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CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.3 La propriété intellectuelle « PI »

2.3.1 Les méthodes de protection de la PI

Les méthodes de protection de la PI permettent à l’entreprise de sécuriser ses innovations. Elles peuvent être classées en méthodes formelles et stratégiques. Les premières sont les méthodes qui confèrent des droits de la PI pour exploiter la création, comme les brevets, les modèles d’utilité, les marques de commerce et les enregistrements de dessins industriels (Armellini 2013). Dans la deuxième catégorie se trouvent des méthodes stratégiques qui concentrent des efforts pour limiter l’accès à l’information (le secret), entraver l’imitation de la part de la concurrence (la complexité de la conception), ou être pionniers (arriver les premiers sur le marché).

Les méthodes formelles

Les brevets sont une méthode de protection de la PI qui établit des droits relatifs à une invention,

en donnant l’exclusivité de son exploitation pour un temps fixé par la loi12 (WIPO 2011). Après l’obtention d’un brevet, l’entreprise peut l’utiliser seule en interne (Grindley et Teece 1997, Ernst 2003) ou faire une cession de la licence (Xie et coll. 2014). Le développement des innovations a fait en sorte que les BM doivent être alignés avec la gestion des brevets pour mieux répondre au marché actuel. Cette méthode de protection est également considérée comme une mesure des résultats de l’innovation, particulièrement comme une mesure d’innovations significatives (Beneito 2006).

Par exemple, Royalty Pharma a développé son BM autour de la commercialisation de brevets, c’est-à-dire que l’entreprise ne développe ni ne fabrique de produits, mais agit comme un courtier de brevets. La nouveauté de leur BM réside dans le paiement anticipé de bénéfices futurs. Plus

11 idem

précisément, Royalty Pharma permet au fabricant ou au détenteur d’un brevet d’obtenir des fonds d’investissement en avance, en permettant de réduire les risques divers dans le développement ainsi que de donner des paiements raisonnables aux propriétaires des brevets (Lim et Suh 2016). Motohashi (2016) souligne la relation qui existe entre le fait de détenir des brevets et la survie des grandes entreprises (plus de brevets, plus de probabilité de survivre) ; et dans le cas des petites entreprises, plus de brevets, plus de probabilité de croissance. Les brevets ont également une incidence dans des décisions prises par les entreprises. Au Canada par exemple, les exportations manufacturières sont effectuées essentiellement vers des pays qui présentent une meilleure protection de la PI (Rafiquzzaman 2002).

Une autre méthode de protection est le modèle d’utilité. Cette méthode offre la protection d’un objet ou d’un procédé industriel nouveau pour une période de temps plus court que les brevets et sans respecter des conditions de brevetabilité13 (WIPO 2011). Tout comme les brevets, les modèles d’utilité comptent aussi comme une mesure d’innovation incrémentale (Beneito 2006). Dans les pays industriels, en particulier pour les PME, où la disponibilité des ressources est limitée, les modèles d’utilité deviennent des outils très efficaces de protection contre la copie (Suthersanen 2006).

La marque de commerce est l’insigne associé à un produit ou à un service, en vue de le distinguer

de la concurrence14. La marque de commerce est un actif incorporel de l’entreprise, comme son nom, le sigle, le dessin, l’emblème, entre autres15 (WIPO 2011). Une analyse suffisante du marché permet d’utiliser cette méthode pour attirer un plus grand nombre des clients, grâce à des dessins et des symboles (Mendoça et coll. 2004). La marque de commerce aussi est une source directe de revenus, car elle peut être utilisée sous forme de licence (Mendoça et coll. 2004, Calboli 2007, Calboni 2016).

L’enregistrement de dessins industriels cherche à protéger les caractéristiques ornementales et

non fonctionnelles d’un résultat d’une activité de conception. C’est un outil à faible coût qui permet

13 Association française de normalisation, 1979. Office québécois de la langue française. Fiche terminologique. Consulté le 17 septembre 2016.

