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CHAPITRE III MÉTHODOLOGIE

3.3 Le déroulement de l’enquête de terrain

3.3.1 La préparation au terrain de recherche

Les premières démarches en lien avec le travail de terrain remontent à l’été 2017. Une connaissance impliquée dans le milieu du graffiti a été rencontrée à cette période dans l’objectif d’obtenir quelques informations pour construire le projet de mémoire et préparer l’accès au terrain de recherche. Celle-ci nous a présenté l’application Instagram comme un des meilleurs outils pour être au fait de la sous-culture du graffiti (à Montréal comme ailleurs dans le monde) de même que pour entrer en contact avec des participants ou participantes potentielles. Elle nous a de plus offert une liste d’utilisateurs Instagram qu’il était pertinent de suivre (comptes personnels de graffeurs et graffeuses ou de crews, tenus par des photographes de graffiti et street art, portant sur des styles particuliers de graffiti, ou encore publiant des « memes »279 se moquant

du graffiti légal). Un compte d’utilisatrice a donc été créé. Nous avons indiqué sur la biographie rattachée au compte : « Étudiante à la maîtrise faisant une recherche sur le "droit du graffiti" à Montréal ». L’observation des publications et, parfois, des commentaires émis nous a sans aucun doute permis de nous immerger dans une des réalités de l’univers du graffiti à Montréal, du moins à travers les yeux de quelques utilisateurs et utilisatrices. Cette démarche nous a donné une idée de l’ambiance qui règne au sein de la communauté du graffiti, du vocabulaire y étant utilisé, de certains réseaux de graffeurs et graffeuses (les personnes affiliées à différents crews de même que la pratique conjointe entre certains crews), de l’utilisation populaire de lieux

279 Selon la définition en ligne du dictionnaire Merriam-Webster, un « meme » est « an amusing or

interesting item (such as a captioned picture or video) or genre of items that is spread widely online especially through social media ». Le site de Lifewire précise que « [t]he majority of modern memes are captioned photos that are intended to be funny, often as a way to publicly ridicule human behavior » :

voir Paul Gil, « What is a Meme? » (1 juillet 2019), en ligne : Lifewire <https://www.lifewire.com/what- is-a-meme-2483702>.

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spécifiques, etc. Ce sont des informations sur lesquelles, plus tard, nous avons pu rebondir, autant au cours de discussions informelles au moment du recrutement que lors des entrevues avec les personnes participantes. Par ailleurs, alors qu’il était prévu d’amorcer nous-même le premier contact avec les participants et participantes potentielles, étonnamment, un des utilisateurs d’un compte auquel nous nous sommes abonnée nous a contactée de lui-même pour manifester son intérêt envers le projet de recherche. Quoi qu’il en soit, comme il sera explicité prochainement, l’approche heureuse de cet individu représente moins la tendance générale qu’une donnée aberrante, le recrutement de participants et participantes ayant constitué l’aspect le plus difficile de l’enquête de terrain.

Également, dans le même objectif de préparation au terrain, nous nous sommes abonnées à certaines pages sur Facebook : celle de Graffiti Montréal (qui contient des publications de photos de graffitis prises à Montréal, des mentions de certains graffeurs et graffeuses et d’événements reliés au graffiti) et celle des boutiques montréalaises Le Sino et Anonym Shop, les deux se spécialisant dans la vente d’aérosols destinés aux arts urbains. L’utilisation des réseaux sociaux a aidé à nous garder à jour quant aux événements en cours ou à venir auxquels participent des graffeurs et graffeuses. Nous avons d’ailleurs assisté, tout au long de l’enquête de terrain, à quelques-uns de ces événements (vernissages d’exposition et festivals), au cours desquels nous avons pu entrer en contact avec des personnes impliquées dans le milieu du graffiti à Montréal de même que, par l’entremise de multiples discussions informelles, nous familiariser avec les dynamiques sociales au sein du milieu du graffiti à Montréal. Bien que les informations recueillies au moment de ces démarches préparatoires et exploratoires ne soient pas utilisées dans l’analyse des données, elles ont certainement enrichi notre compréhension de la sous-culture à Montréal.

Enfin, il va sans dire qu’à partir du moment où le graffiti a été identifié comme sujet de mémoire, l’espace urbain nous est apparu sous un nouveau jour. Naturellement,

notre regard se rivait sur tous les tags qui croisaient notre chemin, que ce soit pour les déchiffrer, pour analyser le chemin emprunté par un graffeur ou une graffeuse (par les apparitions successives du même tag sur une même rue), pour identifier les tags de différentes personnes effectuées au même moment (par la proximité physique et stylistique des tags sur la surface) … Que ce soit dans les ruelles, le métro, les plus petites rues de quartier ou les grandes artères montréalaises, nous cherchions à vérifier les informations qui nous avaient été parvenues par la recherche documentaire et par les discussions plus ou moins informelles sur le graffiti avec notre entourage. C’est ainsi que nous avons constaté le dynamisme de la sous-culture (par l’apparition régulière de nouveaux graffitis dans des quartiers donnés), que certaines surfaces, comme les portes, étaient davantage utilisées pour des tags et d’autres, comme les toits, pour des throw-ups de plus grande envergure et que certains writers avaient une tendance plus marquée à repasser (ou à « crosser ») les murales des autres. D’une manière similaire à l’observation de l’activité d’utilisateurs-graffeurs sur les réseaux sociaux, l’observation des surfaces montréalaises nous a permis de nous familiariser avec les espaces du graffiti et ses usagers et usagères, contribuant autant à préparer notre accès au terrain qu’à élargir le travail de recherche.