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2. PROBLÉMATISATION

2.1 Positionnement et Rôle du DRH

2.1.2 Difficultés de positionnement du DRH

2.1.2.2 Polyvalence des compétences et des tâches en GRH

Il existe un tronçonnage de la fonction du DRH, du fait de la variété des compétences et donc des expertises qu’on en attend et dont on peut douter, devant le risque de carence que cela peut provoquer. « La multiplicité des tâches et des activités des professionnels en RH, des objectifs, des dispositifs, des orientations choisies par les organismes, rend difficile la détermination d’un profil unique de responsable de RH aux compétences clairement stabilisées » (Ibid., p. 49). Beaucoup sont arrivés à la fonction par l’obtention d’une compétence, constituée d’un savoir bâti sur l’acquisition de connaissances, constituée aussi d’un savoir-être caractérisé par des attitudes, des motivations et des valeurs, constituée enfin d’un savoir-faire qui se manifeste par la qualité du fonctionnement de la personne (Lazar, Huber-Kriegler, Lussier, Matei et Peck, 2007). Cette compétence a pu être acquise sur le terrain au cours d’une carrière longue et diversifiée souvent après l’exercice de fonctions opérationnelles (Duyck, 2005). La globalité des connaissances nécessaires pour remplir cette fonction n’est pas manifeste pour garantir une vision globale et stratégique de la fonction qui

intègre la transversalité (CSP, 2013). « Les compétences requises pour exercer le métier de DRH sont nombreuses : juriste, psychologue, stratège, manager, etc., et les talents individuels essentiels : technicien, diplomate, négociateur, organisateur, meneur d'hommes, etc. » (Duyck, 2005, p. 206). La difficulté de tenir ce rôle est liée à son caractère polymorphe. Cela rend parfois son pouvoir d’action et sa fiabilité trop incertains pour que son importance stratégique lui soit reconnue. Les évolutions sociétales de nos jours ont généré une complexification de la gestion des hommes (Le Saout et Saulnier, 2002). La fonction de DRH, chargé d’en assurer la coordination, se trouve confrontée à la gestion de cette complexité et parfois en conséquence à une remise en question de sa capacité à remplir le rôle stratégique qu’il voudrait jouer. Généralement membre de la direction, engagé dans une vision globale de la stratégie d’entreprise, administrateur des hommes même quand il externalise une partie de ses tâches, acteur central interrelationnel entre toutes les parties prenantes qu’elles soient internes ou externes, le DRH, dans l’idéal, joue un rôle d’interface, de partenaire et de médiateur de toutes les composantes. Il est à la recherche d’un consensus où la dimension humaine et éthique des décisions stratégiques puisse être préservée. « Le rôle stratégique du DRH réside moins dans sa capacité à anticiper l’avenir que dans les deux rôles plus politiques d’intermédiation et d’expertise qu’il est amené à jouer » (Raveleau et Chalumeau, 2010, p. 242). Il n’en reste pas moins vrai que dans une situation économique en mutation permanente et incertaine, avoir une vision stratégique et la traduire en décisions, implique une connaissance anticipatrice et relativement réfléchie de l’avenir de l’entreprise, voire une capacité à planifier de manière fiable et concrète son futur qu’il s’agisse de réalités techniques, financières, commerciales, environnementales, mais aussi culturelles et politiques (Giboin, 2012). Il s’agit pour ce faire de développer un réseau informatif à vision prospective indispensable pour se projeter vers l’avenir et de préparer ainsi l’adaptation de la gestion des RH. C’est nécessaire si le DRH veut inscrire son action dans une stratégie globale de l’entreprise (Junghans, 2007). De plus, dans les grands groupes internationaux les décisions stratégiques sont prises loin de la réalité du terrain, parfois dans une méconnaissance des incidences humaines qui en découlent (Ben Hassel et Raveleau, 2012). « Difficulté d’élaborer des scénarios prospectifs pertinents d’un point de vue stratégique pour l’entreprise, et difficulté à évaluer leur attractivité et leur acceptabilité par les acteurs concernés » (De Geuser, Grosvernier, Guénette et Maksimovic, 2012, p. 223). Suite à ce constat, il est aisé de comprendre la difficulté pour le DRH d’exercer pleinement un rôle stratégique qui lui soit aisément reconnu.