14 Office québécois de la langue française (2007). Fiche terminologique. Consulté le 17 septembre 2016.

15 Institut canadien des Comptables agréés, 2006. Dictionnaire de la comptabilité et de la gestion financière (version 1.2). Office québécois de la langue française. Fiche terminologique. Consulté le 17 septembre 2016.

à une PME de développer et de protéger ses inventions, tant dans des pays développés que dans des pays en voie de développement (WIPO 2011). Ces créations contribuent à la performance de l’entreprise et l’aident à avoir une meilleure position compétitive vers le marché (Gemser et Leenders 2001, Hertenstein et coll. 2004, Chiva et Alegre 2009). Dans certains cas, cette méthode est le seul facteur prépondérant qui lui permet de se différencier de la concurrence, comme cela s’est passé avec le « Apple iMac G3 » et son design révolutionnaire à son époque (Talke et coll. 2009).

Les méthodes stratégiques

Le secret est une méthode stratégique de protection de la PI où les entreprises conservent de

manière confidentielle l’information privilégiée pour avoir des avantages face à la concurrence. Et même si le secret est la méthode de protection la plus utilisée dans l’industrie de façon générale, dans la littérature, cette méthode reçoit moins d’attention que l’ensemble de toutes les méthodes formelles de protection de la PI (Pooley 2013). Le secret peut également agir dans certains cas comme un facteur d’exclusion, qui fait pencher la balance en sa faveur par rapport au brevet, peu importe la taille de l’entreprise (Arundel 2001). Sans tenir en compte que le secret a aussi des coûts d’infrastructure associés et surtout qu’il génère des limitations au moment de créer d’autres innovations (Lydon 2008).

Une deuxième méthode stratégique est la complexité de la conception, cette méthode de protection tente de freiner la copie d’une innovat ion en faisant de nouveaux dessins et une conception de produits difficiles à reproduire. Arundel (2001) analyse des entreprises innovatrices qui produisent de nouveaux produits ou procédés et montre que la complexité de la conception est une méthode de protection qui est classée au milieu des options dont les entreprises disposent pour protéger leur PI. Des résultats similaires ont été obtenus par Harabi (2002), Sattler (2003), Basant (2004), Mairesse et Mohnen (2004), Gonzalez-Alvarez et Nieto-Antolin (2007).

Finalement, en travaillant sur sa capacité d’arriver premier sur le marché comme méthode de protection de sa PI, une entreprise doit avoir un plan stratégique solide qui lui permet de concevoir des produits de qualité et de les distribuer dans un laps de temps relativement court. En effet, se différencier de la concurrence nécessite d’avoir un minimum de temps entre la production et la consommation (Tersine et Hummingbird 1995, De Treville et coll. 2014, Madsen et Mavraj 2015). Arriver premier sur le marché permet à l’entreprise de profiter des opportunités créées par la

nouveauté et de réagir en premier aux nouvelles exigences de ses clients (Woodruff 1997). Selon Arundel (2001), les entreprises qui produisent de nouveaux produits ou processus considèrent la capacité d’arriver premier comme la méthode la plus effective de protection.

Il est important de souligner que les entreprises protègent leurs innovations en combinant des méthodes formelles ou stratégiques, qui s’adaptent le mieux à leurs besoins (Dahlander et Gann 2010). Hanel (2006) a analysé différents secteurs au Canada de façon globale, en mettant particulièrement l’accent sur les méthodes formelles pour montrer que deux tiers des entreprises manufacturières utilisent des méthodes de protection, et que les mécanismes les plus utilisés dans ce secteur sont l’accord de confidentialité et la marque de commerce. Dans d’autres secteurs, tels que le pharmaceutique, l’agriculture, la construction, la machinerie minière et les équipements électriques, le brevet est privilégié. Et finalement, le secret industriel est utilisé par les secteurs des semi-conducteurs et de l’équipement électronique.