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La possible rencontre de la chanson et du théâtre en trois exemples

3.3 Le spectacle final

3.3.1 La possible rencontre de la chanson et du théâtre en trois exemples

Suite au visionnement de l’enregistrement vidéo du spectacle expérimental, nous avons ciblé trois extraits susceptibles de montrer comment il est possible de théâtraliser l’objet- chanson215 en mettant en action simultanément les trois corps de nos axes de recherche : le corps du chanteur, le corps du musicien et le corps de la musique. Deux des extraits choisis sont des moments où il y a altération de l’objet préexistant. En effet, pour introduire de la théâtralité dans la chanson, la musique se modifie pour laisser planer un sens nouveau.

214 Voir l’annexe XVIII de cet essai.

215 Nous tirons ce concept de la terminologie de Jean-Nicolas De Surmont, La poésie vocale et la chanson

Nous allons le voir dans ce qui suit, c’est le cas dans la première pièce chantée du spectacle, La chanson de la chanteuse ratée, et c’est aussi le cas dans la chanson Parapluie sans lui.

Dans La chanson de la chanteuse ratée, le spectacle démarre après le retard de la vedette. Il s’agit d’une chanson qui parle de narcissisme : la chanteuse s’aime elle-même et le montre. Elle croit être « le phénomène » de l’heure et elle s’affiche à travers un jeu de séduction. Son corps est dansant et exprime la coquetterie et à cela répondent les réactions des Odettes, jouant un chœur-public. C’est alors qu’une menace d’abandon survient216 : le chœur-public décide de ne plus suivre Odile, de la quitter. C’est ce moment qui nous intéresse. Comme Odile perd son public, son état d’esprit change. Dans un premier lieu, elle réagit avec son corps. Elle devient menaçante : elle prend son ukulélé, elle le tient serré dans ses bras comme une arme à feu. Elle le bouge au rythme de la musique comme si elle lançait des coups de fusil. Cette séquence présente deux stratégies de théâtralisation. D’abord, il y a implication du corps et du masque facial puisqu’Odile implique son expression corporelle et « libère son visage » en le laissant signifier l’état d’âme du personnage217. Ensuite, Odile utilise le principe du détournement de l’instrument de musique. L’ukulélé n’est pas employé comme outil sonore, mais bien comme symbole de violence.

Dans un second lieu, Odile ne chante plus, car c’est une Odette narratrice218 qui le fait dorénavant. L’Odette narratrice, avec une voix neutre, annonce le drame qu’Odile mimera par la suite : « Après deux clins d’œil nerveux et un sourire forcé, elle prit une allumette. De grandes flammes furent projetées, sa robe prit en feu, ainsi que l’assistance ». Puis, au moment de prononcer le mot « allumette », on ajoute d’autres stratégies de théâtralisation pour étoffer la scène : le corps musical et les musiciens-acteurs se mettent de la partie. Pendant qu’Odile allume une bombe (évoquée par un ballon gonflable et un feu de Bengale), le corps musical joue une sonorité qui induit la tension et soutient l’intériorité d’Odile. Concrètement, l’ensemble des instruments, dans un rythme lent, mais soutenu, crée une musique qui est de plus en plus aigüe et de plus en plus forte. On emploie

216 Consulter la vidéo, annexe XIX, à 00.06.20.

217 Cette stratégie fait référence aux propos d’Yvette Guilbert, section 2.1.4.

218 On utilise ici la stratégie de la narration pour inviter le spectateur à douter du niveau de réalité dans lequel

la scène se passe. Pourquoi y a-t-il narration ? Est-ce parce que le drame qui se passe devant leurs yeux est un souvenir ? L’Odette narratrice change aussi de statut.

donc une métaphore attributive basée sur le mouvement ascendant, le rythme et le volume pour symboliser les émotions du personnage d’Odile219. Cela est renforcé aussi par l’emploi de stratégies vocales : les Odettes chantent aussi et emploient hauteur et volume. Disposées ici et là dans le public, elles chantent à répétition le mot « non », de plus en plus fort et de plus en plus aigu. L’Odette narratrice, quant à elle, fait une longue note avec une voix d’opéra… jusqu’à ce que tout explose. Les musiciens-acteurs, quant à eux, sont placés en hauteur dans l’espace scénique (sur une plateforme). Ils sont éclairés pour en faire des témoins de la scène. Nous utilisons la stratégie qui veut que l’on sorte le musicien de sa fosse d’orchestre220. Nous aurions pu d’ailleurs accentuer cet effet par des jeux de regard plus dirigés et des mimiques plus engagées dans ce rôle de témoin.

