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4.3 Diagnostic du gaz spinoriel

5.1.1 Diagramme de phase avec un magnétisation libre

par l’hamiltonien de spin que nous avons écrit dans le chapitre 1, dans l’équation (1.34). Dans l’approximation de mode unique, qui suppose un découplage entre les degrés de liberté externes et internes, cet hamiltonien se récrit de manière générique à l’aide des opérateurs de spin si de chaque atome i :

ˆ H = Us 2N N X i6=j ˆ si· ˆsj+ pXN i ˆsi,z+ qXN i ˆs2 i,z. (5.1)

Le premier terme correspond au terme d’interaction dépendante du spin, et favo-rise l’anti-alignement des spins, à cause du signe positif de l’énergie de spin Us (voir équation (1.46)). Le deuxième terme décrit l’effet Zeeman linéaire, proportionnel au champ magnétique appliqué p = −µBB0/2, qui tend à aligner les spins selon la direction du champ. Le troisième terme correspond à l’effet Zeeman quadratique, d’amplitude q = qBB2

0, qui favorise l’espèce mF = 0 par rapport aux deux autres espèces mF = ±1. Il est possible de modifier l’effet Zeeman quadratique, voire même de changer son signe à l’aide d’un couplage avec des micro-ondes mais nous ne fai-sons pas ici [141].

En champ moyen, nous rappelons la forme que prend la fonctionnelle d’énergie de spin d’un atome dans ce système, obtenu dans la section 1.3.2. Avec la para-métrisation de la fonction d’onde de spin (√n+1e+1, √n0e0, √n−1e−1)T, et pour un système caractérisé par une énergie dépendante du spin Us, soumis aux effets Zeeman linéaire p et quadratique q, nous avons :

Espin Us =1 2m2z + x(1 − x) + cos(2Θ)(1 − x)qx2− m2 z  − P x + Qx, (5.2) où Q = q/Us et P = −p/Us. Dans cette expression, x = n+1+ n−1 = 1 − n0 avec ni la fraction d’atomes dans la composante mF = i, et mz = n+1− n−1 est la projec-tion du spin total selon z : mz = Mz/N, Θ = (θ+1+ θ−1)/2 − θ0. Nous remarquons immédiatement que quand Us>0, cette énergie est minimisée pour Θ = π/2.

5.1. Diagramme de phase du gaz de spin 1 139

En absence d’effet Zeeman (P = Q = 0), l’énergie Espin est minimisée pour

mz = 0 et x peut prendre toutes les valeurs entre 0 et 1, c’est-à-dire que toutes les solutions telles que n+1 = n−1 sont admises. L’état de spin associé vérifie hSi = 01, et correspond à la famille d”états dits “polaires” introduit par [22]. Chaque élément de cette famille correspond à un état où les atomes sont dans l’état mF = 0 selon un axe de quantification n dans la sphère unité. En coordonnées polaires, cette famille d’états s’écrit de la manière suivante :

poli = R(θ, φ) 0 1 0 = √1

2sin θe−iφ

cos θ

1

2sin θe

, (5.3)

avec n l’axe pointant dans la direction (θ, φ). Le vecteur n définit l’“axe directeur nématique” [63, 142], et pointe dans une direction arbitraire de la sphère unité. L’état fondamental correspond à la superposition cohérente de tous ces états, qui est invariant par symétrie dans l’espace de spin.

Plus généralement, le système de spin 1 peut être caractérisé par un paramètre d’ordre nématique de spin [143, 144], un vecteur analogue à l’orientation préféren-tielle moyenne des molécules dans un cristal liquide [145]2. Nous décrivons les trois phases particuliers associées au système [26], en caractérisant pour chacune le para-mètre d’ordre nématique et la magnétisation associés. Les phases sont obtenues en minimisant (5.2) à P, Q donnés, et regroupées dans la figure 5.1. La minimisation est assez élémentaire quoiqu’un peu fastidieuse, nous donnerons par conséquent uni-quement les résultats.

• Pour un effet Zeeman tel que (

P2/2 < Q si P ≤ 1

P < Q+ 1/2 si P > 1, (5.4) l’énergie Espin est minimisée pour x = 0 et mz = 0. Toutes les atomes sont dans l’état mF = 0 par rapport à l’axe ez, avec un spin moyen nul hSi = 0. Un tel état correspond à un état dit “polaire-z” (Pz), c’est-à-dire un état polaire dont l’axe directeur nématique n est aligné selon la direction du champ ez3. Dans la base hyperfine {F = 1, mF}mF=+1,0,−1, cet état s’écrit :

Pzi = 0 1 0 . (5.5)

Pour cet état, nous constatons que h ˆSx

2 i = h ˆSy 2 i = 1 et h ˆSz 2 i = 0. Le vecteur directeur nématique est perpendiculaire au plan dans lequel sont confinées les 1. En effet, hSxi = 2px(1 − x) cos(Θ) cos(θ+1−1

2 ) = 0 car Θ = π/2, de même hSxi = 2ipx(1 − x) cos(Θ) sin(θ+1−1

2 ) = 0, ethSzi = mz= 0.

