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Une phase de résolution et de réparation

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2.1 La réaction inflammatoire

2.1.2 Les acteurs moléculaires et cellulaires de l’inflammation (par phase)

2.1.2.3 Une phase de résolution et de réparation

La résolution de l’inflammation peut être divisée en une phase anti-inflammatoire visant l’élimination de la cause de l’inflammation et des médiateurs associés, et une phase pro-résolutive permettant la reconstruction. Les éléments clefs de la résolution sont donc l’élimination du signal inflammatoire, la diminution des signaux de survie, la normalisation des gradients de cytokines, l’apoptose des PN et leur phagocytose par les macrophages, et enfin la reconstruction (Fullerton et al., 2013; Ortega-Gomez et al., 2013).

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Vers une nouvelle différenciation, re cellularisation

Un retour à l’homéostasie est possible si la cause de l’inflammation est supprimée, les médiateurs inflammatoires neutralisés (désensibilisation des récepteurs, clivages des cytokines par les protéases…), la migration arrêtée, le flot sanguin et la perméabilité vasculaire normaux et le granulome éliminé principalement par l’apoptose et la phagocytose. Dans ces conditions, un remodelage tissulaire est possible (Baum and Arpey, 2005). Nous développerons le rôle de l’apoptose des PN et de leur phagocytose dans le paragraphe II.B.2.c).

La réparation tissulaire suit une détersion complète. Elle aboutit à une cicatrice si le tissu lésé ne peut se régénérer (par exemple un neurone ou une cellule musculaire myocardique) ou lorsque la destruction tissulaire a été très importante et/ou prolongée. La réparation peut aboutir à une restitution intégrale du tissu. Il ne persiste alors plus aucune trace de l'agression initiale et de l'inflammation qui a suivi. Cette évolution très favorable est observée lors d’agression limitée, brève, peu destructrice dans un tissu capable de régénération cellulaire (Baum and Arpey, 2005).

La réparation s’appuie sur différentes phases : une reconstruction ou remodelage du tissu matriciel, une ré-épithélialisation et une néo-vascularisation. La première étape est la reconstruction du tissu matriciel et la constitution d'un nouveau tissu conjonctif appelé bourgeon charnu, formé des leucocytes du granulome, des fibroblastes et myofibroblastes et des néo-vaisseaux sanguins dont la croissance est dirigée de la profondeur vers la surface de la lésion. Les fibroblastes se différencient en myofibroblastes produisant du collagène et de la fibronectine. Cette étape est sous le contrôle du FGF (fiborblast growth factor) , PDGF (Platelet-derived growth factor ) et TGF-β (Baum and Arpey, 2005). Le remodelage du tissu débute alors grâce aux macrophages et aux fibroblastes contrôlés par des facteurs de croissance (principalement le TGF-β) et un équilibre entre synthèse et dégradation des protéines matricielles. Les propriétés contractiles des myofibroblastes permettent de diminuer le volume du bourgeon charnu. Ensuite la ré-épithélialisation se met en place dont l’acteur principal est le kératinocyte dans le cas d’une plaie cutanée (Baum and Arpey, 2005). La néo-vascularisation permet de finir la reconstruction tissulaire, régulée par des facteurs stimulateurs (tel que le VEGF, vascular endothelial growth factor) ou inhibiteurs (comme l’angiotensine). Une angiogénèse insuffisante peut entraîner une sclérose des tissus et une angiogénèse excessive faciliter une infection ou la progression d’une tumeur (Baum and Arpey, 2005).

Les médiateurs contrôlant la résolution

La réaction inflammatoire est limitée dans le temps. Les médiateurs inflammatoires ont une faible demi-vie ce qui permet à la résolution de l’inflammation de se mettre en place. Des systèmes de contrôle le permettent : les cytokines anti-inflammatoires (IL-10 et TGF-β), des anti-protéases, des anti-radicaux libres (des antioxydants enzymatiques et le glutathion), des anti-médiateurs lipidiques et les glucocorticoïdes endogènes. Comme nous l’avons vu, la réaction inflammatoire a des effets sur le système nerveux. Elle module notamment l’axe hypothalamo-hypophysaire et par la CRH (corticotropin releasing hormone) induit la production de l’ACTH (adrénocorticotrophine). L’ACTH induit la production par les glandes surrénales de stéroïdes, dérivés du cholestérol donnant notamment les glucocorticoïdes endogènes comme le cortisol.

 Les médiateurs protéiques

La phase anti-inflammatoire implique des cytokines comme l’IL-10, des protéines solubles comme l’annexine-A1, et des antagonistes de cytokines inflammatoires comme l’IL-1RA ou des formes solubles de récepteur. Les glucocorticoïdes endogènes peuvent aussi être impliqués dans leur expression. Ils favorisent l’expression et la relocalisation de l’annexine-A1 à la surface des PN et inhibent ainsi leur adhésion et transmigration (Perretti and Dalli, 2009). Les PN demeurent la source principale d’annexine-A1.

