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Préparation de l’état de magnétisation du gaz spinoriel

spinoriel

En l’absence de champ RF, nos échantillons spinoriels ont une polarisation de

mz ≃ 0.5. La distribution dans les sous-états de F = 1 est le résultat du pompage optique par les six faisceaux lasers pendant la phase de capture dans le piège di-polaire croisé, réalisé en présence d’un gradient de champ magnétique (voir section 2.3.3). Pour la suite de nos expériences, en particulier l’étude du diagramme de phase à basse température (voir chapitre 5), nous souhaitons pouvoir réaliser des conden-sats spinoriels avec des états de polarisation différents, idéalement allant de mz = 0

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à mz = 1. Dans la section précédente, nous avons vu comment l’interaction avec un champ RF tend à dépolariser l’échantillon. Une méthode consistant à changer d’état de polarisation de spin à l’aide d’une fraction de période d’oscillation de Rabi n’est pas satisfaisante, en raison des fluctuations du champ magnétique. Deux choix s’offrent à nous : soit nous augmentons l’amplitude du champ RF ce qui diminue le temps nécessaire pour modifier la polarisation du nuage, soit nous allongeons le temps d’interaction afin de tirer profit du brouillage pour dépolariser l’échantillon. Pour implémenter le premier choix, nous devrions construire un circuit d’adaptation d’impédance entre l’amplificateur et la bobine, et optimiser ainsi le courant parcou-rant la bobine. Nous avons opté pour le deuxième choix, plus rapide à implémenter. Dans cette section, nous allons d’abord décrire une procédure qui permet de dépolariser l’échantillon de manière contrôlée, en variant le temps d’interaction avec un champ RF à résonance. Afin d’accéder au contraire à des magnétisations plus élevées, nous avons mis au point une procédure basée sur une distillation de spin, que nous étudierons dans un deuxième temps.

4.2.1 Dépolarisation à l’aide d’un champ magnétique

oscil-lant

Nous étudions à présent l’étude du mécanisme de dépolarisation en fonction du temps d’interaction avec le champ RF. Nous effectuons le pulse RF pendant la phase de compression du PDC (voir section 3.2), en imposant un champ homo-gène B0 = B0ex avec une amplitude B0 = 240 mG, associée à la fréquence de Larmor ν0 = 168 kHz. Le champ RF B1eRF est allumé 160 ms après le début de l’évaporation libre, c’est-à-dire au début de la compression du piège. Nous introdui-sons également un décalage inhomogène spatial en ajoutant un gradient de champ magnétique b ≃ 1 G.cm−1 (voir équation (2.5)). L’ajout d’un gradient conduit à un déphasage des oscillations de Rabi le long des bras du PDC. Dans la direction

x, le long du premier bras, deux atomes distants de 100 µm (taille caractéristique de la distribution atomique dans les bras) ressentent des champs magnétiques qui diffèrent de 4 mG, correspondant à un décalage inhomogène de l’ordre 3 kHz. En plus du décalage inhomogène, nous balayons la radio-fréquence autour de ν0 avec une amplitude de 10 kHz pendant une durée ∆tRF. À cause du décalage spatial et du balayage de la fréquence, les oscillations de Rabi se brouillent dans le nuage. Le mélange des trois espèces de spin est le résultat de ce brouillage ainsi que de celui dû aux fluctuations du champ magnétique ambiant résiduel (environ 7 kHz).

Nous représentons dans la figure 4.5(a,b) l’évolution de la puissance du piège et l’amplitude du gradient dans la phase qui suit le chargement du piège dipolaire. Nous varions la durée du pulse ∆tRF, et faisons le diagnostic de la polarisation du nuage après le transfert et l’évaporation dans le piège composite. Les résultats de cette expérience sont montrés sur la figure 4.5(c,d).

La dépolarisation de l’échantillon est caractérisée par une augmentation des po-pulations N0 N−1et une diminution de N+1, avec un nombre total d’atomes constant à 10 % près. Elle est complète après ∼ 0.7 s, temps caractéristique du remplissage

124 contrôlée et diagnostic Stern et Gerlach −1 −0.5 0 0.5 1 0 10 20 30 40 t [s] P PDC [W] (a) −1 −0.5 0 0.5 1 0 2 4 6 8 10 12 14 t [s] b’ [G.cm −1 ] balayage RF (b) 0 0.5 1 1.5 0 1000 2000 3000 4000 ∆t RF [s] N +1 N 0 N −1 (c) 0 0.5 1 1.5 −0.1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 ∆t RF [s] m z (d)

Figure 4.5 – (a) Évolution de la puissance du PDC après son chargement du PMO. (b) Évolution de l’amplitude du gradient de champ magnétique pendant la phase de mélange de spin. (c) Populations des espèces mF = +1 (carrés rouges), mF = 0 (triangles verts) et mF = −1 (ronds bleus) en fonction du temps d’interaction ∆tRF

avec le champ B1. (d) magnétisation mz en fonction de ∆tRF.

du centre du PDC. Les valeurs de magnétisation des échantillons produits sont re-productibles à environ 5 % pour chaque valeur de ∆tRF. Nous concluons que la dépolarisation en présence d’un déphasage inhomogène nous permet de réaliser des états de magnétisation bien contrôlés en dessous de mz ≃ 0.5.

