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Chapitre 2 : la prise en charge non-médicamenteuse du vieillissement et de la Maladie

2 Hypothèse métabolique

2.1 Présentation de l’hypothèse et son évolution

L’hypothèse dite métabolique (ou circulatoire) stipule que la stimulation de la fonction cardiorespiratoire par l’APRA engendrerait une augmentation du flux sanguin cérébral qui permettrait une meilleure oxygénation du système nerveux central. Cette hypothèse, présentée par Dustman et al. (1994) suppose que : du fait des besoins importants des tissus cérébraux en glucose, en oxygène et du fait qu’un approvisionnement suffisant de ces substrats semble indispensable pour le métabolisme neuronal, les changements directs dans la fonction cardiovasculaire affecteraient directement le fonctionnement du système nerveux central. Ainsi, l’APRA pourrait ralentir la vitesse à laquelle se produisent les altérations du métabolisme neuronal pendant le processus de vieillissement. Actuellement, cette hypothèse présente un intérêt croissant du fait de la relation positive observée entre le niveau maximal de l’aptitude aérobie (correspondant au débit maximal d’oxygène par unité de temps, le

VO2max), les fonctions cognitives et la structure cérébrale, aussi bien chez des populations vieillissantes (Bullitt et al., 2009 ; Colcombe et al., 2003 ; Erickson et al., 2009, 2011) que chez les patients atteints de la MA (Burns et al., 2008 ; Vidoni, Honea, Billinger, Swerdlow, & Burns, 2012). De plus, les dysfonctionnements mitochondriaux pourraient être les probables déclencheurs et amplificateurs de la progression de la voie amyloïdogénique associée à la MA (Swerdlow, Burns, & Khan, 2010). Leuner, Müller, & Reichert (2012) font également l’hypothèse que, dans la forme sporadique de la MA, certains processus candidats au vieillissement, induiraient dans un premier temps des altérations du fonctionnement neuronal associées à des dysfonctionnements mitochondriaux, qui, en conséquence, déclencheraient la production anormale des peptides β-amyloïdes.

Pour rappel, la mitochondrie est un organite des cellules eucaryotes. Sa fonction la plus connue est la production d’énergie chimique (l’Adénosine Triphosphate, ATP). De plus, elle serait impliquée dans d’autres processus cellulaires tels que l’homéostasie du calcium, l’apoptose, la prolifération et la différenciation cellulaire. La mitochondrie possède son propre Acide DésoxyriboNucléique (ADN) qui code pour les quatre sous-unités de complexes enzymatiques constituant la chaine respiratoire (ou chaine de transport des électrons ; complexes I, II, III et IV). Ces complexes, par transports successifs d’électrons, réalisent une phosphorylation oxydative, permettant de pomper progressivement des protons de la matrice mitochondriale vers son espace inter-membranaire, générant ainsi un gradient de protons. Ce gradient est ensuite utilisé dans un cinquième complexe (ATPsynthase) pour générer l’ATP. Néanmoins, ce mécanisme n’est pas parfait et 2 % des électrons transférés par la chaîne respiratoire vont être responsables de la formation d’Espèces Réactives de l’Oxygène (ERO). Durant les processus de vieillissement, l’augmentation progressive des niveaux d’ERO décrit un stress oxydatif, conduisant à une accumulation de protéines, de lipides et d’acides nucléiques oxydés. Ce phénomène semble en partie initier les altérations des cellules et les

dysfonctions de la mitochondrie. En effet, les ERO se produisant dans la mitochondrie, celle- ci en serait la première cible. Ces ERO engendreraient principalement des modifications progressives de l’ADN mitochondrial et des altérations du fonctionnement du complexe I (Leuner et al., 2012). Ces mutations successives de l’ADN mitochondrial au cours du temps semblent être un des acteurs majeurs du processus de vieillissement. De ce fait, les dysfonctions mitochondriales résultantes d’un vieillissement pathologique provoqueraient une surproduction d’ERO, lesquelles amplifieraient d’avantage les dysfonctions mitochondriales (Leuner et al., 2012), qui à leur tour engendreraient des dysfonctionnements cellulaires.

Il convient aussi de rappeler que la protéine précurseur de l’amyloïde (βAPP) est une glycoprotéine transmembranaire synthétisée dans le réticulum endoplasmique et transportée vers l’appareil de Golgi (Pagani & Eckert, 2011). C’est à partir de celui-ci qu’elle va être clivée et / ou transportée vers d’autres organites ou vers la membrane plasmique. Sa fonction précise, au sein de l’organisme reste relativement peu connue. Il existe deux voies de dégradation l’βAPP : la voie non-amyloïdogénique et la voie amyloïdogénique (pathologique, Figure 1, Huang & Jiang, 2009 ; Pagani & Eckert, 2011). Dans la voie non-amyloïdogénique, l’βAPP est clivée par les α-sécrétases (enzymes de la famille des A Disintegrin And

Metalloproteinase) au niveau de la membrane (notamment la membrane plasmique et de

l’appareil de Golgi), ce qui libère une contrepartie C-terminale membranaire (C83), un fragment N-terminal (sAPPα) soluble et abolie la formation du peptide Aβ (Pagani & Eckert, 2011). La contrepartie C-terminale membranaire, C83, est ensuite clivée par la γ-sécrétase (multi-complexe protéique) pour produire le peptide p3 et un fragment cytosolique appelé

