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3.1 Circuits Josephson à base d’irradiation ionique

3.1.2 Procédé de fabrication

L’irradiation aux ions oxygène à une certaine dose et énergie permet de choisir les propriétés physiques d’un film d’YBCO. Combinée à des méthodes de fabrication de circuit comme la lithographie optique et électronique, l’irradiation ionique permet la fabrication de circuits Josephson. En effet une forte dose d’irradiation permet de rendre isolant le matériau supraconducteur, de cette manière, en protégeant les zones que l’on veut garder supraconductrices, on fabrique les pistes des circuits. Une irradiation à plus faible dose permet d’abaisser la transition en température. On fabrique ainsi des jonctions Josephson. Par rapport à d’autres processus technologiques permettant de fabriquer d’autres types de jonctions (rampe, joint de grain), l’irradiation ionique permet de réaliser des structures planaires (par opposition aux processus multicouches). On bénéficie aussi d’une grande flexibilité dans la conception et fabrication de circuits complexes.

3.1.2 Procédé de fabrication

La fabrication de SQUID HTc avec des jonctions irradiées (Tinchev, 1993) est employée depuis très longtemps (Hollkott et al., 1997) (White et al., 1988) (Kahlmann et al., 1998) (Katz, Sun, Woods, & Dynes, 1998) (Katz, Woods, Dynes, & Sun, 1999) (Katz, Woods, & Dynes, 2000) (Platt, Katz, Dynes, & Berkowitz, 1999) (Kang et al., 2002), (Blamire et al., 2002).

Nous travaillons avec des ions oxygène (Chen, Cybart, & Dynes, 2004) (Bergeal et al., 2005) (Bergeal, Lesueur, Faini, Aprili, & Contour, 2006) (Lesueur et al., 2007) (Bergeal et al., 2007) mais d’autres ions peuvent être utilisés, comme par exemple l’Hélium (He) qui permet d’obtenir une meilleure résolution dans les dimensions de jonctions (C. H. Wu, Jhan, Chen, & Jeng, 2013) (Cybart et al., 2015). Cependant les équipements qui permettent d’utiliser les ions He sont peu accessibles.

62 Le procédé utilisé pour fabriquer nos circuits a été décrit en détail dans plusieurs manuscrits, (N. Bergeal, 2005), (T.Wolf, 2010), (S.Ouanani, 2015). Il se résume en trois étapes. Pendant ces étapes on définit les connections électriques, les pistes supraconductrices des circuits et les jonctions Josephson. La Figure 32 montre un schéma des différentes étapes de fabrication (Saphia Ouanani, 2015).

Figure 32 : Schéma montrant les différentes étapes de fabrication de nos circuits (Saphia Ouanani, 2015). Les wafers utilisés sont des films minces commerciaux achetés à la société CERACO ( http://www.ceraco.de ). Ils sont composés d’un substrat en saphir, sur lequel on épitaxie une couche mince d’YBCO de 150 nm. L’YBCO est recouvert d’une couche de 100 nm d’Or. Un exemple est représenté à la Figure 32 a). En partant d’un film vierge, la première étape de fabrication des circuits consiste à réaliser une photolithographie pour protéger avec une résine, SPR 700, en b) ce qui seront par la suite les plots de connections électriques. Une gravure par faisceau d’ions (IBE) Argon enlève l’or des parties non protégés par la résine. Ceci correspond aux étapes c) et d).

Une deuxième photolithographie permet de protéger les futures pistes supraconductrices, le wafer sera ensuite irradié avec des ions oxygène d’énergie 110 keV et une dose de 5.1015

ions/cm². Dans le schéma ceci correspond aux figures e) et f). Cette étape peut être remplacée par une gravure IBE, avec des paramètres légèrement différents de celle réalisée pour graver les connexions en or. Les propriétés des dispositifs utilisés ne sont pas modifiées en remplaçant l’irradiation par la gravure. Nous avons réalisé des wafers avec les deux méthodes, dont nous discuterons plus loin.

63 La dernière étape consiste à réaliser les jonctions. On utilise une lithographie électronique, afin d’avoir la résolution nécessaire pour faire des jonctions de l’ordre de 40 nm. Cette fois ci le wafer entier est à nouveau recouvert d’une résine protectrice, et des ouvertures sont faites aux endroits destinés à être des jonctions comme on peut le voir en g). Une deuxième irradiation aux ions oxygène à plus faible dose 3.1013 ions/cm² et même énergie définit les jonctions et le circuit final est comme celui représenté en h).

