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Sur la base de l’analyse précédente, nous nous concentrons maintenant sur la conception et la réalisation des projets territoriaux de mobilité. Notre attention est retenue par une méthode appliquée dans le déploiement de nouvelles propositions de mobilité274. Cette dernière propose de comparer, non pas des scénarios avant-après, mais des scénarios après et un virtuel après sans infrastructure de transport qui pourrait être complété, dans la mesure du possible, par une évaluation ex-ante et ex- post des situations dans lesquelles s’inscrivent les projets.

Ces scénarios se différencient en postulant des situations possibles si aucune action n’est entreprise, mais, généralement occultant l’adaptation progressive des systèmes de mobilité. Pour alimenter cette méthode des propositions d’actions de mobilité durable doivent être avancées. Nous en proposons une première synthèse, découlant des enjeux précédemment identifiés. Elle est classée en fonction de quatre thématiques : sur le territoire, sur l’environnement, l’économie et le volet sociétal. L’ensemble est ainsi traité en 24 thèmes pour donner une vision synoptique et permettre d’alimenter les futures réflexions (Tableau 9, page 119).

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Synthèse de l’atelier thématique « Mobilité Solidaire », p. 9. URL : https://www.ecologique-

solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Mobilit %C3 %A9 %20plus %20solidaire %20r %C3 %A9duction %20fractures %20sociale %20et %20territoriale.pdf. Consulté le 07 mars 2018.

272

Kelbel C., Mahiu A., Brandeleer C., et Buffet, L., 2009, « Mobilité durable : enjeux et pratiques en Europe » Bruxelles, Think tank européen « Pour la Solidarité », CDU CD100314.

273

Orfeuil J.-P., Garnier C., 2005, « Enjeux sociaux de la mobilité : quelques éléments de réflexion », Comité 21, Economie et développement durable, Paris, pp. 202-214 (225 p.).

274

Offner J.-M., 1992, « Les « effets structurants » du transport : mythe politique, mystification scientifique ». In Espace géographique, tome 22, n°3, 1993, pp. 233-242.

Propositions d’actions pour développer une stratégie de mobilité durable

Territoire Environnement Economie Société

Recomposer une organisation territoriale

compatible avec une mobilité durable (lien aménagement/urbani-

sme/mobilité).

Développer une stratégie d’usage limité

des sols (optimisation des réseaux, densification urbaine…). Encourager les structures de proximité (approvisionnement local…). Encourager le renoncement à l’autosolisme (transports en commun, covoiturage, autopartage…). Développer la réversibilité des infrastructures et favoriser l’innovation technique dans le domaine de l’ingénierie territoriale (expérimentation routière…). Adapter les infrastructures aux changements climatiques (recul stratégique, résilience…).

Valoriser les modes vertueux (bonus, forfait

mobilité, gratuité de stationnement…).

Finaliser l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (PMR)

et développer la mobilité servicielle

(senior…).

Optimiser l’utilisation des réseaux (partage de voirie, réversibilité des voies, sites propres…).

Favoriser les ressources et énergies renouvelables (tant pour

les infrastructures que pour les déplacements).

Favoriser l’accessibilité et mettre en place une tarification adaptée des

modes collectifs (tarification sociale,

gratuité selon les niveaux de pollution…).

Ouvrir les données de mobilité et innover par

des systèmes d’information

collaboratifs.

Hiérarchiser l’intermodalité dans les

territoires (espaces de covoiturage, pôles

d’échanges intermodaux…).

Limiter les polluants y compris lors de la production et du recyclage des infrastructures et des véhicules (bilan de « la naissance à la tombe »). Améliorer les performances des systèmes de transports collectifs et adapter les offres aux territoires (transport à la demande, lignes hebdomadaire de marché…). Soutenir le développement des modes actifs (marchabilité, engins personnel de déplacement, vélos en libre service…). Assurer la continuité des itinéraires (pédestres, cyclables…). Réduire le bruit (revêtement, utilisation du réseau…). Développement des véhicules autonomes et serviciels. Développer une économie de la mobilité circulaire (recyclage). Soutenir une politique

de prévention et de sécurité pour tous les modes et résoudre les conflits d’usages (sensibilisation des scolaires, information

des citoyens, vélo- école…). Expérimenter de nouvelles formes d’écomobilité (traction animale, partage de véhicules publics et privés…). Poursuivre l’innovation technique (performances des motorisations, des

carburants, mobilités alternatives…). Développer le télétravail et les télécentre, voire le nomadisme professionnel.

