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II.2.1. Introduction

Afin d’évaluer le pouvoir radioprotecteur de la Naphazoline et du WR-2721, vis à vis de l’ADN, nous soumettons de l’ADN plasmidique Φ174 (4361 bp, Amersham Pharmacia Biotech Inc.) à une irradiation gamma par une source au Cobalt 60, en présence et en absence de ces deux composés. Les irradiations sont réalisées à l’ONERA (Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales) à Toulouse. En effet, comme il est mentionné dans le premier chapitre, l’ADN contenu dans le noyau des cellules constitue la cible principale des rayonnements ionisants. Les modifications de l’ADN consécutives à une irradiation peuvent être réparées pour certaines, mais pour d’autres, elles peuvent persister et être à l’origine de mutations, de mort cellulaire ou de phénomène de cancérisation. C’est pourquoi, nous avons choisi d’utiliser de l’ADN plasmidique comme modèle d’étude.

II.2.2. Conditions expérimentales

Différentes solutions contenant de l’ADN plasmidique Φ174 (Amersham Pharmacia Biotech Inc, 4361 pb) dans 30 µL de tampon phosphate 5 mM (pH 7,4, NaCl 10 mM) ont été exposées à une irradiation par une source Cobalt 60 à différentes doses (débit de dose à 50 Gy/h) à 25°C en présence et en absence des différents composés. La quantité d’ADN utilisée par échantillon est de 0,5 µg (16,7 µg/ml). Les doses d’irradiation sont similaires à celles utilisées dans la littérature pour des tests semblables [111].

110 Prouillac C., Célariès B., Vicendo P., Rima G. C. R. Biologies, 329(3), 196-199, 2006. 111

L’ADN plasmidique se présente sous la forme d’un ADN double brin circulaire superenroulé (forme I). Lorsqu’il subit une coupure simple brin, il passe à une forme double brin circulaire relaxée (forme II) qui migre moins loin sur le gel d’agarose. Enfin, une coupure double brin conduit à un ADN linéarisé (forme III) qui migre entre les formes I et II. Ces différentes formes sont séparées par migration électrophorétique et révélées par le bromure d’éthydium.

Figure 16 : Les différentes formes d’ADN plasmidique.

Les coupures de l’ADN consécutives à l’irradiation ont donc été révélées par électrophorèse sur gel d’agarose 0,8 % contenant 25 µl de bromure d’éthidium (10 mg/ml). Après irradiation, 10 µ L de bleu de bromophénol (75% glycérol, 24,95 % tampon Tris, 0,05 % bleu de bromophénol) sont ajoutés à chaque échantillon. La migration est réalisée pendant 16 heures à 20 V dans du tampon tris borate EDTA (10,8 g/L de tris(hydroxyméthyl)aminométhane, 5,5 g/L acide borique, 0,93 g/L d’EDTA). Le gel est ensuite analysé et les différentes formes d’ADN plasmidique ont été révélées par illumination sur une table UV à 254 nm. Après photographie, une quantification des bandes a été réalisée par densitométrie à l’aide d’un logiciel Mesurim.

Les dommages induits par les rayonnements γ ont été estimés par l’augmentation de la quantité de la forme circulaire relaxée. Le nombre de cassures simple brin par molécule d’ADN générées par les rayonnements a été évalué par le pourcentage de forme circulaire relaxée (% Forme II) selon la formule suivante :

FII = Forme Circulaire Relaxée

Le coefficient de 1,66 a été affecté à la forme superenroulée en raison d’une plus faible fluorescence du bromure d’éthydium lorsqu’il est lié à la forme superenroulée. La forme très compacte de l’ADN superenroulée ne permet pas une bonne intercalation du bromure d’éthydium entre ses paires de bases.

Nous avons également pu calculer les pourcentages de protection de la façon suivante :

Avec PF = Produit + ADN + Fenton ; TNT = témoin ADN non traité ; TF = témoin ADN traité.

Un test t de Student a été réalisé afin de mettre en évidence l’effet protecteur des nos composés. Nous avons comparé les échantillons ADN traité + produit avec le témoin non traité c’est à dire l’ADN natif (** différence très significative p < 0,01 ; * différence significative p < 0,05) à l’aide du logiciel GraphPad InStat version 3.00.

Forme circulaire relaxée ADN + Forme superenroulée x 1.66 Forme circulaire relaxée

% FII = 100 *

% protection = 100 *

PF – TNT

II.2.3. Résultats

Après irradiation de l’ADN plasmidique en présence et en absence des différents composés et après électrophorèse sur gel d’agarose, nous déterminons les pourcentages d’ADN sous forme circulaire relaxée (soit le pourcentage de cassures simple brin) et les pourcentages de protection correspondants. Les concentrations utilisées en Naphazoline et en WR-2721 sont les suivantes : 0,5, 1, 5 et 10 mM.

