LA RESPONSABILITÉ DES OPÉRATEURS DANS LA PRÉVENTION DES ÉCHECS
I. QUALIFICATIONS ET COMPÉTENCES DES OPÉRATEURS
La capacité à être parent adoptant est évaluée dans un premier temps par l’agrément. Il est le sésame au démarrage de toute procédure d’adoption en reconnaissant l’aptitude des
postulants à la filiation adoptive. Établie par des professionnels de la petite enfance, cette expertise est ensuite suivie par celle des opérateurs.
Le pouvoir conféré aux opérateurs conduit à s’intéresser à leurs qualifications et à leurs compétences.Le décret du 11 septembre 1998 précise qu’ « un organisme agréé […]
doit être dirigé par des personnes qualifiées par leur intégrité morale, leur formation ou
expérience… »7. D’ailleurs, sur son site Internet, l’OAA Destinées affirme que ses responsables sont « qualifiés pour trouver des familles adoptives » et la FFOAA que les OAA sont « des professionnels de l’adoption »8. La qualification renvoie quant-à-elle à la notion de professionnalisme. En effet « qualifier, c’est attribuer une valeur à une chose ». Qualification et compétence sont deux notions étroitement liées mais la qualification
n’entraîne pas de fait les compétences9. Les compétences induisent des acquis qui peuvent ne pas être liés à la professionnalisation, mais à l’expérience, ainsi les associations préfèrent employer ce terme pour se distinguer du milieu professionnel. La professionnalisation des OAA, associations privées, est un thème récurrent. Ainsi que le relève Yves Dénéchère, la MAI « pousse les OAA à mieux s’organiser, mieux travailler, se
moderniser, en un mot à se professionnaliser »10. D’ailleurs, dans son rapport d’activités de
2009, la MAI précise que les OAA doivent se professionnaliser11. Cécile Brunet-Ludet y a fait notamment référence en évoquant : « la pesanteur culturelle des œuvres de l’adoption
[…] »12. Cet appel à la professionnalisation des acteurs du monde associatif renvoie donc à la question (de l’évaluation) de leurs compétences13.
7 Décret n° 98-815 du 11 septembre 1998, article 11 (consultable sur
https://www.legifrance.gouv.fr).
8 Site Internet de la FFOAA (consultable surhttp://www.ffoaa.org)
9 Ewan Oiry, « Qualification et compétences : deux soeurs jumelles », Revue française de gestion, n°158, 2005, pp. 13-34.
10 Yves Denéchère, Des enfants venus…op.cit., p. 313.
11 Mission Adoption Internationale, Rapport d’activité 2009, p.10.
12Entretien Cécile Brunet-Ludet réalisé le 26 février 2015 à la MAI.
13 Annie Dussuet, Erika Flahault, Dominique Loiseau, « Quelle gestion des ressources humaines
dans l’économie sociale ? Entre bénévolat et professionnalisation, la place du travail dans les associations », Programme de recherche développement, 2007, p. 47.
A. L’Expérience, une garantie suffisante ?
1. Un professionnalisme revendiqué par les OAA
La MAI préconise une professionnalisation des OAA et déclare : « les OAA doivent se comporter en organisations professionnalisées et disposer de personnels qualifiés […] le bénévolat et l’expérience de parent adoptif ne constituent pas, à eux seuls,
une qualification dans le domaine de l’adoption »14. D’ailleurs, dans son rapport paru en
2000, Gérard Gouzes relève que l’expérience «n’est pas suffisante pour intervenir dans le processus d’adoption »15, soulignant le fait qu’elle ne peut pallier le manque de
professionnalisation.
« Être un professionnel », un « pro », va bien au-delà, puisque cela signifie alors que
l’on détient des compétences qui permettent une expertise dans un domaine particulier »16. Professionnaliser, « c’est donc acquérir une reconnaissance par la société que l’activité en question ne peut être réalisée par n’importe qui sans mettre autrui (le consommateur du service produit par l’activité, en particulier) en danger: c’est la reconnaissance d’une “licence”, c'est-à-dire de l’exclusivité du droit d’exercer cette activité »17. Or des critiques sur le professionnalisme des OAA sont émises. À titre d’exemple, la responsable d’un
service Adoption, qui a souhaité garder l’anonymat, qualifie la pratique de certains OAA « d’amateurisme »18.
