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Portrait des trajectoires migratoires et professionnelles Devenir préposé au

CHAPITRE 4 : ÊTRE PRÉPOSÉ AUX BÉNÉFICIAIRES : DESCRIPTION DE

4.1. Portrait des trajectoires migratoires et professionnelles Devenir préposé au

Le premier objectif de ce mémoire est d’identifier les trajectoires migratoires et professionnelles des participants rencontrés. Sur un total de quatorze préposés immigrants interrogés, neuf sont des femmes et cinq sont des hommes. Sur ces quatorze préposés, deux participants ont immigré de l’Amérique Latine, quatre des Caraïbes, deux de l’Afrique du nord, cinq de l’Afrique centrale et un participant a immigré de l’Europe. Désirant un avenir meilleur pour eux et leurs familles, douze participants ont quitté leurs pays en raison de la guerre civile liée à des problèmes politiques. Seulement deux participants ont immigré au Québec parce qu’ils connaissaient déjà la région. Ils y étaient venus pour voyager et ils ont pris la décision de venir s’y installer à long terme. Ces deux participants sont arrivés au Québec seuls, sans conjoint, ni enfant. Au niveau professionnel, sept participants possédaient déjà un diplôme universitaire lors de leur arrivée au Québec, alors que trois participants avaient un diplôme équivalent à une technique professionnelle. Les autres détenaient un diplôme équivalent à un niveau d’études secondaires. Le tableau #1 présente, plus en détails, la nationalité, les motifs d’immigration, et la formation d’origine pour chacun des participants.

Tableau 1 : Profil des participants

Participants Nationalité d’origine Motifs d’immigration Formation d’origine F 01 Amérique centrale Elle a quitté en raison des problèmes

politiques du pays

L’équivalent d’une formation

professionnelle

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s’y installer définitivement

H 03 Afrique centrale Sa famille et lui ont fui la guerre civile Étude universitaire F 04 Amérique centrale

Sa famille et elle ont quitté en raison des problèmes politiques du pays

Étude universitaire, cycles supérieurs F 05 Afrique centrale

Elle quitte son pays en raison de la guerre civile. Elle avait le statut de réfugié

L’équivalent des études secondaires

F 06 Afrique centrale

Ses enfants et elle quittent le pays en raison de la guerre civile. Ils avaient le statut de réfugiés

L’équivalent des études secondaires

F 07 Amérique du Sud

Sa famille et elle quittent en raison des problèmes politiques du pays

Étude universitaire H 08 Amérique du Sud Sa famille et lui quittent en raison des problèmes

politiques du pays

L’équivalent d’une formation

professionnelle H 09 Afrique du Nord Sa famille et lui quittent en raison de la guerre

politique Étude universitaire H 10 Afrique du Nord

À la suite d’un voyage au Québec, il décide de s’y installer

définitivement

L’équivalent des études secondaires

F 11 Amérique centrale Elle quitte son pays en raison des problèmes politiques de du pays

L’équivalent du diplôme d’études collégiales

F 12 Europe Sa famille et elle quitte pour un avenir meilleur Étude universitaire H 13 Amérique du Sud Il quitte le pays en raison de la guerre

civile Étude universitaire

F 14 Amérique centrale Sa famille et elle quitte en raison des problèmes politiques

Étude universitaire, cycles supérieurs

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Peu de temps après avoir mis les pieds en sol québécois, les participants se sont mis à la recherche d’un emploi ; un emploi non spécialisé pour ceux qui ne possédaient que l’équivalent des études secondaires et un emploi spécifique à leur domaine pour ceux qui détenaient un diplôme collégial ou universitaire. Du côté des diplômés, aucun participant n’a réussi à se retrouver un emploi qualifié, leurs diplômes n’étant pas reconnus au Québec. Les recherches étaient sans succès, et ce, même si plusieurs étaient accompagnés par des intervenants des centres multiethniques et par des orienteurs gouvernementaux pour les aider dans leurs démarches. Toujours sans emploi, la solution proposée par ces intervenants était de refaire leurs études universitaires au Québec. Cette option n’était pas envisageable pour plusieurs ; ils ne pouvaient pas se permettre de retourner aux études. Les besoins primaires étaient leur priorité : trouver un emploi rapidement pour payer le loyer et nourrir leur famille. Toutefois, deux participants ayant un soutien financier plus élevé sont retournés à l’université au Québec pour s’orienter vers un autre domaine que celui qu’ils occupaient dans leur pays. Malgré leur diplôme « québécois », ils n’ont jamais trouvé d’emploi dans ce nouveau domaine.

