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Chapitre I : Naissance et développement de la radio coloniale : 1930-1957

2- Une politique éditoriale au service du gouvernement général de l’AOF

Les évènements de la Seconde Guerre mondiale pèsent, dès le début, très lourde- ment sur les activités de la nouvelle station de radiodiffusion de l’AOF. Elle devient très vite un élément du dispositif de défense. La propagande qu’elle est censée diffuser doit à la fois discréditer l’adversaire et contribuer à souder l’Empire autour de la mère-patrie 40.

Les émissions de Radio-Dakar durant le second conflit mondial seront ainsi fortement marquées par une constante propagande de l’autorité politique centrale en direction des

39 Soulier-Valbert, op.cit., p. 749.

populations dans le but de s’assurer la loyauté de celles-ci41. Le contenu de cette propa-

gande évolue cependant au gré des rapports de force qui se modifient régulièrement sur le théâtre des opérations aussi bien en métropole qu’en outre-mer.

La tonalité des émissions devient ainsi hostile à l’Allemagne quand débute le con- flit avec des commentaires dénonçant le « banditisme allemand » 42. Un homme, André

Demaison avait été dépêché par la métropole à Dakar pour mettre en place les structures chargées de la propagande 43. Il témoigne de la réussite de sa mission dans le journal

Paris-Dakar en annonçant avoir mis en place un « Service des informations et de la pro- pagande » dont les activités consistent, entre autres, à diffuser quotidiennement des com- muniqués sur le conflit44. Le gouverneur général de l’AOF Léon Cayla n’hésite pas pour

sa part, à s’adresser directement aux auditeurs en signant des proclamations diffusées par la station fédérale en vue de remonter leur moral 45. Il appelle les populations à se tenir

« plus près que jamais de la Mère patrie »46.

La stratégie de propagande du gouverneur général Cayla consiste alors à mettre à contribution les grands chefs musulmans. Le dignitaire musulman El Hadj Seydou Nourou Tall joue ainsi un rôle important dans cette stratégie de captation des masses africaines mise en place par l’autorité coloniale. La figure de Tall, qui s’est construite dès le début des années 1930 dans une posture de médiation politique et sociale entre administrés et

41 Bebey, La Radiodiffusion…, p. 35.

42 Niang, Le journal Paris-Dakar…, op.cit., p. 33.

43 Journaliste et écrivain, André Demaison devient Directeur de la radiodiffusion nationale en métropole,

sous le régime de Vichy.

44 Paris-Dakar du 18 novembre 1939, n°1153, p. 1. IFAN, 1933-1961, IAC, P 629.

45 Il quitte son poste en juin 1940, après la défaite, pour être remplacé par Pierre Boisson aux idées plus

proches de celles de Vichy.

administration coloniale, présentait un avantage de taille. Au contraire des chefs de canton généralement exécrés par les populations du fait de leurs exactions, Tall apportait avec lui l’aura d’une figure religieuse respectée et écoutée par une frange importante des fidèles musulmans47. L’administration coloniale réalise donc très vite tout l’intérêt qu’elle pou-

vait tirer à se servir de Seydou Nourou Tall, d’autant plus que ce dernier, pour donner l’exemple, s’était même proposé pour s’engager comme tirailleur dès le déclenchement des hostilités avec l’Allemagne48. Mais la France préféra l’utiliser plutôt comme propa-

gandiste.

El Hadj Seydou Nourou Tall tient par exemple le 2 juin 1940, lors d’une prière spéciale organisée à Dakar, ces propos qui en disent long sur la propagande antiallemande qui se saisit de l’AOF : « O Dieu, nous te mettons en face des Allemands et nous nous réfugions près de Toi pour chercher un abri contre leur méchanceté et leurs offensives. Je te demande d’exterminer les Allemands, de les renverser, de repousser leurs strata- gèmes»49. L’imam de la grande mosquée de Dakar El Hadj Moustapha Diop se joignait

également à ces prières largement relayées par la radio et Paris-Dakar, pour conjurer la menace allemande. Ils tiennent alors aux fidèles un discours destiné à peindre les Alle- mands sous les traits d’un peuple hostile et cruel.

