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Partie I : Couplage basé sur les connaissances méthodologiques

4.2 Processus de constitution de tableaux de bord

Nous avons vu précédemment qu’un tableau de bord n’est pas simplement un outil de reporting, il doit aider le décideur à prendre les meilleures décisions. Dans cette optique, Alain Fernandez [Fernandez, 2005] propose un processus de constitution de tableau de bord en cinq étapes. Ce processus est illustré sur la figure 4.1.

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Figure 4.1 : Processus de constitution d’un tableau de bord

La sélection des axes de progrès consiste à déterminer la meilleure démarche de progrès. Cette étape est un préalable à la constitution d’un tableau de bord : il s’agit de définir les axes de progrès les plus profitables pour l’entreprise tout en tenant compte de ses spécificités, de son marché ainsi que des moyens disponibles. Cette étape se place plutôt en amont de la conception et donc du couplage de la conception et de la planification, nous ne l’aborderons donc pas dans ce mémoire.

La détermination des points d’intervention a pour but d’identifier exhaustivement les activités et processus critiques au sein des axes de progrès précédemment identifiés. Ici aussi, nous nous plaçons en amont de la conception et de sa planification. Nous ne traiterons donc pas cette étape.

Le choix des objectifs permet de définir et sélectionner, pour chaque acteur et groupe d’acteurs, les meilleurs objectifs « tactiques ». Il s’agit d’appliquer concrètement les axes de progrès définis dans la première étape. Ces objectifs vont devoir être suivis, ce qui fait l’objet des étapes suivantes. Cette étape est l’objet de la section 4.2.1.

Le choix et la construction des indicateurs consistent à sélectionner les indicateurs les plus pertinents en tenant compte des objectifs à suivre, du contexte et des habitudes de travail du décideur. Cette étape est détaillée dans les sections 4.2.2.1 et 4.2.2.2.

La structuration et le maintien du tableau de bord ont pour but d’agencer les indicateurs afin de permettre au tableau de bord d’être un véritable outil d’aide à la décision en permettant au décideur de visualiser l’état courant « d’un seul coup d’œil ». Cette étape fait l’objet de la section 4.2.2.3.

4.2.1 Choix des objectifs

Tous les acteurs du projet de conception (directeur de programme et responsables de conception et de planification) sont intéressés par les tableaux de bord, ces derniers pouvant être différents en fonction des objectifs qui leurs sont donnés. En effet, le directeur de programme doit avoir une vision globale du projet de conception et du système à concevoir tandis que les responsables de conception et de planification ont une vision plus resserrée et plus précise sur une partie du projet.

Chacun des acteurs du projet de conception doit donc définir son propre tableau de bord afin de contrôler ses propres objectifs à atteindre et, au-delà, de prendre les meilleures décisions en ayant connaissance des informations (c'est-à-dire des indicateurs) nécessaires.

4.2.2 Choix et construction des indicateurs

4.2.2.1 Choix des indicateurs

Le choix des indicateurs est crucial pour la constitution d’un tableau de bord. En effet, les indicateurs sont porteurs d’information et si le choix n’est pas judicieux, le décideur risque de disposer

97 d’informations non représentatives de l’objectif à suivre ou du contexte de conception. Dans cette optique, il y a six principes à respecter pour le choix et la construction d’un indicateur :

il doit mesurer le résultat par rapport à l’objectif à suivre. Par exemple, si l’objectif vise au respect des délais pour une conception donnée, l’indicateur devra délivrer, d’une manière ou d’une autre, une information relative aux délais ;

il doit être fiable. Seules les informations dignes de confiance sont susceptibles de contribuer à l’aide à la décision. En effet, un utilisateur ne prendra jamais de décision sur la base d’informations dont il n’est pas sur. Tant que la fiabilité de l’information n’est pas établie, il est inutile de l’utiliser pour construire un indicateur ;

il doit inciter à décider. Un indicateur ne se contente pas de constater une situation. En effet, constater qu’un indicateur dérive n’a d’intérêt que si le décideur est en mesure de prendre les décisions opportunes pour corriger cette dérive ;

il doit pouvoir être construit sans trop de difficultés. Les informations doivent être disponibles et les traitements pour l’obtenir doivent être relativement simples afin de limiter les risques d’erreurs et la maintenance sur les traitements ;

il doit être rafraîchi à temps. L’information fournie par l’indicateur doit être suffisamment récente pour laisser le temps à la décision. Par exemple, un coût mensuel actualisé tous les ans ne sera pas utile pour le décideur.

il doit être délivré à coût acceptable. La collecte d’information prend du temps et par conséquent présente un coût non négligeable. Il est important d’évaluer ce coût au préalable.

4.2.2.2 Transformation des données en indicateurs

En préambule du traitement des données utiles pour la prise de décision et donc la constitution d’un tableau de bord, nous nous intéressons où ces données sont stockées. Dans l’environnement de conception de système, les objectifs de conception sont stockés dans l’entité Exigences système et les solutions de conception sont regroupées dans la solution physique de chaque Alternative Système. Nous retrouvons également de données pertinentes dans les concepts qui sont associés aux systèmes et alternatives système. Dans l’environnement de planification, les objectifs de planification ainsi que les valeurs effectives sont comprises dans les projets ainsi que dans les tâches TE et TD.