La Figure 33 (Sirena et al., 2009) montre plus en détail la dernière étape de fabrication : celle des jonctions. La longueur d est l’épaisseur d’ouverture de la résine qui définit la jonction. A cet endroit des défauts seront créés par l’implantation des ions oxygène et ces défauts seront à l’origine d’une modification des caractéristiques électriques de l’YBCO non protégé par la résine. On voit sur la figure que le profil des défauts en noir n’a pas une forme rectangulaire comme l’ouverture de la résine protectrice, mais plutôt une forme arrondie et d’épaisseur supérieure à d.

Ce profil est typique de l’irradiation ionique. Après fabrication, on retrouve de la dispersion des caractéristiques des jonctions irradiées. Des défauts dans le film d’YBCO peuvent être à l’origine, ainsi que des défauts dus à la lithographie. En particulier des défauts de verticalité ou de rugosité du flanc de résine peuvent contribuer à la dispersion des caractéristiques, compte tenu des faibles dimensions mises en jeu.

Figure 33 : Schéma de l’étape de fabrication d’une jonction irradiée aux ions oxygène (Sirena et al., 2009). Un fil mince d’YBCO est déposé sur un substrat et protégé par une résine. Une lithographie électronique permet de faire des ouvertures dans la résine. Une irradiation aux ions oxygène permet d’introduire des défauts à l’endroit où la résine ne protège pas le film d’YBCO, ce qui a pour résultat un abaissement de la température critique du film à cet endroit. De cette manière on fabrique des jonctions Josephson irradiées.

La dispersion des caractéristiques des jonctions dépend de la dose d’irradiation, mais aussi de la géométrie des jonctions. Lorsque l’on irradie une fente avec des ions oxygène, le nombre moyen d’atomes déplacés s’exprime selon la formule (Bergeal, 2005) :

𝑑𝑝𝑎(𝑥) = 𝐴. 10

8 𝑐𝐷 𝜁

𝑒

𝑥2

2𝑑2 ( 117 )

A est un facteur géométrique de la jonction (A~0.8), c correspond au taux de défauts, 𝜁 est la densité d’YBCO, D la dose d’irradiation 𝑑 l’épaisseur de la fente et x représente une variation spatiale. La résistivité de la jonction est donnée en fonction du nombre d’atomes déplacés 𝑑𝑝𝑎 et de la resistivité avant irradiation 𝜌0 :

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𝜌 = 𝜌

0

(1 + 100𝑑𝑝𝑎 + 4000𝑑𝑝𝑎

2

)

( 118 )

Des simulations de type Monte Carlo, réalisées à l’aide d’un logiciel, permettent de prévoir le profil de défauts crée par irradiation. L’outil SRIM (Stopping and Range of Ions in Matter) (Ziegler & Biersack, 2009), permet de connaitre la distance d’arrêt, ainsi que les interactions d’un ion qui arrive sur un matériau donné, avec une certaine vitesse et énergie. La Figure 34 (M. Malnou, 2015) illustre des simulations SRIM. A gauche nous pouvons voir la projection sur un plan (correspondant au plan (z y) sur la Figure 33) des trajectoires des ions oxygène d’énergie 110 keV implantés dans un film d’YBCO de 70 nm d’épaisseur, déposé sur un substrat de Saphir. Comme on peut le voir, les ions implantés interagissent dans le film mince d’YBCO et le traversent. A droite de la figure, une autre simulation montre le profil de défauts, exprimé en nombre moyen d’atomes déplacés dpa. Les figures du dessus ( a) et b)) montrent le profil d’une fente irradiée à gauche et d’un trou irradié à droite, vus du dessus selon le plan (x y) de la Figure 33. En bas de ces deux figures, nous pouvons voir les profils latéraux, correspondant au plan (z y) de la Figure 33. En pointillés est représenté la limite entre le film mince d’YBCO et le substrat en saphir.

Figure 34 : Simulations SRIM (M.Malnou, 2015). A gauche est représenté le profil de défauts crée par l’implantation d’ions oxygène de 110 keV d’énergie sur un film d’YBCO de 70 nm d’épaisseur, déposé sur un substrat en saphir. A droite sont représentés les profils d’irradiation d’ions oxygène à 110 keV et une dose de 5.1013 ions/cm² par une fente en a) et c) et par un trou en b) et d). En haut est représentée une vue de dessus, correspondant au plan (x,y) de la Figure 33. En bas nous voyons une vue latérale selon le plan (z y) de la Figure 33.