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Chapitre 3 : Méthodologie

3.5. Plan d’analyses

Toutes les analyses ont été effectuées à l’aide de SPSS (version 26.00, IBM corp, 2019). Le seuil de significativité accepté pour toutes les analyses a été fixé à 0,05.

3.5.1. Analyses descriptives

Afin de répondre aux objectifs 1 et 2 de la présente étude, des analyses descriptives ont été menées afin de dresser un portrait général des résultats (c.-à-d. la moyenne, l’écart-type, le minimum et l’étendue). En ce sens, le protocole de traitement de données de Tabachnick et Fidell (2007) a été suivi, ce qui a permis de vérifier la présence de données extrêmes (vérification des graphiques tiges et feuilles ), la normalité (skewness, kurtosis et test de normalité Kolmogorov-Smirnov pour un échantillon) et l’homoscédasticité et l’homogénéité de variance (test de Levene).

3.5.2. Analyse de la covariance univariée

Afin de préciser les résultats obtenus à la suite des analyses descriptives, l’analyse de la covariance univariée [ANCOVA] avec correction de Bonferroni (coefficient conservateur) a été choisie pour examiner l’effet de variables catégorielles sur une variable dépendante. L’ANCOVA, en comparaison à l’ANOVA, permet de contrôler l’effet d’une autre variable continue qui a un impact présumé sur la relation initiale. Dans la présente analyse, l’âge fut mis en covariable étant donné les écrits soutenant des différences développementales entre les trois composantes de l’AR (Calkins et Williford, 2009; Montroy, 2014). Les variables indépendantes sexe, situation familiale, occupation de la mère et revenu familial ont été testés puisqu’elles sont reconnues pour avoir une influence sur le niveau d’AR de l’enfant (p.ex. Cadima et al., 2016).

3.5.3. Analyses de régressions multiples

Afin d'éclairer les relations entre l’AR et la qualité des interactions, des analyses de régressions multiples hiérarchiques ont été réalisées. La régression multiple permet de préciser la relation entre plusieurs variables indépendantes et une variable dépendante. La méthode hiérarchique permet de déterminer l’ordre d’entrée des variables dans le modèle à l’aide de la création des blocs de variables qui seront entrés de manière hiérarchisée dans le modèle (Irizarry, 2019). Les analyses ont d'abord été lancées selon le modèle théorique de la qualité des interactions (c.-à-d. en fonction des trois grands domaines de la qualité des interactions tels que présentés dans le chapitre 2). Toutefois, un problème important de multicolinéarité a été observé. Une erreur fréquente est de confondre multicolinéarité et corrélation (Irizarry, 2019). Si des variables colinéaires sont nécessairement très fortement corrélées entre elles, cela ne signifie pas qu'elles sont forcément colinéaires. En termes non statistiques, il y a colinéarité lorsque deux ou plusieurs variables mesurent le même phénomène (Allisson, 2012).

Pour identifier les variables problématiques, la tolérance et le facteur d’inflation (VIF) de la variance ont été examinés. La tolérance est la part de la variance d’une variable indépendante qui n’est pas expliquée par une autre variable dépendante (Irizarry, 2019). Cet indice relié à la tolérance doit être le plus petit possible; dès qu'il se trouve au-delà de 0,10, il doit être investigué (Irizarry, 2019). Le VIF représente pour sa part la variance réciproque de la tolérance. Des valeurs élevées pour cet indice témoignent ainsi de multicolinéarité. Il est entendu que des valeurs au-delà de 0,10 ne sont pas acceptables (Irizarry, 2019).

Dans le cadre de cette étude, les analyses de tolérance et le VIF ont permis de relever la présence de multicolinéarité. Plus précisément, elles ont permis d'identifier trois variables indépendantes comme étant problématiques (VIF au-delà de 0,10) : développement de concepts, qualité de la rétroaction ainsi que modelage langagier. Cette multicolinéarité observée amène à questionner le modèle théorique initial pour la poursuite des analyses de régression. Les prochaines sections feront état de la littérature ayant observé des limites quant au modèle théorique initial, limites pouvant biaiser les analyses statistiques.

3.5.4.1. Limites relevées quant à la structure factorielle du CLASS Pre-K

Alors que plusieurs études menées avec le CLASS ont confirmé la structure factorielle à trois composantes préférablement à des structures à une ou a deux composantes (Hamre et al., 2013; Pakarinen et al., 2010; Stuck, Kammermeyer, et Roux, 2016; von Suchodoletz, Fäsche, Gunzenhauser, et Hamre, 2014), d’autres recherches (p.ex. Williford et al., 2017) ont relevé certaines limites quant à l’utilisation du CLASS sous sa forme théorique originale, notamment en termes méthodologiques.

