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Les différents postes disponibles

A. Un accès restrictif à des postes aliénants : une procédure imprécise

2. Les différents postes disponibles

Le détenu peut espérer travailler soit pour le service général(a) soit en atelier(b).

22 Annexe n° 8 : grille dévaluation en fin de période d’intégration

La nature de ce travail, d’après les témoignages recueillis, est peu valorisante. Le détenu ne peut prétendre qu’à effectuer des tâches répétitives ne nécessitant la plupart du temps aucune formation. Cela ne fait qu'appuyer notre point de vue sur le fait que le détenu travailleur constitue une main d'œuvre « jetable, docile et vulnérable ».

De plus il est facile pour le contremaître de le remplacer d'un jour sur l'autre. Il en résulte une énorme instabilité propre au statut de détenu travailleur qui rend vaine toute perspective d’évolution sur les postes.

a. Le service général

Lorsque les détenus sont affectés au service général, ils sont chargés d’assurer le fonctionnement courant de la prison en vue de maintenir en état de propreté les locaux de la détention et d’assurer les différents travaux ou corvées nécessaires au fonctionnement des services de l’établissement pénitentiaire.

Par le service général les détenus contribuent au fonctionnement général de l'établissement, à son entretien courant et à celui des abords, à sa maintenance, à la préparation et à la distribution des repas ainsi qu'au fonctionnement de la buanderie.

L'organigramme du service général comporte également la plupart du temps un coiffeur, un assistant bibliothécaire, un écrivain public et un assistant en audiovisuel.

Certains emplois, pour des raisons de sécurité, sont interdis aux détenus, ainsi l’art D 105 du CPP prévoit expressément qu’aucun détenu ne peut être employé aux écritures de la comptabilité générale, au greffe judiciaire ou dans les services médico-sociaux.

L'organisation du service général prend en compte la nécessité de doter les détenus qui y sont employés de compétences professionnelles favorables à la qualité des services rendus. Elle est conforme aux règles d'hygiène et de sécurité particulières aux domaines d'activités concernés. 23

23 Annexe n°9 : Règlement spécifique Maintenance

Le financement des rémunérations et des cotisations sociales des détenus employés aux activités du service général est pris en charge directement par l'Administration.

La gestion des crédits budgétaires affectés au service général est assurée site par site par le chef d'établissement.

Le montant minimum journalier de rémunération par détenu est fixé par l'administration pénitentiaire pour l'ensemble des établissements. Il est réévalué chaque année conformément à l'évolution du SMIC horaire.

Il existe trois niveaux de rémunération journalière selon la qualification du détenu.

- Classe 1 : les ouvriers qualifiés : 13,03€

- Classe 2 : Les ouvriers spécialisés : 10,41€

- Classe 3 Les manœuvres occasionnels 7, 76 €

Malgré cette faible rémunération, largement inférieure à celle pratiquée en atelier, l’emploi au service général est fortement prisé par les détenus notamment parce que cela implique une certaine liberté au sein de la prison.

b. Les ateliers de production

Dans le cadre du travail en atelier, le recours à la main d’œuvre pénale se fait pour toutes sortes de productions, parfois de grandes « marques ».

A la Maison d’Arrêt de Luynes visitée, les détenus fabriquaient des coupes de sport pour la marque France Sport, des cartes postales pour Décathlon, et dans les ateliers de La Farlède, ils étaient employés à de l’emballage pour Yves Rocher et à des assemblages de produits pharmaceutiques pour Para Pharma.

Le travail en atelier consiste le plus souvent en des activités de conditionnement et de façonnage, ou encore de pliage, d’ensachage ou de tri. Ainsi les détenus fabriquent des cotillons ou des stickers ou encore procèdent au montage de bouchons de porcelaine, de panneaux de signalisation routière. De même ils peuvent être amenés à effectuer du montage publicitaire ou du collage d’étiquettes.

Au regard de cette liste non exhaustive, il est facilement compréhensible que le travail en atelier est souvent décrié, jugé inintéressant, aliénant et pas suffisamment formateur. Cependant des évolutions prometteuses doivent être soulignées.

Parfois, certaines activités requièrent un réel savoir faire, par exemple pour le contrôle et le montage de puces et de circuits électroniques de téléphonie mobile, ou pour la fabrication de moteurs d’avion. De plus la manipulation de certaines machines sophistiquées nécessite une réelle formation.24

Dans un autre domaine, il est important de noter le développement du secteur tertiaire dans les travaux proposés aux détenus. Ainsi a été expérimentée au centre pénitentiaire de Bapaume une plate-forme téléphonique de renseignements. Une cinquantaine de détenus sont occupés à ces postes. Le centre s’est équipé d’un espace High-tech, avec l’installation de téléphones, ordinateurs et casques. Ce type d’évolution est extrêmement intéressant car il permet aux détenus de bénéficier d’une formation et d’une expérience qu’ils pourront valoriser à l’extérieur dans un secteur très demandeur.

Cette expérience va dans le sens des mesures préconisées par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté autorité indépendante jugeant "nécessaire, rapidement, de développer un dispositif actif de recherche d'offres de travail" ou encore "d'encourager de nouveaux modes d'activité" comme l'informatique.25

Enfin nous avons constaté qu’a l’occasion de ce travail en atelier se met en place une hiérarchisation des détenus, certains se hissant au poste de détenus-contrôleurs dont le pouvoir est ambiguë puisqu’ils ont un rôle de contrôle sur leurs codétenus.

Pour chaque activité est élaboré un règlement d'atelier26 détaillé, minutieux et tatillon, précisant notamment les multiples conditions d'organisation interne du travail, les modalités de

24 Annexe n° 10 Autorisation de conduite des chariots automoteurs de manutention

25 Nouvel Observateur 15 mai 2009 « Le travail carcéral préoccupe le contrôleur »

26 Annexe n° 4 : règlement des ateliers de production

rémunération et les diverses mesures d'application de la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité. Ce règlement est signé par le chef d'établissement et il est affiché dans chaque atelier.

La rémunération minimale est le Seuil Minimum de Rémunération (SMR) fixé en Maison d'Arrêt et en Etablissement pour peines selon le barème établi annuellement par l'Administration Pénitentiaire. Il est indexé chaque année sur le SMIC horaire.

Tous les postes offerts aux détenus sont caractérisés par leurs spécificités répétitives, pénibles et finalement aliénantes. Dans un établissement visité nous avons été étonnés de voir que les détenus travaillent en journée continue de 7h 30 à 13 h 30 avec deux pauses de cinq minutes, debout sur des tréteaux rudimentaires sans chaises de repos.

Cette pénibilité sans repos concédé sur les postes de travail, s’ajoutant a une surmédicalisation calmante aux benzodiazépines, ne participe-t-elle pas d’une volonté d’anesthésie collective de cette population réputée inquiétante ?

Après ce que l'on pourrait qualifier de maelström juridique asservissant quant à l’accès du détenu au travail, il convient de s’intéresser maintenant aux conditions légales d’exécution de ce travail captif.