L’extrait décrit ci-dessus, même s’il ne dure que quelques instants, montre comment nous avons pensé l’écriture de la partition finale et comment nous avons fait interagir les stratégies de théâtralisation pour supporter, dans ce cas particulier, l’idée d’une transition psychologique du personnage d’Odile. Non seulement il y a usage des moyens vocaux et corporels de la chant-actrice en question, mais il y a aussi une simultanéité des stratégies par la convocation du corps musical et la présence d’un musicien-acteur.

Dans le deuxième extrait221 qui nous intéresse, situé dans le tableau La magie peut- être bien II, dans lequel est présentée la chanson Parapluie sans lui222, une variété de stratégies de théâtralisation ont aussi été utilisées pour soutenir la dramaturgie de l’autosabotage et pour présenter, de surcroît, comment Odile en est arrivée à devenir un être explosif. Mentionnons dans un premier temps que Parapluie sans lui est une chanson qui présente l’Odile d’avant, celle qui n’avait pas le profil de l’échec et encore moins celui d’une chanteuse écrapoutie. La chanson se veut plutôt naïve : Odile a un rendez-vous galant avec l’homme de ses rêves. Et tout se passera bien jusqu’à ce qu’on apprenne à connaître réellement les intentions de son compagnon, joué par une des Odettes, déguisée grossièrement en garçon.

219 Voir la section 2.3.1 du présent essai. 220 Voir la section 2.2.1 du présent essai.

221 Voir la vidéo en annexe, de 00.37.20 à 00.39.00.

La séquence, qui, précisons-le, a été insérée à l’intérieur de la chanson (on a ajusté l’arrangement aux besoins dramaturgiques), commence avec l’homme qui se met à genoux en avant-scène. Hormis le fait que les deux chant-actrices impliquent leur corps en déployant une esthétique burlesque et caricaturale, un autre moyen de théâtralisation est employé. En effet, le corps musical se met à l’œuvre pour symboliser le double du personnage masculin, son côté mal intentionné223 : Odile croit alors à une demande en mariage, mais le corps musical nous indique clairement que l’homme prépare un mauvais coup (la guitare acoustique fait des boucles d’accords mineurs en utilisant à l’occasion des notes graves). Sur ce fond musical plutôt sombre, l’homme présente une jolie petite boîte en forme de cœur. Or, cette dernière contient un ballon noir dégonflé. L’homme le prend et le fait claquer de manière arrogante. Les musiciens-acteurs, toujours sur leur plateforme, observent la scène, encore comme témoins. Mais on sent qu’un des membres du chœur de musiciens dirige le groupe. Il fait un signe de la tête. C’est alors que la pluie se met de la partie. C’est le corps musical qui la met de l’avant : un des musiciens joue un type de percussion qui, par métaphore comparative, rappelle le son de la pluie qui tombe sur un toit (rythme, volume et timbre). L’homme gonfle ensuite le ballon en faisant un mouvement de va-et-vient avec le bassin et en respirant bruyamment. Odile, quant à elle, chaque fois que le ballon grossit, lance un petit cri chanté, de plus en plus aigu, qui rappelle, par le principe de la métaphore comparative, l’orgasme féminin (rythme). L’homme est fier d’être arrivé à ses fins. Lorsque le ballon se dégonfle et virevolte dans les airs, les illusions d’Odile se dégonflent aussi et la musique s’arrête. Odile lance une fleur à son compagnon (c’est lui qui la lui avait offerte en cadeau) ; elle est contrariée. Puis, il y a un coup de tonnerre (joué par un instrument de musique). Et, sans tarder, l’homme va rejoindre tout simplement une autre femme au loin, incarnée par une des Odettes. Odile, elle, se retrouve seule sous la pluie et va s’asseoir côté jardin. Les Odettes y sont aussi, mais elles demeurent invisibles pour jouer le son de la pluie en tapotant le parapluie et elles lancent des plumes pour symboliser la pluie qui tombe sur Odile.

L’homme, lui, est désormais côté cour. Avec la même fleur qui représentait le lien supposément amoureux avec Odile, il caresse la femme qu’il a rejointe et utilise la tige de

la fleur pour symboliser une pénétration. Odile, seule, est assise comme si elle était dehors. Elle chante ces paroles tout en regardant la scène qui lui brise le cœur : « Chapeau fleuri, mini clapotis, des sucreries sous la pluie. Bottes de pluie, parapluie sans lui, reviendra-t-il vendredi ? ». Odile chante d’une voix brisée, en faisant des nuances vocales qui donnent une sensation de peine. On ne sait pas si elle imagine la scène. On ne sait pas si c’est un souvenir dont elle a été témoin. Les niveaux de réalité se rencontrent et se mélangent. C’est une tentative de mise en scène qui cherche à démontrer comment un rêve peut se briser, comment tout peut concourir à noircir une situation qui semblait pourtant bien partie. Puis, Odile se lève et continue de chanter. À ce moment, elle joint plusieurs stratégies vocales pour signifier ce qu’elle ressent : volume bas, rythme plus lent qu’à l’habitude, parlé-chanté en sont trois exemples. L’accompagnement musical est aussi modifié. La naïveté de la chanson, qui habituellement transparaît dans le sautillement de la guitare et le rythme marchant de la contrebasse, fait place à un jeu guitare acoustique doux et ralenti et à quelques notes de contrebasse. Cela contribue au sentiment de tristesse qui émerge de la situation. Le musicien-acteur qui dirige l’ensemble, à ce moment, la regarde. On a l’impression qu’il est de pair avec elle, voire qu’il a de la compassion.

