• Aucun résultat trouvé

3.1. Présentation du plan pluriannuel

Le plan pluriannuel d'infrastructures et de transport affine le programme cadre à long terme. Ce plan détaille un ensemble cohérent de projets de construction d'infrastructures (routes, lignes de chemin de fer, voies navigables, transports publics régionaux) ou d'amélioration de l'utilisation des infrastructures existantes et en assure le financement jusqu'en 2010. Il est revu d'année en année et réexaminé à chaque fois par le Parlement. Si l'administration nationale des ponts et chaussées ou un organisme régional estime nécessaire de construire une nouvelle infrastructure ou d'améliorer une infrastructure existante, le Ministre propose le lancement d'une étude préliminaire à ce sujet.

Le présent chapitre analyse les différentes phases d'établissement du plan pluriannuel, en mettant l'accent sur la participation du public aux projets et sur les difficultés qui en découlent. Le chapitre se fonde sur le rapport C4.3 de PIARC rédigé par Lindy Molenkamp et Hans Tinselboer du Centre de recherche sur les transports du service national de surveillance des voies d'eaux et des ouvrages hydrauliques. Il se focalise sur les projets routiers.

3.2. Établissement du plan pluriannuel Le plan pluriannuel s'établit en trois phases :

• Étude préliminaire.

• Planification.

• Exécution.

Table Ronde 128 : Systèmes nationaux de planification des infrastructures de transport – ISBN 92-821-2343-X - © ECMT, 2005

L'initiateur (par exemple l'administration nationale des ponts et chaussées) réalise l'étude préliminaire2 et informe le Ministre des problèmes de mobilité qui se posent dans la région concernée ainsi que des solutions qui peuvent y être apportées. Cela peut durer de un à cinq ans. Le Ministre peut profiter de la prochaine révision du plan pluriannuel pour, comme c'est généralement le cas, faire passer le projet à la deuxième phase.

La planification3 est un exercice d'assez grande envergure qui s'étend généralement sur plusieurs années. Elle se divise en quatre sous-phases : avant-projet, étude de faisabilité avec évaluation de l'impact sur l'environnement, définition du tracé et projet définitif avec devis4. Une enquête publique doit être organisée au terme de chacune des trois premières sous-phases.

L'initiateur établit un avant-projet pour les professionnels et le public. Cet avant-projet explique les raisons d'être et les buts du projet ainsi que les modalités de réalisation des études subséquentes. Il délimite la région en cause et présente les solutions envisageables. Le public est informé des conditions dans lesquelles il peut s'exprimer sur le projet.

L'initiateur consulte dans l'idéal, à titre informel, les parties intéressées pendant l'établissement de l'avant-projet. La Loi impose par ailleurs la soumission de l'avant-projet à l'enquête publique dès sa finalisation.

Le comité d'évaluation de l'impact sur l'environnement (un comité permanent composé d'experts désignés par les pouvoirs publics) et plusieurs organismes consultatifs5 sont également consultés. Les autorités compétentes (à savoir le Ministre des Transports et le Ministre du Développement Régional) arrêtent sur cette base les règles auxquelles l'évaluation de l'impact sur l'environnement doit se conformer en matière d'hypothèses de base, de conditions limitatrices ainsi que de critères d'évaluation et de comparaison des solutions possibles. L'initiateur détaille ensuite toutes les solutions envisageables, en propose le cas échéant certaines variantes et étudie les conséquences de chacune de ces solutions et de leurs variantes. Cette étude s'étend généralement à celle des mesures à prendre pour tempérer ou contrebalancer les effets négatifs sur l'environnement ainsi que sur le tissu social et les conditions de vie6. Le travail pratique, habituellement réalisé par un sous-traitant, est déterminé dans une large mesure par les règles relatives à l'évaluation de l'impact sur l'environnement. Les résultats sont publiés dans un rapport accessible au public.

L'initiateur organise des réunions publiques d'information. Il doit, en vertu de la Loi, donner aux parties intéressées (particuliers et groupements spécialisés) l'occasion de se prononcer sur le rapport. Il consulte le comité d'évaluation de l'impact sur l'environnement ainsi que les organismes consultatifs.

Les autorités compétentes (cf. ci-dessus) retiennent sur cette base la solution à laquelle ils accordent leur préférence.

L'initiateur passe alors au stade de la définition du tracé de la solution retenue, un tracé dont la marge de fluctuation est maintenant limitée à deux mètres à l'horizontale (et 0.5 mètre à la verticale).

Ce tracé est soumis pour commentaire au public et aux autres parties intéressées, au nombre desquelles se retrouvent maintenant les autorités provinciales et municipales dont la coopération est requise.

Les autorités compétentes, soit adoptent le tracé retenu tel qu'il est proposé ou sous réserve de modifications mineures, soit enjoignent à l'initiateur de leur présenter une nouvelle proposition, auquel cas cette nouvelle proposition doit à nouveau être soumise à enquête publique.

