• Aucun résultat trouvé

Partie 4 : Méthodologie 102

I. Présentation de l’établissement 102

La prison de Saint-Quentin Fallavier (Isère) est un centre pénitentiaire à « gestion déléguée », issu du programme 13000 d’Albin Chalandon. Cet établissement se situe à l’extrémité du parc d’activité de Chesnes (ZAC) à 4 km de Saint-Quentin Fallavier. Il comprend un quartier maison d’arrêt (MA) et un quartier centre de détention (CD) et accueille uniquement des détenus hommes (majeurs). Mis en service en 1991, cet établissement est

relativement récent, mais il souffre toutefois des mêmes difficultés que les autres établissements pénitentiaires, du fait notamment de la surpopulation (dégradation des bâtiments, difficultés d’hygiène…). Il comptait 391 places disponibles en 2005, réparties entre le quartier MA (199 places) et le quartier CD (192 places). Il accueillait au 1er juillet 2005, 302 détenus en MA (taux d’occupation de 151,8%) et 182 détenus en CD (94,8% d’occupation ; OIP, 2005). Cet établissement bénéficie d’une UCSA, d’une antenne SMPR et d’une antenne SPIP.

1. Travail, formations et activités proposées au sein de

l’établissement

Le centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier dispose d’installations diverses permettant la mise en place de plusieurs activités dont les principales sont les suivantes :

- Travail en ateliers : surfaces d’ateliers de 1500 m2 permettant, selon la demande des concessionnaires, jusqu’à l’emploi de 140 détenus ;

- Formations professionnelles : formations peinture, cariste, travaux paysagers et plaquiste (de 3 à 8 mois, 20 détenus par formation) ;

- Enseignement : enseignants détachés et salles de cours à disposition ;

- Activités socio-culturelles diverses mises en place par le SPIP (salle polyvalente au sein de l’établissement, bibliothèque, chorale…) ; accès limité, inscription sur liste ;

- Activités sportives : l’établissement dispose d’un gymnase avec salle de sport collectif, salle de musculation, douches et d’un terrain extérieur ; possibilités de pratiquer divers sports comme le football, le volley-ball, le basket-ball, le tennis de table, le badminton, le tennis, la musculation, le footing, la marche ou la pétanque. Accès limité, inscription sur liste. Intervenants extérieurs proposant des activités sportives ponctuelles (cycle judo, yoga, gymnastique douce, tennis de table) avec de petits groupes de détenus, huit personnes en moyenne.

- Activités d’éducation et de promotion de la santé organisées par l’UCSA et le SMPR.

Bien que partageant les mêmes installations, les détenus de la MA et du CD ne sont pas amenés à se côtoyer, bénéficiant à tour de rôle de ces espaces collectifs ou travaillant par exemple dans des ateliers séparés.

2. La situation des délinquants sexuels au sein de l’établissement

Les bâtiments du centre pénitentiaire s’élèvent sur trois étages, rendant ainsi compte de quatre niveaux de détention en comptant le rez-de-chaussée. L’étage 0 est réservé et affecté aux délinquants sexuels qui se voient donc communément appelés les « pointeurs » ou les « zéros » au sein de l’institution. Particulièrement isolés dans l’établissement, ils sont écartés au maximum du reste de la population pénale du fait du peu de considération qu’ils reçoivent des autres prisonniers. Ils disposent, outre d’un quartier de détention spécifique (« CD 0 » et « MA 0 »), d’une cour de promenade qui leur est réservée, d’ateliers distincts pour travailler et de créneaux particuliers pour accéder aux parloirs, aux diverses activités et installations sportives.

L’ensemble de ces mesures ne leur garantit pas une quelconque « tranquillité », puisqu’il arrive qu’ils rencontrent ou croisent ponctuellement d’autres détenus lors de déplacements. En règle générale, lorsqu’un tel « croisement » pourrait se produire, ils sont soit escortés par des surveillants, soit enfermés provisoirement dans une salle à proximité, le temps que le flux des détenus se dissipe. Si cela les préserve d’éventuelles violences physiques, il demeure impossible d’éviter les insultes lancées à leur égard. Certains préfèrent donc limiter au maximum leurs sorties de cellule pour s’éviter ce genre de traitement, ce qui est notamment le cas pour les activités sportives. L’accès pour se rendre aux installations est en effet visible des cours de promenade (à travers grilles et grillages) et ces détenus sont fréquemment la cible d’invectives et de jets de pierres le temps de leur passage. Ainsi, malgré les efforts entrepris par l’établissement pour préserver leur sécurité, cette catégorie de détenus vit une détention des plus pénibles.

Cette situation difficile avait par ailleurs été soulignée dans le rapport au Sénat de la « commission d’enquête sur les conditions de détention dans les établissements

pénitentiaires » (Hyest & Cabanel, 2000). S’intéressant au traitement des délinquants sexuels

en prison, les auteurs soulignaient que « les « pointeurs » font l’objet d’un isolement qui se

veut rigoureux dans les établissements plus importants : il en est ainsi au centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier où ils sont affectés dans un quartier spécifique au rez-de-chaussée de la prison et regroupés dans des ateliers, qu’il s’agisse des prévenus ou des condamnés. La délégation a pu constater l’ostracisme dont ils sont l’objet : vitres de leur cellule régulièrement brisées par les jets de pierres des autres détenus, impossibilité de se tenir devant la fenêtre de leur cellule fréquemment obturée, obligation de vivre dans une

atmosphère confinée et le plus souvent tabagique. La commission (…) a pu constater que l’administration pénitentiaire était fréquemment incapable d’assurer la sécurité physique des « pointeurs », voire fermait les yeux sur les brimades dont ils sont l’objet (insultes, crachats, racket, passages à tabac, viols…). » (p.38-39).

La condition de ces détenus semble donc particulièrement malaisée au sein de l’établissement, faite d’insécurité, de brimades répétées et d’une certaine mise en retrait volontaire de la vie intra-muros. Nos considérations précédentes quant au « double isolement » dont ces détenus sont généralement victimes semblent de mise au sein de cette

institution, de même que leur confinement et sédentarité accrus. Le centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier ne fait donc pas exception quant au traitement et aux conditions de détention des délinquants sexuels, ce qui conforte nos précédents dires et valide notre choix de mener cette étude auprès de cette population spécifique.