Chapitre 2 : Matériels et méthodes 3. Expérimentations en réacteurs fermés dopés en micropolluants 3.1. Photodégradation 3.1.1.Photoréacteurs immergés sur site 3.1.1.1. Stratégie d’exposition Pour comprendre le rôle de la photodégradation naturelle (lumière solaire) dans l’élimination des micropolluants, nous avons élaboré une stratégie expérimentale visant à déterminer, in-situ, leurs constantes cinétiques dans la colonne d’eau. Nous avons appliqué la stratégie décrite ci-dessous à deux saisons différentes, du 9 au 16 mars 2015 et du 6 au 21 juillet 2015. L’intensité lumineuse moyenne sur une journée (10h-16h) observée était de 630 W.m-2 en hiver à 860 W.m-2 en été. La stratégie expérimentale consistait à immerger des ballons en quartz de 500 mL à différentes profondeurs (10, 30 et 50 cm ; Figure 21). Le quartz permet de réduire l’atténuation de l’intensité des rayons lumineux et principalement les rayons UV-B (λ= 290-400 nm). Immergés simultanément, les photoréacteurs sont ensuite récupérés après différents temps d’exposition Les photoréacteurs ont été remplis d’eau: de l’eau déminéralisée pour étudier la photodégradation directe (seule), ou bien, de l’eau de la ZRV pour étudier la photodégradation directe et indirecte. Nous avons ensuite ajouté 1 mL de la solution de dopage décrite dans la partie 4.2. dans chacun des photoréacteurs, pour obtenir une concentration en micropolluants d’environ 10 μg.L-1. Les couples de photoréacteurs (eau déminéralisée et eau de ZRV) ont ensuite été placés sur des structures en bois permettant de maintenir leur immersion à 3 profondeurs d’eau (10, 30 et 50 cm) (Figure 19). Des photoréacteurs recouverts de papier aluminium ont servi de témoin. Ils ont été immergés à 10 cm de profondeur (Figure 20), de manière à vérifier l’absence de modification des concentrations par d’autres processus (e.g. hydrolyse, biodégradation, adsorption), et ainsi vérifier que la dégradation des micropolluants observée est bien attribuable à la photodégradation. Figure 19 : Dispositif d’immersion des photoréacteurs en quartz de 500 mL à -10, -30 et -50 cm de profondeur : 3x eau déminéralisée (droite), 3x eau de ZRV (gauche) Figure 20 : Témoins en quartz recouverts d'aluminium immergés à -10 cm de profondeur Un schéma récapitulatif du design expérimental utilisé pour cette étude est proposé en Figure 21. A l’instant initial, plusieurs structures en bois ont été immergées. Lors de la campagne de mars, 4 structures en bois ont été immergées et retirées après 24, 48, 72 et 168 heures. Durant cette première campagne, il a été observé que le processus de photodégradation était un phénomène relativement lent en ZRV. Afin d’augmenter le nombre de points de cinétique pour chaque micropolluant et observer la dégradation sur une plus longue durée, nous avons modifié le plan d’échantillonnage dans la campagne de juillet : 5 structures en bois ont été immergées et retirées après 47, 71, 213, 238 et 358 heures pour mieux observer la dégradation des micropolluants les moins photodégradables. Une fois les ballons retirés, les prélèvements ont réalisés suivant la méthode décrite en partie 3.1.3, puis les échantillons sont analysés au laboratoire du LAMA selon la méthode décrite en 3.2.2. Photoréacteur (500 mL) remplis d’eau du bassin (photodégradation directe + indirecte) Photoréacteur (500 mL) remplis d’eau déminéralisée (photodégradation directe) Photoréacteur témoin (couvert de papier d’aluminium) Figure 21 : Stratégie expérimentale pour étudier la photodégradation de micropolluants organiques en ZRV (campagne de juillet 2015) 3.1.1.2. Détermination de l’intensité lumineuse La détermination de l’intensité lumineuse est essentielle pour comprendre le rôle de la photodégradation en ZRV et comparer les données acquises dans des conditions de saisonnalités et météorologies différentes. Elle est exprimée en W.m-2 ou en μEinstein.m-2.s-1, et le passage de l’un àl’autre est effectué par l’équation 43 : ɊܧǤ ݉ିଶǤ ݏିଵൌௌሾሾௐሿమሿכ ͳͲͲͲ כఒሾሿଵଶ (Eq. 43) (Fenna, 2002) La détermination de l’intensité lumineuse de notre lieu d’étude s’est effectuée à l’aide de deux appareils fournissant une mesure directe. x Le pyranomètre Cet appareil automatisé, présenté Figure 22, fournit l’intensité globale du rayonnement (ultraviolet (UV), visible et infrarouge (IR, 300-2800 nm) toutes les cinq minutes, et les exprime en W.m-2 dans la gamme 0-2000 W.m-². Ce système est utilisé en surface (hors eau). Son fonctionnement automatisé permet d’accéder à la variation lumineuse incidente au cours de la journée, ainsi qu’à l’évolution de l’exposition solaire en absence de l’expérimentateur. Les données sont enregistrées en continue et celles obtenues au Interface air/eau 47 71 0 cm 10 cm 30 cm 50 cm -Profon deu r 1 m -213 238 358 0 cours de nos campagnes de mesures ont été récoltées afin d’observer l’évolution des conditions climatiques lors de nos expériences. x