L’intérêt de ces interventions des chefs musulmans locaux résidait dans le fait qu’elles étaient délivrées en langues locales, et qu’elles faisaient appel à la fibre religieuse

47 Sylvianne Garcia, « Al Hajj Seydou Nourou Tall « grand marabout » tijani; l’histoire d’une carrière

(1880-1980) » p. 247-276 dans David Robinson, Le temps des marabouts : itinéraires et stratégies isla-

miques en Afrique occidentale française, v. 1880-1960, Paris, Karthala, 1997, 584 p.

48 Ibid., p. 254.

des populations50. Ces deux éléments étaient susceptibles de rendre leur réception plus

aisée par les masses africaines. La tonalité antiallemande de la station, adoptée dès le dé- clenchement du conflit, est cependant abandonnée à partir du 22 juin 1940 à l’heure de la signature de l’armistice entre le troisième Reich allemand et le gouvernement de Pétain. Cet évènement provoque le départ du gouverneur général Cayla, plutôt hostile à la colla- boration avec les Allemands. La propagande antiallemande cède alors la place à une « drôle de guerre » d’information marquée par le souci de rester légitimiste sans que le renversement d’alliance ne soit assumé de manière ostentatoire51.

L’AOF se retrouve en effet en ce début du second semestre 1940 dans une position délicate, soucieuse de se préserver d’une occupation allemande directe tout en restant fer- mement dans le giron de Vichy52. Un homme, Pierre Boisson, gouverneur général de

l’Afrique occidentale française, héros des batailles de la Première Guerre mondiale au même titre que le Maréchal Pétain, incarne cette posture qui transforme l’AOF en entité hostile aux Britanniques et aux Gaullistes au lendemain de l’Armistice53. Radio-Dakar

s’adapte à cette nouvelle réalité politique, en se mettant au service du gouvernement gé- néral de Boisson et du régime de Vichy.

50 Les discours en pulaar de Seydou Nourou Tall et ceux en wolof de l’imam Diop faisaient l’objet de

traductions en français sur les pages de Paris-Dakar et sur les ondes de Radio-Dakar.

51 Niang, « Le journal Paris-Dakar… », p. 8.

52 Dans plusieurs discours prononcés à Radio-Dakar et relayés par le journal Paris-Dakar, le gouverneur

général Boisson dément toute présence allemande en AOF et toute forme de collaboration directe entre l’AOF et l’Allemagne, défendant une position dite « patriotique » sous la bannière du Maréchal Pétain. Des propos très tranchants sont par exemple rapportés dans l’édition (n°1717) du vendredi 19 septembre 1941 de Paris-Dakar qui retranscrit cette partie du discours de Boisson : « nous n’avons jamais été en contact avec les Allemands sauf ceux qui avaient internés pendant la guerre et que des compatriotes sont venus chercher après l’armistice. Depuis cette date, nous n’avons plus vu aucun Allemand ».

Cette adaptation de Radio-Dakar s’accélère après le 25 septembre 1940, une date qui marque l’échec des forces navales et aériennes anglo-gaullistes dans leur tentative de prendre le contrôle de la capitale de l’AOF, Dakar. Fort de cette victoire militaire, Pierre Boisson s’appuie sur la radio de la Fédération pour entreprendre un intense travail de pro- pagande visant à dépeindre les Gaullistes comme des traîtres et des vassaux des Anglais. Les mots « parjure, traître, déshonneur » reviennent souvent dans ses discours radiodiffu- sés pour qualifier le général De Gaulle 54.

La défaite des gaullistes en septembre 1940 fournit également au gouvernement général de l’AOF le prétexte de vouloir faire triompher les idées de la « Révolution natio- nale » portées par le régime de Vichy55. Celles-ci ambitionnaient de créer un « homme

nouveau » dont les qualités premières seraient « l’esprit de discipline, l’esprit de soumis- sion, l’esprit de sacrifice à l’égard de ses chefs »56. Cet objectif de la « Révolution natio-

nale » supposait dans le contexte de l’AOF, majoritairement habitée par des masses indi- gènes, considérées en métropole comme peu évoluées culturellement, la constitution d’une élite chargée de jouer un rôle d’avant-garde. C’est ainsi qu’est mis en place le ser- vice d’ordre légionnaire (SOL) qui « devient l’organisation unique de la Révolution na- tionale en AOF »57.

