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1.3 Les billards

1.3.3 Propriétés statistiques des billards

Les propriétés ergodiques caractérisent le chaos dans un cadre de théorie de la mesure. Les propriétés statistiques caractérisent le chaos dans un cadre de théorie

des probabilités : elles établissent une grande similarité entre un système dynamique donné (M, F, p , f ) et des séquences de variables aléatoires indépendantes identiquement distribuées (i.i.d.). Il s'agit de deux manières différentes de caractériser le chaos. En général, mais pas dans tous les cas, les propriétés ergodiques impliquent les propriétés statistiques et inversement. .

En physique, lorsqu'il est question d'applications lisses, on s'intéresse aussi à leurs propriétés statistiques. Soit l'application lisse F : M —» M préservant la mesure p et la fonction lisse observable / : M —» R. On peut alors étudier les propriétés statistiques suivantes :

- une vitesse de relaxation des corrélations ; - un théorème de limite central ;

- d'autres théorèmes de limites.

Dans les modèles physiques typiques, de fortes propriétés statistiques requièrent au stricte minimum le mixing et peuvent en général être difficilement imaginés sans les propriétés de K-mixing et de Bernoulli. La loi des grands nombres dans sa version forte est garantie par le théorème ergodique de Birkhoff pour toutes les applications ergodiques et toutes les observables intégrables.

C O R R É L A T I O N S

Les variables aléatoires Xn = f ° En résultant d'un système dynamique F : M —> M

ne sont pas indépendantes. La dépendance entre des variables aléatoires \ n et Xm est caractérisée par leur covariance :

COv(x„,Xm) = (XnXm) ~ (Xn){Xm)-

Pour des processus stationnaires (cf. §A.2), (xn) = (Xm) et alors cov(xn,Xm) ne

dépend que de \n — m\. En se basant sur cela, on définit la corrélation de l'observable / p a r :

Cf( n ) = cov(/, / o Fn) = < / ■ ( / o F " ) ) - ( / )2. (1.39)

La corrélation vérifie : C/(—n) = Cf(n) et C / ( n — m) = cov(xn,Xm)- La corrélation

(1.39) peut être généralisée comme :

Cf,g(n) = ( f - ( g o Fn) ) - { f ) ( 9 ) , (1-40)

où f , g : M —* R sont deux observables. Ces deux corrélations sont distinguées en appelant la première autocorrélation. Pour des variables indépendantes, nous avons :

(Xn, Xm) = {Xn)(Xm) et Cf(n - m) = 0 [13].

d'observables / . g G L2(A/), nous avons :

C / » ^ > 0. (1.41)

Ainsi, la convergence C/i9(n) —> 0 est garantie par le mixing, mais pour prouver le TLC, et autres théorèmes de limites, la convergence doit aussi être suffisamment rapide (définie ci-bas), ce qui n'est pas le cas pour des observables générales f et g. En effet, pour toute transformation apériodique préservant la mesure et toute séquence c„ —> 0 (de convergence arbitrairement lente), nous avons

|C/,

0

(n)| > Kl

pour des fonctions intégrables typiques f et g. [13]

Pour assurer une convergence rapide, nous devons restreindre la classe des applications et observables étudiées à des lisses ou presque lisses. Heureusement, les applications et observables les plus souvent rencontrées en physique appartiennent à cette classe, où l'espace des phases M est supposé être une variété lisse (souvent compacte) et l'application F est lisse ou lisse par morceaux. Les observables physiques intéressantes sont aussi le plus souvent des fonctions lisses, ou lisses par morceaux, sur la variété. Les deux types de convergence suivants sont fréquents pour les applications. Définition 8. Nous disons que les corrélations décroissent exponentiellement si

\Cf,9(n)\ < A f W (1.42)

pour A = constante, a > 0 arbitraire et tout n ^ 0. Nous disons que les corrélations décroissent algébriquement (ou polynomialement) si

|C/>0(n)| < B\n\~b (1.43)

pour B = constante, b > 0 arbitraire et tout n ^ 0.

En général, la décroissance exponentielle des corrélations est suffisante pour les preuves de théorèmes de limites. La décroissance algébrique des corrélations est suffisante si b est suffisamment grand, mais les preuves sont plus ardues ; si b < 1 les théorèmes limites font généralement défaut.

Billards dispersifs

Pour les applications lisses uniformément hyperboliques, les corrélations décroissent exponentiellement vite pour toute observable lisse. [20, 21]

Les billards dispersifs de catégories A et B sont uniformément hyperboliques. Pour ceux-ci les corrélations décroissent donc exponentiellement.

Pour les billards dispersifs de catégorie E et pour plusieurs billards non dispersifs, l'hyperbolicité est non-uniforme et les corrélations décroissent algébriquement. [22, 23, 24]

T H É O R È M E DE LA LIMITE CENTRAL

Puisque les corrélations décroissent exponentiellement dans les billards dispersifs, il en découle que le TLC (cf. déf. 9, annexe §A.2) s'applique. C'est-à-dire que les sommes partielles :

5„ = / + / o F + / o F2 + --- + / o F " - l (1.44) d'observables / itérées ont une distribution qui converge vers la distribution normale

A/(0,1), quand n —► oo. DIFFUSION

Le principe d'invariance affirme que la fonction cumulative Sn, après un changement d'échelles spatiale et temporelle adéquat, converge vers un processus de Wiener. Philipp and Stout [26] énonce dans un théorème les conditions pour que la séquence Xn = / o F " satisfasse l'ASIP (almost sure invariance principle) et le WIP (weak invariance principle) ; voir les sections A.2.4 et A.2.5 en annexe [26].