Les stratégies de théâtralisation employées dans cette scène ont en fait dépassé les trois axes de recherche. Mentionnons l’apport des accessoires qui participent au système de signes : le ballon, les plumes et la fleur. Tous font d’abord partie de l’univers kitsch d’Odile, avec leur aspect léger et bonbon. Cependant, ils se poétisent ensuite pour participer au drame. Le ballon devient phallique, les plumes incarnent la pluie et la fleur est l’objet symbolique d’un crime contre Odile. C’est un jeu de contraste essentiel à notre proposition artistique.

Du côté des musiciens-acteurs, d’autres pistes auraient pu être explorées. D’abord, puisqu’ils sont visibles et qu’on les voit diriger la scène musicalement, il aurait été intéressant de travailler la direction des regards ou, du moins, d’en accentuer quelques-uns. Par exemple, au lieu de regarder Odile dans la séquence de la trahison, les musiciens- acteurs auraient pu regarder les deux amants (les traîtres) en plein ébat. On aurait pu y lire une autre signification. Hypothétiquement, cela aurait pu représenter les yeux du jugement ou encore les yeux du voyeurisme. D’autre part, nous aurions aussi pu mettre un éclairage

différent sur les musiciens-acteurs. Comme ils sont les créateurs sonores de la météo de ce tableau et des tensions dramatiques, un changement de couleur aurait été intéressant. Un l’éclairage latéral, pour effacer leurs visages tout en les gardant présents, du moins en mouvement, aurait peut-être aidé à ce que les signes en place sur scène soient plus précis pour le spectateur.

Pour terminer, le troisième extrait que nous avons sélectionné pour montrer comment se concrétise l’idée de la théâtralisation de l’objet-chanson est un tableau complet nommé La magie, peut-être bien I 224 dont fait partie la chanson Je monte je monte. Ici aussi on est du côté illusionné d’Odile : celui de l’espoir.

Au début de la séquence, où nous avions en tête d’utiliser la corporalité de la chant- actrice et de la mettre en rapport avec le corps musical, Odile ouvre à nouveau une boîte. Elle y voit quelque chose dont on ne connaît pas la substance. Odile réagit : elle se met à courir. Et la musique court avec elle, après elle. C’est un jeu : Odile joue et rigole dans l’espace. Pour réussir ce jeu de déplacements et de chasse amoureuse, nous avons utilisé le son de la guitare électrique. Par métaphore comparative, on peut comprendre que le corps musical fait des pas : c’est le rythme des notes qui nous aide à faire ce saut imaginatif. Le corps d’Odile participe à la métaphore par ses déplacements. Nous avons aussi demandé au technicien de spatialiser le son en direct afin que le spectateur puisse suivre des oreilles le déplacement comme s’il s’agissait d’une réelle présence en scène.

Dans un deuxième temps, une lumière s’ouvre sur le praticable côté jardin. Alors, tout se fige en silence. On entend un cœur qui bat (joué par la guitare acoustique). La douche lumineuse éclaire la scène au rythme du cœur. On voit, dans la pénombre, un musicien-acteur marcher et jouer les battements cardiaques. Ce dernier est, pour la première fois du spectacle, en dehors de sa zone scénique habituelle. Cela n’est pas un hasard. Il s’agit d’une stratégie de théâtralisation pour garnir l’épaisseur de signes, pour créer une vie scénique (voir la section 2.2.4). Le musicien-acteur est alors personnage. Son jeu instrumental doit d’ailleurs s’adapter à cette nouvelle réalité.

Dans un troisième temps, la scène se focalise sur Odile, qui est obnubilée par la lumière et la musique. Elle se dirige, à petits pas, bras tendus, vers la source, comme s’il s’agissait d’un aimant. Tranquillement, le rythme du cœur fait place à l’accompagnement musical de la chanson. Cette musique est douce : elle prépare le terrain d’une chanson qui parlera d’espoir. Pour rencontrer cet « espoir », Odile monte dans la zone éclairée et y chante. Puis, lorsque la lumière change de praticable, Odile le fait aussi. Mentionnons que les stratégies de théâtralisation employées dans ce passage touchent surtout la chant- actrice. Odile doit faire intervenir une série de poses, de regards et de gestes pour interpréter sa chanson.

