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1.4 La mécanique pour l'étude du pied diabétique

1.4.4 Prévention chez les sujets diabétiques

Plus récemment, et en accord avec les travaux cités ci-dessus, l'équipe de [Wrobel et al., 2014] a développé une semelle ayant la capacité de diminuer les concentrations de contraintes de cisaillements sous le pied. Ils ont prouvé qu'après un court exercice de marche (200 pas), la température cutanée de la voûte plantaire des sujets portant leur semelle était moins élevée que chez les sujets ayant une semelle classique, apportant ainsi possiblement la preuve de la diminution de cisaillement. En France, une startup du nom de [TexiSense, 2016] a développé un tissu instrumenté faisant oce de capteur de pression. Ce tissu a pour vocation d'être utilisé dans divers domaines (lit et fauteuil roulant pour la prévention d'escarre par exemple) mais surtout dans notre cas dans la réalisation de semelles instrumentées pour l'étude et le suivi du pied diabétique. Le patient, recevant une alarme lorsqu'une pression trop importante est relevée, ou encore lorsque la pression reste élevée trop longtemps (immobilité prolongée), pourra intervenir directement en changeant sa position.

Conclusions du chapitre 1

Au cours de ce chapitre, nous avons pu comprendre ce qu'était la pathologie du diabète ainsi que ses complications, en particulier celle du pied diabétique, pouvant mener à un MPP chez environ 25% des patients diabétiques. Celle-ci pourra avoir de graves répercus-sions sur la qualité de vie du patient. En eet la possible formation d'ulcère aura un fort impact sur son espérance de vie, passant à un taux de mortalité de 70% dans les cinq an-nées suivantes. L'apparition d'un ulcère est généralement le résultat de la présence de deux atteintes pathologiques importantes, faisant elles-mêmes suite à l'hyperglycémie chronique. Ces problèmes sont : (i) la neuropathie périphérique, source de perte parfois totale de sen-sation sur les membres inférieurs, et (ii) l'artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), source d'une diminution importante d'apport sanguin. Enn, l'importance capitale de prévenir la première ulcération a été démontrée en connaissance du taux de récidive extrê-mement important (65% dans les cinq années à venir). L'ensemble de ces constats mèneront la communauté scientique à être très active dans ce domaine, notamment concernant les travaux impliquant l'usage de capteurs thermiques.

On a vu que les travaux liant thermique et pied diabétique n'avaient pas manqué d'ori-ginalité dans les diérentes façons de tester la pathologie. Que ce soit l'acquisition d'un thermogramme ou encore l'enregistrement d'une réponse à un test, diérentes informations importantes ont ainsi pu être apportées à ce domaine de recherche. Il a en partie été dé-montré que les patients diabétiques neuropathiques avaient leurs pieds plus chauds que la moyenne. Cette élévation de température sera souvent attribuée à l'ouverture des AVA, du fait de la neuropathie. Une dissymétrie thermique importante ou prolongée entre les deux pieds sera mise en lien avec une inammation pouvant évoluer en un mal perforant plantaire. Les tests sollicitant le corps (test froid, chaud, marche etc.) ont démontré que les patients diabétiques avec neuropathie ont plus de dicultés à réguler leur température (interne et externe). Cette diculté serait une conséquence d'une atteinte de la thermorégulation et l'imagerie thermique apparait comme un outil capable d'étudier ce phénomène. Suite à ce constat, il a été montré que le mécanisme de thermorégulation, lié à l'utilisation d'oxyde nitrique (produit par les cellules endothéliales), serait le plus aecté par la pathologie.

Quelques cas de recherches ont aussi été reportés sur les thèmes de suivi de cicatrisa-tion et de mains diabétiques. Les études mécaniques des eets de la pathologie sur le corps ont révélé un raidissement des tissus mous, ainsi que l'importance de prendre en compte la contrainte de cisaillement plutôt que la pression de contact. Cette dernière sera d'ailleurs corrélée à une augmentation locale de température, établissant un premier lien thermomé-canique. Enn on a vu l'émergence de nouvelles techniques de prévention, pour le médecin ou encore pour le patient.

C'est en se basant sur ces résultats que ce doctorat essaiera, tout au long de cette thèse, d'apporter une nouvelle pierre aux connaissances dans le sujet diabète/thermique, principale-ment en exploitant les champs d'informations thermiques obtenus par une caméra infrarouge.

there, it is the man that is unsuccessful, not the ex-periment. A. Bell

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Modèles numériques

Sommaire

Introduction . . . 46 2.1 Modèles thermiques appliqués aux tissus biologiques . . . 48 2.1.1 Pennes - Premier modèle . . . 48 2.1.2 Wul - Première critique . . . 49 2.1.3 Chen & Holmes - Vers une meilleure prise en compte des structures

vasculaires. . . 50 2.1.4 Ajout du contre-courant . . . 51 2.1.5 Autres travaux . . . 52 2.2 Première étude  Analyse dynamique suite à un déséquilibre

thermique . . . 54 2.2.1 Tests réalisés . . . 54 2.2.2 Modèle bio-thermique . . . 55 2.2.3 Identication de paramètres . . . 63 2.2.4 Premières observations réelles . . . 64 2.2.5 Discussions sur l'inuence de la conductivité thermique . . . 65 2.2.6 Première modication du protocole . . . 66 2.2.7 Vers un nouveau protocole basé sur les eets de la thermorégulation 67 2.3 Deuxième étude - Analyse dynamique des oscillations

ther-miques de surface, induites par la thermorégulation . . . 69 2.3.1 Un modèle simple pour interpréter ces oscillations thermiques . . . 69 2.3.2 Analyse de l'eet de la perfusion sur la thermique de surface . . . 73 2.4 Discussions . . . 81 Conclusions du chapitre 2 . . . 83