L'application de collisions T : AI —» Al pour les billards dispersifs de catégorie A et les observables / continues, telles que o2- > 0, satisfont à toutes les conditions du théorème de Philipp et Stout. Celles-ci convergent donc vers un mouvement Brownien dans la limite d'un temps infini. Ces billards ont ainsi un comportement diffusif pour n —> oo.

Soit q(F), la position d'une particule dans un gaz de Lorentz planaire (équivalent à un billard dispersif sur un tore) au temps T et considérons sa distribution asymptotique quand T —* oo.

T h é o r è m e 4. Le vecteur q ( T ) / \ / T converge en distribution vers une loi normale 2D de moyenne nulle et de matrice de covariance f _ 1V .

appelée matrice de diffusion en temps discret. Les théorèmes de la limite central en ID et 2D sont énoncés aux sections A.2.2 et A.2.3, en annexe.

Lorsque le théorème 4 est applicable, le système est diffusif : la variance de la position croit linéairement avec le nombre de collisions (i.e. dans le temps) :

var((7) = D • Nc, (1.45)

où nous mesurons le temps en nombre de collisions Arc. La constante de proportionalité est la constante de diffusion, que nous notons D. Cette constante apparaît dans l'équation différentielle de la diffusion :

^ = D V V , (1.46) laquelle possède une interprétation statistique.

La constante de diffusion est liée au libre parcourt moyen par l'équation d'Einstein- Smoluchowski [25] :

où T est le temps total que dure la trajectoire. Dans notre cas, ||7j|| — 1 et de plus, dans les systèmes diffusifs, cr = fy/~N, où f est le libre parcourt moyen et N, le nombre de collisions. Ainsi nous avons :

T = Y T ^ T = A = Nf (1.48)

*-" M

et l'équation (1.47) devient :

2Arf 2 v ;

SUPERDIFFUSION

Les théorèmes 7 et 4 ne s'appliquent pas aux billards dispersifs de type B. Sans horizon, la fonction de retour r(x) et la fonction de déplacement L(x) ne sont pas bornées ; elles ont un premier moment (moyenne) fini, mais un deuxième moment (variance) infini. Dans ce cas, la particule peut se propager loin avant la collision suivante. On appelle cela un mouvement ballistique. La particule peut alors se propager plus rapidement que dans un procesus de diffusion classique. Ce comportement pourrait être en lien avec les phénomènes naturels de superdiffusion et de supraconductivité.

Des arguments heuristiques [27] et des simulations numériques [28] ont longtemps suggéré que la bonne loi d'échelle pour la fonction de déplacement qn est dans ce cas y/n log n plutôt que y/n : i.e., qn/ \ / n l o g n devrait converger à une distribution limite. Une preuve a été annoncée dans [29].

Billards de Bunimovich

Pour les applications hyperboliques non-uniformes, les corrélations décroissent, en général, algébriquement [30]. Contrairement à l'ergodicité, les propriétés statistiques ne se transmettent pas à T. Le taux de mixing de F peut en effet être beaucoup plus lent que celui de F*. (Quelques itérations seulement de F * peuvent correspondre à plusieurs itérations de F.)

Il a longtemps été prédit, sur la base d'arguments heuristiques, que la fonction de corrélation Cf^g(n), pour des observables continues dans un stade, devait décroître comme ~ 1/n. Et puisque la série Y2n Vn diverge, on s'attendait à ce que le TLC ne s'applique pas. Ce n'est que récemment (2004-2005) que ces conjectures ont partiellement été prouvées. Une limite sur le taux de décroissance des corrélations légèrement inférieure à 1/n fut établie [23, 24] :

._ , .. constante • In2 n , _„.

\C,,g(n)\ < . (1.50)

Des travaux sont en cours pour prouver une limite plus stricte, se rapprochant de la valeur prédite constante/n [23, 24].

Par ailleurs, le TLC pour le billard en stade fut réfuté dans [14]. Un TLC non- classique fut plutôt obtenu pour la somme partielle Sn. Soit une observable continue f(r, Q) évaluée sur l'espace des collisions A4 et soit :

I / = ^ T / / ( r , a = 0)dr, (1.51) sa valeur moyenne sur l'ensemble des vecteur normaux attachés aux composantes de

frontière Tx et F2 (ces vecteurs normaux génère strictement des trajectoires non- hyperboliques qui ne frappe jamais les demi-cercles). Bâlint et al. [14] démontre alors le théorème suivant. Théorème 5. Si 1/ ^ 0, alors S J y / n l n n - ^ A f ( O y j ) , ou 2 4 + 31n3 oi = ;— . (L52) f 4 - 3 1 n 3 v ' Si 1/ = 0, alors Sn/ V ^ ^ A f ( 0 y2) , pour une quelconque o"j > 0.

Nous observons ici une asymptote y/nlnn non-générique dans le cas général 1/ ^ 0. Cela est similaire à la superdiffusion dans les gaz de Lorentz sans horizon.

Alors que les propriétés statistiques pour certains billards de Bunimovich ne furent obtenues que très récemment, les propriétés d'ergodicité et de mixing pour toutes les classes de billards de Bunimovich sont des faits acceptés depuis longtemps [16, 17, 18, 31].

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