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B - Mieux protéger la biodiversité et lutter contre le changement climatique grâce aux documents de

gestion durable et à la certification

En visant à concilier l’intérêt général et celui des propriétaires, les documents de gestion durable permettent d’orienter efficacement la gestion forestière. Ils sont « les véritables outils de travail de tous les forestiers » selon l’expression de Bertrand Servois50 lors de son audition. Ils permettent de favoriser la diffusion des bonnes pratiques identifiées. Dans un contexte marqué par une forte incertitude, ils peuvent

47 REseau National de suivi à long terme des ECOsystèmes FORestiers.

48 Institut national de l'information géographique et forestière.

49 La technique LIDAR utilise un émetteur laser embarqué sur un appareil volant (avion, drone…) afin d’obtenir des images du sol très précises (10cm environ) pour caractériser le milieu forestier et réaliser des cartes d'exposition, de pente, d'ensoleillement…

50 Président de l’UCFF (Union de la Coopération Forestière Française).

AVIS DECLARATIONS/SCRUTINANNEXES également servir à informer et former les propriétaires et à les sensibiliser à la

préservation des sols, de la biodiversité ainsi qu’à la lutte contre le changement climatique, éléments qui ne font pas toujours partie de leurs attentions principales.

Dans un avis précité51, le CESE avait d’ailleurs souligné que « le regroupement des propriétaires privés et l’établissement de documents de gestions durables, jugés incontournables par le CESE, doivent s’accompagner de la construction d’une vision partagée de l’adaptation entre propriétaires privés et gestionnaires publics de forêts.

La diversité des arbres et la non fragmentation de la trame forestière doivent figurer au nombre des objectifs à atteindre.»

La prise en compte du changement climatique et de ses effets doit également constituer un point d’attention des propriétaires forestiers. Des outils s’inscrivant dans cet objectif existent déjà. BioClimSol conçu par le CNPF, vise à « aider le forestier dans la gestion des peuplements sur pied ou pour le choix des essences lors d'un renouvellement dans un contexte de changement du climat ». Il en est de même pour Climessences, porté par le réseau Aforce52 dont les fonctionnalités « permettent d’améliorer la connaissance des essences, de comprendre les évolutions du climat selon différents scénarios de changements climatiques, à l'échelle d'une région forestière et d’outiller la réflexion sur le choix des essences en climat changeant. »

La préservation de la biodiversité dont la présence et la diversité renforcent la résilience des milieux forestiers, doit aussi être intégrée comme un élément important.

Le CNPF a mis au point à cet égard, un indice de biodiversité potentielle (IBP) permettant au gestionnaire d’intégrer aisément la biodiversité taxonomique ordinaire dans sa gestion courante. Il est principalement basé sur l'observation des arbres, des peuplements et des milieux associés.

Par ailleurs, les données relatives aux forêts européennes, fournies par Eurostat, se révèlent insuffisantes notamment s’agissant de l’état de leurs écosystèmes et de leur biodiversité du fait des modes de sylviculture mis en œuvre.

Préconisation 3 :

Adapter les documents de gestion durable en forêt publique et privée en y intégrant des indicateurs de diversité des essences, de biodiversité, ainsi que de captation et de stockage de carbone, et faire évoluer l’indicateur de durabilité de la gestion forestière d’Eurostat pour qu’il distingue les forêts à forte biodiversité des autres.

Les Schémas régionaux de gestion sylvicole (SRGS), actuellement en cours d’élaboration, destinés à être le cadre à respecter par les documents de gestion durable, individuels (Plan Simple de gestion et Code de Bonnes Pratiques Sylvicoles) ou collectifs (Règlement Type de gestion), vont prendre en compte des dimensions nouvelles comme l’intégration paysagère des opérations sylvicoles. De même, ils vont insister sur la diversité des modes de gestion et l’intérêt de la diversification des essences à l’échelle d’un bois ou d’une forêt. Ces apports qui vont dans le bon sens, sont à compléter et amplifier.

51 L’adaptation de la France au changement climatique mondial.

52 AFORCE est un réseau mixte technologique qui rassemble des acteurs du milieu forestier (ONF, CNPF, IGN, Inrae, AgroParisTech, APCA, Gip Ecofor, Météo France…).