Le gouverneur général assigne au SOL la tâche d’assurer un rôle d’agent d’exécu- tion des ordres émanant du commandement territorial 58. Le membre du SOL devient ce

54 Paris-Dakar du 26 septembre 1940, édition spéciale non numérotée, p.1, IFAN, 1933-1961, IAC, P 629. 55 Cantier, Jennings, L’Empire colonial, p. 78.

56 Ibid, p. 81

57 Ib., p. 80. Le Service d’ordre légionnaire (SOL), encouragé par le gouverneur général Boisson, se voit

confier la tâche d’encadrer la société et d’y insuffler les idées de la Révolution nationale.

français d’élite et modèle défini par la Révolution nationale, au service exclusif du maré- chal Pétain et de son régime, dont il doit répandre la parole et faire exécuter les ordres. À travers ce paradigme, transparaît surtout le culte du chef infaillible au cœur du modèle politique de Vichy. Le triomphe de la Révolution nationale signifiait donc aux yeux de ses promoteurs, une soumission totale au régime de Vichy et à son Chef le maréchal Pétain considéré comme le sauveur de la France. Mais comment réussir cette stratégie d’implan- tation de la Révolution nationale en AOF ?

L’environnement semblait favorable à un tel embrigadement idéologique puisque les forces gaullistes, cantonnées dans les territoires de l’Afrique équatoriale française (AEF) ne constituaient plus une menace immédiate. Pendant deux années (septembre 1940-novembre 1942), le discours vichyste se répand sur l’AOF, en grande partie grâce à Radio-Dakar. Le gouverneur général s’attache les services de la section locale de la Lé- gion des combattants dont il est membre et le président pour accomplir un travail de pro- pagande utilisant largement le canal de la radio. Regroupant pour l’essentiel des anciens combattants de la Première Guerre et des engagés de la seconde, aussi bien européens qu’africains, les membres de cette Légion vouaient une admiration sans borne au Maré- chal Pétain et entendaient entretenir le culte de sa personne 59.

La Légion devient ainsi un rouage important de la propagande vichyste en AOF60.

Son pouvoir s’accroit considérablement au lendemain de l’armistice, devenant un auxi- liaire du pouvoir colonial pour encadrer la population, contrôler l’information et réprimer

59 La présidence de la Légion est assurée par Pierre Boisson en personne, dès sa création jusqu’en septembre

1942.

toute velléité d’opposition au régime de Vichy. Cet embrigadement idéologique atteint son paroxysme avec la mise en place fin 1941, par la Légion, du Service d’ordre légion- naire (SOL) qui agit comme une milice supplétive et renforce les missions des forces de sécurité régulières 61.

Pour mieux réussir sa mission, la Légion dispose d’un temps d’antenne au niveau de Radio-Dakar pour faire passer ses messages de glorification de la figure du Maréchal. Elle animait ainsi des émissions d’une durée totale de quarante-cinq minutes, réparties entre le mercredi et le samedi, dont le contenu se résumait pour l’essentiel à louanger le gouvernement de Vichy et son chef et à critiquer les anglais et les gaullistes62. Des mes-

sages brefs destinés à capter les esprits étaient également diffusés sur les ondes par la Légion tous les jours à midi, pendant deux minutes d’horloge, contribuant à populariser chez une partie des auditeurs des slogans de ralliement au Maréchal. Le travail de propa- gande de la Légion à la radio s’appuyait principalement sur une série d’activités dites patriotiques menées sur tout le territoire de l’AOF. Elles consistaient par exemple à des cérémonies de levée des couleurs mobilisant des autorités militaires et administratives, des notables et écoliers pour faire honneur au drapeau français63.

La propagande vichyste à Radio-Dakar prenait également la forme d‘une musique militaire, appelée marche de l’infanterie de la marine, diffusée quotidiennement et censée rappeler chaque jour aux auditeurs la gravité des évènements en cours en même temps

61 Pierre Ramognino, « Le pétainisme sans Pétain. Révolution nationale et contrôle social en AOF- 1940-

1943 », Outre-mer, tome 91, n°342-343, 1er semestre 2004, p. 65-82.