2.1.2.3 Les RH et la réalité économique

Promouvoir une vision stratégique des RH peut conduire à considérer la GRH comme un outil au service de la performance économique de l’entreprise sans tenir compte de la véritable dimension humaine que cela sous-tend. Il s’agit dans ce cas de penser l’économie comme la finalité de l’activité humaine (Rodin, 2011). « L’enseignement de la GRH n’échappe pas à la perspective instrumentale » (Taskin, 2012, p. 205). Gérer l’être humain comme un objet, une ressource qui doit être rentabilisée, au même titre que l’investissement financier, c’est instrumentaliser les ressources humaines et considérer les hommes comme des variables d’ajustement (Rodin, 2011). La conséquence qui en découle consistera de s’efforcer de mesurer économiquement les résultats de la gestion du capital humain. Cette mesure reste encore relativement hypothétique et subjective, même si certains s’y efforcent quantitativement (Fustec et Marois, 2006), en tentant de mettre en place des indicateurs fiables pour faire apparaître les liens entre la performance organisationnelle et économique et le management des compétences (Morin et Lamaute, 2012). Les activités RH les plus souvent mesurées qui semblent favoriser un engagement organisationnel plus productif des salariés ont porté sur la qualité de la sélection des hommes, les modalités de rémunération, les systèmes d’évaluation, les possibilités de formation, la liberté d’expression directe et participative des salariés, une politique de sécurité d’emploi, et une communication importante (Arcand et al., 2004). La qualité de la gestion des ressources humaines est parfois considérée comme la garantie d’un avantage économique concurrentiel (Ben Hassel et Raveleau, 2012). Gérer les hommes à leur satisfaction produirait leur engagement dans la poursuite de résultats économiques du fait de la productivité et de la qualité de leur travail dont un personnel motivé serait le garant (Arcand et al., 2004 ; Orlitsky et al., 2003). Cette assertion est plus facile à proclamer qu’à vérifier. Mesurer le retour d’investissement que représente une politique de gestion des ressources humaines à la fois vertueuse et généreuse n’offre pas de garantie de son bien-fondé économique. La fonction RH est une fonction de coût : « Accepter la notion de retour sur investissement est une erreur, car cette notion n’est pas basée sur le même référentiel temporel et les mêmes valeurs » (Cadin et Guérin, 2010. p. 66). Les DRH sont plus des porteurs d’innovation sociale ou d’une vision alternative de l’organisation (Ibid.).

Harmoniser stratégie RH, efficacité et éthique n’est pas aisé. « La stratégie poussée à son paroxysme débouche sur le machiavélisme dans les rapports humains et la manipulation de l’autre » (Fortier et Albert, 2012, p. 395). Or le DRH ne peut concevoir les personnes que

comme des partenaires, il est le garant de la protection des valeurs éthiques de l’entreprise pour ce qui concerne les rapports humains. « Il donne le ton et veille à la cohérence dans le traitement des personnes » (Haegel, 2010). La fonction stratégique du DRH, si ce dernier contrevient à cette exigence, perd de son sens et de sa valeur. La perte de crédibilité qui en découle ne lui confère plus la reconnaissance de sa dimension stratégique par aucune des parties prenantes concernées (Meignant, 2004). « Les DRH sont en mal d’appartenance et de reconnaissance vis-à-vis des salariés relativement peu confiants en la fonction RH et de directions peu enclines à les faire participer à la définition de la stratégie générale. » (Ben Hassel et Raveleau, 2010, p. 219).