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Etude fonctionnelle de ReP1-NCXSQ, une protéine qui régule l'échangeur Na+/Ca2+ du nerf du calamar

Chapitre 1 Etude du protéome mitochondrial humain : application de la stratégie N-TOP pour

3. Etat des connaissances au début du projet

Plusieurs études protéomiques des organites cellulaires en général et des mitochondries en particulier ont été effectuées. La première publication concernant le

protéome mitochondrial remonte à l’année 1998 [18]. Depuis, il y a eu plusieurs études dédiées à l’analyse protéomique des mitochondries visant à augmenter le recouvrement du protéome mitochondrial. Cependant, la plupart des données récentes de « haute qualité » ont été obtenues sur des tissus de rongeurs [19-21] ou sur la levure [22]. L’étude la plus récente effectuée sur des mitochondries humaines a permis d’identifier 150 protéines environ [23]. Une des difficultés majeures des études du protéome mitochondriale réside dans les quantités très faibles de tissus ou de cellules humaines disponibles pour préparer des mitochondries de pureté acceptable pour les analyses protéomiques. La pureté des préparations de mitochondries diminue drastiquement avec la diminution de la quantité de l’échantillon de départ. Une étude qui date de 2003 sur les mitochondries de cœur humain effectué par Taylor et coll. restera une exception et a permis d’identifier 615 protéines. Les auteurs indiquent qu’ils disposaient de trois cœurs humains et donc de suffisamment de matériel pour permettre une purification de mitochondries avec un rendement important [24]. Un examen poussé des données montrent une importante contamination par des protéines cytoplasmiques. Ceci constitue un obstacle pour l’obtention de données protéomiques sur les autres tissus et pour l’étude des variations intercellulaires des protéomes mitochondriaux.

Dans une étude intéressante [21], Pagliarini et coll. ont réalisé un large recueil de protéines mitochondrial provenant de quatorze tissus différents de souris. Pour différencier les protéines mitochondriales des contaminants, ils ont appliqué une approche dite de protéomique soustractive. Cette approche consiste à comparer un échantillon de mitochondries grossièrement purifié avec un échantillon de mitochondries issu d’une purification poussée. Les protéines mitochondriales devraient donc être enrichies dans le deuxième échantillon par rapport au premier. Enfin, dans le but de confirmer la nature mitochondriale de leurs protéines, ils ont effectué des expériences de marquage à la GFP et de microscopie de fluorescence. Dans leur approche quantitative, ils ont utilisé les pourcentages de recouvrement de séquence des protéines et la somme des aires des pics chromatographiques de toutes les séquences de peptides assignées aux protéines identifiées. Le pourcentage de recouvrement étant utile pour estimer les abondances relatives des différentes protéines entre elles, on observe néanmoins des erreurs significatives lorsqu’il s’agit de protéines abondantes. La somme des aires des pics est en corrélation avec les abondances relatives d’un échantillon à l’autre pour une protéine donnée mais difficile à utiliser pour comparer les abondances de différentes protéines entre elles vu que le nombre de peptides varie considérablement entre deux protéines différentes. Ils ont donc utilisé le pourcentage de recouvrement pour la comparaison des protéines entre elles et les aires des pics pour la comparaison des variations d’abondance d’un tissu à l’autre. Une des possibilités pour réaliser une cartographie des protéines mitochondriales humaines est d’utiliser ces données des mitochondries murines et procéder par orthologie avec celles des humains. Cependant les auteurs soulignent eux même clairement que leur étude souffre de certains biais importants :

• Premièrement, leur étude s’appuie fortement sur des comparaisons quantitatives pour étudier les variations du protéome mitochondrial entre les différents tissus et la vraisemblance de la nature mitochondriale des protéines identifiées (en comparent les extraits bruts avec les extraits purifiés). Or leurs approches quantitatives qui reposent sur l’analyse spectrale sont probablement peu précise et pas suffisamment reproductible conduisant à un taux de 50 % de résultats non concluants.

• Deuxièmement, la confirmation de la localisation mitochondriale des protéines est effectuées par le marquage à la GFP et les auteurs ont eux même indiqué que cette technique est peu sensible et peut induire des artefacts dans la translocation des protéines.

Alors qu’il est connu que des différences dans les protéomes mitochondriaux issus de différents tissus existent, des travaux récents montrent néanmoins que des sous-populations de mitochondries avec des protéomes différents peuvent exister au sein d’un même tissu [25]. Très peu d’informations existent sur les protéomes de ces sous-populations de mitochondries.

Chez les mammifères, toutes les protéines mitochondriales à l’exception de treize (codées par le génome mitochondrial) sont codées par le génome nucléaire. Elles sont traduites dans le cytosol et importées dans la mitochondrie. La plupart de ces protéines portent un peptide signal à leurs extrémités N-terminales appelé peptide de transit qui assure sa translocation correcte dans l’organite. Une minorité de protéines portent une séquence signal interne [26] et implique donc une série de translocases [27,28]. Deux voies d’importation principales existent (Figure 1) [29]. Dans la première voie, le peptide signal dirige la protéine à travers le complexe TOM (Translocase of the Outer Membrane) qui se situe dans la membrane externe de la mitochondrie, puis à travers le complexe TIM23 (Translocase of the Inner Membrane) et le moteur PAM (Presequence translocase-Associated Motor) qui se situent dans la membrane interne jusqu’à la matrice où la MPP (Mitochondrial Processing Peptidase) clive le peptide de transit. Pour la deuxième voie, les protéines avec une séquence signal interne sont reconnues par le récepteur Tom70 et transportées par le complexe TOM et par les chaperones Tim9 et Tim10 (elles se situent dans l’espace intermembranaire) vers le complexe TIM22. Le complexe TIM22 favorise l’insertion des protéines transporteurs dans la membrane interne.

Il a été récemment montré chez la levure, que la voie d’importation impliquant un clivage protéolytique et libérant une nouvelle extrémité N-terminale peut modifier la stabilité de la protéine mitochondriale maturée [22]. Par ailleurs, cette étude montre que des données expérimentales solides sont nécessaires pour renforcer nos connaissances sur ce procédé de clivage N-terminal. Il existe effectivement des algorithmes de prédiction pour prédire le site de clivage du peptide de transit [30,31], mais ces algorithmes s’appuient sur un ensemble relativement petit de protéines dont le site de clivage a été déterminé expérimentalement. Il est donc nécessaire de valider expérimentalement ces prédictions.

Figure 1 : Illustration des deux voies d’importation des protéines dans les mitochondries décrite dans le paragraphe ci-dessus. MtHsp 70 = Matrix Heat shock protein 70. (Adaptée d’après [29])

Le cycle de vie des protéines mitochondriales et surtout leurs fins de vie, est particulier. Cet organite ne possédant pas de protéasome, les protéines sont dégradées par des protéases matricielles qui restent peu connues et qui diffèrent des procédés de dégradation du reste des protéines cellulaires [32]. Et enfin, il subsiste des questions concernant l’altération du protéome dans le cas de pathologies liées aux mitochondries en plus de leur implication dans l’apoptose [33] et les maladies neurodégénératives [16]. Ceci montre tout l’intérêt de mener des études de protéomiques mitochondriales comparatives orientées par des cas cliniques. Cependant la difficulté reste d’obtenir en quantités suffisantes des biopsies de tissus humains pour ce genre d’analyses.