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CHAPITRE III CADRE MÉTHODOLOGIQUE

4.1. ARTICLE 1: Modèles émergents de transformation des universités conventionnelles

4.1.7. Présentation graphique et discussion des résultats

Suivent la présentation graphique des résultats et la discussion (4.1.7.1.).

Figure 6: Histogramme synthétique des résultats de l’axe institutionnel: les différents modèles d’universités identifiés

Légende

UB= Universités bimodales.

CH= Universités conventionnelles aux cours hybrides. UD= Universités entièrement à distance.

UM= Universités intégrant plusieurs modèles (ou aux modèles multiples).

UT= Universités hautement technologiques fonctionnant à base d’intelligence artificielle.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 U B C H U D U M U T Modèles émergents

4.1.7.1. Discussion des résultats

En effectuant une comparaison des résultats obtenus avec la littérature scientifique, nous remarquons des convergences quant à l’idée de changement d’identité des universités conventionnelles. Ainsi que l’avançait Seale (2003), avec l’utilisation et l’implantation des technologies éducatives en leur sein, les universités ont changé leur identité.

D’un point de vue conceptuel, Samarawickrema et Stacey38 (2007), Inoue39

(2007) et Lorenzetti (2005) parlent explicitement d’évolution (evolving institution /silent revolution) de l’université sous l’influence de l’intégration des TIC et de l’Internet en particulier pour ses activités académiques d’enseignement, d’apprentissage et subsidiairement de recherche.

Dans le même sens, Fullan (2007, 2001) parle d’un changement de paradigme, estimant qu’avec les continuelles avancées technologiques dans plusieurs pays, le paradigme de l’enseignement supérieur a déjà commencé à changer.

D’un point de vue plus proche des modèles d’universités en émergence, la littérature évoque quelques modèles d’enseignement sur campus utilisant Internet (Marchand et Loisier, 2003; Paquette, 2002; Guri-Rosenblit, 2001; Hanna, 1998). Ainsi, Samarawickrema et Stacey (2007), Salter, Richards et Carey (2004) et Baer (1998) concluent de leurs travaux que l’utilisation de l’Internet en enseignement à l’université se fait essentiellement sous deux formes. Elle se fait comme partie d’un cours ou d’un programme disponible en ligne, en complément aux cours suivis en présentiel, pour étudiants réguliers inscrits aux cours sur campus, soit sous la forme d’un programme entier dispensé à distance à l’intention des étudiants n’assistant pas aux cours sur campus.

La présente recherche a permis d’aller plus loin dans la distinction des modèles susceptibles de voir le jour dans le paysage universitaire au cours des prochaines décennies. Ces modèles probables sont, en nombre d’importance, les cours hybrides à l’intérieur des universités conventionnelles, le modèle bimodal, les universités entièrement à distance, un modèle d’université conventionnelle intégrant plusieurs modèles, et des universités fonctionnant à base d’intelligence artificielle.

En nous référant au modèle théorique, la recherche indique que les universités

38

Ces deux chercheurs, dans une étude de cas portant sur une large université australienne, utilisent le terme d’evolving

institution pour qualifier le phénomène de l’utilisation de plus en plus croissante et généralisée des TIC par les universités

conventionnelles partout dans le monde pour donner des cours aux étudiants on campus et off campus. 39

Inoue (2007) utilise pour sa part le terme de silent revolution pour designer les transformations que l’éducation en ligne fait subir aux universités.

conventionnelles, de par leur bimodalité et cours hybrides notamment, sortiront de plus en plus d’un espace exclusivement local et régional pour s’inscrire dans la livraison de cours à l’échelle nationale et internationale.

Les résultats étant ainsi, les universités conventionnelles locales et régionales sont-elles vouées à la disparition sur le long terme et ne faire place qu’à des universités atteignant, grâce à l’utilisation d’Internet, une clientèle nationale et internationale? Deux ordres de réponses ont été recueillis. Le premier postulant que la disparition des universités conventionnelles est une illusion forme la majorité, le second renvoie l’avènement possible de la disparition des universités conventionnelles à un avenir très lointain. Dans les deux cas, l’improbabilité de la disparition des universités conventionnelles constitue le point de ralliement. En cela, la littérature est encore confortée, puisque certains chercheurs tels que Olapiriyakul et Scher (2006) ont mené aussi des recherches qui concluent que l’apprentissage à distance pur a des limitations.