Tableau 9 : Propositions d’actions pour une mobilité durable

(S. Loubié, 2019)

Pour déployer ces propositions, nous proposons de mettre en place des indicateurs afin de suivre la mise en place et l’évolution des objectifs de mobilité durable dans un projet territorial. Ces indicateurs factuels sont ciblés et permettent d’évaluer la prégnance globale de la mobilité durable et sa traduction dans le comportement individuel. Ils sont volontairement adaptés, facilement mobilisables et pérennes pour

mobilité collective et la mobilité individuelle. Ce système d’indicateurs pour être pertinent doit nourrir un dispositif de prise de décision et de gouvernance et la conduite de projet. Ils ne sont donc pas destiné à rester confiné dans une sphère techniciste et pourrons être adaptés à des communications envers le grand public (Tableau 10, page 120).

Indicateurs de la mobilité durable dans un projet territorial

Type d’indicateur Cible de l’indicateur Indicateurs Economique Mobilité collective

Montant global du budget public et privé de mobilité (échelle macro).

Montant global des ressources financières de mobilité (échelle du territoire).

Montant global en investissements et fonctionnement de la mobilité. Ressources liées aux usagers publics et privés (transports publics, covoiturage…).

Mobilité individuelle

Taux d’équipement des ménages en moyens de déplacement propres. Evolution de la part du budget mobilité dans le budget des ménages.

Environnemental

Mobilité collective

Taux d’équipement public en motorisation propre.

Equipements publics pour les modes alternatifs (covoiturage, autopartage, libre service, voies réservées…) et taux d’utilisation. Equipement en distribution de ressources alternatives (électricité, hydrogène…).

Capacité intermodale du territoire (pôles d’échanges multimodaux…).

Mobilité individuelle

Modalités d’intégration des nouveaux modes (étude comportementale).

Evaluation de l’évolution des comportements de mobilité en mobilité durable (étude sociologique).

Sociétal

Mobilité collective

Accessibilité (PMR…) des réseaux de transport et infrastructures (voiries) et intégration de la mobilité active.

Budgets de mobilité inclusive : tarification sociale des transports collectifs, plateformes de mobilité, aide au permis, à l’acquisition de véhicule…

Evaluation du développement du travail à distance.

Taux de couverture du territoire par des solutions de mobilité. Evolution des taux d’accidents par mode et types de réseaux.

Mobilité individuelle

Part de la population ayant un accès réel à un mode de mobilité autre que l’autosolisme.

Taux d’équipement des ménages en téléphonie mobile et accès aux outils de mobilité numériques.

Evaluation de la motilité.

Evaluation de l’immobilité (vitalisation de la vie locale, perte de travail, relégation sociale…).

Gouvernance

Mobilité collective

Evaluation de la gouvernance de la mobilité. Evaluation des indicateurs et mesures correctrices. Mobilité

individuelle

Evaluation de la participation citoyenne.

Evaluation qualitative des perceptions et attentes des usagers.

Tableau 10 : Proposition d’indicateurs d’évaluation de la mobilité durable

Dans notre approche centrée sur la conduite de projet de mobilité à un échelon territorial local, nous avons souhaité éclairer les thèmes répartis en économie, environnement, sociétal et gouvernance et deux niveaux d’indicateurs permettant de conjuguer une approche sur un plan collectif et sur un plan individuel. Afin de permettre de qualifier un projet comme relevant d’un objectif de mobilité durable, nous proposons donc de retenir des indicateurs aisément mobilisables et dont l’évolution doit pouvoir contribuer à analyser le bénéfice pour l’économie, l’environnement, la sécurité et la cohésion sociale.

