• Aucun résultat trouvé

Propriétés électriques

Dès sa découverte, J. P. Remeika rapporte l’observation d’un signal piézoélectrique dans les composés Ga2-xFexO3 [Wood 1960]. Parce que les matériaux piézoélectriques peuvent être

également pyroélectriques, A. G. Chynoweth a essayé de mettre en évidence la pyroélectricité dans les composés Ga2-xFexO3, mais aucune réponse pyroélectrique n’a pas été détectée. Sa conclusion

est que si le cristal de Ga2-xFexO3 est pyroélectrique, l’effet doit être très faible [Wood 1960].

S. C. Abrahams et B. F. Levine attribue l’origine de cette piézoélectricité aux atomes d'oxygène, les déplacements que pourraient subir les cations ne permettraient pas d’après eux de rendre compte de la piézoélectricité (voir figure I.19) [Abrahams 1964], [Abrahams 1965], [Levine 1968]. Cependant, ces auteurs suggèrent que ce sont les tétraèdres Ga1-O4 qui contribuent

principalement à la piézoélectricité, car l’axe de symétrie des tétraèdres est parallèle à l’axe de polarisation spontanée (l’axe b). Même si le réseau d'oxygènes ne présente pas de centre d’inversion, l’objet le plus asymétrique de la maille de Ga2-xFexO3 est le tétraèdre Ga1-O4. L’une

des liaisons Ga1-O du tétraèdre Ga1-O4 étant quasi parallèle à l’axe de facile polarisation, une

pression le long de cette direction pourrait induire la compression de cette liaison et déplacer le centre de gravité des charges positives/négatives (induisant ainsi une polarisation spontanée). S. C. Abrahams et al. remarquent une diminution de la piézoélectricité lorsque la teneur en fer augmente. La substitution du gallium par le fer entraîne des distorsions structurales des octaèdres de gallium Ga2-O6 et la position de l’atome d'oxygène commun aux environnements Ga1 et Ga2 est alors

modifiée. La conséquence directe est la déviation de la liaison Ga1-O par rapport à l’axe de polarisation b. L’application d’une pression selon cette direction ne mène pas à la compression de

cette liaison; dans ce cas la liaison a plutôt tendance à pivoter et l’effet piézoélectrique est alors diminué.

Figure I.19. Schéma représentant l’arrangement des cations et des spins au sein de Ga2-xFexO3

[Abrahams 1964].

T. Arima et al. [Arima 2004], quant à eux, attribuent l’apparition d’une polarisation spontanée au sein de Ga2-xFexO3 au déplacement des ions Fe3+ dans les environnements

octaédriques distordus Fe1 et Fe2. Les auteurs mesurent par diffraction neutronique, les déplacements des ions Fe3+ par rapport au centre des octaèdres et calculent une valeur théorique de

la polarisation induite de 2.5 µC/cm2.

Figure I.20. Schéma représentant les contributions partielles des ions à la polarisation totale selon l’axe cristallographique b au sein de Ga2-xFexO3. L’amplitude et la direction de la

A. Roy et al. [Roy 2011] calculent une valeur de la polarisation induite égale à 30.53 µC/ cm2, valeur supérieure d’un ordre de grandeur à celle obtenue par T. Arima. La contribution

partielle à la polarisation totale des différents ions est symbolisée sur la figure I.20. A. Roy et al. observent que la contribution la plus importante est celle du site Ga1. Cependant, celle-ci est compensée par la contribution des sites Fe1, O1, O2 et O6. D’après ces auteurs, La structure cristallographique montre que ces sites sont les objets les plus asymétriques de la structure et sont placés au centre d’inversion de la symétrie. En revanche, les sites Ga2 et Fe2 maintiennent une configuration quasi-symétrique et contribuent moins à la polarisation totale. Ils concluent que la polarisation spontanée apparue au sein de Ga2-xFexO3 est majoritairement due aux déplacements des

positions des sites Ga1, Fe1, O1, O2 et O6.

I.2.5. Effet magnétoélectrique

Figure I.21. Courbe de la susceptibilité magnétoélectrique en fonction de la température dans Ga2-xFexO3 [Rado 1964].

