• Aucun résultat trouvé

Chapitre II. Modèle d'étude et bases méthodologiques

II. Protocole de traitement des échantillons et méthodologie

II.3. Quantification des éléments métalliques

Les métaux bioaccumulés par U. cf. pusilla ont été dosés à partir de prélèvements d’hépatopancréas (Chapitre III-B) et de muscle abdominal (Chapitres IV et V-A) (Figure II. 6). Par ailleurs, les métaux accumulés par le bopyre ont été dosés à partir de la totalité de l’organisme (Chapitres IV et V-B) (Figure II. 6). Chez les crustacés, l’hépatopancréas constitue un organe majeur de bioaccumulation des métaux et joue également un rôle prépondérant dans les processus de détoxication de ces éléments (Marsden and Rainbow, 2004; Ahearn et al., 2004; Pourang et al., 2004). A l’inverse, le muscle abdominal n’est généralement pas reconnu comme bioaccumulant fortement les métaux. Néanmoins, il est possible que sur le long terme une bioaccumulation des métaux se fasse dans cet organe et a donc été investiguée chez U. cf. pusilla.

En ce qui concerne les dosages des métaux, il est à noter que l’ensemble de la verrerie utilisée (tubes à minéraliser, tubes à essais, béchers, etc.) a subi une étape de lavage à l’eau régale (acidité 5 % ; 48 h de décontamination) avant utilisation.

II.3.1. Préparation des minéralisats

Après dissection, les échantillons de tissus ont tout d’abord été mis à sécher à l’étuve à 45 °C pendant une durée minimale de 48 h. Cette étape est indispensable car elle permet de déterminer des quantités de métaux dans les échantillons par rapport à leur masse sèche (DW). De ce fait, les imprécisions dues à de potentielles différences de teneurs en eau des échantillons sont contrôlées (variabilité de l’égouttage des organes, variations dues à la congélation, etc.).

Les dosages ont été effectués par spectrométrie de masse à plasma à couplage inductif (ICP-OES) ou par spectrométrie d’absorption atomique (SAA). Ces types d’analyses ne peuvent se faire qu’à partir d’une phase liquide. Les échantillons séchés et pesés ont ainsi été digérés par une attaque à l’acide nitrique HNO3 à 65 %. Le processus de digestion était accéléré par chauffage (plaque chauffante HotBlock; Environmental Express), s’effectuant en 3 étapes :

(1) les échantillons ont progressivement été chauffés jusqu’à une température de 100 °C pendant 1h.

(3) la température de la plaque chauffante a été abaissée de 100 °C à une température ambiante permettant le refroidissement des échantillons sur une période de 1h.

Les minéralisats ont ensuite été dilués par ajout d’eau ultra-pure (résistivité= 18,2 MΩ ; MilliQ) afin d’obtenir une concentration finale d’acide nitrique de 11 %. Ils étaient alors gardés en chambre froide (4 °C) et à l’obscurité jusqu’à l’étape de dosage.

Remarques : (1) le dosage des métaux dans l’eau de mer ne nécessite pas d’étape de minéralisation. Les

échantillons ont été acidifiés par ajout HNO3 à 65 % de manière à obtenir une concentration finale d’acide de 11 % et placés en chambre froide jusqu’à leur dosage.

(2) dans le cadre du dosage multi-éléments des échantillons de sédiment (Chapitre III), la minéralisation effectuée consistait en une attaque totale, i.e. à l’aide d’acide fluorhydrique, d’acide nitrique et d’acide chlorhydrique. Cette étape a été réalisée par la plateforme de chimie analytique (plateforme M&Ms) de l’UMR EPOC sous la supervision d’A. Coynel.