Cependant, H. Gudmunsson275 interroge les limites de l’utilisation des indicateurs en

mobilité durable. Il révèle qu’évaluer la mobilité durable présente un problème lié à l’accès à une masse imposante d’information et interroge sur les seuils et limites à prendre en compte (par exemple doit-on intégrer l’ensemble des process de construction et de fonctionnement automobile du berceau à la tombe ? Doit-on analyser les infrastructures de circulation en prenant en compte l’ensemble des process depuis la phase de production des différentes matières premières nécessaires jusqu’au recyclage des matériaux lors de sa destruction ?). Ces éléments posent la question de la limite de pertinence de prise en compte du système de mobilité au regard du paradigme englobant de la mobilité durable. Nos propositions ne visent donc pas une complétude du système mais doivent permettre de construire une estimation de la prise en compte de la mobilité durable car « les indicateurs pourront devenir, à la fois, de meilleurs moyens de mesurer la mobilité durable en tant que telle, et peut-être aussi d’œuvrer davantage au service d’un changement social dans la voie de l’instauration d’une authentique mobilité durable »276.

275

Gudmunsson N. H., 2003, « Donner du sens aux concepts. La mobilité durable et les systèmes d'indicateurs dans le domaine de la politique des transports », Revue internationale des sciences sociales 2003/2, n° 176, pp. 221-242. DOI 10.3917/riss.176.0221.

276

Conclusion

La mobilité constitue une préoccupation majeure de notre société et parmi les nombreux enjeux dont elle fait l’objet, nous en avons retenu certains. Notre présentation est donc volontairement incomplète, mais elle nous dote des éléments nécessaires pour asseoir nos réflexions au regard de la mobilité dans l’espace périurbain que nous allons aborder par la suite.

Les enjeux environnementaux : Les déplacements engendrent différentes nuisances clairement identifiées par différentes recherches. Nous retenons l’approche systémique de Frédéric Héran277 qui bien qu’appliquée aux espaces urbains trouve une

résonance dans le périurbain moyennant quelques adaptations : congestion en entrée d’agglomération, difficultés d’accès aux pôles d’échanges, effets de coupure des infrastructures, consommation d’espace, dégradation des paysages et coupure écologique, vibrations et odeurs, dégagement de chaleur par surchauffe du tablier routier, déchets aux abords dus à la négligence de l’usager. Les déplacements motorisés sont toujours basés en quasi-totalité sur une énergie fossile non renouvelable et la mobilité décarbonée reste en retrait, bien que la mobilité active soit le second mode de déplacement. Le mode motorisé est responsable d’une part importante des polluants atmosphériques ayant un rôle sur le plan global dans le changement climatique. L’adaptation de la mobilité est nécessaire car l’inertie du système induit que les politiques n’auront des conséquences sensibles qu’à l’horizon 2050, voire 2100. La mobilité est aussi responsable de nuisances quotidiennes (phoniques, visuelles, olfactives…), de la consommation des espaces (emprise des infrastructures et des dépendances, aires de services…), de coupures de corridors écologiques et des paysages (dévalorisation, effets de coupures…). Elle est aussi tributaire des changements climatiques et des phénomènes paroxysmaux tant sur les capacités fonctionnelles que structurelles qu’ils remettent en cause. Une stratégie d’adaptation des systèmes de mobilité aux changements climatiques reste à construire à l’échelle des territoires en fonction des enjeux.

L’enjeu économique : le développement de la mobilité induit paradoxalement des capacités de développement des territoires mais peut aussi contribuer à limiter ces derniers quand elle est mal maîtrisée. Ce développement est dépendant des politiques publiques qui par leurs implications peuvent favoriser tels ou tels mode ou les restreindre directement (tarification du stationnement, réduction des vitesses, priorisation des transports en commun…) ou indirectement (organisation spatiale). Ainsi, nous avons aussi attiré l’attention sur la précarité énergétique liée à la mobilité quand les distances domicile/travail deviennent importantes. Cette précarité concerne les plus démunis et s’exprime fortement dans les espaces sous dépendance automobile, comme c’est le cas dans les espaces ruraux et périurbains. Elle devient aussi un enjeu au cœur des revendications sociales de nos contemporains. L’essor des véhicules électriques limitent certes la pollution atmosphérique dans le cadre de leurs

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utilisations mais externalisent aussi la pollution liée à la production d’énergie issue de sources non renouvelables et au cycle de vie du véhicule, mais il réduit la dépendance au pétrole importé278. De plus à la consommation d’énergie fossile croissante due à

l’éloignement des polarités, s’ajoutent la construction et de l’entretien des infrastructures, le traitement des déchets, la pollution des eaux et des sols, l’impact sur la biodiversité de la construction ... Pour chaque nuisance il existe des solutions et des mesures compensatoires qui viennent accompagner les différents travaux et réalisations.