A contrario, La Fédération Française des OAA (FFOAA) estime que les OAA sont
« des professionnels de l’adoption ». Comment les OAA, structures associatives, appréhendent ils la notion de professionnalisation ? En somme, être reconnu professionnel apporterait-il la garantie d’une exécution efficiente de leur mission ? A contrario, la
revendication d’une expérience peut-elle être suffisante ? La professionnalisation peut se décliner sous différentes formes : l’intégration de professionnels, la formation de bénévoles
14 MAI, Orientations stratégiques 2011-2012 pour l’adoption internationale [En ligne]
http://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/Strategie_2011_ok.pdf
15 Gérard Gouzes, op.cit., p.69
16 Annie Dussuet, Erika Flahault, Dominique Loiseau, « Quelle gestion des ressources… » op.cit., p. 33.
17 Ibid., p. 34.
ou encore la salarisation19. La Fédération Française des OAA (FFOAA) précise qu’être
accompagné par un OAA, c’est bénéficier d’un « encadrement professionnel », c’est-à-dire, « ayant connaissance et expérience de l'adoption, agissant dans une structure stable autorisée, suivant régulièrement des formations adaptées, travaillant en équipe et en réseau,
soucieux d’une démarche permanente d’amélioration de la qualité, à l’écoute des
candidats »20.
Lorsque les OAA sont interrogés sur leur sentiment face l’impulsion de professionnalisation donnée par la MAI, ils répondent tous qu’ils se considèrent comme des professionnels de l’adoption et revendiquent ce statut en le justifiant par leur expérience. Geneviève Vial (Les Enfants avant Tout) déclare : « 30 ans d’expérience ne
sont pas négligeables et permettent de soutenir la comparaison ! »21. L’expérience
permettrait donc une connaissance de terrain et une maîtrise qui rendraient possible une
anticipation des problèmes, ce qu’un diplôme ou une qualification professionnelle ne garantiraient pas forcément. Mme V affirme, elle aussi, se considérer comme une
professionnelle de l’adoption. Pour elle le professionnalisme c’est « anticiper un problème »22et cette anticipation n’est possible que par la connaissance du terrain. Une
autre responsable d’OAA déclare : « beaucoup disent qu’on n’est pas professionnel, mais
désolée, nous on connaît le terrain ! ». Elle prend pour exemple « une psychologue qui faisait des copier-coller » ou encore le refus de délivrance d’un agrément à une femme
parce qu’elle était divorcée, et n’était « donc pas faite pour être mère ». « Cet exemple est courant et après on dit que ce sont des professionnels »23. La définition de la qualification proposée par Pierre Naville et reprise par Erwan Oiry rejoint la notion de professionnalisme revendiquée par les OAA : « la qualification dépend de l’homme et non du poste de travail qu’il occupe »24, le professionnalisme serait donc la capacité de réaliser de façon performante la tâche exigée par la fonction. « Bien faire son travail, pour la
définition industrielle du professionnalisme, c’est être en mesure de donner une réponse
techniquement performante à un problème ; être compétent, c’est mobiliser le savoir-faire
le plus approprié à une situation »25.
19 Annie Dussuet, Erika Flahault, Dominique Loiseau, op.cit., pp. 35-36.
20 Site fédération, http://www.ffoaa.org
21 Sources, questionnaire à la demande de l’OAA. 22Entretiens… op.cit.
23 Entretien Mme A Orchidée réalisé le 25 juin 2015.
24 Ewan Oiry, op.cit.
25 Castillo Monique, « Du professionnalisme à l'éthique professionnelle », Études, tome 415, 2011,
Dans ce sens, Danièle Ikidbachian (La Famille Adoptive Française), relève : « des travailleurs sociaux ont des représentations fausses sur ce que sont les enfants adoptés »26. Mme A soutient son propos en soulignant que « le diplôme ne rend pas professionnel ».
D’ailleurs Mme V insiste sur le fait que pour occuper son poste de directrice « il n’y a pas
de diplôme ». Cela peut être mis en parallèle avec ce qu’Annie Dusset, Eroka Flahault et Dominique Loiseau qualifient de « professionnel méconnu », qui « exerce une activité
nouvelle, portée par le secteur associatif, mais qui n’est pas sanctionnée comme une
profession »27. En effet, aucun diplôme n’est particulièrement requis et/ou assimilé pour
exercer la fonction de directeur d’OAA.
