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Problématiques du VHE chez les immunodéprimés

1. Généralités

1.7. Problématiques du VHE chez les immunodéprimés

Chez les personnes co-infectées VIH/VHE, l'épidémiologie, les facteurs de risque et les complications à long terme semblent moins compris et plus complexes que chez les immunocompétents.

Il existe plusieurs études récentes décrivant la prévalence du VHE en fonction de la zone géographique ainsi que la présence ou non de formes chroniques (tableau 4).

En Europe, elle ne dépasse pas 38.7% en France, montrant des valeurs différentes dans le même pays.

Bien qu'aucune comparaison directe ne soit disponible, en raison de l’absence d’appariement de l’âge, du sexe et des différents tests commerciaux utilisés, il semble montrer une séroprévalence similaire voire accrue de VHE chez les PVVIH, en particulier chez ceux qui ont un faible taux de CD4. Cependant, le risque de chronicité est encore très controversé. M. Riveiro-Barciela en 2014 retrouve 9,2% d’IgG anti-VHE chez les VIH versus 5,2% dans la population générale (p=0,03)(105) et ML. Mateos Lindemann en compte respectivement 10,4% versus 2,8% (107).

En parallèle, certaines études n’ont rapporté aucune différence significative chez ces co-infectés par rapport à la population générale, comme notamment au Royaume-Uni (68) ou en France avec une prévalence de 38.7% d’IgG chez les VIH versus 47.3% chez les donneurs de sang (69).

v A propos des facteurs d’exposition chez les PVVIH et similairement à la population générale, l’âge (69)(96)(106) et la consommation de viande de porc (68) sont des variables à risque de VHE. En 2017, A. Rivero-Juarez rapporte une association entre les VIH/VHE et le milieu rural (108).

v Concernant l’immunité, le faible taux de CD4 + a été associé à un risque plus élevé de VHE (106).

Une étude espagnole retrouve des IgG anti-VHE plus fréquemment chez les patients dont le nombre de CD4 était £ 500 cellules/mm3 en comparaison aux VIH avec une immunité plus élevée (109). A noter qu’une étude récente a rapporté le cas d'une femme avec un taux de CD4 <200 cellules/ mm3 et qui est restée virémique, en dépit d’une réponse immunitaire restaurée (95). Ce cas démontre que le VHE peut persister chez les individus immunodéprimés, quel que soit leur statut immunitaire.

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v Plusieurs rapports, ont montré une association entre cirrhose et VHE chez les PVVIH. GK. Jaqjit- Singh décrit un patient pour lequel un cas de cirrhose cryptogénique était probablement attribuable au VHE (110). Deux études espagnoles ont trouvé une prévalence accrue de cirrhose chez les VHE/VIH (105)(103). K. Neukam, en 2013 décrit, chez les PVVIH fortement immunodéprimés et atteint de VHE chronique, que la progression de la cirrhose peut être encore plus rapide que celle observée chez les co-infectés VHB/VHC/VIH. Il parle même de maladie opportuniste (94).

Tableau 4 : Etudes européennes de séroprévalence chez les PVVIH :

Pays Années SéroPréV. Tests dg

ARN RT- PCR Formes chroniques FDR significatif (p <0.05) Biblio France/ Toulon, Oise 2010 9% IgG dans le sud et 3% IgG dans le Nord. EIAgen, Montréal 2 P Non Gradient Nord/Sud (111) France/ Marseille 2011 4,4% IgG et 1,6% IgM

EIAgen, Italie 1 P 1 P Cirrhose (112)

France/

Paris 2012 1,5% IgG EIAgen, France 0 Non Ns (113)

France/

Toulouse 2016

38.7% IgG et

3.6% IgM Wantai, Chine 1 P NC Age (69)

Espagne 2012 9% IgG Bioelisa, Spain 3 P NC

Cirrhose (23 % VHE + vs 6% non

cirrhotique)

(103)

Espagne 2014 26%IgG Wantai, Chine 1 P Non Age, sexe et CD4 faibles (106)

Espagne 2015 9,8% IgG Wantai, Chine 5P Non Age (96)

Espagne 2017 Incidence : 7.2 cas pour 100

patients/an Milieu rural (108)

Angleterre 2011 9,4% IgG Wantai, Chine 0 Non Porcs et patients non blancs (68) Séroprev : Séroprévalence des IgG ou IgM anti-VHE, Tests Dg : Tests diagnostiques, p : puissance, P : patient, Ns : non significatif. NC : non calculé.

