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II. DÉVELOPPEMENT PARTICIPATIF, GESTION DES AFFAIRES PUBLIQUES ET

2. Des politiques économiques efficaces

Il est impossible de concevoir un développement équitable et durable sans une croissance économique reposant sur une large assise, car c’est elle qui favorise les changements structurels propres au processus de développement, qui crée des emplois rémunérateurs et qui produit les ressources nécessaires à l’organisation des services sociaux et économiques ainsi qu’à l’amélio­ ration du niveau de vie. La notion de croissance «à large assise» implique un processus d’ordre qualitatif. Dans son rapport de 1989, le Président du CAD note qu’un développement équitable suppose nécessairement une croissance économique viable et à large assise, mais que celle-ci ne saurait être soutenue « sans un développement participatif et équitable, dans lequel la grande masse de la population est partie prenante aux activités productives et au partage des fruits de la croissance».

Les pays en développement et la communauté des donneurs reconnaissent l’importance capitale que revêtent des politiques efficaces pour une croissance économique à large assise. C’est aux pays en développement eux-mêmes qu’il appartient de définir leurs objectifs et les politiques à mettre en œuvre pour y parvenir, mais nombre d’entre eux ont encore besoin d’une aide extérieure. Appuyer ces pays dans les efforts qu’ils déploient pour améliorer leurs politi­ ques économiques et de développement est une des priorités les plus élevées de la coopération pour le développement dans les années 90.

Le dosage précis des mesures requises pour engendrer une croissance à large assise dépend de la situation de chaque pays. En tout état de cause, la principale conclusion des travaux du CAD est que le développement du secteur privé est toujours un facteur d’efficacité déterminant dans cette optique, comme le confirme d’ailleurs l’expérience des nouvelles écono­ mies industrielles et d ’autres pays en développement jouissant d’une bonne santé économique. Les politiques fondées sur l’efficience et sur les forces du marché engendrent une croissance équitable et à large assise, tout en aidant à atténuer le problème de la pauvreté. Elles vont dans le sens de l’équité parce qu’elles associent les masses populaires aux activités productives et parce qu’elles privilégient l’aspect de la croissance lié à l’emploi. Elles permettent de mobiliser les capacités de production des pauvres, car c’est dans le secteur privé que les possibilités de gain sont pour eux les plus nombreuses. On peut utiliser de façon productive la ressource principale des pauvres, à savoir leur force de travail, grâce à des mesures appropriées (en matière de salaires, de prix et de réglementation, par exemple) tendant à augmenter la propor-

tion de main-d’œuvre qui entre dans les activités de production. Le jeu de la concurrence favorise l’efficience et un partage plus large des avantages économiques découlant de la croissance.

Les Membres du CAD ont reconnu qu’il conviendrait à l’avenir d’axer tout particulière­ ment les efforts d’aide sur le secteur privé, en vue de favoriser un développement dynamique et durable ainsi qu’une répartition équitable des bienfaits de la croissance économique pour une plus grande partie de la population. Ils s’emploient donc activement aujourd’hui à redéfinir et à étoffer leurs politiques dans des domaines clés pour l’essor de l’initiative privée. Les premiers résultats de ce travail sont exposés dans le chapitre I («Intensification de la coopération internationale au service de l’expansion du secteur privé et de l’investissement étranger direct dans les pays en développement : principes et actions recommandés») de l’ouvrage intitulé «Promouvoir le secteur privé dans les pays en développement» (OCDE, 1990). Les politiques et programmes d’aide à l’appui du secteur privé, notamment en ce qui concerne les microentre­ prises et le secteur informel, sont traités au chapitre IV du présent rapport.

De nombreux pays appliquent actuellement des programmes d’ajustement structurel com­ portant des réformes économiques et institutionnelles destinées à faciliter le passage du « diri­ gisme» étatique à l’économie de marché. Ces programmes comprennent non seulement des mesures de stabilisation à court terme visant à remédier aux déséquilibres des paiements, à l ’extérieur comme à l ’intérieur, mais aussi des réform es structurelles d ’ordre macro-économique et sectoriel qui tendent quant à elles à accroître la souplesse de l’économie et à la rendre plus productive. Leur objectif essentiel est de créer les conditions économiques et le climat politique qui permettront de faire aboutir les efforts déployés par les pays en développement, avec l’aide des bailleurs de fonds, en faveur d ’un développement viable à long terme. Il est indispensable que ces pays continuent de bénéficier des concours extérieurs dont ils ont généralement besoin sous la forme d’une aide coordonnée à l’appui de leurs programmes de réformes.