À titre d’exemple, Pakarinen et ses collaborateurs (2010) ont dénoté une variance négative pour la dimension modelage langagier. Par définition, une variance ne peut pas être négative, car ceci indique qu’un modèle théorique spécifique n’est pas approprié pour traiter les données (Bihler et al., 2018).

En parallèle, des études (p.ex. Leyva et al., 2015; Pakarinen et al., 2010; Stuck et al., 2016) ont rapporté des corrélations entre les résiduels, ce qui suppose que les dimensions affectées ont une cause commune de variation qui n’est pas prise en compte par l’outil (Bihler et al., 2018). Ainsi, on peut penser qu'il existerait d’autres facteurs sous-jacents à la qualité des interactions qui gagnerait à être ajoutée dans le modèle (Bihler et al., 2018). De très fortes corrélations (r=0,75-0,98) entre deux domaines, en particulier entre le soutien émotionnel et l’organisation de la classe, ont également été rapportées dans différents travaux (Hamre et al., 2013; Pakarinen et al., 2010; Stuck et al., 2016; von Suchodoletz et al., 2014). Pour Bihler et ses collaborateurs (2018), si ces domaines corrèlent si fortement, c’est qu’ils pourraient en fait n’en former qu’un seul. Ainsi, sur le plan statistique, ils devraient être considérés comme tels. D’ailleurs, de très fortes corrélations entre les domaines peuvent aussi être un indice de multicolinéarité (c.-à-d. lorsque deux ou plusieurs variables mesurent exactement le même phénomène). Conséquemment, l'importance individuelle de chaque dimension dans la prédiction d'une variable dépendante est difficile à évaluer dans les modèles de régression linéaire (Allisson, 2012). D’ailleurs, suite à une étude réalisée auprès de 325 classes aux États-Unis, Hamre, Hatfield, Pianta, et Jamil (2014a) ont également rapporté des problèmes de multicolinéarité lors de leurs analyses.

Pour pallier aux trois limites présentées limites, Hamre et ses collaborateurs (2014a) proposent une modification au modèle théorique à trois facteurs pour en arriver à une nouvelle stratégie analytique : le modèle Bifactoriel (voir Figure 3.1.). Cette stratégie permet

de répartir les dix dimensions du CLASS en un domaine général (l’enseignement sensible), ainsi qu’en deux domaines spécifiques qui saturent de manière spécifique sans problème de multicolinéarité apparent (Gest, Madill, Zadzora, Miller, et Rodkin, 2014; Williford et al., 2017) : a) la gestion positive et routines qui regroupe les dimensions du soutien émotionnel et l’organisation de la classe, et b) les facilitations cognitives qui comprend les dimensions du soutien à l’apprentissage. Alors qu’habituellement, le lien avec la qualité des interactions et des possibles influences sur des aspects du développement de l’enfant est difficile à dégager, Hamre, Hatfield, Pianta, et Jamil (2014b) soutiennent que les données semblent s’ajuster davantage au modèle Bifactoriel tout en permettant une meilleure validité prédictive. En effet, le modèle Bifactoriel permettrait une plus grande précision en traitant de manière séparée les domaines gestion positive et des routines et facilitations cognitives lorsqu’on lance des analyses prédictives telles que les régressions hiérarchiques.

3.5.4.4. Prise en compte des limites dans les analyses de régression hiérarchiques

Des analyses corrélationnelles (voir Annexe E) ont permis de relever que la dimension considération du point de vue de l’enfant affichait peu de validité discriminante. En effet, cette dimension s’avère très fortement corrélée à d'autres dimensions du CLASS. Cette limite a d’ailleurs été rencontrée par d’autres chercheurs (p.ex. Cloney et al., 2016; Bouchard, Cantin, Charron, Crépeau, et Lemire, 2017), qui ont choisi de la retirer du modèle, permettant ainsi aux données de mieux s’y ajuster. Pour poursuivre les analyses de régression dans cette étude, la dimension considération du point de vue de l’enfant a également été retirée (voir Figure 3.2.).

Pour répondre à l’objectif 3, deux analyses de régressions hiérarchiques ont été réalisées par variables dépendantes (composantes liées à l’AR), où deux blocs composent les analyses de régression : a) les variables sexe et âge ont été entrées dans le premier bloc pour contrôler les effets relevés dans la présente étude, b) les variables liées aux domaines gestion positive et routines et facilitations cognitives ont été entrées dans un 2e bloc.

Figure 3.2. Modèle Bifacteur (Hamre et al, 2014) final utilisé pour les régressions hiérarchiques. En somme, la méthodologie de recherche privilégiée dans ce mémoire permet de vérifier dans quelle mesure l’AR des enfants à l’éducation préscolaire cinq ans serait lié aux domaines de la qualité des interactions en classe permettant ainsi de confirmer ou non l’hypothèse de recherche.