• Aucun résultat trouvé

La proximité des tuteurs en question

Les tuteurs, chacun étant affecté à une maisonnée, ont généralement bien saisi leurs missions, en tant qu’acteurs principaux de la vie collective quotidienne du séjour. Ils définissent celle-ci en mettant l’accent sur l’encadrement constant des jeunes, du lever au coucher, et soulignent leur présence et disponibilité auprès d’eux.

« Ma mission principale est de réussir à transmettre des valeurs et une rigueur à ces jeunes. Je fais en sorte d’être tout le temps avec eux, de leur montrer de l’entraide. » (Extrait d’entretien avec un tuteur

sur le site 11 – dans un centre de vacances.)

Ils ont participé aux différentes activités et modules, dont ils ont parfois été des animateurs ou contributeurs. Leurs profils ont globalement été adéquats. Ils ont été des relais essentiels pour forger la cohésion de leur maisonnée et leur action quotidienne pour veiller au respect des tenues, des horaires, du règlement intérieur s’est avérée particulièrement prédominante et essentielle.

Sur certains sites, les tuteurs ont pu s’appuyer sur une préparation satisfaisante du point de vue des outils, du matériel, de leur rôle et de leur place dans les contenus du séjour et auprès des jeunes (animation, pédagogie, positionnement). Ainsi, sur le site 8 (autre qu’un lycée ou un centre de vacances), en fonction des compétences et appétences de chacun, des tuteurs et cadres ont été amenés à préparer ou animer certaines des activités proposées au planning. À titre d’illustration, des tuteurs et cadres issus du mouvement scout ont été associés à la préparation d’un jeu de piste débouchant sur une veillée « scout » ; le rallye citoyen a été coanimé et organisé avec le soutien de l’une des tutrices affichant une expérience d’animation éprouvée en centres de loisirs et de vacances d’autres tuteurs ont été impliqués dans l’animation des temps de démocratie interne aux maisonnées (conseils de maisonnée intitulé « trions les braises »)…

Sur d’autres sites, moins nombreux, les tuteurs s’interrogent, et apparaissent même frustrés par leur rôle confiné à « du quotidien », alors que leurs capacités d’animation leur semblent parfois sous-exploitées. Cela a été le cas sur le site 14 (lycée), sur le site 6 (lycée), sur le site 8 (autre qu’un lycée ou un centre de vacances), sur le site 4 (lycée) ou encore sur le site 1 (centre de vacances).

« Nous n’avons aucun lien avec les intervenants et nous ne sommes pas sollicités dans les activités. En tant que spécialiste du handicap, je trouve vraiment dommage de ne pas avoir été sollicitée dans le cadre des modules sur le handicap. Aussi je suis la seule à ne pas avoir de jeunes handicapés dans ma compagnie ! » (Extrait d’entretien avec une cadre de compagnie sur le site 9 – dans un lycée.) « Les tuteurs se voyaient animateurs et non pas accompagnants d’un groupe de jeunes. Le médecin du travail a remonté de la souffrance au travail des tuteurs et des cadres de compagnie, qui serait basée sur une surcharge de travail et une incompréhension des attentes vis-à-vis du fonctionnement du centre, ça m’interroge vraiment, ça m’inquiète » (Extrait d’entretien avec l’équipe de direction du

site 14 – dans un lycée.)

Dans le cahier de charges de préfiguration du SNU, il est indiqué que les tuteurs de maisonnées ont pour mission de faire « vivre la discipline courante, et mobilisent les volontaires en vue des activités prévues et des services confiés à leur maisonnée » et que les cadres de compagnie « sont chargés d’orienter les tuteurs, d’encadrer la vie courante et de résoudre les éventuelles difficultés26 ». Au regard des compétences et de l’expérience professionnelle demandées lors du recrutement aux uns et aux autres, il semble que les tuteurs de maisonnée pourraient aussi être mobilisés sur des temps d’activités et le respect des règles de vie et pas uniquement sur la gestion de la vie quotidienne. Quant aux cadres de compagnie, la diversité de leur profil peut leur permettre l’animation de modules parallèlement à la garantie du maintien du cadre. Les spécialités et expériences des uns et des autres auraient pu être sollicitées pour l’organisation et/ou l’animation des modules et la gestion du lien potentiel avec le partenaire porteur du module. C’est en tout cas ce qui a pu ressortir des entretiens réalisés avec ces différents professionnels.

Sur l’un des sites, une exposition ludique et un débat sur le module « droit et justice » a été animé par un cadre de compagnie et un tuteur de maisonnée, à partir d’un support et d’une formation de deux heures réalisés par la protection judiciaire de la jeunesse.

Le fait que les équipes ne se connaissaient pas en amont du séjour n’a pas facilité le repérage des compétences de chacun, utiles pour l’animation des modules et autres temps prescrits.

§

Santé et logistique : des fonctions manquantes dans l’organigramme

Sur les sites des séjours de cohésion, l’équipe d’encadrement était composée de quatre cadres de direction, puis de cadres de compagnie et de tuteurs de maisonnée. En comptant ces cadres de compagnie et tuteurs de maisonnée, le taux d’encadrement était d’un professionnel pour cinq jeunes lors de la phase de cohésion de juin 2019, un taux plus de deux fois supérieur à celui des centres de vacances (taux de 1 animateur pour 12 pour l’encadrement des plus de 6 ans). À ces professionnels viennent s’ajouter des intervenants extérieurs pour les modules de formation : un nombre de professionnels qui pose question au niveau budgétaire, mais qui interroge aussi quant à la place et au rôle de chacun. Pour autant, des compétences ont parfois manqué sur certains sites. La confrontation du projet à la réalité du terrain a fait remonter un certain nombre de besoins non anticipés en amont du séjour de 26

cohésion. En effet, dans les organigrammes, un certain nombre de missions et de compétences se sont avérées manquantes, en particulier sur les besoins sanitaires, les problématiques psychosociales et les dimensions logistiques et techniques. Les « structures médicales légères chargées d’assurer le suivi quotidien des volontaires » prévues initialement27 n’ont pas toujours été mises en place et n’ont pas toujours suffi. Sur d’autres sites, l’identification d’un référent logistique a pu faciliter l’organisation du séjour (restauration, transports durant le séjour, utilisation des locaux, blanchisserie…).