Les parties intéressées qui rejettent le tracé retenu par les autorités compétentes peuvent se pourvoir devant le Conseil d'État. Celui-ci doit s'être prononcé avant que le projet définitif puisse être adopté.

Table Ronde 128 : Systèmes nationaux de planification des infrastructures de transport – ISBN 92-821-2343-X - © ECMT, 2005

L'initiateur établit ensuite les plans et le cahier des charges destinés à l'entrepreneur. Il n'y a plus de participation formelle du public à ce stade.

Le Ministre des Transports fixe, après consultation du Parlement, la date de démarrage de la phase d'exécution en tenant compte du coût estimatif, des disponibilités budgétaires et des priorités politiques. Les travaux doivent débuter dans les 13 années suivant la date d'adoption du projet définitif.

La Loi ne prévoit pas de participation du public à la phase d'exécution. Dans la pratique, l'initiateur tiendra le public informé de l'avancement des travaux, des mesures temporaires prises pendant leur déroulement et des nuisances engendrées par les travaux.

3.3. Difficultés liées à la participation du public à l'élaboration des projets routiers

Il faut souvent compter 10 ans ou même davantage pour planifier un projet routier, c'est-à-dire entre le dépôt d'un avant-projet et le début de la phase d'exécution, si tant est qu'elle démarre un jour.

Cette longueur de temps a des conséquences néfastes : le problème de départ reste sans solution et ne fait que s'amplifier au fil des années, les raisons d'être et les objectifs du projet sont sans cesse remis en question par les décideurs et les lobbies et l'enterrement du projet peut sonner le glas des efforts de tous les participants du public. Les parties intéressées (notamment les riverains de la route à construire), enfin, ne savent pas de quoi leur environnement futur sera fait et voient fondre la valeur vénale de leurs habitations.

La durée du processus est imputable, non seulement à l'exercice de définition des priorités politiques qui se déroule entre les phases de planification et d'exécution, mais aussi aux actions en justice lancées par diverses parties intéressées (particuliers, ONG et conseils municipaux) à l'encontre des projets définitifs. Quoi qu'il en soit, la durée du processus est dans une certaine mesure un corollaire inévitable de toute procédure (administrative) réfléchie. La remise en question réitérée des raisons d'être et des objectifs de certains projets peut même témoigner du fait qu'une expédition trop hâtive des phases initiales du projet ralentit fortement le déroulement de ses phases suivantes.

L'issue des processus, longs et difficiles, de débroussaillement et de planification est souvent assez décevante. L'initiateur peut s'être mis en quatre pour intégrer la route projetée dans son environnement en lui causant le moins de dommages possibles. Il est très rare que le résultat de ses efforts ajoute une qualité nouvelle à l'environnement. La qualité intrinsèque souvent décevante de ce résultat peut aussi être imputée à plusieurs causes, notamment à la nature essentiellement réactive de la participation légalement obligatoire du public et au caractère trop souvent très lacunaire des échanges d'informations entre l'initiateur et les milieux consultés. Les observations des parties intéressées ne sont donc souvent prises en considération qu'à un stade trop avancé du processus pour soit être (injustement ?) éludées par les experts, soit se traduire en corrections ou extensions coûteuses du projet sans toucher à son essence. Une autre cause de cette déficience qualitative pourrait devoir être recherchée dans le fait que la plupart des projets routiers sont conçus isolément, c'est-à-dire sans être intégrés dans un plan régional plus vaste, et que le champ de vision est trop étroit. L'accent se porte sur l'atténuation des atteintes à l'environnement plutôt que sur la course aux synergies.

Une route, ou à tout le moins son tracé, est vouée à rester là où elle est pendant des dizaines, voire des centaines d'années. Elle doit donc, dans sa conception, être de qualité durable. Bon nombre des mesures correctrices issues de la procédure actuelle de participation publique procèdent pour l'essentiel de situations actuelles et la durabilité n'y trouve donc pas assez son compte.

Table Ronde 128 : Systèmes nationaux de planification des infrastructures de transport – ISBN 92-821-2343-X - © ECMT, 2005

La première estimation du coût d'un projet se fonde habituellement sur le coût de l'infrastructure de base et des travaux effectués pour tempérer ou compenser les effets négatifs qu'elle exerce dans un nombre limité de domaines reconnus par la Loi (nuisances sonores, etc.). Le coût estimatif du projet routier à réaliser peut avoir augmenté considérablement à la fin de la phase de planification à la suite des corrections qui y auront été apportées en réponse aux observations formulées à son sujet. Le rapport coûts-avantages peut alors aussi s'être modifié au point de condamner le projet aux oubliettes.

Des coûts élevés et apparemment incontrôlés semblent presque inévitables dans une société hautement développée de citoyens conscients et revendicateurs qui attribuent une valeur sans cesse croissante à leur milieu de vie. Les coûts élevés pourraient être le prix à payer pour une qualité et une durabilité même incomplètes. Le fossé béant entre l'initiateur et les citoyens peut aussi avoir sa part de responsabilité, surtout si l'initiateur est une administration nationale à laquelle presque personne ne s'identifie.