Les enjeux sociaux : la mobilité, bien que nécessaire au développement des différentes activités, n’est pas répartie de manière homogène et sa capacité à être mise en œuvre dépend des individus (motilité). C’est pourquoi, nous avons éclairé la notion de mobilité inclusive qui est un défi pour les espaces périurbains pour limiter l’exclusion sociale et la précarité mobilitaire, source de vulnérabilité. La sécurité routière est abordée pour analyser des enjeux spécifiques à ce risque dans l’espace périurbain car d’une part, nous y sommes sensibilisés professionnellement et d’autre part, nous pensons que l’essor des différents moyens de transport et leurs cohabitations sur l’espace public, en attente d’un cadre législatif, augmente ce risque. Cependant cette catégorisation interpelle et F. Héran qui propose une approche systémique car « l’approche traditionnelle des nuisances est aujourd’hui très insuffisante. A trop vouloir circonscrire les effets externes pour éviter notamment les doubles comptes, les solutions sectorielles en viennent à oublier des aspects essentiels et de nombreuses contradictions apparaissent, sans que le bilan des solutions proposées soit forcément positif, bien au contraire. Il devient nécessaire d’explorer systématiquement les relations entre les diverses nuisances »279. Sur ces

bases, nous avons proposé une synthèse des propositions d’actions permettant de nourrir le paradigme de la mobilité durable en les déclinant en une série d’indicateurs opérationnels à mettre en œuvre dans le cadre de suivi de politiques et de projet d’aménagement du territoire. Nous souhaitons attirer l’attention sur les relations entre différents facteurs et susciter un échange constructif. Ainsi, nous avons pu montrer, en nous appuyant sur différents travaux de recherche et notre expertise professionnelle, que le changement de paradigme non seulement confronte la mobilité aux enjeux du développement durable et aux enjeux du changement climatique, mais qu’une adaptation du fonctionnement et une évolution du système des mobilités, incluant la conception et la réalisation des infrastructures, est nécessaire. L’assimilation peut se traduire par la mise en place d’outils de conception, de suivi et des réalisations favorisant une prise en compte du système de mobilité durable au service de l’aménagement des territoires comme noue le montrerons en dernière partie.

278 Pour un cycle de vie moyen estimé à 150 000 kilomètres, elle émettra au total environ 10 tonnes de CO2, contre 22 tonnes

pour une voiture diesel et environ 27 tonnes pour une voiture à essence, selon le scénario de référence de l'étude de l’ADEME qui précise que les gains environnementaux d’un véhicule électrique se retrouvent à l’usage dans la mesure où ils sont utilisés intensément. URL : https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avisademe-vehicule-electrique.pdf Consulté le 10 octobre 2018.

279

Conclusion de la première partie

L’approche de la mobilité a fait l’objet d’un double changement de paradigme dont le premier mouvement a été lent et progressif, tout d’abord des transports vers la mobilité, puis plus rapide de la mobilité vers la mobilité durable. Cette évolution, plus qu’une révolution, est aujourd’hui appropriée par les Sciences Humaines et plus largement par l’ensemble de la société qui l’identifie comme l’un des enjeux majeurs de ce début de XXIème siècle.

Notre conviction initiale était que le paradigme de la mobilité durable constitue un nouveau défi pour l’ensemble d’acteurs du domaine des routes/transports/mobilités. Sans prétendre à l’exhaustivité, mais pour confirmer ce point, nous avons montré comment le développement durable peut devenir un nouveau déterminant de la mobilité dans le cadre des projets qui permettent son développement. En effet, le déploiement d’une nouvelle approche de la mobilité et de l’importance de la lier de manière transversale aux objectifs de développement durable est aujourd’hui en affirmation et s’intègre progressivement dans le référentiel technique auparavant centrés sur le transport et les infrastructures. Ainsi, nous avons identifié les éléments du changement de paradigme des transports à la mobilité et nous avons montré comment il s’est peu à peu imposé en s’élargissant des besoins de déplacements et de transport à une approche systémique de mobilité nécessitant au final de réviser les orientations de l’échelle micro spatiale des relations de proximité usager-territoire à l’échelle macro-spatiale des états à l’international. Cette approche est plurielle, séquentielle, inégale en fonction des territoires et des échelles d’observation.