II.3.2. Dosage par spectrométrie d’émission atomique à plasma couplé induit (ICP-OES)

La spectrométrie d’émission atomique à plasma couplé induit (ICP-OES) permet de quantifier les éléments métalliques d’un échantillon en analysant par spectrométrie optique des photons générés par un plasma à couplage inductif. Il s’agit d’une analyse multi-éléments. Cette méthodologie a été utilisée pour les dosages multi-éléments dans des échantillons biologiques (Chapitre III-B) et des échantillons de sédiment (Chapitre III-B) pour le dosage du Cd dans des échantillons biologiques (Chapitre IV) et des échantillons d’eau mer (Chapitres IV et V-A). Cette méthode repose sur le principe que les atomes soumis à une forte énergie vont absorber cette énergie, entrainant le déplacement des électrons des ions et atomes de leurs couches électroniques internes à leurs couches plus externes (théorie quantique). Les atomes et les ions passent ainsi d’un état fondamental à un état excité. Cet état excité est un état hautement instable énergétiquement (non à l’équilibre). Le retour à un état stable (i.e. de plus faible niveau énergétique) s’effectue par émission d’énergie sous forme de photons qu’il est possible de mesurer. Le nombre de photons émis est directement proportionnel à la quantité d’éléments. Chaque élément disposant d’un spectre d’émission spécifique, il est possible de convertir les mesures d’intensité d’irradiation en concentrations par comparaison avec des solutions standards.

L’appareil utilisé dans cette étude était le 700 Series ICP-OES (Agilent). La quantification des éléments métalliques contenus dans les minéralisats par ICP-OES s’effectue en quatre étapes principales. Dans un premier temps, la solution de minéralisation est introduite dans une chambre de vaporisation sous l’action d’une pompe péristaltique où elle est nébulisée en un aérosol liquide formé de micro-gouttelettes via l’action d’argon gazeux. Une fois cet aérosol formé, celui-ci est injecté dans une torche à plasma d’argon (mélange d’atomes isolés en équilibre entre leur état neutre et leur état ionisé). Le passage au sein de cette torche d’argon (T entre 6000 et 8000 K) permet l’atomisation puis

l’ionisation des éléments contenus dans l’échantillon. Ions et atomes vont alors émettre des photons qui sont détectés par un spectromètre à émission optique. La quantité de radiations émises est finalement convertie en une concentration par comparaison avec des solutions standards.

Il est à noter que les dosages par ICP-OES ont été réalisés par P-Y Gourves, ingénieur d’étude de l’équipe d’Ecotoxicologie Aquatique de l’UMR EPOC.

II.3.3. Dosage par spectrométrie d’absorption atomique (SAA)

La spectrométrie d’absorption atomique (SAA) est une méthode classique de dosage des éléments métalliques. Il s’agit d’une méthode de quantification relative, i.e. qu’elle nécessite la réalisation d’une courbe d’étalonnage pour déterminer la quantité de l’élément métallique d’intérêt. Cette méthode de dosage repose sur deux principes:

(1) les atomes à l’état fondamental absorbent de façon spécifique certaines longueurs d’onde du spectre lumineux qui leur sont propres.

(2) la quantité d’énergie lumineuse absorbée est fonction du nombre d’atomes présents sur le trajet optique (Loi de Beer-Lambert).

Cette méthodologie a été utilisée pour le dosage du Cd de certains échantillons biologiques (Chapitre V-A) et pour les échantillons de sédiment (Chapitre IV). L’appareil utilisé pour ces travaux était le spectromètre à absorption atomique 240Z AA (Agilent) qui présente une limite de détection de 0,075 µg L-1 pour le Cd. L’échantillon liquide (« minéralisat ») est tout d’abord déposé dans un four graphite (atomiseur). Plusieurs étapes de chauffage successives sont ensuite réalisées et permettront in fine l’atomisation de l’échantillon, i.e. la transformation de l’échantillon liquide en atomes libres absorbant l’énergie lumineuse de longueur d’onde donnée émise par une lampe spécifique (pour le cadmium λ = 228,8 nm). Les étapes de chauffage débutent par une phase initiale de désolvatation (élimination du solvant par évaporation), suivie d’une phase de pyrolyse (élimination de la matrice organique), puis une phase de minéralisation (décomposition des molécules en atomes) et finalement une phase d’atomisation (formation d’une vapeur atomique). Une mesure de l’intensité lumineuse transmise est alors réalisée et permettra de déterminer l’intensité de l’absorption lumineuse de l’échantillon (intensité lumineuse incidente – intensité lumineuse transmise) et donc la quantité d’atomes présents dans l’échantillon par comparaison avec des solutions standards. Finalement, une dernière étape de chauffage permet le nettoyage du four graphite. L’ensemble de ces étapes (à l’exception de l’étape de mesure) s’effectue sous une atmosphère d’argon, limitant les interférences avec l’oxygène (Figure II. 7).