Les opposants au projet (ou à certains de ses éléments) comptent dans leurs rangs une proportion sans doute anormalement forte d'hommes de niveau d'éducation élevé et de plus de 50 ans. Il reste à établir si cette surreprésentation pose problème.

Beaucoup de projets sont freinés par des actions en justice intentées par des acteurs qui avaient déjà pu s'exprimer à des stades antérieurs de la procédure (sans obtenir satisfaction). L'administration et les juristes divergent de vues sur le pourquoi de la relative fréquence des actions engagées contre les projets définitifs. Certains le trouvent dans des erreurs de gouvernance, notamment dans un rejet trop désinvolte d'objections formulées par des membres du public, tandis que d'autres pensent au comportement de citoyens revendicateurs et calculateurs prêts à tout pour combattre des décisions qu'ils contestent ou tirer un profit démesuré de la situation.

Les autorités compétentes et/ou le Parlement retiennent parfois une solution qui s'écarte de la solution recommandée pendant ou même après une procédure soigneusement conduite. Une telle décision peut frustrer tous les participants et avoir des retombées négatives sur l'acceptation du projet définitif par la collectivité. L'interférence du pouvoir politique procède de l'incompatibilité fondamentale de deux types de démocratie, celles en l'occurrence qui se concrétisent par la participation directe des intéressés, d'une part, et par la représentation Parlementaire, d'autre part. Les hommes politiques peuvent ne pas apprécier les résultats d'un processus de participation directe des citoyens qu'ils ont omis d'enclore dans des limites bien définies ou ont enclos dans des limites définies longtemps avant que les conditions ne deviennent ce qu'elles sont aujourd'hui.

Il y a à ces maux plusieurs remèdes possibles7. Information convenable et rapide du public

Il a été constaté que ceux qui s'impliquent dans le processus de participation publique sont généralement plus favorables au processus et à ses résultats s'ils ont été informés dès ses premières phases, s'ils ont été bien informés, si les autorités et l'initiateur ont fait preuve d'ouverture et d'honnêteté dans la présentation de leurs plans et de leurs décisions, etc. La qualité des réactions et suggestions du public peut aussi s'en trouver améliorée.

Maintien du contact

Beaucoup de mois ou même d'années peuvent s'écouler entre les différentes étapes du processus de planification où la Loi impose la consultation du public. Il importe donc que les autorités maintiennent le contact avec les intéressés par le canal de bulletins d'information, d'un service d'informations téléphonées ou d'autres moyens.

Table Ronde 128 : Systèmes nationaux de planification des infrastructures de transport – ISBN 92-821-2343-X - © ECMT, 2005

Méticulosité

Les autorités doivent veiller à ce que les procédures soient menées méticuleusement, à ce qu'aucun avis ne se perde, etc.

Intégrité

Les autorités doivent toujours faire preuve d'ouverture et d'honnêteté, fournir toutes les informations intéressantes, etc., même dans les cas où elles n'y sont pas expressément tenues.

L'intégrité est la clé de la crédibilité des pouvoirs publics.

Respect

Une décision n'est acceptable par tous que si la façon dont elle a été prise est respectée par tous.

Et les autorités qui veulent que leurs décisions soient respectées doivent commencer par respecter les citoyens. Les participants au processus de consultation et leurs observations doivent toujours être pris au sérieux. Les fonctionnaires et les agents des administrations peuvent et doivent apprendre à redoubler d'efforts pour y arriver.

Lisibilité

Les problèmes, plans, variantes et observations doivent être présentés en termes compréhensibles par le plus grand nombre pour que le processus et le projet définitif puissent être acceptés par tous.

Leur présentation trop louangeuse ne peut en revanche que susciter la méfiance d'un public qui suspectera les autorités de vouloir le pousser à accepter une décision déjà prise.

Dialogue

Les autorités doivent "dialoguer" et dire au public ce qu'elles pensent de certaines critiques et opinions émises dans le courant du processus.

Clarté

Les autorités doivent clarifier ce qui a déjà été décidé et ce qui reste à discuter.

Persévérance

Les autorités doivent se tenir aux décisions prises et ne pas les remettre entièrement en question.

Les acteurs intéressés préfèrent une décision tranchée à de nombreuses années d'incertitude épuisante.

Générosité des compensations financières

Un processus même hautement interactif et créatif n'empêchera pas d'atteindre au milieu de vie de certains. Il est possible de remédier aux dommages (financiers) subis par les riverains d'un projet (de longue haleine) en menant une politique d'indemnisation financière généreuse de la dévalorisation de (la vie dans) certains logements. Une telle politique renforcera l'adhésion publique au projet et peut prévenir le déferlement d'actions en justice contre le projet définitif, ce qui abrégerait d'autant le temps qui s'écoule entre la mise à l'étude et la réalisation d'un projet. Elle peut malheureusement aussi pousser les coûts à la hausse.

Table Ronde 128 : Systèmes nationaux de planification des infrastructures de transport – ISBN 92-821-2343-X - © ECMT, 2005