Chapitre 4 : Simulation d’impacts sur un merlon de protection pare-blocs
II. Une démarche expérimentale multi-échelles
II.1. Présentation de l’ouvrage prototype REMPARe
II.1.1. Description générale
Géométrie et matériaux
Le merlon de protection étudié a une structure composite dans le sens où sa réalisation
fait intervenir différents éléments de structures associés à plusieurs matériaux de
construction variés. Il est constitué en amont d’un parement et d’un noyau composés de
cellules élémentaires qui viennent en appui sur un remblai compacté placé à l’aval
[Figure 4-1].
Le parement et le noyau sont composés de gabions de deux ou trois mètres de longueur,
divisés en cellules d’un mètre cube par des diaphragmes. Leur largeur dans la direction
transversale est d’un mètre. L’épaisseur du remblai technique aval en crête est de deux
mètres, pour une emprise au sol de 9 m et une hauteur de H = 4 m. La pente de talus
aval est donc comprise entre 2H/1V et 3H/2V (valeurs classiques pour un remblai
compacté).
Une longueur de parement de L = 8 m a été retenue pour limiter les effets de bords lors
d’un impact au centre. Latéralement, les cellules de gabions étant auto-stables sont
laissées libres tandis que le remblai est prolongé par deux talus latéraux afin de
représenter la continuité.
T.N. Remblai Noyau Parement Impactant D = 1,60 m 2 m 7 m H= 4 m x z 2 mChapitre 4 : Simulation d’impacts sur un merlon de protection pare-blocs
(a) (b) (c) Figure 4-2 : Eléments constitutifs de l’ouvrage : (a) cellule de gabion avec géotextile et
tirants, (b) mélange de sable et de déchiquetas de pneus, (c) remplissage de blocs calcaires concassés [REMPARe 2010].
Les gabions mis en œuvre peuvent être qualifiés de composites, de par l’association de
l’enveloppe grillagée et du matériau de remplissage. Le garnissage est composé de
pierres concassées au parement [Figure 4-2 c] et d’un mélange de sable et de
déchiquetas de pneus, confiné par un géotextile, dans les cellules du noyau
[Figure 4-2 a et b].
Dispositif de largage et impactant
L’impactant utilisé pour ces tests est un bloc modèle de forme sphérique, constitué
d’une coque en acier remplie de béton. Son diamètre est de 1,60 m et sa masse de
6500 kg.
La procédure de lancement de l’impactant est assurée par le dispositif suivant
[Figure 4-3]:
- câble porteur en acier, ancré en haut et en pied de falaise (1),
- chariot constitué d’une poulie reposant sur le câble porteur (2),
- impactant suspendu au chariot par l’intermédiaire d’élingues en acier (3),
- treuil permettant de remonter l’impactant jusqu’à la hauteur de lâcher
souhaitée (4).
A noter que la hauteur de chute maximale disponible est de l’ordre de 30 mètres.
Les essais d’impact sont effectués sans largage de l’impactant ce qui a permis de
maitriser avec une plus grande précision le point d’impact. Cependant, la cinématique
de l’impactant induite lors de sa chute et pendant toute la durée du choc, ne correspond
pas à la réalité physique étant donné que la masse sphérique reste arrimée au câble
porteur jusqu’à son arrêt [Figure 4-4].
Largement discuté par le groupement lors de la conception du site, ce dispositif a été
retenu sachant que l’interprétation de l’effet du câble lors de l’impact restera difficile.
En effet une grande partie de la composante verticale descendante de la vitesse est
conditionnée par la mise en traction de l’élingue. De plus, en fin d’essai, la poulie
exerce par l’intermédiaire de l’élingue une tension horizontale empêchant le retour en
arrière de l’impactant, qu’il faudrait quantifier.
Chapitre 4 : Simulation d’impacts sur un merlon de protection pare-blocs
(1)
(4)
(3)
(2)
Figure 4-3 : Schéma de principe du dispositif de lancement de l’impactant.
Figure 4-4 : Photographie du système de « largage » après impact [REMPARe 2010].
Phasage d’essais et réparations
Le merlon prototype a été soumis respectivement à une succession d’impacts à des
niveaux d’énergie différents : 200, 1000, 500 et 2000 kJ. Le dispositif de largage
n’étant pas amovible, l’ensemble des impacts subis par les ouvrages a lieu au même
point (centre du parement). Mis à part le premier essai, les impacts suivants sont donc
menés sur un ouvrage qui a connu un historique de sollicitation non vierge. La réponse
de la structure est fonction des contraintes et des déformations engendrées lors des
essais précédents.