62 Catherine Akpo-Vaché, L’AOF et la seconde Guerre Mondiale, la vie politique (septembre 1939-octobre

1945), Paris, Karthala, 1996, p. 81.

qu’elle devait susciter leur patriotisme 64. Des bulletins d’informations axés sur les évè-

nements de la seconde Guerre mondiale et préparés par le bureau d’information du gou- verneur général permettaient d’informer les populations, sur une base quotidienne, de l’évolution des théâtres d’opération, mais en prenant le soin de censurer toutes les nou- velles défavorables à Vichy65.

Ces émissions de propagande s’adressaient essentiellement aux colons et à leurs familles, mais également aux Africains dit « évolués » ou aux natifs des quatre communes (Dakar, Rufisque, Saint-Louis, Gorée) dont la qualité de citoyens français devenait une équation sans réponses dans le contexte troublé de l’époque66. Ils étaient en effet particu-

lièrement inquiets de voir leur nationalité française remise en cause par Vichy. Une ru- meur allant dans ce sens était entretenue par les forces gaullistes 67.

Le gouvernement général de l’AOF fait ainsi publier et diffuser régulièrement des avertissements à la « cinquième colonne » répandant ces rumeurs susceptibles de faire basculer les ressortissants des quatre communes dans le camp gaulliste68. Ces avertisse-

ments visaient particulièrement les sympathisants gaullistes accusés « de faire croire aux populations africaines, tant de statut européen que de statut indigène, que sous le régime de la nouvelle constitution de la France, elles ne font plus partie de la communauté fran- çaise et, de ce fait, sont exclues des fonctions publiques » 69.

64 Akpo-Vaché, l’AOF et la Seconde Guerre mondiale…, p. 81. 65 Ibid., p. 80.

66 Ruth Ginio, « Les élites européennes et coloniales face au nouveau régime en Afrique occidentale fran-

çaise », dans J. Cantier, Eric Jennings (dir.), l’empire colonial sous Vichy, p. 235-263.

67 Niang, « Le Journal Paris-Dakar… », p.46.

68 Paris-Dakar, n°1482, 12 décembre 1940, p. 1, IFAN, 1933-1961, IAC, P 629. 69 Ibid.

La volonté de contrer toute influence gaulliste, de stabiliser la situation politique et sociale tout en maintenant l’AOF sous l’autorité du Maréchal Pétain constituait finale- ment le ressort de cette propagande. Celle-ci reposait essentiellement sur le contrôle de l’information, la censure et le commentaire orienté des évènements de la seconde Guerre Mondiale70. La faible puissance de Radio-Dakar, seulement un kilowatt jusqu’en 1942,

les difficultés des auditeurs à se procurer des postes radio, les politiques de brouillage des émissions entreprises par les britanniques et les forces gaullistes basées en AEF voisine, vont cependant constituer un sérieux frein à l’efficacité de cette propagande vichyste71.

À partir de novembre 1942, la situation politique de l’AOF bascule à nouveau avec le ralliement de Pierre Boisson aux Alliés. Ce ralliement ne s’accompagne pas cependant dans l’immédiat d’une remise en cause de la personne du Maréchal72. Dans ses vœux de

nouvel an en janvier 1943, le gouverneur général Boisson salue ainsi la figure du général Giraud, artisan de la victoire alliée en Afrique du Nord, un évènement qui a précipité son ralliement. Mais il entame son discours par cette formule : « Après le Maréchal, tou- jours73 ». Malgré cette ambiguïté du discours entourant le Maréchal, le général Giraud est

cependant célébré à la radio comme le nouvel héros de la France. Sa visite à Dakar le 5 janvier 1943 est l’occasion de reportages dithyrambiques à son endroit avec de nombreux superlatifs soulignant sa bravoure : « grand chef…, garant de l’unité impériale fran- çaise…74 ».

70 Ginio, « Les élites européennes et coloniales… », p. 247. 71 Akpo-Vaché, L’AOF et la Seconde Guerre mondiale…, p. 81. 72 Niang, « Le journal Paris-Dakar… », p. 63.

73 Paris-Dakar des 3 et 4 janvier 1943, n° 2110, p. 1, IFAN, 1933-1961, IAC, P 629. 74 Paris-Dakar du 5 janvier 1943, n° 2111, p. 1, IFAN, 1933-1961, IAC, P 629.