En effet dans cette étude, le présupposé que les universités conventionnelles ne pourront disparaître repose sur le postulat selon lequel il y a beaucoup plus sur le campus que l’enseignement. L’université est un lieu de recherche, en somme une communauté, soutiennent les répondants. Ils font valoir que l’expérience face-à-face en temps réel constitue un aspect unique de l’apprentissage, avec ses avantages particuliers voire irremplaçables. Certes, notent-ils, les espaces virtuels d’apprentissage vont émerger et s’accroître mais sans devoir évacuer complètement les rencontres physiques notamment pour la socialisation des jeunes adultes à l’université. En ce sens, se passer de la vie sur campus relèvera davantage du choix des étudiants plutôt que parce qu’un nouveau modèle dominant de l’université l’aura imposé. Comme l’ont précisé certains répondants, c’est très bien les cours à distance et il est sans conteste que les universités ont amorcé une mutation majeure en ce sens, mais lorsqu’il s’agit de théories complexes, lorsqu’il s’agit d’études de cas, lorsqu’il s’agit de travaux d’équipes, et surtout d’enseignement contextualisé comme en médecine, la présence sur campus devient incontournable.

Un autre point de discussion procédant des éléments du modèle théorique, réfère à la place et au rôle des universités, en changement de structure, au sein de la société qui les entoure et leur fournit par ailleurs leur clientèle. La question qui fédère ce point de réflexion est celle de savoir si les universités seront les moteurs d’une société du savoir et du e-learning à l’ère de la cyberculture. Les réponses qui ressortent de la recherche révèlent avant tout que les universités constituent un des principaux moteurs du savoir dans les sociétés humaines. Et dans une société dite du savoir et

du e-learning, elles continueront de jouer leur rôle traditionnel, celui tenu depuis leur création, à savoir des centres de production et de conservation des connaissances.

Néanmoins, il y aura pour les universités l’obligation de se réinventer dans une société à l’ère d’Internet. Car de plus en plus, elles ne sont plus les seules institutions à jouer ce rôle de production et de conservation des connaissances. Il y a notamment les laboratoires d’entreprises privées, les grands instituts de recherche nationaux qui jouent également le même rôle. On observe aussi une synergie entre différentes sources du savoir (bibliothèques, musées), une augmentation des ressources informationnelles individuelles et professionnelles telles que les blogues (de professeurs, d’étudiants), les wiki, le réseautage, les communautés de pratiques, etc. qui tous ensemble contribuent à modeler un nouveau modèle de société du savoir. Les universités font donc partie du panorama. Sauf que le savoir lui-même étant devenu désormais décentralisé, un mouvement de décentralisation des institutions devrait s’ensuivre. Dans ce paradigme, les universités se doivent de se réinventer rapidement, font remarquer les répondants.

L’ère de l’Internet semble donner ainsi aux universités l’opportunité de ne plus travailler comme des tours d’ivoire et de Babel, pour permettre que les étudiants réussissent, de même qu’aux chercheurs d’avoir des liens plus solides avec la communauté, avec ce qui est vraiment important en termes de société et ce que le secteur privé recherche.

Enfin le rôle des universités dans la société n’est pas sur le point de s’effacer à l’ère du numérique. Les répondants soulignent qu’elles conservent leur spécificité d’enseigner la pensée critique, les habiletés de recherche et d’apprentissage, et aussi leur prérogative à certifier la qualité de la formation.

Un dernier point de réflexion qui ressort du modèle théorique concerne les rapports interinstitutionnels entre les universités d’une part et d’autre part entre les universités, le secteur privé et les institutions publiques.

En ce qui est du rapport entre universités, deux logiques semblent poindre à l’horizon: la collaboration et la compétition. Sur le versant collaboratif, les répondants estiment qu’il peut y avoir un partage de plateforme ou d’espace virtuel commun favorisant l’accès à des ressources d’enseignement et d’apprentissage. Le mouvement de coopération qui s’observe déjà mais qui a le potentiel de s’accroitre avec l’adoption de plateformes flexibles (Moddle, etc.) augmentera les réseaux de coopération internationale pour les formations à distance, des programmes conjoints interuniversitaires, la recherche et les formations supervisées avec des partenaires locaux. De pair

avec cette mouvance de collaboration, il y a les problèmes de droits d’auteur auxquels les institutions seront amenées à chercher des solutions.

À l’opposé de ce mouvement de collaboration, la logique de la compétition conduira à une forme d’écrasement des petites universités dont les moyens limités ne pourront pas résister aux meilleurs programmes mis sur pied par les grandes universités ou les consortiums.

Quant au rapport entre universités, institutions publiques et secteur privé, les répondants anticipent que la norme sera également la collaboration dans une société qui se veut celle du savoir. S’agissant des raisons de cette collaboration entre universités, secteur privé et institutions publiques, les répondants soulignent qu’une telle collaboration est devenue nécessaire à cause de l’émergence de savoirs d’origine non universitaire. Comme résultat, le monopole des savoirs universitaires est en train d’être brisé. Aussi dans une société en changement, un changement notamment généré par les technologies, les étudiants eux-mêmes ont-ils besoin d’avoir des connaissances non uniquement disciplinaires et une culture plus accrue de partage d’information.