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Principe de fonctionnement des détecteurs Silicium 23

1.2 Le multi-détecteur AGAT

1.2.5 Les détecteurs Silicium

1.2.5.1 Principe de fonctionnement des détecteurs Silicium 23

Les détecteurs utilisés lors de cette expérience sont des détecteurs formés de semi-conducteurs en silicium. Un semi-conducteur est un matériau dont la conduc-tivité électrique est à mi-chemin entre celle des métaux et celle des isolants. Dans les solides, les niveaux d’énergie sont organisés en bandes. La figure 1.2.8 montre les bandes d’énergies pour les différents types de solides.

Figure 1.2.8 – Bandes d’énergie pour différents types de solides

La bande énergétique occupée la plus élevée est dite bande de valence. La bande de conduction est quant à elle occupée par les électrons libres qui ne participent pas aux liaisons covalentes et donc se déplacent plus librement : cette bande est vide pour les isolants. On voit sur la figure 1.2.8 que les bandes d’énergies sont séparées par des bandes interdites appelées gaps. Ces gaps sont larges pour les isolants, petits pour les semi-conducteurs (1.1 eV pour le silicium) et inexistants pour les conducteurs.

Le principe de fonctionnement des détecteurs à semi-conducteurs est basé sur la formation d’une jonction P-N. Une jonction P-N est créée par la juxtaposition d’un semi-conducteur dopé N et d’un semi-conducteur dopé P. Le dopage d’un semi-conducteur est un processus qui consiste à ajouter des impuretés de sorte à diminuer ou augmenter la largeur de la bande interdite. Le dopage N consiste à augmenter la population des porteurs de charges négatives (donneur d’électrons) donc on ajoute des atomes pentavalents (phosphore, arsenic , ...).. Un dopage de type P permet d’ajouter des porteurs de charges positifs appelés trous (accepteurs d’électrons), c’est-à-dire des atomes trivalents (Aluminium, Bore, ...).

La figure 1.2.9 montre le principe de la jonction P-N. Au niveau de cette jonction, il y a diffusion et recombinaison des porteurs de charges. Des électrons libres de la zone N sont recombinés avec des trous de la zone P, il y a disparition des charges

Figure 1.2.9 – Détecteur semi-conducteur avec polarisation (à droite) et sans po-larisation (à gauche)

mobiles. Dans cette zone appelée zone de transition, ou zone de déplétion, il ne reste que les ions fixes, positifs dans la zone initialement N et négatifs dans la zone initialement P. L’existence de ces charges dans cette zone de déplétion implique la présence d’un champ électrique qui va ralentir la diffusion à cause des forces de répulsion F = q ∗E comme on le voit sur la figure 1.2.9. Ce champ joue le rôle de barrière qui empêche les porteurs de charges libres de traverser la jonction. On applique une tension de polarisation inverse (+ sur le N, - sur le P) de façon à élargir la zone de déplétion.

Lorsqu’un ion pénètre la zone déplétée du silicium, il va créer des paires électrons trous tout au long de son parcours d’arrêt. Le nombre de charges NQ créées par un ion incident d’énergie Ec s’arrêtant dans la zone déplétée est :

NQ = Ec

 (1.2.7)

Avec  l’énergie de création de la paire électron-trou. Pour le silicium  = 3.6 eV. Cette valeur prend en compte la taille du gap et le fait que certains processus (piégeage, excitation thermique du réseau, ...) empêchent la création de paires électron-trou.

Le nombre de charges collectées est donc proportionnel à l’énergie cinétique de l’ion incident.

1.2 Le multi-détecteur AGAT

1.2.5.2 Détecteurs silicium planaires

Nous utilisons trois types de détecteur silicium ; des détecteurs ORTEC, Can-berra et EPI. La résolution de ces détecteurs est typiquement de l’ordre de 20 keV à une énergie de 3-4 MeV.

Le détecteur ORTEC est un détecteur à semi-conducteur implanté et passivé de la série Ultra thin. La surface du silicium de type N est passivée par un dépôt de SiO2. Une implantation de bore forme la zone P et une implantation d’arsenic du côté opposé forme la zone N. Le détecteur Canberra est aussi un détecteur à semi-conducteur implanté et passivé mais carré et composé de 4 pistes.