Tous les participants diplômés ont donc dû chercher un emploi non spécialisé ou un emploi qui ne demandait pas beaucoup d’années d’études. Ayant déjà un réseau de soutien auprès des centres multiethniques et des services de placement provinciaux, plusieurs d’entre eux connaissaient déjà les emplois « en demande » dans la ville de Québec. Le choix s’est arrêté sur le métier de préposé aux bénéficiaires, car la formation n’était pas longue, environ six mois. Aussi, le programme de cohorte, qui n’existe plus aujourd’hui22, permettait de

suivre les cours et de travailler en même temps. De cette manière, ils pouvaient travailler à temps partiel comme préposé, ce qui leur assurait un revenu, tout en suivant les cours en classe. Ce choix de carrière ne reposait pas que sur des raisons économiques : les plus diplômés y trouvaient un certain intérêt à pratiquer ce métier, un emploi qui satisfaisait leur désir de travailler dans le domaine de la santé et auprès des personnes âgées. Malgré ce choix

22 De 2007 à 2013 au CIUSSS de la Capitale-Nationale (anciennement le CSSS de la Vieille-Capitale), les étudiants qui suivaient la formation de préposé aux bénéficiaires pouvaient rejoindre le programme de cohorte qui leur permettait de travailler à temps partiel comme apprenti préposé tout en suivant les cours. Ce programme a été aboli en 2013 pour des raisons budgétaires. Maintenant, les étudiants doivent compléter la formation jusqu’au bout avant de pouvoir travailler.

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sous contrainte, ils ont appris à aimer ce travail ; un travail où ils se sentent utiles en aidant des gens dans le besoin, un travail où ils vivent une grande satisfaction en faisant une différence dans la vie des gens :

J’ai appris que j’aimais prendre soin des gens ; j’aime me sentir utile. Utile pour les gens qui en ont besoin. Je pense qu’il y a trop de solitude ici. C’est la solitude qui m’a le plus marquée. J’aime mon travail, j’aime tout ce que je fais avec les gens.

(Répondante #07)

Du côté des participants qui possédaient un diplôme d’études secondaires, la recherche d’emploi s’est également faite en collaboration avec des centres multiethniques et des orienteurs gouvernementaux. De manière générale, ils ont choisi la formation de préposé aux bénéficiaires, non pas en raison de la durée ou du programme de cohorte, mais parce que ce métier correspondait à leurs valeurs, à leurs intérêts et à la manière dont ils envisageaient l’avenir23. La description du métier de préposé les rejoignait : les tâches à effectuer faisait

sens pour eux et pour plusieurs qui ont connu la guerre civile, prendre soin des autres n’était pas quelque chose de nouveau. Être préposé aux bénéficiaires était une suite logique à leurs parcours :

Ce métier-là ça m’apporte de mieux connaître les gens, l’être humain. Malgré tout ce qu’une personne a fait dans sa vie, en fin de vie, on voit que la personne peut être vulnérable. Il faut leur donner toute l’aide nécessaire et c’est pour ça qu’on est là. Donc, ça devient très humain, c’est ça que ça m’apporte. Comme beaucoup d’immigrants qui font ce métier, j’ai vécu la guerre civile. Ce n’était pas facile, mais quand on prend du recul on peut dire que ça nous apporte beaucoup d’expériences dans la vie. Pendant la guerre, j’ai aidé des gens, des blessés, je devais les aider, alors ce métier c’est un peu ça. Ce n’est pas une

23 Ces participants étaient à la recherche d’un emploi à long terme. Le métier de préposé aux bénéficiaires, étant un travail en grande demande partout dans la province, était un choix idéal : ce travail leur assurait une grande stabilité jusqu’à leur retraite.

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nouvelle expérience pour moi d’être préposé. Ça vient de très loin… Ce métier- là, ça m’apprend beaucoup côté humain.

(Répondant #13)