Chapitre 4 : Simulation d’impacts sur un merlon de protection pare-blocs
Pour les hautes énergies d’impact (1000 et 500 kJ) le parement a présenté un
endommagement important si bien qu’il a été nécessaire de réparer partiellement la face
amont de l’ouvrage prototype :
- Après l’essai à 1000 kJ, l’ouvrage a été réparé par remplacement des cellules
endommagées (6 cellules du parement) [Annexe 5, Figure A 9].
- Après l’essai à 500 kJ, l’ouvrage a été réparé par ajout d’une « rustine » de
grillage et d’un remplissage de pierres dans la zone d’impact
[Annexe 5, Figure A 10].
II.1.2. Systèmes de mesures et résultats des expérimentations en vraie
grandeur
II.1.2.a. Systèmes de mesures
L’instrumentation mise en place pour cet ouvrage prototype a pour but de renseigner
sur leur réponse lors de l’impact dynamique ainsi que l’état de la structure après impact.
Un grand nombre de systèmes de mesure, des plus simples aux plus sophistiqués, à
technologies différentes, a été implanté à la fois, à l’extérieur et dans l’ouvrage
d’étude :
- accéléromètres placés dans l’impactant,
- accéléromètres placés dans l’ouvrage,
- capteurs de déplacements dans l’ouvrage,
- levés topographiques au tachéomètre et levés manuels,
- inclinomètres placés dans le remblai,
- capteur de force à la base de l’ouvrage,
- géophones dans le remblai pour quantifier l’endommagement de la structure,
- enregistrement avec une caméra rapide.
Un certain nombre de mesures a été doublé pour pallier l’éventuelle défaillance d’un
système de mesures.
L’ensemble des résultats expérimentaux obtenus, représente une base de données
intéressante pour une calibration et/ou pour une comparaison avec l’approche
numérique.
A ce jour, l’ensemble des mesures expérimentales n’a pas encore fait l’objet d’une
étude comparative poussée permettant de valider ou d’écarter certaines mesures. Le
travail de doctorat d’Heymann [Heymann 2011], portant sur l’ensemble des
expérimentations réalisées dans le cadre du projet REMPARe, présente de manière plus
exhaustive la conception des ouvrages testés, leur instrumentation et l’exploitation qui
en découle. Le lecteur pourra s’y reporter pour des compléments d’information.
Dans ce travail, la confrontation des approches numérique et expérimentale n’a été
conduite que sur la base d’un nombre réduit de mesures.
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II.1.2.b. Résultats d’essais sur merlon prototype
L’ouvrage prototype avec remblai aval a été impacté à quatre reprises pour des énergies
successives de 200, 1000, 500 et 2000 kJ. L’ensemble des essais et des mesures n’a pas
nécessairement donné lieu à des résultats exploitables, notamment pour l’essai à
1000 kJ où le système d’acquisition a été défaillant.
Accéléromètre
Deux accéléromètres triaxiaux ont été placés dans une réservation au centre de
l’impactant. Ils diffèrent par le système d’acquisition qui est soit filaire, soit embarqué.
Le traitement, l’analyse et l’interprétation de l’ensemble des données expérimentales
est en cours. Les signaux obtenus par « l’accéléromètre embarqué » fait l’objet d’une
expertise en cours. Dans ce travail, seule la mesure filaire a été exploitée.
L’acquisition de l’accélération est réalisée depuis le lâcher de l’impactant jusqu’à son
immobilisation. La mesure est disponible pour les essais à 200 et 500 kJ d’énergie
[Figure 4-5]. Les signaux exploités, lissés par une moyenne glissante pour s’affranchir
du bruit lié aux vibrations, peuvent également être interprétés en force d’impact, en
multipliant l’accélération par la masse de la sphère.
0 4 8 12 16 20 0 0.1 0.2 0.3 0.4 Temps (s) A c c é lé ra ti o n (g ) Ec = 200 kJ Ec = 500 kJ
Figure 4-5 : Accélérations de l’impactant mesurées pour les impacts à 200 et 500 kJ d’énergie cinétique [REMPARe 2010].
Topographie
La topographie complète du parement réalisée grâce aux mesures au tachéomètre, n’est
pas exploitable pour cet ouvrage. La mesure manuelle, effectuée au niveau de l’impact,
après retrait de l’impactant, nous donne une information pertinente et fiable quant à
l’enfoncement de l’impactant dans l’ouvrage [Tableau 4-3]. Lors du démontage ou de
la réparation des ouvrages des levés internes ont pu être effectués manuellement.