Les pourcentages de cassures simples brins obtenus après irradiation gamma en absence et en présence de Naphazoline et de WR-2721, en fonction de leur concentration, sont représentés figure 17.

Naphazoline WR-2721

Figure 17 : Pourcentage de cassures simples brins après irradiation gamma à différentes

doses (4, 5, 7 Gy) en présence et en absence de Naphazoline et du WR-2721 à différentes concentrations (0,5 ; 1 ; 5 et 10 mM). Tous les échantillons ont été réalisés en triplicates et sont représentés, sous forme d’histogramme, les pourcentages moyens obtenus et les écarts types. * produit + irradiation gamma versus témoin non irradié, p < 0,05, ** produit + irradiation gamma versus témoin non irradié, p < 0,01.

Une étude statistique est réalisée visant à comparer par un test de Student les moyennes des pourcentages d’ADN sous forme circulaire relaxée dans les échantillons traités par la réaction de Fenton en présence de produits avec la moyenne du pourcentage d’ADN sous forme circulaire relaxée dans le témoin non traité par la réaction de Fenton (** : différence très significative, * : différence significative).

Pourcentage forme circulaire relaxée 0 5 10 15 20 25 30 ADN non irradié ADN irradié Irrad. + NP 0,5 mM Irrad. + NP 1 mM Irrad. + NP 5 mM Irrad. + NP 10 mM 4 Gy 5 Gy 7 Gy ** **** ** ** ** ** ** ** * * * * 0 5 10 15 20 25 30 ADN non irradié ADN irradié Irrad.+ WR 0,5 mM ** ** ** ** ** ** ** ** **** Irrad. +WR 1mM Irrad. +WR 5mM Irrad. +WR 10mM Pourcentage forme circulaire relaxée 4 Gy 5 Gy

Les rayonnements gamma induisent des cassures simples brins. Le taux de coupures simple brin augmente avec la dose d’irradiation. Concernant l’expérimentation en présence de Naphazoline, les pourcentages de cassures générées par différentes doses d’irradiation sont évalués à 18,67 ± 0,99 % à 4 Gy, 26,05 ± 0,33 % à 5 Gy et à 24,61 ± 0,75 % à 7 Gy contre 3,13 ± 1,23 % en absence d’irradiation.

Pour l’expérimentation en présence de WR-2721, ces taux de coupures sont évalués à 16,44 ± 2,13 % à 4 Gy et 21,12 ± 1,54 % à 5 Gy contre 5,12 ± 1,45 % en absence d’irradiation. Les pourcentages de coupures obtenus, dans les deux expériences, après irradiation en absence de composé sont significativement différents des témoins non traités, c’est à dire non irradié et en absence des composés. (p < 0,01).

L’addition de Naphazoline dans le milieu induit une diminution du pourcentage de cassures simple brin après une irradiation gamma et quelle que soit la dose d’irradiation. De plus, cet effet est d’autant plus important que la concentration en Naphazoline augmente. Nous avons donc une relation dose-effet.

D’autre part, quelle que soit la dose d’irradiation, nous obtenons une protection maximale à la concentration de 5 mM (75,60 ± 0,94 % à 4 Gy). Ceci démontre l’effet protecteur vis à vis de l’ADN apporté par la Naphazoline.

Concernant le WR-2721, nous observons également une diminution du pourcentage de cassures simples brins lorsque la concentration en produit augmente, et ce quelle que soit la dose d’irradiation. Cependant, contrairement à la Naphazoline, nous n’observons pas une protection totale de l’ADN, même aux concentrations les plus élevées (44,54 ± 2,56 % à 4 Gy). Les pourcentages moyens de coupure obtenus en présence de WR-2721 à 10 mM restent encore significativement différents du pourcentage de coupure dans l’échantillon non irradié.

En conséquence, dans nos conditions, la Naphazoline semble plus efficace que le WR- 2721. Cependant, il ne faut pas oublier que le WR-2721 est une prodrogue du WR-1065 à l’origine de l’effet protecteur. Il semble que le passage par ce métabolite soit indispensable à l’observation d’un effet et que les rayonnements ionisants n’induisent pas sa formation.

Il est à noter que l’effet radioprotecteur de la Naphazoline, in vitro, s’effectue à des concentrations élevées. Ceci suggère qu’in vivo les effets physiologiques de cette molécule, en particulier, son effet alpha sympathomimétique, agissent en synergie avec son activité antioxydante. L’effet vasoconstricteur de la Naphazoline pourrait être à l’origine d’une diminution de l’effet oxygène. Dans nos conditions expérimentales, l’effet radioprotecteur observé de ce composé résulte de ses capacités à piéger les radicaux oxygénés formés in situ. Différents processus d’hydroxylation sur la molécule elle-même ou de donation d’hydrogène peuvent être envisagés.

II.3.

Mise en évidence des dommages de l’ADN après