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Chapitre V Du vocabulaire de la démocratie à la langue de la démocratie

I. Présentation du corpus

La présentation des journaux, choisis comme supports de corpus, étant faite dans la partie réservée à la presse, nous n’allons parler que des difficultés rencontrées lors de la collecte du corpus, de la période fixée pour la délimitation de ce dernier et du nombre d’éditoriaux par mois de chaque journal.

A. Difficultés rencontrées pour la collecte du corpus

Le recueil du corpus nous a confronté à beaucoup d’écueils. Si en effet notre choix de l’année des éditoriaux a changé (2015 au lieu de 2013/2014), c’est en partie dû à la version électronique et au fonctionnement de certains journaux en ligne. Pour El Khabar par exemple, « يآر درجم» (Simple point de vue), censé, être à nos yeux, un éditorial, a non seulement été retiré à partir de la fin 2014 mais il s’est avéré, quand nous avons appelé la rédaction du journal en question pour nous enquérir de sa non parution, que ce n’était même pas un éditorial. Pourtant, il en avait toutes les caractéristiques formelles. Nous avons donc essayé d’en savoir un peu plus sur cet éditorial qui n’en est pas un en posant la question suivante au Rédacteur en chef, contacté au mois de juin 2015 : « Si « يآر درجم» (simple point de vue) n’est pas un éditorial, où lecteur pourrait-il trouver le point de vue de votre journal ? » La réponse du Rédacteur en chef a été sans ambages « La position du journal ? Mais il faut la chercher dans les articles d’El Khabar, autrement dit dans la manière de traiter l’information ou l’actualité. » Voilà donc la raison qui nous a contraint à prendre des articles portant sur l’actualité de manière générale et sur la politique en particulier et à changer carrément d’année. Si pour l’aspect formel, les articles pris s’éloignent des règles appliquées à

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l’éditorial, il n’en demeure pas moins que cela n’a pas constitué un grand obstacle à l’avancement de notre recherche du moment que la période choisie importe peu et que ce qui compte dans une perspective d’étude synchronique, c’est bien le produit soumis à l’analyse. Autrement dit, le plus important, pour nous, est l’étude d’un fait linguistique à un moment donné de son « existence ».

Un autre problème s’est également posé lors de la collecte du corpus d’Echaab, journal arabophone. Ce n’est pas le même cas que celui du journal précédent mais cette fois-ci, c’est le nombre d’éditoriaux qui nous a un petit peu surpris. Ainsi, pour l’année 2015, nous n’avons que 15 articles. Comparé aux autres quotidiens, ce nombre est très inférieur. Au départ, nous avions cru que c’était dû peut-être à un bug sur le site de ce journal mais en nous adressant à un de ses journalistes et en lui exposant la situation, il nous a dit que cela était normal vu que les éditoriaux d’Echaab sont produits au gré des circonstances et des dates importantes pour les Algériens : crise économique, fête de l’Indépendance, le 1er Novembre…

B. Période choisie pour la constitution du corpus

Avant d’indiquer cette période, un petit rappel concernant les journaux, sélectionnés pour ce travail, s’avère nécessaire. Pour rappel donc, six journaux avaient été retenus en vue de la constitution du corpus. Il s’agit de trois quotidiens francophones : El Moudjahid, El Watan et Liberté. Les trois autres, édités en langue arabe, sont : Echaâb, Echourouk et El Khabar. Que ce soit pour les journaux francophones ou arabophones, les premiers quotidiens sont publics et les deux autres privés. Deux critères ont été donc retenus pour le choix de ce corpus : un critère linguistique et un autre « économique ». Pour revenir à la période ou plus exactement aux dates, disons que, à partir du moment où cette thèse est basée sur une étude synchronique, nous nous sommes dit que la période importait peu dans la mesure où ce qui est visé c’est l’étude d’une langue par rapport à une autre à un moment donné de leur histoire. C’est vrai que l’époque est importante vu que la démocratie est une pratique plus ou moins moderne, c’est pour cette raison d’ailleurs que nous avons pris l’année 2015 ; mais nous aurions pu prendre 1960 ou 1990 pour traiter ce sujet. Ceci étant dit, et au risque de nous répéter, l’année choisie est 2015 : de janvier à décembre.