Avis

Préconisation 4 :

Intégrer dans les Schémas régionaux de gestion sylvicole (SRGS) :

- des zones non exploitées dites de « libre évolution » ou de « diversité » à l’instar des îlots d’avenir ou de vieillissement en forêt publique, couvrant un pourcentage minimal et maximal du domaine forestier ;

- pour chaque territoire ultramarin, un recensement des massifs forestiers avec pour objectif le classement d'au moins un tiers de leur surface en aire protégée ;

- des règles concernant les coupes de renouvellement pour les adapter à la topographie, aux paysages et à l’histoire des massifs et des sylvicultures locales ;

- la possibilité réglementaire que les regarnis soient effectués avec d’autres espèces que l’essence principale du peuplement (essence

« objectif »).

La certification forestière s’inscrit en complémentarité avec les documents de gestion durable en termes d’engagement et de garanties apportées et contrairement à ces derniers, elle est visible pour les consommateurs. Il importe par conséquent que son cahier des charges assure le niveau souhaitable d’exigences et les fasse évoluer. Cela sera d’autant plus facile que la certification repose « sur un principe d’amélioration continue, pour tenir compte des évolutions sociétales, scientifiques, climatiques et économiques » comme l’expliquait Mme de Neuville, présidente France de PEFC, lors de son audition. L’enjeu est de les faire connaître et de les rendre compréhensibles, auprès du public. Cela ne sera possible que si la certification est suffisamment répandue et si elle fait l’objet d’une large information de l’ensemble de la chaîne de valeur, des gestionnaires aux clients finaux.

Elle doit donc répondre à des attentes sociales s’agissant des conditions d’emploi et de travail des salariés forestiers, comme environnementales. A ce titre, des aspects actuellement insuffisamment pris en compte mériteraient de l’être. Ils concernent des éléments constitutifs des milieux forestiers : la biodiversité, les sols et les ressources en eau.

De plus, il serait souhaitable y compris pour éviter le clivage potentiel entre organismes certificateurs, qu’à terme, la certification fasse l’objet d’une reconnaissance officielle.

Préconisation 5 :

Encourager les propriétaires et les gestionnaires à la certification forestière et revoir son cahier des charges pour mieux prendre en compte les impacts réels de la gestion sylvicole, en particulier les aspects relatifs à la préservation de la biodiversité, des sols et des ressources en eau, avec pour objectif à terme, de parvenir à une certification reconnue officiellement.

La Commission européenne a fait part de sa volonté de placer sous protection stricte, l’ensemble des forêts primaires et anciennes. Au moins 30 % des superficies terrestres et marines de l'Union européenne devront être protégés, parmi lesquels un

AVIS DECLARATIONS/SCRUTINANNEXES tiers le seront plus strictement, cela comprend toutes les forêts primaires et anciennes

encore présentes dans l’Union. Il incombera aux Etats- membres de déterminer ces zones. La Commission demande «qu'un accent particulier soit mis sur la protection et la restauration des écosystèmes terrestres et marins tropicaux et subtropicaux situés dans les régions ultrapériphériques de l’Union, en raison de leur valeur exceptionnelle en matière de biodiversité ».

La Commission inclut également les mangroves parmi les zones à protéger strictement, car celles-ci abritent des écosystèmes particulièrement riches en carbone. Des objectifs de restauration de la nature, juridiquement contraignants, permettront de réparer les écosystèmes dégradés, en particulier ceux qui présentent le meilleur potentiel pour capter et stocker le carbone, prévenir et réduire les effets des catastrophes naturelles. Il est nécessaire que les gestionnaires forestiers et les collectivités territoriales participent à cette démarche.

Lors du troisième Conseil de défense écologique en novembre 2019, le gouvernement a annoncé un objectif de mise sous protection forte de 250 000 hectares de nouvelles surfaces forestières, soit 30 % du territoire national en aires protégées et 10 % en protection forte en 2022, dont deux projets en Guyane pour environ 180 000 hectares. Certaines associations de défense de l'environnement, l'association Maiouri Nature Guyane et le collectif « Or de Question » notamment, ont souligné l'insuffisance de cette mesure et les risques encourus pour les 360 000 hectares de forêt primaire qui restent accessibles aux compagnies minières aurifères.

Préconisation 6 :

Considérant que la protection des forêts primaires qui jouent un rôle majeur en matière de préservation de la biodiversité et de lutte contre le changement climatique en Outre-mer doit être une priorité, le CESE préconise de mettre le massif forestier guyanais sous protection ; les activités réglementées peuvent y être maintenues, en particulier la sylviculture durable.

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