La dernière séquence de cet extrait commence avec l’ouverture d’une lumière qui met en évidence un guitariste, jouant de sa guitare. Il est assis dans la zone réservée habituellement au monde intime d’Odile (sa chambre à coucher, voire son lit). Odile se dirige vers lui dans la pénombre tout en chantant. Lorsqu’elle pénètre dans la lumière, on ne voit pas qu’Odile et son musicien, on voit aussi l’esquisse d’un couple en train de passer un moment du quotidien ensemble. Odile regarde son compagnon avec espoir. Elle veut le toucher. Quand elle s’apprête à le faire enfin, l’homme se lève et disparaît, laissant Odile dans la solitude. Était-ce un fantôme ? Ou un idéal, imaginé et inatteignable ? Était-ce le rêve de son propre musicien ? Ce moment de rencontre entre Odile et le personnage musicien laisse planer une série de questions sans réponse, de tensions dramatiques.

Nous croyons que ce tableau est l’un des plus complets de notre spectacle en termes de stratégies employées et, de surcroît, d’évocation : il s’agit d’un moment poétique. Le fait de sortir le musicien-acteur de sa zone de jeu habituelle (la plateforme) a soudainement ouvert le système de significations. C’est ce que l’on constate avec la série de questions sans réponse qui se font jour autour du rapport entre le musicien-acteur et Odile. D’autre part, le musicien-acteur a aussi pris des risques qu’il ne prend pas généralement : il a modifié l’arrangement de la chanson, il a joué de son instrument en se déplaçant dans la noirceur et il a interagi corporellement avec la chant-actrice. Nous avons ainsi pu montrer le potentiel théâtral du changement de statut d’un musicien. Son apport à la dramaturgie a été consistant.

L’accompagnement musical est aussi un signe important dans le contexte de cet extrait. Il a été modifié pour exprimer, par métaphore attributive, l’idéal de l’amour. Certaines notes sont soutenues et il y a de délicates nuances, des petits glissandos qui caressent doucement les oreilles. Rien n’est brusque. La sensation d’un calme harmonieux plane.

Mentionnons en dernier lieu que l’organisation de cette séquence aurait pu tirer profit de quelques ajustements techniques. Le moment de l’apparition de la lumière, la précision des gestes de la chant-actrice, la durée de certaines actions et le choix des stratégies vocales auraient pu être revus pour clarifier la dramaturgie. Pourquoi le jeu physique d’Odile était-il encore le même si l’on se trouvait dans un niveau de réalité différent ? Pourquoi l’interaction Odile et corps musical n’était-elle pas accentuée ? Pourquoi la métamorphose du musicien-acteur n’était-elle pas plus marquée par d’autres signes tels le costume ou l’éclairage ?

Notre recherche-création nous a permis de constater que, dans une chanson, le théâtre n’est jamais loin. Il est déjà dans le drame qui traverse les paroles, dans la voix de la chanteuse et parfois dans ses gestes. Dans la section 2.1 du présent essai, c’est d’ailleurs ce que l’on a remarqué. Cela a aussi été le cas dans les extraits que nous avons choisis de présenter ci-dessus. Nous avons aussi prêté attention aux autres paramètres qui peuvent contribuer à l’hybridation chanson-théâtre : le corps musical et le musicien-acteur. En effet, nous avons démontré en partie que, dans un objet-chanson, c’est-à-dire dans cette œuvre brève de 3 minutes qui impliquent la combinaison texte-mélodie-performance225, il est possible de penser le support musical différemment ; il est aussi possible de penser le rôle du musicien différemment. Dans le cadre de ce projet de création, nous avons donc modifié/ altéré, l’objet-chanson existant pour appuyer la dramaturgie naissante.

Après coup, par ailleurs, de nouvelles idées émergent. De nouvelles pistes de création, dans l’optique d’une hybridation encore plus marquée, nous apparaissent. D’abord, dès les premiers instants de la création d’une chanson, c’est-à-dire au moment même des premières ébauches textuelles et des premières esquisses mélodiques, et non

seulement lors de la phase de mise en scène, il pourrait être intéressant de penser l’accompagnement musical comme un personnage potentiel, voire comme une entité tangible échangeant avec l’interprète vocale. Au lieu d’imaginer l’accompagnement d’une chanson comme une simple série d’accords qui cherche à créer ambiance ou harmonie, il pourrait être intéressant de l’imaginer comme un être en devenir : un être qui entre en dialogue avec celle ou celui qui chante à ses côtés. D’autre part, il pourrait aussi être possible d’introduire, dès les premiers instants, des manières de chanter le texte différemment ou de faire intervenir des choristes d’une autre manière. La ligne mélodique ordinairement chantée pourrait éventuellement inclure aussi des parties parlées, des parties murmurées, des parties dialoguées. Nous pensons entre autres à des chansons de