Cette visite marque le début de la « dépaitinisation » de l’AOF. C’est dans ce sil- lage que s’inscrit le discours prononcé à Dakar le 7 janvier 1943 par le général Giraud. L’axe central de son propos relayé par la radio est la réaffirmation que la France continue le combat contre l’occupant allemand pour « libérer la France, et cela le plus tôt pos- sible75 ». L’intermède Giraud, qui dure jusqu’en août 1943, se traduit ainsi par la mise en

place d’une propagande à nouveau antiallemande sans être anti-pétainiste puisque le Ma- réchal continue d’être présenté dans la presse aux ordres du gouvernement général comme un patriote76.

La démission du gouverneur général Pierre Boisson en juin 1943 inaugure un nou- veau cycle politique nécessitant une révision de la politique de propagande de Radio-Da- kar et de toute la presse contrôlée par le gouvernement général. Le culte de personnalité entourant le Maréchal n’est plus d’actualité. Celui du général Giraud décline pour sa part, conséquence de sa perte d’influence au sein du comité français de libération nationale qui passe progressivement sous le contrôle du général De Gaulle. Le remplaçant de Boisson,

le gouverneur général Pierre Cournarie, donne le ton de la nouvelle politique de l’AOF, dans un discours prononcé le 24 juillet 1943 sur les ondes de Radio-Dakar. Il y déclare notamment sa volonté de « n’agir que par et pour la guerre » contre les puissances de l’Axe77.

La propagande de Radio-Dakar s’adapte à cette conjuration du nouvel homme fort de l’AOF, en se mettant totalement au service des objectifs politiques et militaires définis

75 Paris-Dakar du 7 janvier 1943,n° 2113, p. 1, IFAN, 1933-1961, IAC, P 629. 76 Niang, « Le journal Paris-Dakar… », p. 64.

par le comité français de la libération. De Gaulle devenant à partir d’août 1943 le chef incontesté de la France libre avec l’effacement du général Giraud, le culte de sa personne occupe alors à partir de ce moment et jusqu’à la fin du conflit, les ondes de Radio-Dakar. Ainsi donc, durant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale, Radio-Dakar a dû révi- ser par quatre fois sa politique éditoriale. Elle est passée d’une propagande antiallemande (septembre1939-juin 1940), à un ton très hostile aux puissances alliées (juillet 1940-oc- tobre 1942), avant de connaître un intermède alliant pétainisme et hostilité aux Allemands (novembre 1942-juin 1943) et enfin un ralliement total à De Gaulle (à partir de juillet 1943). Radio-Dakar aura été utilisée comme porte-voix par les différentes administrations qui se succèdent en AOF, épousant à chaque fois docilement les choix politiques du mo- ment de celles-ci.

2-2 Après la guerre, place au grand divertissement et à la diffusion de la culture française

Après la Seconde Guerre mondiale, la station fédérale desserre l’étau de la propa- gande politique pour faire place à des émissions au contenu plus léger. Cela se traduit notamment par l’importance des émissions divertissantes, musicales notamment, ainsi que la diffusion de pièces théâtrales et la présentation d’œuvres littéraires. Hormis les bulletins d’information dont le contenu reste l’apanage des services du ministère de la colonie, la musique et la culture constituent l’essentiel de la programmation de Radio-Dakar durant toute l’année 195078. À partir de janvier 1950, Radio-Dakar se dote d’une programmation

78 Institut Fondamental d’Afrique Noire (IFAN), DOC Radiodiffusion de l’Afrique occidentale française,

typique répartie en trois blocs d’émissions : une matinale de 7h00 à 8h00, une deuxième entre 12h et 13h30 et enfin une soirée démarrant à 18h20 pour finir à 23h0079.

En cette année 1950, la station de Dakar n’offrait pas encore un programme en continu du matin au soir, mais plutôt des blocs d’émissions diffusés durant des tranches horaires bien définies. Les deux blocs d’émission diffusés en matinée et en après-midi brillaient par leur légèreté : des plages musicales et de brefs bulletins d’information cen- trés sur l’actualité métropolitaine. Le bloc d’émissions de la soirée était le moment de diffuser des concerts de musique classique, du théâtre lyrique, de déclamer les fables de la Fontaine ou de lire des ouvrages littéraires en entier. Il n’était pas ainsi rare que la tranche horaire allant de 20h30 à 22h15 soit entièrement consacrée à la lecture d’un ro-