Pour les OAA l’expérience est complémentaire et nécessaire. Thérèse Villeneuve
(Les Amis des Enfants du Monde) déclare : « l’expérience vaut parfois autant que les
diplômes »28. Brigitte Godde (Enfance Avenir) nuance, en précisant que l’expérience « est un plus ». Mr. G indique lui aussi que « l’expérience permet de détecter beaucoup de
choses ». Pour Jean-Vital de Monléon (pédiatre, dirigeant de la Consultation d’Orientation et de Conseils d’Adoption (COCA)à Dijon), l’expérience acquise des OAA n’est pas assez
considérée : « les OAA ne sont pas assez écoutés ! ». A contrario, Danièle Ikidbachian
précise qu’au sein de la Famille Adoptive Française, l’équipe est constituée uniquement de
professionnels et ajoute : « il n’y a pas de parents adoptants ». Faut-il en conclure que l’on
ne peut pas être à la fois juge et partie et que l’expérience des parents adoptifs risquerait de
nuire à l’objectivité requise dans la sélection des dossiers de postulants ?
Enfin, il apparaît pour l’ensemble des OAA que l’expérience doit être confortée par
des formations. Au-delà de l’expérience, les qualités requises sont, selon Mme V « l’empathie, l’humanisme,l’écoute et le discernement ». L’ensemble des OAA s’accorde
sur la nécessité de la formation : Mme V: « être professionnel, c’est se former » ; Mme A : « être professionnel, c’est apprendre tout le temps » ; Mme P, Geneviève Vial (Les Enfants Avant Tout) et Thérèse Villeneuve (Les Amis des Enfants du Monde) y font aussi référence. Elles suivent toutes les trois des formations régulières. Pour les membres des OAA sans qualification professionnelle, des formations sont organisées par les fédérations, ainsi que par le Centre d'Ouverture Psychologique et Sociale (COPES) ; ce dernier
s’adresse à l’ensemble des acteurs « garants de la prévention précoce et de la santé globale
26 Entretien Danièle Ikidbachian…, op.cit.
27 Annie Dusset, Eroka Flahault et Dominique Loiseau, op.cit., p. 39.
de l’enfant, de l’adolescent et de la famille »29. Deux professionnels ont été cités au cours des entretiens par les OAA : Anne-Marie Crine, psychologue attachée au service de
l’adoption de la communauté française de Belgique, et consultante auprès du Service Social International du Centre international de l’enfant dans l’adoption) ou encore Jean-Jacques Choulot, pédiatre et directeur de la consultation d’adoption au centre hospitalier de
Pau. « Ces formations permettent de balayer toute la problématique de l’adoption pour se former, s’informer et être efficaces auprès des couples adoptants » déclare Thérèse Villeneuve (Les Amis des Enfants du Monde).
2. Une professionnalisation inégale
L’adoption relève de différents domaines d’expertise : médicale, psychologique,
juridique… C’est pourquoi il était important de signaler leur intégration dans les équipes des OAA. Diverses sources (rapports, sites Internet, entretiens) ont été mobilisées dans ce
sens, sans toutefois permettre d’avoir des indications pour tous les OAA.
Tableau n°15: Présence de professionnels au sein des équipes des OAA au 1er janvier 2016
Nom OAA Professionnels
Accueil aux Enfants du Monde Psychologue (1) et médecin (1)
Accueil et Partage NR
Agir pour l’Enfant NR
Arc-en-Ciel Pas de professionnel dans l’équipe
29 Le COPES a été créé en 1970 par Michel Soulé (pédiatre et psychiatre). Site Internet du COPES http://www.copes.fr/Presentation/Tout_sur_le_Copes
Nom OAA Professionnels
Ayuda
Généraliste, psychiatre, urgentiste, directeur de clinique, assistantes sociales,
psychologue, aides maternelles Chemin vers l’Enfant Psychologues, juristes, expert-comptable
Children of the Sun NR
Confédération Française pour l’Adoption NR
De Pauline à Anaëlle NR
Destinées Médecins, psychologue, enseignants,
avocate, comptable, pharmacien
Diaphanie NR
Edelweiss Accueil NR
Enfance Avenir Médecins, psychologues, juristes,
puéricultrices
Enfants du Monde France NR
Kasih Bunda-france Médecins
La Cause Assistante sociale, pédopsychiatre
La Famille Adoptive Française Équipe exclusivement professionnelle :
assistante sociale, psychologue
La Providence NR
Nom OAA Professionnels
Les Enfants avant Tout Psychologue
Les Enfants de l’Espérance Psychologue, médecin, assistante sociale
Les Enfants de Reine de Miséricorde assistante sociale
Lumière des Enfants Médecins, pédiatre, psychologues,
assistante familiale, avocate, comptables
Médecins du Monde
Médecins, psychologues, juge des enfants, comptable, infirmière, enseignante, éducatrice spécialisée, orthophoniste
Orchidée adoption Assistants sociaux
Païdia Médecin, juriste, travailleurs sociaux,
infirmière, puéricultrice, psychologue
Rayon de Soleil de l’Enfant étranger Psychologues, assistante sociale
Renaître NR
Solidarité Fraternité Il n’y a pas de professionnel dans l’équipe
Ti-Malice Psychologue, juriste
Sources : Entretiens et sites Internet des OAA
Les psychologues sont largement présents (dans douze OAA), ainsi que les médecins (pour 8 OAA) et les assistantes sociales (pour 8 OAA), tandis que d’autres le sont plus
rarement : les enseignants ne sont mentionnés que dans 2 OAA, et un orthophoniste seulement pour Médecins du Monde. Cette prédominance permet d’émettre l’hypothèse que l’accent est mis sur certains domaines, hiérarchisant les priorités. Ainsi, au cours de notre échange, Raymond Speroni (Destinées) note, que les OAA sont professionnalisés, et
Médecins du Monde pour le Vietnam n’est composée que de médecins30. La « forte tendance médicale » des organismes d’adoption est soulignée par Colette Legrand en 2006
qui souligne que « les questionnaires sur la santé sont envoyés aux nouveaux parents, avec
moult détails et rien sur le comportement »31. Ceci étant, Médecins du Monde est constitué
d’une équipe pluridisciplinaire offrant la représentation la plus large de professionnels32.