L’observation d’un effet magnétoélectrique (ME) dans Ga2-xFexO3 est signalée pour la

première fois par G. T. Rado en 1964 [Rado 1964]. Il montre que l’application d’un champ magnétique le long de l’axe cristallographique c induit une polarisation le long de l’axe b et qu’en appliquant un champ électrique selon la direction b, une aimantation est induite selon la direction c. En traçant la variation de la susceptibilité magnétoélectrique en fonction de la température (voir figure I.21), G. T. Rado a observé que les termes du couplage magnétoélectrique de l’effet magnétoélectrique linéaire (MEE) et (MEH) s’annulent quand l’ordre magnétique disparait à la

température de Néel. L’auteur suggère que dans Ga2-xFexO3 le couplage magnétoélectrique est un

al. démontrent qu’il n’existe aucun couplage direct entre la magnétostriction et l’effet magnétoélectrique dans ce système [Popov 1998].

En 2004, T. Arima et al. [Arima 2004] mesurent dans des cristaux de Ga2-xFexO3

(0.8!x!1.1) la polarisation induite le long de l’axe cristallographique b par l’application d’un champ magnétique selon l’axe c (voir figure I.22). Les auteurs observent l’apparition de courbes en forme de papillon, dont ils attribuent l’origine à un processus de renversement de l’aimantation. Comme on peut le voir sur la figure I.22, la polarisation électrique selon l’axe c est nulle.

Figure I.22. Mesure de l’effet magnétoélectrique dans les cristaux de Ga2-xFexO3 (0.8!x!1.1)

[Arima 2004].

Une anomalie de la constante diélectrique a été constatée au voisinage de la température de transition magnétique dans les céramiques de Ga2-xFexO3 (voir figure I.23) par Z. H. Sun et V. B.

Naik [Sun 2006], [Naik 2009]. D'après ces auteurs, l’anomalie observée dans l'évolution thermique de la permittivité indiquerait l’existence d’un couplage magnétoélectrique entre l’ordre magnétique et l’ordre électrique dans GaFeO3. La disparition de l’anomalie sous l’application d’un champ

magnétique faible µ0H=60 mT suggère également l’existence d’un effet magnétoélectrique actif

[Naik 2009]. De plus, à des températures inférieures à la température de transition magnétique, la variation de la permittivité "# dépend de l’aimantation M et montre une relation linéaire entre "# et M2, indiquant qu’une corrélation entre les propriétés diélectriques et magnétiques existe au sein de

a - Etude de Z. H. Sun b - Etude de V. B. Naik Figure I.23. Evolution de la permittivité et de la pe

[Sun 2006], [Nai

t de la perte diélectrique en fonction de la température Sun 2006], [Naik 2009].

Récemment, M. B. Mohamed et al. [Mohamed 2010], [Mohamed 2011] effectuent des mesures de constante diélectrique sur des céramiques de GaFeO3. Celles-ci révèlent l’absence d’une

anomalie de la permittivité ou de la perte diélectrique au voisinage de TN (voir figure I.24).

Cependant, en dopant la maille de GaFeO3 avec du manganèse sur les sites natifs du fer

(concentration égale à 10 et 25%) un pic est observé au voisinage de la température de transition magnétique sur les courbes de variation thermique de la permittivité et de la perte diélectrique (voir figure I.24).

Figure I.24. Evolution de la permittivité et de la pe dans des céramiques de GaFeO3 pures et dopées e

2011]

t de la perte diélectrique en fonction de la température t dopées en manganèse [Mohamed 2010], [Mohamed

2011].

Cette question sur le comportement électrique de Ga2-xFexO3 est de plus en plus débattue. V.

B. Naik et al. prétendent par exemple que ce système n’est pas ferroélectrique [Naik 2009]. Sur les cycles d’hystérésis P vs. E enregistrés à 1 kHz et à différentes températures ces auteurs observent que la polarisation n’est pas saturée, suggérant que la contribution du courant de fuite est majoritaire par rapport à la polarisation électrique réelle due à l’orientation des dipôles électriques (voir figure I.25). Sur les courbes P vs. E mesurées à 150 K et à différentes fréquences de travail on constate que les cycles d’hystérésis s’ouvrent dès que la fréquence de mesure baisse, du fait de la contribution du courant de fuite.

Figure I.25. Courbes P vs. E mesurées à différentes températures et à différentes fréquences de travail pour une céramique de GaFeO3 [Naik 2009].

Les résultats contraires obtenus par les différentes équipes de recherche [Sun 2006], [Naik 2009], [Mohamed 2010], [Mohamed 2011] ouvrent un débat sur les propriétés magnétoélectriques des composés Ga2-xFexO3. Cette polémique permet d’envisager des études approfondies dans ce

sens, afin de conclure sur le couplage des paramètres d’ordre magnétique et électrique (et encore sur l’existence de la ferroélectricité) au sein de ces matériaux.