Le spectroradiomètre Cet appareil d’utilisation manuelle, présenté Figure 23, fournit l’intensité par intervalle de longueur d’onde (UV et visible). Il mesure le flux de photons arrivant par unité de surface à l’endroit où la sonde est immergée. L’appareil a été incliné d’environ 45 ° par rapport à la verticale, ceci afin de recevoir le flux de photon de la manière la plus optimale. La mesure a été réalisée à la surface et dans l’eau. L’immersion a été effectuée manuellement à différents instants (10, 11, 12, 13, 15 et 16 h), et à différentes profondeurs (toutes les 5 cm, jusqu’à 75 cm de profondeur). Plusieurs mesures ont été réalisées au cours de 3 campagnes lors de 3 périodes différentes. En effet, une campagne préliminaire aux 2 déjà mentionnées, a eu lieu les 17 et 18 juin 2014, pour s’adapter à l’appareillage et caractériser au mieux la pénétration de la lumière dans le bassin de la ZRV. Lors des études de la photodégradation pendant les campagnes du 9-16 mars 2015 et du 6-21 juillet 2015, des mesures d’intensité lumineuse ont été réalisées chaque jour. Figure 22: Pyranomètre non-immergeable (LP PYRA 03, Delta Ohm, C2AI) mesurant l'intensité lumineuse incidente Figure 23 : Spectroradiomètre immergeable (RAMSES, TriOS Optical Sensors) 3.1.2.Exposition en laboratoire, en conditions contrôlées L’objectif de cette expérience a été d’étudier ex-situ la photodégradation directe des micropolluants dans des conditions contrôlées de laboratoire afin de mettre en avant une possible relation entre la structure chimique et leurs capacités à se photodégrader. Afin de pouvoir toujours comparer les résultats obtenus dans cette expérience avec ceux obtenus à l’échelle de la ZRV, nous avons choisi de travailler avec une lampe simulant au maximum le rayonnement lumineux. Nous avons ainsi sélectionné un suntest Atlas® comme source d’irradiation de notre milieu réactionnel (Figure 24). Cet appareil est constitué d’une chambre d’essai avec une surface irradiée de 560 cm² par une lampe à Arc Xénon (puissance de 1500 Watts) avec une intensité lumineuse constante de 765 W.m-² dans un domaine de longueur d’onde compris entre 300 et 800 nm. Ces caractéristiques permettent de simuler au mieux le rayonnement solaire (Figure 48). De plus l’appareil est équipé d’un plateau réfrigérant refroidi par un cryostat à circulation limitant au maximum une montée en température de la chambre d’essai. L’agitation est assurée par un agitateur magnétique placé sous le plateau réfrigérant. Le milieu réactionnel est constitué de 500 mL d’eau ultrapure MilliQ LC-Pak placé dans un ballon en quartz pour comparer aux résultats in-situ. Le ballon est bouché pour limiter l’évaporation due à l’échauffement. Nous avons ensuite ajouté 1 mL de la solution de dopage précédemment décrite (Cf. 4.2.) dans le photoréacteur. Un volume de 5 mL de solution a été prélevé pour servir de témoin. Il n’a pas été exposé à la lumière afin de s’assurer de l’absence de dégradation d’un autre processus au cours de la manip (hydrolyse par exemple). Le milieu réactionnel a donc été placé dans la chambre d’essai pendant 181 heures, la salle étant mise dans une totale obscurité au cours de l’expérience. Deux méthodes analytiques ont été employées pour l’analyse des micropolluants, chacune des méthodes nécessitaient des volumes de prélèvements différents : 5 mL pour une injection directe avec la méthode UPLC/(Q)-TOF et 25 mL pour la méthode UPLC/MS-MS. Des prélèvements de 5 mL sont effectués après 0, 0.25, 0.5, 0.75, 1, 1.5, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 24, 28, 32, 53, 57, 61, 77, 81, 85, 149, 153, 157, 173 ,177 et 181 heures. Des prélèvements de 25 mL sont effectués après 0, 0.5, 1, 2, 3, 4, 8, 24, 36, 53, 77, 149 et 173 heures. Le volume du ballon n’étant pas suffisant pour permettre l’ensemble des prélèvements, l’expérience a été répétée trois fois afin de recouvrir toutes les durées d’exposition. Par ailleurs, le pH et la température du milieu réactionnel ont été contrôlés lors de chaque prélèvement. Le contrôle du pH permet de s’assurer du respect des conditions rencontrées dans un environnement naturel (pH de l’eau = 7). Le contrôle de la température permet d’écarter l’hypothèse de la thermodégradation des composés dans le milieu réactionnel. Le suivi de température a mis en avant une température relativement élevée (proche de 40°C). Afin d’étudier si cette température pouvait entrainer la dégradation des composés une expérience a été mise en place, nous avons réalisé une expérience témoin avec le même protocole que pour l’expérience en suntest, à la différence que le milieu réactionnel Figure 24: Irradiation du milieu réactionnel à l’aide d’un suntest Atlas® Dans le document Photodégradation et oxydation chimique de micropolluants pharmaceutiques et phytosanitaires en traitement complémentaire : performances, mécanismes et modélisation (Page 128-133)