Une complémentarité s’avère nécessaire dans le cadre de l’adoption internationale, dans plusieurs domaines, et de façon transversale. Une plus large représentation de juristes aurait pu être attendue mais seuls sept OAA en intègrent une. De la même manière, on ne comptait que quatre organismes ayant des spécialistes de la comptabilité alors que le concours de ces derniers peut être un gage de bon fonctionnement financier.
Le processus de professionnalisation s’effectue par le recours à des spécialistes extérieurs aux OAA, par exemple, pour les journées de formation des adoptants où les intervenants ont une approche différente. Représentant Les Amis des Enfants du Monde, Thérèse Villeneuve précise qu’il n’y a pas de professionnels au sein de l’équipe, mais que
l’organisme a recours à des psychologues.
Enfin, la professionnalisation peut aussi etre apprhéndée au regard d’échanges avec
d’autres acteurs, notamment via le réseau Euradopt. Ce réseau constitué de vingt six
organismes de douze pays européens permet de partager sur les pratiques des opérateurs. Or seul deux OAA ont intégré ce réseau. Païdia le premier en 2012 suivi des Amis des Enfants du Monde. La MAI a encouragé les OAA à l’intégrer moyennant d’ailleurs des subventions et a organisé une réunion d’information à ce sujet. Cepedant, elle note le refus de confronter les pratiques professionnelles et l’emploi de la langue anglaise rebutte a priori les organismes33.
30 Entretien réalisé avec Raymond Speroni le 25 mars 2013.
31 Colette Legrand, « L'adoption, une aventure à risques », Dialogue, volume 171, n°1, 2006, pp.
83-91.
32 Médecins du Monde, bilan annuel 2014, p. 20.
3. Salarisation, bénévolat et militantisme : une cohabitation inévitable
Historiquement, le milieu associatif est d’abord le lieu de l’engagement bénévole, du
don de temps à une association. La notion « s’affirme à partir des années 1980 comme
l’expression dominante des implications non salariées dans les associations »34. La salarisation serait « une reconnaissance sociale du travail ». D’ailleurs, « Le terme de professionnalisation est employé couramment comme un équivalent de celui de salarisation.
Il s’agirait alors seulement du passage d’un travail bénévole, non rémunéré à un travail rémunéré par un salaire »35. Ce qui conforte la position Mme E qui reconnaît prendre en
considération la nécessité d’une professionnalisation par la salarisation. A contrario, Thérèse Villeneuve (Les Amis des Enfants du monde) et Mme A, affirme : « nous sommes bénévoles, ce n’est pas pour autant que nous sommes pas professionnels ». D’ailleurs, l’ensemble des OAA a recours au bénévolat.
Tableau n° 16: La salarisation au sein des OAA 1er janvier 2016
Nom OAA Nb
Salariés Remarques Accueil aux enfants du
Monde NR
Accueil et Partage NR Agir pour l’Enfant NR
Arc-en-Ciel 1 Le salarié est présent trois matinées par semaine.
Ayuda 0
Chemin Vers l’Enfant 0
Children of the Sun NR
Confédération Française
pour l’Adoption NR
34 Lionel Prouteau et François-Charles Wolff, « Donner son temps, les bénévoles dans la vie associative », Économie et Statistique, n°372, 2004, pp. 3-39.