Certaines données peuvent être utilisées sans modification et d’autres nécessitent un traitement afin de fournir un indicateur plus significatif et/ou agrégeant plusieurs données. Par exemple, la mesure de compatibilité entre une alternative système et des exigences système exprimées, proposée ultérieurement dans la section 6.2.4, est un indicateur qui est obtenu grâce à un traitement sur les données de conception.

Les indicateurs et plus généralement les tableaux de bord nécessaires à la prise de décision sont variables en fonction du système à concevoir et du projet de conception associé. Néanmoins, nous proposons quelques indicateurs utilisables en toutes circonstances :

 la faisabilité et la vérification des entités suivies,

 le coût système et le coût projet prévisionnel et effectif,

 l’avancement de la conception et de la planification,

 le risque système et projet.

Un indicateur mesure un objectif à suivre, il doit donc être fiable et inciter à décider. De plus il doit être facile à construire et actualité à temps. Enfin, il doit être réalisable à un coût acceptable. Les

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formes d’indicateurs les plus courantes sont donc connues et peuvent aisément être mises en œuvre. Il peut s’agir :

 d’écarts, il s’agit de comparer une valeur réelle avec une valeur attendue (par exemple une valeur physique du système peut être comparée avec l’exigence système correspondante),

 de ratios, c'est-à-dire un rapport entre grandeurs significatives. Un ratio seul n’a pas de signification propre, c’est son évolution au cours du temps qui est significative,

 de graphiques offrant une bonne visibilité sur l’évolution des situations et des indicateurs (par exemple, le suivi du coût du projet),

 des clignotants permettant de générer des alertes en cas de dépassement d’un seuil fixé (par exemple, la faisabilité et la vérification peuvent être traités de cette manière). Les indicateurs peuvent être représentés de différentes manières en fonction de ce qu’ils représentent. Nous proposons ci-dessous quelques exemples de représentation d’indicateurs :

 les indicateurs de type tout ou rien. Ce sont les indicateurs les plus élémentaires. Ils ne délivrent qu’une information binaire : oui/non, bon/mauvais, etc. Ils sont essentiellement utilisés pour les alarmes ;

 les indicateurs de type tout ou rien avec seuil d’alerte. Ils sont similaires aux précédents mais présentent un état supplémentaire à l’approche d’un seuil critique. C’est le principe du feu tricolore qui passe à l’orange avant de passer au rouge (indicateur a figure 4.2) ;

 les indicateurs de type mesure. Ils sont utilisés pour suivre l’évolution d’une entité et différentes présentations sont possibles comme :

o le thermomètre ou la jauge. Comme tout indicateur, un seuil doit être fixé. Selon le type de mesure, le seuil d’alerte peut être défini comme « niveau bas » ou comme « niveau haut ». Le thermomètre change alors de couleur. Pour une meilleure anticipation, un second seuil intermédiaire peut être fixé (indicateur b figure 4.2) ;

o le tachymètre qui présente l’évolution de la mesure à la manière d’un compteur de vitesse de voiture. Comme l’exemple précédent, un ou deux seuils peuvent être fixés (indicateur c figure 4.2) ;

 les indicateurs de type courbe qui permettent d’évaluer la mesure par rapport à une référence. Cette référence peut être un seuil ou une consigne. Cette consigne sera généralement une projection de tendance pour atteindre l’objectif. Par exemple, une évolution une évolution linéaire des coûts engagés jusqu’à la fin du projet sera une tendance à respecter et tout écart devra être corrigé,

 les indicateurs de type multi-seuils. Ils garantissent la transmission d’un message purement qualitatif comme « très faible-faible-modéré-fort-très fort »,

 les indicateurs complexes. Ces indicateurs, qui peuvent être entre autres des tableaux, des listes, etc., sont plutôt à écarter des tableaux de bord du fait de la quantité d’information importante qu’ils véhiculent.

Quelques exemples de représentation des indicateurs présentés ci-dessus sont proposés sur la figure 4.2.

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Figure 4.2 : Quelques exemples de représentations d’indicateurs

4.2.3 Structuration et maintien du tableau de bord

L’agencement des indicateurs au sein du tableau de bord est d’une importance significative. En effet, même si la préconisation d’un nombre d’indicateurs réduit (entre cinq et dix indicateurs par tableau de bord) cadre l’information transmise au destinataire du tableau de bord, toutes les informations ne sont pas équivalentes en importance. Il est donc nécessaire de mettre en exergue les indicateurs présentant pour l’utilisateur du tableau de bord, le plus d’intérêt. Dans ce sens, Alain Fernandez décompose le tableau de bord en quatre cadrans comme illustré dans la figure 4.3 [Fernandez, 2005].

Figure 4.3 : Sens de lecture prioritaire d'un écran

Un écran se lit depuis l’angle en haut à gauche vers l’angle en bas à droite. Les cadrans I et II sont donc des zones de première importance. Les informations d’alertes essentielles ou les indicateurs les plus cruciaux seront placés dans ces deux cadrans en priorité. Les cadrans III et IV sont généralement lus au second coup d’œil. Les indicateurs moins critiques seront donc naturellement placés dans ces zones.