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C’est également dans un contexte de mutation sociale et d’interrogation sur les inégalités scolaires que les textes de 2015 réaffirment l’importance de la maîtrise de la langue orale pour la réussite des élèves, et en détaillent précisément les objectifs. La publication, en septembre 2016, d’un ensemble de documents d’accompagnement précise les approches de cet enseignement en termes de communication et de maîtrise des conduites discursives. Nous allons détailler ces prescriptions avant de nous intéresser aux pratiques enseignantes dans les classes.

B.1- ENJEUX DE L’ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE ORALE

Marie Hélène Leloup présente, sur le site éduscol37, les enjeux d’une bonne maîtrise de la langue

orale. Celle-ci devrait permettre non seulement de « développer les fonctions cognitives du

langage » et de « contribuer à la qualité des apprentissages » mais devrait également influer sur la

qualité du climat scolaire. Les objectifs chiffrés qu’elle associe à cet apprentissage, reprennent ceux de la loi de refondation de l’école de la République (2013) :

• réduire à moins de 10 % l’écart de maîtrise des compétences en fin de CM2 entre les élèves de l’éducation prioritaire et les élèves hors éducation prioritaire ;

• diviser par deux la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification ; • amener tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture à l’issue de la scolarité obligatoire.

Cette transposition laisse penser que la maîtrise du français oral supporte à elle seule la responsabilité de la réduction des inégalités scolaires, ce qui fait peser une lourde charge sur cet

36 Dans le rapport sur l’enseignement à l’école primaire, (M. Rouchette, IGEN, 1976), certains passages qui

valorisaient la place de l’oral en tant « qu’outil intellectuel au service du savoir » et en tant qu’« objet d’étude à part entière » ont été censurés. D’autres qui mettaient en valeur les « pionniers de la pédagogie moderne » qui avaient « déjà entrepris la rénovation profonde de cet enseignement » ont également été supprimés du manuscrit par le législateur avant publication (Langlois, 2009, p.95).

37 Sur le site éduscol, consulté le 17 08 17 :

enseignement. Mais détaillons de quelle manière la langue orale est évoquée dans les programmes scolaires de 2015.

B.2- OBJECTIFS DE L’ENSEIGNEMENT DE L’ORAL À L’ÉCOLE PRIMAIRE

Le socle commun, redéfini en 2015, formule l’objectif suivant : tous les élèves sortant du cycle 3 de l’école (la 6e est associée à présent à ce cycle), doivent savoir : « comprendre, s’exprimer et

communiquer en langue française à l’oral et à l’écrit » (B.O. 2015, Cycles 2, 3, 4, p.6).

La communication

La communication est considérée, dès la maternelle, comme un objet d’apprentissage, avec, à la fin de ce premier cycle, des objectifs centrés sur la capacité de l’élève à se faire comprendre :

• Communiquer avec les adultes et avec les autres enfants par le langage, en se faisant comprendre.

• Reformuler pour se faire mieux comprendre.

En fin de cycle 2 (CE2), il ne s’agit plus seulement de rendre les élèves capables de se faire comprendre quand ils s’expriment. Il faut les entraîner à émettre des « énoncés clairs », et participer

« avec pertinence » aux échanges de la classe :

• Produire des énoncés clairs dans les différentes situations de communication, en tenant compte de l’objet du propos et des interlocuteurs ;

• Participer avec pertinence à un échange (questionner, répondre à une interpellation, exprimer un accord ou un désaccord, apporter un complément…).

Dans les attendus de fin de cycle 3, la participation à des échanges oraux devra être non seulement pertinente, mais constructive :

• Interagir de façon constructive avec d’autres élèves dans un groupe pour confronter des

réactions ou des points de vue.

La capacité d’écoute n’est explicitement posée comme un objectif que dans les programmes de cycle 2, où les élèves doivent apprendre à concentrer leur attention sur les échanges, et à être vigilants sur leur capacité de compréhension :

• Conserver une attention soutenue lors de situations d’écoute ou d’interactions • Manifester, si besoin et à bon escient, son incompréhension.

Cette compétence d’écoute est cependant également abordée pour les autres cycles, dans les textes d’accompagnement.

Les conduites discursives

• Pratiquer divers usages du langage oral : raconter, décrire, évoquer, expliquer, questionner,

proposer des solutions, discuter un point de vue.

En cycle 2, la liste est moins détaillée :

• Pratiquer avec efficacité les formes de discours attendues dans des situations où les attentes

sont explicites, notamment, raconter (en particulier raconter seul un récit étudié en classe), décrire, expliquer (B.O. 2015, cycles 2, 3, 4, p.13).

Au cycle 3, il est remarquable que cette demande semble se réduire sensiblement et intègre l’appui de notes ou de présentation numérique :

• Réaliser une courte présentation orale en prenant appui sur des notes ou sur diaporama ou

autre outil numérique. (B.O. 2015, cycles 2, 3, 4, p.101).

Les autres objectifs concernant l’oral pour ce cycle se rapportent à des supports écrits :

• Écouter un récit et manifester sa compréhension en répondant à des questions sans se

reporter au texte.

• Dire de mémoire un texte à haute voix.

Cette réduction de la prescription est compensée par les documents d’accompagnement, qui posent les bases théoriques et pratiques d’une didactique de l’oral en cycle 3, pour aider les enseignants à « dépasser l’usage pragmatique ordinaire » de la langue orale.

B.3- DISCUSSION

L’apprentissage de la langue orale par les élèves se voit donc chargé d’un fort enjeu, et ses objectifs de fin de cycle sont détaillés précisément dans les nouvelles prescriptions. Cette liste de capacités susceptibles d’être évaluées est complétée par le relevé de « connaissances et

compétences associées », ainsi que par des « exemples de situations, d’activités et de ressources pour l’élève ».

Cependant, il reste difficile de mettre en action dans les classes une pratique de l’oral qui permette l’expression et les progrès de tous, et les habitudes professionnelles découlent d’un équilibre difficile à trouver entre : « une spontanéité qui n'est que bavardage et une directivité qui

ne garde que l'apparence du dialogue pédagogique ». Dans les observations réalisées en

élémentaire, c’est la deuxième option qui semble prévaloir (IGEN,1999, p.34).

C- LA PRATIQUE DE L’ORAL EN CLASSE : HABITUDES DU MÉTIER ET