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Triple-pointe

DIAGNOSTIQUES MONOPOINTES AXÉES TRIPLE-POINTES DOUBLE-POINTES MONOPOINTES DÉJETÉES

V.2. Principaux résultats archéologiques

V.2.1 Un décalage frappant entre modèle expérimental

et réalité archéologique

À notre sens, le résultat archéologique le plus étonnant après observation de notre matériel est la quasi absence d’endommagements témoignant de l’utilisation des armatures en tête de hampe. Plusieurs questions se posent alors. Tout d’abord, cette absence témoigne-t-elle de l’absence d’armatures en tête de hampe sur les lèches mésolithiques ? Ou bien peut-on imaginer que les armatures axiales mésolithiques ont été utilisées de telle manière qu’elles n’ont subi que très peu de traumatismes en comparaison de notre modèle expérimental ? Enin, dans le cas où l’on réfuterait ces deux hypothèses, on peut se demander si les monopointes axées de Farman et de la Grande-Rivoire de même que les triple-pointes de Farman ont eu une autre destinée fonctionnelle que les monopointes déjetées et double-pointes de ces deux sites (dont le fonctionnement en armature latérale

V.2.1.1 Pas d’armatures axiales au sein des assemblages

archéologiques étudiés ?

Il est peu probable que les monopointes axées et triples pointes des assemblages étudiés aient servi en armatures latérales. En effet, celles-ci ne présentent pas les endommagements caractéristiques des armatures latérales expérimentales. De plus, quelques unes d’entre elles portent des fractures transversales témoignant bien de leur emmanchement en partie axiale de hampe. Ainsi, la présence d’armatures axiales apparaît de manière fugace au sein de nos assemblages.

V.2.1.2 Un biais lié aux tactiques de chasse ? Un biais lié à la colle ?

On peut se demander alors si ces armatures axiales ont été utilisées exactement comme nos armatures axiales expérimentales. Nous avons vu que les armatures axiales expérimentales s’endommageaient essentiellement lorsque la lèche atteignait un os et que lorsque celle-ci n’atteignait que les parties molles (comme la panse), les armatures s’endommageaient rarement. Puisque les armatures axiales archéologiques sont peu endommagées, on peut alors se demander si la tactique de chasse employée par ces chasseurs ne privilégiait pas l’atteinte des parties molles (comme l’atteinte redoutable par l’arrière-train bien connue en chasse à l’arc). Il reste tout de même que dans les mêmes conditions de tir (les parties molles n’étant pas privilégiées), notre modèle expérimental coïncide bien avec la réalité archéologique pour les armatures latérales et disto-latérales et pas pour les armatures axiales.

Comme nous l’évoquions plus haut, il serait toutefois nécessaire de réaliser des expérimentations avec d’autres types de colle ain d’observer si les pointes axiales peuvent présenter des endommagements moindres à l’impact que ceux particulièrement traumatisants que nous avons produits lors de nos expérimentations.

V.2.1.3. Un destin fonctionnel diférent pour les pointes et pour les barbelures ?

Lorsque ce biais possible lié à la colle aura pu être éliminé, le fait que les monopointes axées et triples pointes des assemblages étudiés ne portent pas (ou presque) de traces d’impact a contrario des monopointes déjetées et des double-pointes pourraient indiquer que ces deux catégories d’armatures n’ont pas été emmanchées sur les mêmes lèches. Cela pourrait alors être l’indice d’utilisation de lèches différentes pour des chasses

Un autre indice de segmentation des chaînes opératoires cynégétiques apparaît à Creysse où toutes les armatures fabriquées sur place n’ont pas été réintroduites au sein du site au retour de la chasse. On peut alors imaginer que certains lieux étaient dédiés plus que d’autres à la fabrication des microlithes ou bien à la boucherie au retour de la chasse.

V.2.2 Une simpliication de la mise en forme au cours

du Sauveterrien

L’analyse des assemblages du Sauveterrien ancien de Creysse et du Sauveterrien récent de la Grande Rivoire nous a permis de mettre en évidence une évolution remarquable de la mise en forme des triangles scalènes ayant servi comme barbelures. La simpliication est lagrante : tandis qu’au Sauveterrien ancien, on obtient une double pointe au moyen de deux troncatures (obtenues par une ou deux fragmentations par la technique du coup de microburin), au Sauveterrien récent, on peut s’affranchir de la mise en forme d’une grande pointe, inutile dans le cadre d’un fonctionnement en barbelure, et on peut mettre en forme deux armatures latérales à partir d’un seul support (ig. 59).

Ce schéma fait écho au modèle évolutif concernant les triangles sauveterriens décrit par N. Valdeyron (Valdeyron 1994, Barbaza et Valdeyron 1991) qui observe une tendance à leur allongement au cours de la période. Ainsi les triangles du Sauvetterrien récent façonnés avec technique du coup de microburin sont mis en forme dans la partie mésiale du support. L’angle entre la grande base et la petite base est alors très ouvert. A contrario les triangles du Sauveterrien récent ne sont plus mis en forme dans la partie mésiale du support. Le tailleur exploite l’ensemble de la longueur du support et l’angle entre la grande base et la petite base se ferme alors. L’allongement des triangles au cours du Sauveterrien serait donc corrélé à l’évolution de leur mode de façonnage.

Le fonctionnement même de la lèche composite à armatures latérales, très consommatrice en barbelures comme nous l’avons vu, aurait ainsi pu pousser les chasseurs mésolithiques à simpliier leurs schémas de mise en forme des microlithes et à améliorer leur rendement de production en abandonnant la technique du microburin (source importante d’accidents) et en produisant même parfois deux microlithes à partir d’un seul support lamellaire. Il conviendra bien sûr de vériier cette dernière pratique sur d’autres assemblages puisque, pour le moment, nous ne l’avons mise en évidence qu’à la Grande Rivoire.

Monopointe déjetée