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Capteurs de déplacement
Des capteurs de déplacement à tige (piste plastique), ont permis de mesurer les
déplacements dans le plan d’impact, aux interfaces entre parement-noyau (3 points de
mesure) et noyau-remblai (3 points de mesure) [Annexe 6, Figure A 11]. Le relevé
automatique au cours de l’essai est complété par un relevé manuel effectué après
impact. Les évolutions temporelles des déplacements sont données [Annexe 6, Figure A
12]. Les résultats de mesures doivent cependant être nuancés par les difficultés
rencontrées expérimentalement notamment pour les essais à haute énergie d’impact :
mise en flexion des tiges, cisaillement observé des platines au sein de l’ouvrage,
oscillation de la potence qui sert de condition rigide, …
Le Tableau 4-1 récapitule les déplacements mesurés aux interfaces parement-noyau
(x = -1 m) et noyau-remblai (x = -2 m) au niveau de la hauteur d’impact (z ≈ 2 m).
Inclinomètre
Dans le plan d’impact deux inclinomètres verticaux, l’un manuel (avec 2 axes de
mesure) et l’autre automatique, ont été placés à 50 cm en retrait de l’interface
noyau-remblai (x = -2,5 m). Les déplacements cumulés obtenus dans la direction de l’impact
sont donnés en [Annexe 6, Figure A 13]. Sur le graphique, les valeurs positives
représentent un enfoncement.
Les déplacements maximaux obtenus en z = 2 m sont donnés dans le Tableau 4-1.
Mesure des déplacements horizontaux (m)
Capteurs de déplacements Inclinomètre
x = -1 m x = -2 m x = -2,5 m
Energie attendue
(kJ)
Maximum Résiduel Maximum Résiduel Résiduel*2
200 0,16 0,08 0,02 < 0 0,005
1000 - 0,19*1 - - 0,027
500 0,09 0,08 0,02 0,01 0,030
2000 0,54 0,49 0,14 0,07 0,050
*1 : Mesure effectuée par levé topographique manuel lors de la réparation du parement après l’essai à 1000 kJ.
*2 : Les déplacements inclinométriques sont des déplacements cumulés.
Tableau 4-1 : Récapitulatif des déplacements horizontaux mesurés dans l’ouvrage au niveau de la hauteur d’impact (z ≈ 2 m), via les capteurs de déplacements automatiques et
l’inclinomètre manuel [
Annexe 6
].Caméra rapide
La mise en œuvre d’un enregistrement vidéo par caméra rapide avait pour but initial, de
permettre une analyse du comportement de l’ouvrage pendant l’impact [Figure 4-6]. A
partir de ces enregistrements il nous a également été possible de déterminer le vecteur
vitesse de l’impactant et le point d’impact juste avant le choc, et d’estimer
l’enfoncement final du bloc dans l’ouvrage [Heymann 2011].
Chapitre 4 : Simulation d’impacts sur un merlon de protection pare-blocs
Figure 4-6 : Images prises à la caméra rapide pour un impact à 2000 kJ d’énergie [Heymann et al. 2010]. Energie attendue (kJ) Energie calculée (kJ) Vitesse totale (m/s) Vitesse suivant x (m/s) Vitesse suivant z (m/s) Hauteur d’impact (m) 200 140* 7* -6* -2* 1,83* 1000 1036 17,9 -16,8 -6,0 1,74 500 541 12,9 -11,5 -5,7 2,13 2000 2203 26,0 -23,7 -10,8 2,10
* : les données pour l’essai à 200 kJ sont approchées car les images sont de mauvaise qualité Tableau 4-2 : Caractéristiques cinétiques de l’impact et hauteur d’impact estimées via
l’enregistrement par caméra rapide.
Mesure de l’enfoncement de l’impactant (m) Energie attendue (kJ) topographique Levé manuel Enregistrement par caméra rapide 200 0,35 - *1 1000 - *2 0,66 500 0,36 0,38 2000 - *3 0,68 *1 : images sombres.
*2 : pas de mesure possible au parement (écroulements). Au démontage, la déformée à l’interface parement noyau a été estimée à environ 0,19-0,20 m.
*3 : pas de mesure possible au parement (écroulements).
Tableau 4-3 : Enfoncements en fin d’impact du bloc estimés à partir de l’enregistrement par caméra rapide, et par levé topographique manuel.