35 v Les manifestations extra-hépatiques ou la progression vers la chronicité du VHE n'ont pas été rapportées à la même fréquence que dans d'autres formes de déficit immunitaire. Le premier cas de VHE chronique chez un VIH a été rapporté par HR. Dalton en 2009 (93), suivi de quelques séries de cas notamment en France (91)(114), en Espagne (94), et en Allemagne (115). Aux USA, une étude à grande échelle et publiée en 2015 n'a montré qu'un seul patient avec une forme chronique (95).

v Enfin, il existe un risque de faux négatifs avec la sérologie. La séroconversion anti-VHE peut être retardée ou absente pendant la phase d'infection aiguë chez les patients VIH, avec un faible taux de CD4. Une étude publiée par P. Colson en 2011, décrit un patient VIH avec des CD4 à 77 cellules/mm3 qui, suite à un bilan hépatique perturbé, réactive un VHB, et est diagnostiqué VHE positif avec IgM +, IgG negatif et ARN RT-PCR positif (116).

F. Abravanel en 2016 retrouve une réponse humorale plus faible chez les PVVIH comparativement aux donneurs de sang (69).

Néanmoins, les études qui ont effectué la détection de l'ARN du VHE par PCR ont montré des résultats plus faibles que ceux évaluant la sérologie (71).

1.7.2. Transplantés d’organes solides (SOT) et VHE.

Pour les receveurs de greffes d’organes solides, l’incidence de l’ARN VHE en Europe est entre 0,9 à 3,5%, avec des infections qui deviennent chroniques dans près de 60% d'entre elles (98).

La voie de transmission est principalement zoonotique mais il existe des cas par transfusion (117) et allogreffe (118).

Ces patients sont à risque de développer une forme chronique. En France, N. Kamar a rapporté 6,5 % de SOT HEV ARN positif dont 57% ont développé une infection chronique (119). Une autre étude en 2013 portant sur des transplantés rénaux rapporte 80% de formes chroniques avec un taux de clairance de VHE de 54% après une diminution de la dose d'immunosuppresseurs (123).

Selon M. Riveiro-Barciela, les bénéficiaires de SOT qui ont une cirrhose du foie sont sensibles au VHE, surtout si la cirrhose apparait après la transplantation (105).

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L'utilisation de tacrolimus est également connue pour être un facteur de risque de VHE chronique chez les patients en post-transplantation (98).

A contrario, C. Buffaz a conclu, dans une étude de 2014, que les patients transplantés du foie peuvent ne pas être particulièrement enclins à développer des formes graves(120).

1.7.3. Troubles hématologiques et VHE.

Pour finir, les patients atteints de cancers hématologiques sont à risque de développer des formes graves et chroniques d’hépatite E.

En Allemagne, l’étude d’un homme atteint d’une leucémie lymphoïde chronique et qui a développé une IHA sur VHE ayant entrainé son décès, a été publié par S. Pfefferle en 2012 (121).

En conclusion, le diagnostic parait plus difficile et les techniques biologiques moins fiables chez

certains immunodéprimés tel que les PVVIH, les receveurs de greffes d’organes solides et les patients porteurs de cancers hématologiques. De plus, les formes cliniques aiguës graves, chroniques et les formes sévères évoluant vers une fibrose semblent plus fréquentes chez ce groupe à risque.

Enfin au sein de ces populations de malades, les perturbations du bilan hépatique sont fréquentes et de multiples étiologies (autres infections, effets secondaires.) sont possibles, faisant suggérer que le VHE est probablement sous diagnostiqué.

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1.8.

Comorbidités et diagnostic différentiel.

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