Introduction

Le chapitre 1 nous a permis de comprendre la pathologie du pied diabétique, les com-plications associées, ainsi que de dresser un état de l'art des recherches réalisées dans ce domaine. Ces dernières étant limitées principalement aux travaux liant thermique et pied diabétique. L'objectif principal du présent chapitre est : (i) de mieux comprendre le lien entre la température de surface et les diérents facteurs pouvant l'inuencer ; (ii) d'étudier les perturbations possibles de la température de surface liées au diabète.

La température à la surface de la peau humaine (température cutanée - (TC)) est une grandeur physique dépendante de nombreux facteurs, classiquement retenus dans la modéli-sation d'un problème de thermique. Ces facteurs (géométrie, matériaux, sources de chaleur interne, échanges avec l'extérieur, ...) sont schématisés dans la gure 2.1. Les sources de chaleur internes peuvent avoir plusieurs origines. Deux sont principalement retenues ; la pre-mière est la source de chaleur métabolique, pouvant, entre autre, être inuencée par l'activité physique. Celle-ci correspond à l'énergie produite par le corps, principalement en convertis-sant l'ATP (obtenue par divers mécanismes, dont un utiliconvertis-sant le glucose) en ADP1. Il est généralement admis que la production interne est d'environ 300−400 W.m−3 [Pennes, 1998]. La seconde source, qualiée ici de source de perfusion, est liée au ux sanguin macro et microvasculaire.

On rappelle que le sang est tout d'abord échaué dans les zones profondes de notre corps grâce à une activité métabolique importante (première source). Ensuite, le c÷ur va répartir le sang dans un vaste réseau vasculaire, d'abord profond, puis de surface. Ce réseau sera composé de vaisseaux ayant un diamètre allant de quelques centimètres (aorte, 2.5 cm de diamètre) à d'autres extrêmement ns de quelques micromètres (plexus réticulaire, environ 50 µm). Les diérents mécanismes de la thermorégulation vont alors permettre de réorga-niser le réseau vasculaire pour garantir la stabilité de la température interne du corps. Les complications du diabète vont avoir plusieurs eets sur le corps et niront par altérer ces mécanismes.

Comme l'illustre la gure 2.1, les eets du diabète sur la TC peuvent être très larges en agissant potentiellement sur tous les facteurs cités plus haut. On sait notamment que la neuropathie périphérique va agir sur la microcirculation en ouvrant les AVA, et ainsi accen-tuer les troubles trophiques en diminuant les apports sanguins en surface. Cette neuropathie aura aussi pour eet de diminuer la capacité sudomotrice de la peau, et donc aura tendance à assécher la peau ainsi qu'à modier les propriétés thermo-physiques de surface. Enn, en perdant les sensations au niveau du pied, les appuis changent et nissent par modier la forme même du pied. Tout cela mène à d'importantes modications des facteurs inuents, et donc aussi de la TC.

En émettant des hypothèses sur l'allure de la TC, suite à une altération donnée, la com-munauté scientique a souvent essayé de remonter à ces altérations, ne connaissant souvent que la thermique de surface. C'est en couplant des résultats expérimentaux à diérents mo-dèles que ces travaux sont principalement réalisés. Ces momo-dèles peuvent être mathématiques, physiques ou encore statistiques. Les modèles physiques ont cependant la volonté de s'appro-cher au maximum de la réalité de l'étude, mais, de par leur complexité souvent plus grande,

Figure 2.1  Illustration des mécanismes agissants sur la température du pied diabétique. Les parties entourées en pointillés sont celles possiblement aectées par le diabète.

sont moins nombreux dans le cadre du pied diabétique. C'est pour ces raisons que la première partie de ce chapitre sera consacrée à un état de l'art sur les diérents modèles thermiques, appliqués aux tissus biologiques, existants. Ensuite, une première étude, dont l'objectif sera d'évaluer les sources thermiques de perfusion chez diérents sujets (sains et diabétiques), sera réalisée. Celle-ci se retrouvera rapidement confrontée à plusieurs problèmes, ne reétant justement pas la réalité. Sur ce constat, un nouveau modèle sera réalisé. Ce dernier cherchera surtout à comprendre dans quels cas les mécanismes de la thermorégulation sont visibles en observant la TC. Cette étude permettra nalement de poser les bases du chapitre suivant, dédié à la réalisation d'un banc de mesure pour des interventions cliniques.