2. Quand hSi = 0, ce paramètre d’ordre peut être construit à partir du tenseur nématique d’ordre 2 notéNab [63] :Nab= 1

2h ˆSaSbˆ + ˆSbSaˆi où a, b = x, y, z et ˆSa l’opérateur de spin dans la direction a (voir section 1.3).

140 température ! !"# $ $"# ! !"$ !"% !"& !"' !"# !"( !") !"* P Q Polairez AF F n n m m 2eme ordre 1 er ordre B

Figure 5.1 – Diagramme de phase de l’état fondamental en champ moyen d’un gaz de spin 1 dans un champ magnétique dirigé selon ez. Nous indiquons en lignes continues rouge (P2/2 = Q) et noire (P = Q + 1/2) les frontières des phases ca-ractérisées par une discontinuité de la magnétisation, signature d’une transition du premier ordre. La ligne tiretée bleue symbolise la frontière à laquelle on change de phase avec mz continue, signature d’une transition de deuxième ordre. Dans chaque sphère, chaque axe a correspond à un état de spin mF = 0 selon a. Pour l’état “polaire-z” (Pz), de magnétisation nulle, l’axe directeur nématique n (flèche rouge) est dirigé selon la direction du champ. L’état “antiferromagnétique” (AF) possède à la fois une magnétisation m parallèle au champ magnétique (flèche bleue), et un ordre nématique n qui lui est perpendiculaire. Pour l’état “ferromagnétique” (F), tous les spins sont égaux à mF = +1 selon l’axe du champ. La magnétisation est complète, c’est-à-dire mz = 1, et l’ordre nématique disparaît.

fluctuations de spin.

• Pour un effet Zeeman tel que

P2/2 > Q et P < 1 (5.6)

Espinest minimisée pour x = 1 et mz = P . Cet état, appelé “antiferromagnéti-que” (AF) [63], est caractérisé par une magnétisation longitudinale m = mzez non nulle et m = 0. L’état de spin |ζAFi correspondant est :

AFi = q 1+P 2 e−iφ 0 −q1−P 2 e . (5.7)

Pour cet état, les fluctuations de spin dans le plan x − y ne sont plus iso-tropes : h ˆSx

2

i 6= h ˆSy

2

i, si bien que la symétrie par rotation des fluctua-tions autour du champ magnétique est brisée. Un ordre nématique transverse

5.1. Diagramme de phase du gaz de spin 1 141

subsiste [144] caractérisé par un vecteur n qui évolue dans le plan x − y :

n k cos(φ)ex + sin(φ)ey. Une superposition cohérente de ces états restaure l’isotropie dans le plan x − y.

Dans cette phase, les interactions dépendantes du spin dominent devant l’effet Zeeman quadratique. À cause du caractère antiferromagnétique des interac-tions (Us >0), l’espèce mF = 0 n’est pas miscible avec les espèces mF = ±1, alors que ces deux dernières sont miscibles entre elles (voir section 1.3.2). C’est pourquoi l’espèce mF = 0 tend à être éliminée [25, 146].

• Pour un effet Zeeman tel que

P >1 et P > Q + 1/2, (5.8)

Espin est minimisée pour x = 1 et mz = 1. Cette phase, dominée par l’effet Zeeman linéaire, correspond à un état polarisé : tous les atomes sont dans l’état mF = +1. Cette phase est souvent appelée par abus de langage “ferro-magnétique” (F), l’orientation étant imposée par le champ extérieur. L’état de spin |ζFi correspondant est :

Fi = 1 0 0 . (5.9)

Il n’y a pas d’ordre nématique dans cette phase : n = 0.

Dans toutes ces phases, le paramètre d’ordre nématique se trouve dans le plan per-pendiculaire à l’axe de magnétisation.

Deux types de transitions de phases ressortent de ce diagramme. Nous les indi-quons dans la figure 5.1.

• Si nous fixons P et augmentons Q, la magnétisation mz reste contante égal à

P (ou 1 selon la valeur de P ), puis chute abruptement à 0 en passant dans la phase polaire. Pendant la traversé de cette frontière, le paramètre d’ordre n bascule abruptement du plan x − y à l’axe ez. Cette discontinuité s’interprète comme une transition de phase du premier ordre.

• Si nous fixons Q et augmentons P en partant de la phase antiferromagnétique, nous passons d’une phase à deux composantes à la phase polarisée avec une variation continue des populations relatives et de la magnétisation mz à la frontière P = 1. La norme du vecteur n devient nulle à la frontière. Cette transition est du deuxième ordre.

Il est intéressant de noter que ce système est analogue à un ensemble de spins, de norme 1, placés sur un réseau bipartite et couplés par un terme d’échange de type Heisenberg [147]. Nous décrivons ce système dans l’annexe D et étudions, dans l’approximation de champ moyen, l’orientation moyenne des spins de chaque sous-réseau en fonction du champ magnétique appliqué et de l’anisotropie ionique. Nous

142 température en déduisons l’existence de plusieurs transitions de phase, comme la transition “spin-flop” [148], analogue à la transition de phase du premier ordre du gaz spinoriel décrite précédemment. En particulier, nous mettons en évidence deux paramètres d’ordre, la magnétisation (somme des spins moyens des deux sous-réseaux), et la magnétisation alternée (leur différence), qui sont équivalents à m et n.