Les Cahiers de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de l’Île de France indiquent qu’au-delà des stratégies politiques, la mobilité implique le comportement de chacun mais s’avère aussi inextricable de l’action publique, tant par les infrastructures proposées que par la régulation que nécessite l’offre de transport : « la mobilité est, certes, une question d’infrastructures. Mais c’est aussi une question de comportement, et de coordination de l’action, de régulation des flux par des moyens multiples »280. Elle est donc soumise à un système global relevant des choix de la

société (volonté de régulation, restriction…), au contexte territorial (aménagement du territoire, politique de transport…) mais aussi individuel (motilité, capacité de changement, aptitude d’adaptation…). La mobilité relève donc d’un processus d’arbitrage indissociable du contexte territorial, social et des capacités acquises pour concevoir son intention de déplacement. Ainsi, comme nous l’exposerons, elle est discriminante dans les espaces périurbains dans lesquels l’individu doit composer ses déplacements avec des contraintes supérieures à l’urbain : faiblesse de l’offre de transport public, modes actifs peu adaptés aux distances, surcoût des déplacements

280

Cahiers de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de l’Île de France, 2009, Vers une mobilité durable en Europe. Paris, 175 p.

quotidiens plus longs. De plus, la structure du système de mobilité conditionné aux configurations des infrastructures ne peut pas absorber le besoin croissant de mobilité. Dans un contexte économique contraint, les réseaux ne peuvent échapper à une recomposition sur eux-mêmes dans une résilience, comme celle déjà en cours en architecture et urbanisme281.

Nous avons montré que le deuxième mouvement prend sa source dans une prise de conscience internationale et une intégration de la finitude des ressources. Cependant, il est resté en retrait sur le plan conceptuel, peinant par l’imprécision de ses contours282 comme en témoigne les approches différentes développées dans le rapport

de l’ONU et les très nombreuses définitions existant dans les travaux de recherche. Le concept de développement durable est devenu pourtant une référence incontournable, un mode de conception et de pensée presque obligé283, présent dans

les principaux schémas et politiques d’aménagement et ce à l’ensemble des échelles institutionnelles284. La mobilité a intégré cette durabilité qui est inscrite aujourd’hui

dans des objectifs mondiaux, européens et nationaux. Cependant, la mobilité durable peine à clarifier ses contours et à proposer des solutions globales et efficaces pour sa mise en œuvre. Elle devient pourtant un élément majeur des politiques économiques, sociales et environnementales d’urgences285 face au changement climatique. Ainsi, les

enjeux concernent différents secteurs de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme pour lesquels des réponses concrètes existent mais restent lentes à mettre en œuvre : réorganisation des territoires (rapprochement des lieux de travail des domiciles par des télécentres ou en développement du télétravail…), optimisation de l’utilisation des infrastructures existantes, amélioration de l’efficacité énergétique des véhicules, renforcement des offres publiques...

L’immobilité, pendant de la mobilité, concentre l’essentiel des préoccupations sociologiques actuelles286. D’un point de vue de l’analyse spatiale, l’immobilité peut

être considérée comme un état statique relevant d’un certain équilibre des forces287,

mais d’un point de vue global il existe une réelle asymétrie entre l’immobilité et la mobilité. En s’autorisant un regard vers d’autres disciplines, on peut remarquer que ces deux fonctions de mobilité et d’immobilité, au regard de l’individu, sont séquentielles « au quotidien ou à plus long terme, les individus sont dans une alternance permanente d’immobilités et de mobilités »288. Traiter des questions de

mobilité doit donc aussi inclure celles de l’immobilité. L’approche de la mobilité est aussi soumise à la finesse de l’observation qui peut considérer qu’un déplacement de

281 Rouillard D., 2019, La résilience de l’infrastructure, Revue TEC, n° 240, janvier 2019, pp. 4-5.