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CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.2 L’innovation ouverte « IO »

2.2.2 Les pratiques d’IO sortantes

Les pratiques d’IO sortantes (« outbound practices ») valorisent à l’externe les connaissances développées à l’interne (Gassmann et coll. 2004, Enkel et coll. 2009, Huizingh 2011). Ces pratiques sont divisées en sept catégories : la cession de licences de PI et de brevets, l’offre de service de R-D à de tierces parties, les entreprises issues de l’essaimage, l’incubation et la création d’entreprises, la coentreprise avec des partenaires externes, la participation à la normalisation publique et les dons à des organismes communautaires ou sans but lucratif. Ces pratiques sont définies dans les paragraphes suivants.

La cession de licences de PI et de brevets (« IP out-licensing and patent-selling ») est une

pratique qui vise à l’obtention de revenus complémentaires pour les innovations que possède l’entreprise (Gassmann 2006, Lichtenthaler et Erns 2007, Van de Vrande et coll. 2009). Les entreprises ayant différents BM peuvent profiter de la PI et des brevets en payant pour leur utilisation (Chesbrough 2006a, Van de Vrande et coll. 2009, Chesbrough et Brunswicker 2014). Mais Enkel et coll. (2009) ont trouvé que la proportion des entreprises qui ont une politique de cession de licences est inférieure à celle des firmes qui ont développé une politique d’acquisition de licences. Par exemple, dans le secteur des grandes entreprises, le niveau d’importance pour ce type de pratique est très faible (Chesbrough et Brunswicker 2013). Dans le cas des PME, en particulier dans le secteur pharmaceutique, le développement de cette pratique n’est pas une priorité, mais elles finissent par le faire en raison du manque de moyens pour construire leur propre portefeuille (Kern et Van Reekum 2012).

L’offre de service en R-D à de tierces parties (« Providing R&D services to third parties ») est

une pratique très largement utilisée par les entreprises afin de permettre à de tierces parties d’exploiter un produit immédiatement commercialisable (Chesbrough et Brunswicker 2014). Mais le travail des tierces parties ne se limite pas à recevoir le produit, car l’utilisation de cette pratique

nécessite une réciprocité de tous les acteurs dans le processus en permettant de profiter au maximum de l’innovation (Howells 2006). L’un des principaux problèmes de cette pratique vient du fait qu’il faut préciser tous les droits de PI associés au produit, particulièrement en ce qui concerne les applications du savoir-faire et les capacités de R-D (Pisano 1990). Si tous les éléments vont de pair avec le BM, la capture de valeur augmente grâce à cet actif complémentaire (Chesbrough et Rosenbloom 2002). Chesbrough et Brunswicker (2014) démontrent que cette pratique est l’une des plus importantes pour de nombreuses grandes entreprises.

Les entreprises issues de l’essaimage (« spin-offs ») permettent la création d’une nouvelle

structure d’affaires séparée de l’organisation mère (Tübke 2005). Les motivations derrière ce processus peuvent être la commercialisation des résultats de la R-D qui n’ont pas été transférés avec succès à l’interne au sein des unités d’affaires de l’entreprise même ou encore, l’externalisation des activités qui ne font pas partie du noyau d’affaires de l’entreprise (Ronhbeck et coll. 2007). Autrement dit, des entreprises exploitent la technologie par le biais de la création de nouvelles entreprises, en tirant parti des connaissances internes (Van de Vrande et coll. 2009). Chesbrough et coll. (2006) ont exploré la performance des laboratoires de recherche de Xerox pendant 20 ans ainsi que les entreprises issues de l’essaimage, telles 3Com Corporation et Adobe Systems inc., de même que leur évolution dans le temps. En outre, Walter et coll. (2006) ont analysé les entreprises qui sortent d’un environnement universitaire et de quelle manière celles-ci sont influencées positivement par les réseaux auxquels elles appartiennent. Finalement, en comparant l’importance de cette pratique par rapport aux pratiques d’IO sortantes, l’étude de Chesbrough et Brunswicker (2013) montre que cette pratique est la moins importante chez les entreprises de grande taille.

L’incubation et la création d’entreprises (« Corporate business incubation and venturing »)

constituent une pratique qui se caractérise par l’offre d’un appui aux idées potentiellement rentables qui proviennent des employés de l’entreprise (Chesbrough et Brunswicker 2014). Ces nouvelles unités d’affaires sont généralement le résultat de projets de recherche à l’intérieur de l’entreprise et s’ils sont bien ciblés, ces résultats peuvent devenir de nouveaux objectifs stratégiques pour l’entreprise (Grimaldi et Grandi 2005, Narayanan 2009). Campbell et coll. (2003) ont évalué ce phénomène et ont trouvé que la grande majorité des incubations échouent en raison des objectifs et des BM mixtes, comme les cas de Diageo, Marks & Spencer et Ericsson. Pour les grandes entreprises, le niveau d’importance de ce genre de pratique est moyen par rapport aux autres

pratiques sortantes. Cependant, en observant le changement d’importance de la pratique au cours d’une période de trois ans, cette pratique se situe au premier rang en termes d’augmentation du niveau de son importance (Chesbrough et Brunswicker 2013).

La pratique de la coentreprise avec des partenaires externes (« Joint-venture activities with

external partners ») regroupe des entreprises qui veulent se concentrer sur un résultat précis

d’innovation sans affecter les activités des sociétés mères en inversant une partie de leurs ressources pour créer une nouvelle organisation (Kogut 1988). Quatre raisons principales expliquent la multiplication de cette pratique : réaliser des économies d’échelle, transférer des compétences et des connaissances, restructurer un portefeuille d’activités, et l’entrée dans de nouveaux marchés à haut risque (Meschi 2009, Triki et coll. 2016). Même si cette pratique s’avère la plus importante pour les grandes entreprises (Chesbrough et Brunswicker 2013), elle comporte un certain nombre de risques, dont une grande instabilité et de faibles performances. Ceci entraîne qu’au cours des cinq premières années de vie de l’entreprise, de 30 % à 50 % des associés vendent, rachètent ou dissolvent la nouvelle entreprise (Triki et coll. 2016).

La participation à la normalisation publique (« Participation in public standardisation ») est

une pratique qui est très souvent utilisée par les entreprises qui participent à l’élaboration des normes, des standards et d’autres réglementations avec la direction des organismes formels de normalisation. Par exemple, l’Organisation internationale de normalisation « ISO » ainsi que les consortiums informels de normalisation, comme l’Organization for the Advancement of Structured

Information Standards « OASIS » (Chesbrough & Brunswicker 2014, Vanhaverbeke et

Chesbrough 2014). La participation dans ces processus est fortement liée à la taille de l’entreprise, car les PME ont peu tendance à participer à ces processus de normalisation en raison des coûts fixes élevés que cela représente ; en revanche, les grandes entreprises peuvent soutenir leur coût et ainsi profiter des externalités positives générées par les normes établies (Swann 2000, Blind 2004).

Les dons à des organismes communautaires ou sans but lucratif (« Donations to commons or nonprofits ») cherchent à soutenir la R-D extérieure par le biais des dons et des biens communs à

des organismes sans but lucratif, comme des collectivités ouvertes (Chesbrough et Brunswicker 2014). Un très bon exemple est le chemin suivi par IBM avec le don de plusieurs de ses brevets de logiciels à la communauté de code source ouvert « open source » ; grâce à cette action, l’entreprise

a augmenté le patrimoine intellectuel pour le développement des logiciels libres et en même temps, elle a gagné une bonne réputation auprès de ses clients (West 2003, Chesbrough 2007b).