AICD (APP Intra Cellular Domain).Le fragment N-terminal soluble, sAPPα, présenterait des

propriétés neurotrophiques et neuroprotectrices (Pagani & Eckert, 2011). Dans la voie amyloïdogénique, l’βAPP est clivée par les β­sécrétases (enzymes) en amont de la membrane (notamment de la membrane plasmique, de l’appareil de Golgi et des endosomes) ce qui

libère une contrepartie C-terminale membranaire (C99) et un fragment N-terminal (sAβPPβ) (Huang & Jiang, 2009 ; Pagani & Eckert, 2011). La contrepartie C-terminale membranaire, C99, est ensuite clivée par la γ-sécrétase (multi-complexe protéique) pour produire le peptide β-amyloïde et un fragment cytosolique appelé AICD (APP Intra Cellular Domain). Le peptide β-amyloïde va par la suite, soit rester dans l’organite, soit se déplacer vers la mitochondrie ou vers l’extérieur de la cellule (Pagani & Eckert, 2011).

Les études récentes sur les cultures cellulaires semblent montrer que les ERO dérivés du complexe I initieraient l’augmentation des processus amyloïdogéniques (Leuner et al., 2012). En effet, il semblerait que l’augmentation de la production de certains ERO (comme le

peroxyde d’hydrogène) augmente l’activité du BACE 1 (Beta-site APP Cleaving Enzyme 1),

une enzyme des β­sécrétases impliquée dans la coupure β de la βAPP. L’activité du BACE 1 étant aussi liée à l’activité des γ­sécrétases, l’augmentation des ERO pourrait être initiatrice de la génération des peptides β­amyloïdes. De plus, les études récentes sur les modèles animaux de la MA montreraient que ces peptides perturberaient, à leur tour, l’activité des structures de la mitochondrie, notamment la membrane mitochondriale et le complexe IV, ce qui amplifierait la quantité d’ERO produite et les mutations de l’ADN mitochondrial. Un fonctionnement récursif (« cercle vicieux ») se mettrait alors en place, aboutissant à un dysfonctionnement accentué de la mitochondrie, laquelle va activer les voies de signalisation de l’apoptose, conduisant à la mort prématurée des neurones (Figure 1). Il convient de noter que les β-amyloïdes, tout comme les ERO, ne vont pas uniquement cibler la mitochondrie. En effet, de par sa structure, les β-amyloïdes semblent être capables de se lier à une variété de biomolécules, incluant les lipides, les protéines et les protéoglycanes (Huang & Jiang, 2009). Les peptides β-amyloïdes sous formes solubles ou fibrillaires (considérées comme toxiques) pourraient aussi se lier à un sous ensemble protéique de la membrane plasmique des cellules

gliales, neuronales et à leurs récepteurs respectifs (Huang & Jiang, 2009). De ce fait, une grande partie des cellules de notre cerveau semble être en proie à ce peptide.

Figure 1 : Schématisation du clivage de la protéine précurseur de l’amyloïde (βAPP) et influence des mitochondries. Les plus grosses tailles des flèches et des cases mettent en évidence la voie préférentielle en fonction du type de vieillissement. (A gauche) fonctionnement lors du processus de vieillissement réussi (en bonne santé), caractérisé par un probable clivage non-amyloïdogénique de la βAPP (en bleu) supérieur à celui amyloïdogénique et favorisant la neuroplasticité. Ce vieillissement sain limite les dysfonctions mitochondriales, lesquels vont limiter l’activité des β-sécrétases. (A droite) fonctionnement lors du processus de vieillissement pathologique engendrant une MN de type MA, caractérisé par un clivage amyloïdogénique de la βAPP (en rouge) supérieur à celui non-amyloïdogénique. Les dysfonctions mitochondriales seraient initiatrices de ce vieillissement pathologique. Elles vont amplifier l’activité des β-sécrétases par les ERO et une hyperphosphorylation Tau, de manière récursive, conduisant ainsi vers l’apoptose cellulaire. Il convient de noter que cette schématisation résume le processus physiologique général du clivage de l’ βAPP lié aux fonctions mitochondriales sans préciser les différents compartiments cellulaires et enzymes impliqués dans la production, le clivage et le transport des produits issus de l’ βAPP.

Libération sAPPα soluble

βAPP

αS βS Libération sAβPPβ soluble ϒS ϒS Libération Peptide P3 + ACID Libération Peptide Aβ + ACID Neuroplasticité Dégradation ERO Dysfonctions mitochondriales Détoxification Propagation + agrégation Apoptose + neurodégénération Libération sAPPα soluble αS βS Libération sAβPPβ soluble ϒS ϒS Libération Peptide P3 + ACID Libération Peptide Aβ + ACID Neuroplasticité Dégradation ERO Dysfonctions mitochondriales Détoxifica tion Propagation + agrégation Apoptose + neurodégénération

βAPP

Vieillissement réussi Vieillissement

2.2 Considérations physiologiques liées à l’intensité d’une Activité Physique Régulière