Nom OAA Nb Salariés Remarques De Pauline à Anaëlle 0 Destinées 0 Diaphanie 0 Edelweiss accueil 0 Enfance Avenir 2 Enfants du Monde-France 0 Kasih Bunda-France 0
La Cause 1 La salariée est la responsable de l’antenne
Adoption
La Famille Adoptive
Française 3 La Providence NR
Les Amis des Enfants du
Monde 2
Une pour l’adminstration et une pour la
comptabilité
Les Enfants avant Tout 0 Une directrice salariée pendant trois ans et une
secrétaire salariée jusqu’en 2014.
Les Enfants de l’Espérance 0
Les Enfants de Reine de
Miséricorde 1
En octobre 2016, une des salariés a repris le statut de bénévole
Lumière des Enfants 1
Médecins du Monde 4
Orchidée adoption 1 Il y a un salarié à temps partiel, et un salarié en fonction des missions
Païdia 0
Rayon de Soleil de l’Enfant
Étranger 0
Renaître 0
Solidarité et Fraternité 1 Le salarié est à temps partiel
Ti-Malice 0
Vivre en Famille 0
La profession des salariés n’a pu être renseignée à chaque fois. Soit l’information n’est pas précisée sur les sites Internet, soit celle donnée au cours des échanges reste très évasive. L’accent est principalement mis sur leur présence au sein de l’organisme. Le sujet semblait délicat au vu des critiques émises au sujet du fonctionnement basé sur le bénévolat.
Il se dégage que huit OAA comptent au moins un salarié au sein de leur équipe, tandis que pour 16 d’entre eux, l’équipe est entièrement constituée de bénévoles. La faible représentation de salariés au sein des OAA résulte de la question de leur financement. Geneviève André-Trévennec (Médecins du Monde) déclare : « les petits OAA, c’est-à-dire moins de dix adoptions par an, ont du mal à se professionnaliser, les problèmes de moyens sont sous-jacents ». Le manque de moyens pour Brigitte Godde (Enfance Avenir) explique aussi le nombre réduit de salariés dans son OAA. Elle insiste sur le fait « qu’il faudrait augmenter les subventions ou retirer les charges ce qui permettrait de salarier davantage »36. Ce manque de soutien financier est aussi souligné par Jean-Vital de Monléon37. Évoquer la
professionnalisation avec pour seul indicateur la salarisation s’avère réducteur.
En effet, des OAA ont recours à des professionnels bénévoles au sein de leur organisme, ce qui est par exemple le cas des OAA La Cause, Destinées, Ayuda et Païdia.
L’illustration la plus probante est l’OAA Médecins du Monde. Lors de notre entretien, Geneviève André-Trévennec déclare : « Médecins du Monde est le premier OAA à se professionnaliser, 98 % des personnes sont des bénévoles professionnels »38 ; mais c’est également le cas de Lumière des Enfants, dont l’ensemble des professionnels est bénévole. Ce qui rejoint le constat de Dan Ferrand Bechmann, selon lequel « le bénévolat s’est
professionnalisé » ; avec le titre de son ouvrage, l’auteur va même plus loin, qualifiant le bénévolat de “métier” ». « Pour les associations, le travail bénévole est à la fois une ressource essentielle et un facteur de production. C’est une ressource existentielle pour les associations sans salarié qui disparaissent en son absence »39. Par ailleurs, le recours au bénévolat est lié aux origines historiques des OAA, la conception religieuse pouvant être mise en parallèle : le don est premier sans attente de retour, il renvoie à la générosité, au partage de valeurs et de solidarité. Le concept du don développé par Marcel Mauss peut être ici retenu. Le don, forme archaïque de l’échange (qui) induit une contrepartie, « contre
36Entretien…op.cit..
37 Entretien Jean-Vital de Monléon réalisé le 13 février 2015.
38 Entretien Geneviève André-Trévennec réalisé le 13 mars 2015.
39 Édith Archambault, Jérome Accordo, Brahim Laouisset, « La connaissance des associations »,
don ». Le travail bénévole par le don de son temps et la tâche effectuée sans retour salarial entre dans cette logique. Le bénévolat, implique en retour une fonction au sein de
l’association, la détention d’un pouvoir40.
Le bénévolat est mobilisé non seulement par les OAA mais aussi par l’AFA. En tant
que groupement d’intérêt public, l’AFA est autorisée à faire appel à des bénévoles pour
l’exercice de ses missions depuis 201441. Le rapport annuel de l’AFA de 2016 souligne que
le recours au bénévolat a été l’initiative de Béatrice Biondi42. L’AFA se limite à quatre
personnes bénévoles, pour aider la chargée de communication. Ainsi deux bénévoles ont effectué des traductions, une autre a travaillé à l’élaboration «d’un kit de préparation des