C. Nombre d’éditoriaux par journal

Mois El

Moudjahid El Watan

Liberté Echaâb Echourouk El Khabar

Janvier 07 27 25 02 16 26

Février 09 22 24 01 13 30

Mars 11 28 27 01 17 30

159 Mai 16 28 26 00 16 31 Juin 11 27 26 02 14 29 Juillet 12 24 25 01 18 29 Août 14 27 27 03 17 30 Septembre 13 26 25 01 13 30 Octobre 15 25 26 01 13 31 Novembre 14 26 26 02 13 30 Décembre 25 27 27 03 16 31 Total 151 315 310 17 181 357 Total par langue 776 555 Total éditoriaux 1331 D. Commentaire

Si nous commençons par les journaux d’expression française, nous remarquons que le nombre d’éditoriaux diffère entre le public et le privé. L’écart est en effet très important entre El Moudjahid et El Watan et Liberté. Nombre de questions peuvent être posées quant aux raisons de cet écart. Sachant que l’éditorial est la vitrine du journal, son porte-parole en quelque sorte, nous ne pouvons que nous demander s’il s’agit d’un choix délibéré ou si cela est dicté par d’autres considérations professionnelles ou extraprofessionnelles. La même remarque s’impose pour les journaux arabophones mais cette fois-ci avec un nombre très bas pour le journal public Echaâb. En effet, 17 éditoriaux pour toute une année : c’est très peu compte tenu des différents événements qui ont secoué le pays et toute la région. Croyant donc que les éditoriaux téléchargés sur le site de ce journal n’étaient pas en nombre suffisant, nous avons prix attache avec un des journalistes de ce quotidien et nous lui avons expliqué la situation. Sa réponse a été très claire : « C’est la directrice du journal qui s’occupe de l’éditorial et celui-ci n’est publié qu’en cas d’événement très important ou lors des fêtes nationales comme le 1er Novembre ou le 05 Juillet. » En d’autres termes, ce journal n’a apparemment pas de ligne éditoriale stable ou précise puisqu’elle dépend des circonstances et des aléas de la vie politique. Encore faut-il le confirmer au moyen d’une étude mais ce n’est pas l’objectif de ce travail. Cela est-il une caractéristique de la presse publique ? Nous sommes tenté de répondre par l’affirmative mais vu le nombre d’éditoriaux du journal privé Echourouk, cette justification devient infondée. Que se cache-t-il donc derrière cet écart ? D’autant plus qu’un journal suisse, Le Temps en l’occurrence, avait même essayé de publier deux éditoriaux par jour. Cela n’a pas vraiment eu les effets escomptés puisqu’il y a vite renoncé mais cela veut dire aussi que ce genre journalistique est d’une importance capitale. Il est vrai que certains spécialistes en journalisme, tels que Annik Dubied et Marc Lits,

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affirment que l’éditorial est «[…]un article en tête du journal, publié à des moments

importants seulement, engageant l’éditeur […] »309 Mais cela n’empêche pas de dire que, dans le paysage médiatique algérien, on est habitués à des éditoriaux quotidiens. Dans ce cas, y a-t-il un autre moyen de déceler l’opinion du journal ? Et comment la presse, qualifiée de quatrième pouvoir, participerait-elle à la vie démocratique en s’abstenant de divulguer sa position ? Donc, pour expliquer l’écart relevé par le caractère public des quotidiens El Moudjahid et Echaâb, la tâche devient risquée étant donné qu’un journal privé comme Echourouk présente également une particularité par rapport aux autres quotidiens. Il s’agit peut-être d’une pratique propre aux journaux en question, une sorte de tradition qui s’est installée au fil du temps. Il faut souligner par ailleurs que les éditoriaux d’El Khabar constituent un cas particulier. Ce ne sont pas en fait des éditoriaux mais bien des articles traitant de la vie politique comme nous l’avons souligné plus haut.

Pour ce qui est du critère linguistique concernant le nombre d’éditoriaux, les quotidiens francophones sont en première position avec un nombre d’articles de 776 contre 555 pour les journaux d’expression arabe. Un écart de 221 éditoriaux qui rend ardue notre mission de chercher le vocabulaire de la démocratie. Mais nous n’avons pu procéder autrement. 555 éditoriaux restent quand même un échantillon valable pour les objectifs que nous nous sommes tracés.