L ’affectation rationnelle des ressources publiques est un facteur essentiel de l’efficacité des politiques dans la mesure où elle tend à accroître les financements intérieurs dont elles ont précisément besoin. Pour améliorer l’efficacité de leur action, les gouvernements pourraient, entre autres, procéder à un certain redéploiement de ressources au profit des secteurs qui contribuent à donner à la croissance et au développement une plus large assise. Dans la déclaration qu’ils ont publiée à l’issue de leur Réunion à haut niveau de 1990, les Membres du CAD observent que «compte tenu de la persistance de la pénurie mondiale de capitaux, il importe tout particulièrement de soutenir et d ’encourager un accroissement de l’épargne inté­ rieure dans les pays en développement; par exemple, des ressources non négligeables pour­ raient dans bien des cas être libérées par les budgets militaires». D ’après les estimations du PNUD, les pays en développement consacrent en effet une plus grande part de leur PNB global à l’armée (5.5 pour cent) qu’à la santé et à l’éducation combinées (5.3 pour cent); dans beaucoup d’entre eux, les dépenses affectées aux armements sont même deux à trois fois plus élevées que les dépenses de santé et d’éducation.

Il serait donc tout à fait possible de diminuer la part relative des dépenses militaires au profit des services économiques destinés aux pauvres et aux équipements collectifs dont ils ont besoin pour leurs activités, notamment dans l’agriculture et le secteur informel en milieu urbain comme en milieu rural. Une redistribution des ressources pourrait également être opérée au profit des services d’enseignement, de formation, de santé, d’approvisionnement en eau, d’assainissement et de planification familiale. La valorisation des ressources humaines est sans aucun doute une dimension cruciale de toute stratégie de développement participatif, puisqu’elle contribue à donner aux pauvres les moyens nécessaires - santé, éducation, forma-

tion - pour participer plus pleinement au processus de production. L ’expérience des pays en développement qui enregistrent à l’heure actuelle des résultats positifs en apporte une preuve évidente. Les investissements les plus efficaces supposent des choix difficiles qui dépendent des besoins particuliers de chaque pays. Dans son étude intitulée « L ’Afrique subsaharienne : de la crise à une croissance durable», la Banque mondiale calcule que les pays africains devront doubler la part de PNB qu’ils consacrent à la valorisation des ressources humaines, pour la porter à environ 8 à 10 pour cent jusqu’à l’an 2000 et au-delà, s’ils veulent être en mesure d ’envoyer tous leurs enfants à l’école primaire et de réaliser les autres objectifs qu’ils se sont fixés en matière de santé et de planification familiale, de sécurité alimentaire et de nutrition. Le Rapport mondial sur le développement humain publié par le PNUD en 1990 nous apprend par ailleurs que 25 à 30 pour cent de la totalité des dépenses de développement devraient être affectés aux services sociaux afin de maintenir un juste équilibre entre développement écono­ mique et développement social.

Sans un environnement économique extérieur favorable, les pays en développement, surtout les plus pauvres d’entre eux, ne disposeront pas de ressources suffisantes pour traduire dans les faits les politiques bien conçues qui répondraient au double impératif d’une croissance à large assise et de la mise en valeur des ressources humaines. Dans leur déclaration à l’issue de la Réunion à haut niveau de 1990, les Membres du CAD affirment qu’ils «soutiendront activement, au sein de leurs gouvernements et auprès de l’opinion publique de leurs pays respectifs, un accord substantiel de libéralisation des échanges [dans le cadre du cycle de négociations d’Uruguay]comprenant d ’importantes mesures destinées à améliorer l’accès des produits qui présentent de l’intérêt pour les pays en développement au commerce internatio­ nal». Ils se félicitent en outre «que soient étudiées au Club de Paris des propositions visant un nouvel allégement de la dette officielle bilatérale des pays à faible revenu surendettés qui mettent en œuvre des programmes d’ajustement». Ces pays continueront d’avoir besoin d’une aide consentie à des conditions libérales pour mener à bien leurs réformes économiques et persévérer dans la voie d’un développement participatif.

Dans leur déclaration de 1990, les Membres du CAD reconnaissent en outre «vu les immenses tâches de développement des années à venir, et compte tenu en particulier des efforts énergiques de démocratisation et de réforme des politiques économiques en cours dans le monde en développement», qu’un effort d’aide «sensiblement plus important devra être consenti tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif». Ils soulignent dans le même temps que « compte tenu de la rareté des ressources disponibles, les efforts de développement des pays du tiers monde eux-mêmes, et notamment leurs efforts d’ajustement structurel, devraient être une considération importante dans la fourniture de l’aide». A cet égard, les problèmes que pose la répartition de l’aide entre les pays, ainsi qu’à l’intérieur de chacun d’entre eux, mériteront d’être soigneusement réexaminés.