4.2.2 Purification à l’aide d’une distillation de spin

Pour réaliser des échantillons davantage polarisés, nous avons recours à la tech-nique de distillation de spin [127, 128] pendant la phase d’évaporation forcée. En présence d’un gradient de champ magnétique, la profondeur de potentiel est diffé-rente pour chaque espèce de spin, en raison de la force magnétique exercée par le

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gradient. Considérons des atomes plongés dans un champ de biais B0 = B0ez, sur lequel s’aligne le moment magnétique. L’ajout d’un gradient de champ magnétique

B = bx

2 ex− byey + bz

2 ez donne lieu à un terme d’interaction atome-champ dé-pendant de la position, dont dérive une force F pour chaque espèce de spin mF :

F(mF) = µBmF

2 kB0 + B∇k. (4.5)

Nous négligeons ici l’effet Zeeman quadratique. Cette force se réécrit de la manière suivante : F(mF) = µBmF 2kB0+ B∇k b′2x/4 b′2y bB0/2 + b′2z/4 . (4.6)

Pour des positions x, y, z . wPDC= 35 µm, un gradient b ≃ 12 G.cm−1, et le champ

B0 de l’ordre de 1 G, la force est principalement verticale :

F(mF) ≃ µBm4Fbez (4.7) Nous voyons que cette force agit dans des sens opposés pour les atomes dans

mF = ±1 : elle tend à compenser la gravité pour l’espèce +1 tandis qu’elle s’ajoute à la gravité pour l’espèce −1. Les profondeurs de potentiel des trois espèces selon z sont donc modifiées par le gradient. Nous pouvons évaluer le rapport entre la chute de potentiel due à la présence du gradient et celle due à la gravité :

∆V ∆Vgrav

= µBb

4mg (4.8)

Pour des gradients de l’ordre de b = 12 G.cm−1, ce rapport est proche de 1. Les déformations des potentiels dues au gradient de champ magnétique ne sont significa-tives que lorsque le piège dipolaire croisé atteint une profondeur de quelques dizaines de µK, c’est-à-dire pour des puissances inférieures à 1 W. Ces profondeurs sont at-teintes à la fin de l’étape de remplissage évaporatif du PDC dans le dimple, autour de t = 1 s. Dans la figure 4.6(a), nous représentons les potentiels de piégeage res-sentis par les trois espèces pour un gradient de champ magnétique b = 12 G.cm−1, et PPDC = 500 mW. Nous reportons également dans 4.6(b) les résultats d’une ex-périence, dans laquelle nous avons mesuré la magnétisation d’un échantillon pour différentes valeurs du gradient bappliqué pendant la rampe d’évaporation. La valeur du gradient est modifiée immédiatement après la fin de la période de “PMO froid”, et gardée constante pendant la compression et l’évaporation commune dans le PDC et le piège dimple, jusqu’à t = 1.8 s (au moment du transfert dans le deuxième piège composite).

La magnétisation augmente avec le gradient appliqué, signe que nous évaporons préférentiellement l’espèce mF = −1. À cause de la déformation des potentiels, comme nous le montrons dans la figure 4.6(a), la profondeur effective du piège pour l’espèce mF = −1 est plus faible que celle des deux autres. Les déplacements des centres des trois pièges induits par le gradient sont négligeables devant la taille du

126 contrôlée et diagnostic Stern et Gerlach −150 −100 −50 0 50 100 150 −30 −20 −10 0 10 z [µm] V / k B [ µ K] mF=−1 m F=0 mF=+1 b’=14.4 G.cm−1 (a) 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 0 1000 2000 3000 4000 (b) µBb’/4mg 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 µBb’/4mg m z (c)

Figure 4.6 – (a) Potentiels de piégeage selon z pour les espèces mF = +1 (ligne rouge), mF = 0 (ligne verte), mF = −1 (ligne bleue), pour un gradient de champ magnétique b = 12 G.cm−1 et une puissance PPDC = 500 mW. (b) Magnétisation de l’échantillon spinoriel en fonction du gradient de champ appliqué.

piège, si bien que les trois nuages restent en contact thermique tout au long de la rampe d’évaporation. Le paramètre η = V/kBT (défini dans la section 3.1), est dif-férent pour chaque espèce, ce qui conduit à des taux d’évaporation plus élevés et donc à une évaporation plus rapide pour mF = −1 et mF = 0 que mF = +1. C’est pourquoi on parle de “distillation de spin”. L’espèce la mieux piégée, ici mF = +1, profite du refroidissement sympathique [18] avec les deux autres espèces, et la di-minution de la température s’effectue au prix d’une baisse moins importante du nombre d’atomes dans mF = +1 que pour les autres espèces (voir figure 4.6(b)). Ce processus de distillation nous mène à des échantillons davantage polarisés, jusqu’à