Le détecteur EPI est un détecteur à barrière de surface, épitaxié, c’est-à-dire que la zone P est réalisée par un mince dépôt d’or à la surface du silicium, fabriqué au service semi-conducteur de l’IPNO. La figure 1.2.10 montre la méthode de fabrication de l’EPI [55]. Le détecteur est réalisé à partir d’un substrat de silicium de type N de 300 µm d’épaisseur. Sur une des deux faces une fine couche d’or (~ 50 nm) est déposée par évaporation afin de former une jonction PN. Sur l’autre face, on réalise un dépôt d’aluminium afin de former une électrode avec un bon contact ohmique.

Figure 1.2.10 – Fabrication de l’EPI

Il existe deux façons d’exploiter les détecteurs silicium. La première consiste à utiliser la charge totale. La deuxième consiste à utiliser le signal de courant.

Le signal de charge

Le nombre de charges créées et collectées lors de l’arrêt d’une particule chargée dans un détecteur silicium est proportionnel à l’énergie cinétique de la particule. Dans notre cas, étant donné que nous sommes en cinématique inverse la vitesse est

pratiquement la même pour tous les fragments. Le nombre de charges collectées sera donc directement proportionnel à la masse du fragment. Le signal de charge nous permet donc d’identifier les masses des différents fragments.

Figure 1.2.11 – Spectre en énergie du détecteur CHn+.

La figure 1.2.11 montre le spectre en énergie du détecteur couvrant les trajec-toires des fragments C+/CH+/CH+

2 /CH3+/ lors de la collision CH+

4 → He. Il est construit à partir des amplitudes des signaux de charge. La résolution du dé-tecteur de l’ordre de 50 keV nous permet de résoudre parfaitement les masses des fragments.

Le signal de courant

On peut exploiter le signal de courant issu de ces détecteurs. En physique nu-cléaire, ce signal est utilisé pour déterminer la nature de la particule ionisante. C’est l’aspect dynamique de la collection de la charge qui va permettre de ré-soudre les particules. Le phénomène est expliqué en détail dans les articles Chabot et al. [56], Seibt et al. [57] et Martinet et al [58].

Deux effets sont à la base des variations des formes de courant. Le premier concerne la profondeur d’arrêt du projectile dans le détecteur. En effet, dans un semi-conducteur, d’épaisseur e, une charge déposée à une profondeur d met un temps t à rejoindre sa face de collection qui se trouve à la distance d et e-d pour respectivement les électrons et les trous. Lors de l’arrêt de l’ion dans un détecteur, les charges sont distribuées le long de la trace de façon inhomogène. Le maximum de charge est créé proche du point d’arrêt. Le temps de collection des charges est par conséquent au premier ordre proportionnel à la distance d’arrêt. Enfin, puisque la distance d’arrêt est reliée au numéro atomique de l’ion, pour une énergie donnée, le temps de collection renseigne sur la particule qui est détectée. Un exemple de résolution du type de particule exploitant la première de ces propriétés est donné sur la figure 1.2.12 et est issu d’expériences auxquelles j’ai participé dans le cadre de la R&D Gaspard (Assié et al. [59]).

1.2 Le multi-détecteur AGAT

Figure 1.2.12 – Spectre brut de l’amplitude maximal en fonction de l’énergie avec un détecteur silicium de tension de polarisation de 275V.

La figure 1.2.12 représente l’amplitude maximale du signal de charge en fonction de l’amplitude maximale du signal courant pour le proton, deuton, triton et alpha. Grâce à la méthode d’analyse de forme on arrive à distinguer ces particules jusqu’à des énergies de 3 à 4 MeV. Le second effet influençant la forme des impulsions de courant issu des détecteurs silicium concerne la densité de charge dans la trace, qui si elle est importante, crée un écrantage du champ électrique ralentissant la collection des charges. Cet effet a été mis à profit pour résoudre l’état de fragmen-tation d’un projectile moléculaire (par exemple CH versus C+H). La figure 1.2.13 donne un exemple d’application de cette propriété à la détection de molécule de type Cn[56].

Cette propriété, pour ce qui concerne la résolution des fragments CHy, n’est pas opérante due au bruit du détecteur qui est à un ordre de grandeur supérieur à l’effet attendu.