• Aucun résultat trouvé

2. LA RECHARGE RAPIDE DANS LE MONDE

2.1. Portrait global : enjeux et statistiques

Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans le cadre de l’Electric Vehicles Initiative (EVI), une initiative multi-gouvernementale incluant 15 pays qui comptent plus de 90 % du stock de véhicules électriques en circulation dans le monde, le dilemme typique de « l’œuf et de la poule » quant au rôle d’incitatif ou de support que doivent jouer les installations de recharge publiques dans l’implantation massive des véhicules électriques à l’échelle mondiale ne semble plus pertinent. En effet, à la question à savoir si les équipements de recharge doivent d’abord se déployer pour susciter les ventes de véhicules électriques ou bien si ce sont ces ventes qui doivent d’abord atteindre un seuil critique pour justifier des investissements dans les infrastructures de recharge, la réalité apporte la réponse que les véhicules électriques et les équipements de recharge semblent plutôt se déployer de manière simultanée, confirmant ainsi le double rôle des infrastructures de recharge (AIE, 2013). En ce sens, des investissements gouvernementaux sont réalisés dans plusieurs pays afin de contribuer au financement des réseaux de recharge, de sorte qu’ils prennent de plus en plus d’ampleur dans les pays de l’EVI depuis 2010 (idem). Ces déboursés, qui s’élevaient à la fin de 2012 à plus de 800 millions de dollars américains (USD) pour les pays membres de l’EVI, dont le Canada ne fait pas partie, demeurent cependant largement

inférieurs aux autres dépenses réalisées par ces mêmes pays en recherche et développement (plus de huit milliards de USD) et en mesures fiscales incitatives (près de quatre milliards de USD). Les pouvoirs publics semblent donc pour l’instant prioriser des investissements qui visent d’abord à réduire le coût d’achat ou encore à améliorer l’autonomie des véhicules électriques. Même si les réseaux de recharge ne sont pas complètement négligés, leur développement représente de l’avis même de l’AIE l’un des besoins les plus criants sur le marché des véhicules électriques et jouera un rôle clé dans la transition vers une adoption de masse pour ce type de véhicules (idem).

De manière approximative, les pays membres de l’EVI comptaient à la fin de 2012 un total de 46 000 bornes de recharge non-résidentielles de niveaux 1 et 2 ainsi que 1900 équipements de recharge rapide (idem). La figure 2.1 présente les stocks de bornes de recharge lente (niveaux 1 et 2) et rapide non-résidentielles par pays membre de l’EVI à la fin de 2012.

Figure 2.1. Stocks de bornes de recharge non-résidentielles pour véhicules électriques dans les pays membres de l’EVI (tiré d’AIE, 2013)

On peut constater que tous les pays n’en sont pas tous au même point quant à la taille de leur réseau de recharge et que leur stratégie de déploiement relativement au type de bornes priorisées peut également être très différente. Par exemple, le Japon semble le leader incontesté de la recharge rapide, lui qui compte près de 1400 des 1900 bornes de ce type recensées dans les pays de l’EVI : ce constat n’est guère surprenant considérant que la norme de conception CHAdeMO provient du Japon, tout comme la plupart des constructeurs qui la supportent. Toutefois, malgré ce constat, ce pays compte tout de même près de deux fois plus d’équipements de recharge de

niveaux 1 et 2. Certains autres pays implantent des équipements de recharge rapide, mais dans une proportion relative au nombre total de bornes qui est beaucoup plus modérée. On pense entre autres aux États-Unis, qui possèdent le plus vaste réseau de recharge au monde, au Danemark, à la France et aux Pays-Bas.

Un ratio souvent utilisé afin d’étudier les stratégies de déploiement des infrastructures de recharge selon les pays est celui entre le nombre d’équipements de recharge et le nombre de véhicules électriques en circulation. Des estimations proposées dans le rapport de l’AIE prétendent qu’un ratio adéquat devrait se situer entre 80 et 300 équipements de recharge pour 1000 véhicules électriques en circulation (idem). Si la plupart des pays de l’EVI semblent respecter ce ratio pour les équipements de recharge lente, il en est tout autre en matière de recharge rapide, alors que dans le meilleur des cas, au Japon, ce ratio atteint 30 bornes pour 1000 véhicules électriques. Les équipements de recharge rapide seraient-ils alors moins massivement nécessaires que ce que plusieurs croyaient au départ ? La réponse à cette question dépend essentiellement du contexte d’implantation : par exemple, une étude de cas sur le contexte californien a déterminé en 2012 que 100 à 200 bornes de recharge rapide stratégiquement réparties dans l’État étaient suffisantes pour assurer une bonne couverture initiale du territoire et ainsi répondre adéquatement aux besoins de recharge des utilisateurs (idem). Des recherches plus poussées sont nécessaires afin de mieux comprendre la relation qui existe entre les caractéristiques d’une région et le ratio idéal de bornes de recharge lente et rapide par véhicule électrique (idem). La figure 2.2 présente trois profils de déploiement d’équipements de recharge, soit ceux du Japon, des Pays-Bas et des États-Unis.

Figure 2.2. Différents profils de déploiement de bornes de recharge pour véhicules électriques (tiré d’AIE, 2013)

Au prorata du nombre de véhicules électriques en circulation, on remarque encore une fois que le Japon est chef de file des pays de l’EVI en matière de recharge rapide et que malgré la taille imposante du réseau de recharge américain (voir figure 2.1), qui est davantage axé sur la recharge lente, le nombre d’équipements de recharge non-résidentiels mis en relation avec le nombre de véhicules électrique permet de nuancer la réelle disponibilité des bornes aux conducteurs de ce type de véhicules aux États-Unis. La figure 2.2 illustre par ailleurs que c’est aux Pays-Bas que l’on retrouve le plus fort taux d’équipements de recharge par véhicule électrique parmi l’ensemble des pays de l’EVI.

De nombreux autres pays qui ne sont pas membres de l’EVI sont considérés comme des exemples à suivre en matière d’infrastructures de recharge. La Norvège, qui présente des conditions climatiques similaires à celles qu’il est possible de retrouver au Québec, possède le taux de bornes de recharge publiques disponibles par million d’habitants le plus élevé au monde (MCE, 2013). Son parc de véhicules électriques, qui comptait 13 147 véhicules électriques rechargeables au 1er juin 2013, dont plus de 96 % de VÉB, est proportionnellement à sa population et au nombre de véhicules en circulation le plus important de la planète (idem). Si le déploiement des équipements de recharge en Norvège semble avoir contribué à ces réalisations, les incitatifs fiscaux et les incitatifs indirects (privilèges accordés aux détenteurs d’un véhicule électrique, par exemple l’accès à des voies réservées) semblent toutefois avoir joué un rôle plus prédominant (Dussault, 2013).