Au cours des entretiens conduits par l’équipe d’évaluation, les encadrants mettent en lumière le manque, sur plusieurs sites, d’une fonction dédiée au médico-social afin de gérer sans difficulté l’accueil des jeunes (certains pouvant avoir des problèmes de santé physique ou mentale ou suivre des traitements médicaux), mais aussi les situations d’urgence au moment où elles apparaissaient (malaises, accidents), ainsi que les remontées de situations préoccupantes. Ils ont pu exprimer toute la difficulté de leur tâche. Ils ont notamment mentionné à plusieurs reprises le besoin de mobiliser un professionnel en charge de l’accompagnement social et de la prise en charge psychologique des jeunes (et de l’équipe). Certains jeunes ont, en effet, eu des difficultés à vivre la vie en collectivité, l’éloignement familial ou le stress des cérémonies officielles. D’autres ont laissé, loin de chez eux, émerger des problématiques de violence, de mal-être ou d’addiction. Ces problématiques dépassent, sur tous les sites, les compétences de l’équipe encadrante, sauf quand celle-ci a su anticiper le besoin et intégrer dans l’équipe un éducateur sur le site 10 (dans un lycée), par exemple. La présence d’un psychologue, d’un assistant social ou d’un éducateur spécialisé aurait contribué à améliorer le séjour de certains jeunes et de faciliter l’accompagnement des tuteurs.

De plus, les prestations des infirmiers prévues (quand elles ont été anticipées) une fois par semaine ont été jugées insuffisantes par les directions et les cadres, compte tenu des innombrables incidents — sans gravité majeure — survenus les premiers jours. Si des dispositions particulières ont été prises dans les centres, une présence médicale 24h/24 s’y avère une nécessité.

Un autre point évoqué est le sous-dimensionnement de la fonction logistique, notamment pour ce qui est de la gestion des transports, de la sécurité ou encore de la restauration. Il semble important de désigner un responsable logistique sur chaque site qui soit dédié aux questions de transport durant le séjour pour réaliser des activités, de gestion du petit et du gros matériel consommable ou non consommable (achat, remplacement), de gestion des repas pour les potentiels intervenants ou encore des pique-niques pour les différents groupes de jeunes lors des sorties. Sur l’un des sites, le cadre gestionnaire/logistique était aussi le directeur de la structure à l’année (il vit sur place). Cela a facilité l’organisation et la préparation du séjour en amont et pendant le séjour. Ce fut un atout majeur dans la préparation, l’organisation et la gestion du séjour que le cadre gestionnaire soit aussi le responsable du centre à l’année. Ce sont ainsi les personnels permanents (cuisinier et agents de service) qui ont été mobilisés.

Parallèlement à ces besoins en suivi sanitaire et social et en logistique, la place des cadres, comme cela a été évoqué précédemment, et leur nombre ont posé un certain nombre de questions. En effet, des cadres ont parfois remplacé les tuteurs pendant leurs jours de congé (1 jour par semaine), mais ils n’étaient pas tous nécessairement préparés au rôle de tuteur de substitution ou de « tuteur volant ».

27

Une des évolutions pour la suite pourrait être de réduire le nombre de cadres de compagnie et d’ajouter un ou deux professionnels de santé (permettant une présence médicale en continu lors du séjour) ainsi qu’un responsable logistique. Afin de ne pas ajouter de personnels supplémentaires, ces professionnels pourraient, comme cela a été le cas sur certains sites ayant identifié le besoin, faire partie des cadres de compagnie. Le binôme permettrait une présence 24h sur 24h, afin de gérer les besoins au quotidien (traitement, accompagnement des jeunes en situation de handicap…), mais aussi les situations exceptionnelles (malaises liés au stress, à la chaleur ou à la fatigue…).

§

La volonté d’une partie de l’équipe de se réengager, sous conditions

Concernant les prochaines sessions, une partie des équipes se dit « prête à re-signer » mais sous conditions. Ces dernières peuvent avoir trait à la fois :

– au statut, avec la volonté d’une situation qui soit plus pérenne (pour les cadres de direction notamment) ;

– aux conditions d’exercice, notamment en ce qui concerne le rythme, les congés, ou le cadre d’emploi (contrat de travail et rémunération) ;

– à l’équipe qui sera constituée.

Aussi, la quasi-totalité des encadrants rencontrés durant les séjours de cohésion témoigne d’un réel intérêt pour le dispositif, mais exprime être dans l’expectative pour savoir s’ils reconduiront l’expérience, notamment du côté des membres de direction des centres. D’autres, en revanche, annoncent d’ores et déjà qu’ils ne souhaitent pas poursuivre et/ou s’interrogent explicitement sur la tonalité que prendra le SNU dès lors qu’il sera obligatoire. Au cœur de cette interrogation se pose la problématique de l’encadrement de jeunes qui n’adhèreraient pas aux finalités du SNU ou à son cadre de fonctionnement, qui nécessairement, doit passer par la suite d’une logique parfois perçue comme du bricolage à un cadre plus structuré et précis.

Un organigramme pyramidal, un management hiérarchisé