Pour chaque échantillon, 20 µL de minéralisat étaient nécessaires, auxquels étaient ajoutés 5 µL d’une solution de palladium (Pd ; 2 g L-1) et de nitrate de magnésium (Mg(NO3)2 ; 1 g L-1). Le Pd est un modificateur d’analyte : il forme avec le Cd un complexe thermiquement plus stable que ne le serait le Cd seul. Ainsi il est possible d’appliquer des températures de pyrolyse plus élevées, permettant une élimination de la matrice plus efficace. Le nitrate de magnésium est quant à lui un modificateur de matrice, permettant la volatilisation des composés de la matrice à de plus faibles températures. Ces modificateurs sont essentiels car ils limitent l’absorption non spécifique de l’énergie lumineuse par les composés de la matrice, ce qui pourrait constituer un biais de quantification. Il est à noter qu’en plus du signal d’absorbance spécifique à l’élément atomique considéré, il est possible que des signaux d’absorbance non spécifiques (dus à des molécules non dissociées par exemple) soient enregistrés. Une correction de ces signaux non spécifiques a été réalisée en se basant sur l’effet Zeeman, dont la définition dépasse de loin le cadre de ce travail.

Remarques : (1) seul le Cd a été quantifié dans les échantillons d’eau de mer. Théoriquement, ce dosage

aurait donc pu s’effectuer par SAA. Néanmoins, l’utilisation de cette méthode de mesure est conditionnée à des solutions dont la salinité est inférieure à 2 pour le dosage du Cd. En effet le NaCl a une température de volatilisation très proche de celle du Cd. De façon à limiter les risques d’interférence entre le Cd et le NaCl, il aurait fallu éliminer ce dernier en diluant fortement nos échantillons. Il est fort probable que les échantillons eussent alors présenté des concentrations en Cd inférieures à la limite de détection de l’appareil. Des dosages par ICP-OES ont donc été préférés.

(2) les dosages du Cd dans les échantillons biologiques du chapitre IV auraient également pu être effectués par SAA. Des problèmes techniques nous ont néanmoins amenés à doser ces échantillons par ICP-OES.

Figure II. 7 Programme thermique associé au dosage du cadmium par spectrométrie d’absorption atomique et détails des différentes étapes de chauffage.

II.3.4. Validité des mesures

Afin de s’assurer de la validité des mesures, des échantillons certifiés fournis par le NRCC- CNRC (National Research Council Canada – Conseil National des Recherches Canada) ont été utilisés pour chaque série de dosages (Tableau II. 2). Des blancs de minéralisations (acide seul dilué à 11 %) ont également été réalisés afin de détecter une éventuelle contamination métallique et ont ainsi subi le même traitement que les échantillons biologiques et de sédiments. Le dosage de chaque série d’échantillons était précédé et succédé par le dosage des métaux dans le ou les certifiés et dans les blancs de minéralisation. Les échantillons certifiés permettaient de déterminer le rendement machine. Grâce à la détermination de ce rendement, il a ainsi été possible de déduire des concentrations mesurées les concentrations réelles en métaux de nos échantillons.

Tableau II. 2 Echantillons certifiés utilisés comme références au cours des différents dosages des éléments métalliques. Les certifiés sont fournis par le Conseil National des Recherches Canada (NRCC-CNRC).

Certifiés Type d’échantillons Utilisation

DOLT-5 : hépatopancreas de homard Biologique Chapitres III-B, IV et V TORT-3 : foie de chien de mer Biologique Chapitre III-B

MESS-3 : sédiment marin Sediment Chapitre IV

Remarques : dans le cas des échantillons d’eau de mer, il n’y a pas d’échantillons certifiés (pas d’étape

de minéralisation) et une gamme étalon était utilisée à la place. De la même façon, le blanc de minéralisation a été remplacé par un échantillon d’eau acidifiée à 11 %.