L’IL-10, produite principalement par les lymphocytes T, nécessite pour sa synthèse deux signaux. Le premier peut être des complexes immuns, des prostaglandines, ou encore des cellules apoptotiques. Le second est un ligand des TLR-2, -4 , -5 (selon le type cellulaire). La production de l’IL-10 peut donc être induite après le pic inflammatoire (Mosser and Zhang, 2008; Nathan and Ding, 2010). L’IL-4 et l’IL-10 jouent des rôles anti-inflammatoires en limitant notamment la production des cytokines pro-inflammatoires par le macrophage. Par exemple, une diminution des concentrations d’IL-10 dans les liquides broncho-alvéolaires (LBA) de patients souffrant de SDRA est associée à un mauvais pronostic, sans doute en raison d’une inflammation excessive (Armstrong and Millar, 1997).

Dernièrement, de nouvelles cytokines semblent aussi jouer un rôle anti-inflammatoire : l’IL- 27, l’IL-35 et l’IL-37 (Banchereau et al., 2012). L’IL-27 favorise une réponse Th-1 et supprime le développement Th-17. Cette cytokine induit la production d’IL-10 par les lymphocytes T. L’IL-35 est produite par les lymphocytes Treg et induit leur différenciation (Banchereau et al., 2012). L’IL-37 diminue l’inflammation dans plusieurs modèles murins (Bulau et al., 2011; McNamee et al., 2011). L’IL-37 diminue la production de cytokines pro inflammatoires par des macrophages traités par le LPS (Bulau et al., 2011). Le rôle de ces cytokines commence à être exploré, mais elles semblent participer au contrôle de la mise en place d’une réponse T favorisant la résolution de l’inflammation.

Le remodelage tissulaire est sous le contrôle d’hormones de croissance. Le FGH, PDGH, VEGF et TGF-β orientent la différenciation cellulaire et la prolifération et contrôlent ainsi la résolution de l’inflammation (Baum and Arpey, 2005; Reinke and Sorg, 2012).

 Les médiateurs lipidiques

Changement du métabolisme lipidique

Des médiateurs lipidiques de la résolution sont produits notamment par le PN, tels que la lipoxine A4 (LXA4). En effet, l’inflammation est un phénomène actif avec un changement de classe des précurseurs lipidiques, des omégas 6 (l’acide arachidonique) aux omégas 3 (EPA, acide eicosapentaénoique ou DHA, acide docosahexaénoique) au moment de la résolution. L’accumulation notamment de certaines prostaglandines (PGE2 er PGD2) sur le site inflammatoire serait à l’origine de ce retournement de situation et nécessaire pour l’initiation de la résolution de l’inflammation et le switch dans la synthèse des lipides (El Kebir and Filep, 2010). Ce sont les mêmes enzymes (phospholipase A2, cyclo-oxygénases et lipo-oxygénase) qui transforment les acides gras polyinsaturés en médiateurs pro-inflammatoires ou pro-résolution. Il y a donc une compétition de l’utilisation de ces enzymes pour l’une ou l’autre des voies.

Les nouveaux médiateurs lipidiques synthétisés sont les lipoxines (issues de l’acide arachidonique), les résolvines des séries E (issues du EPA) et D (issues du DHA), les protectines (issues du DHA) et les marésines (issues du DHA principalement dans les macrophages) (figure 33) (Serhan

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and Petasis, 2011). La synthèse des protectines et des résolvines est induite par l’acétylation des précurseurs omégas 3 (DHA et EPA) par la cyclo-oxygénase 2. Leur production est d’ailleurs favorisée par l’acide acétyl salicylique qui induit l’acétylation de cette enzyme (Serhan, 2007). Leur rôle est établi et confirmé en clinique humaine et dans de nombreux modèles animaux (Serhan, 2007).

Figure 33: Synthèse des médiateurs lipidiques (Serhan and Petasis, 2011)

Les lipoxines, dérivées des omégas 6

Les lipoxines ont été découvertes dans les années 1980 par Samuelsson. Leur synthèse peut être induite suite à des contacts cellule/cellule, comme l’adhésion des plaquettes aux PN (Serhan, 2007), mais aussi par les prostaglandines PGE2 et PGD2. Les prostaglandines favorisent la synthèse de la lipoxine au détriment de celle du leucotriène B4 par la 15-lipoxygénase (Serhan, 2007). Les lipoxines inhibent le recrutement des PN (par phosphorylation du cytosquelette) et favorisent le recrutement de monocytes non phlogistiques et des macrophages, ainsi que la phagocytose des PN apoptotiques par les macrophages (Serhan, 2011). Les lipoxines diminuent également la perméabilité vasculaire (El Kebir et al., 2009). La lipoxine A4 diminue l’activité du PN par une baisse de l’expression de CD11b (Hashimoto et al., 2007), de la production de FRO et une inhibition de l’activité de NF-кB (Soehnlein and Lindbom, 2010). La lipoxine A4 inhibe également la migration des cellules dendritiques ainsi que leur production d’IL-12 (Serhan, 2007) (figure 34).

Les résolvines, protectines et marésines, dérivées des omégas 3

Une analyse systémique des médiateurs lipidiques générés dans des exsudats inflammatoires, a permis de mettre en évidence trois nouvelles classes de molécules anti- inflammatoires : les protectines, les résolvines et les marésines. (Norling and Serhan, 2010).

Les résolvines limitent le recrutement des PN. La résolvine D2 par exemple inhibe l’adhérence des PN aux cellules endothéliales activées et diminue la production par ces mêmes cellules d’oxyde nitrique (Spite et al., 2009). L’utilisation de la résolvine D2 a permis de réduire la mortalité dans un modèle murin de sepsis par diminution de la migration des PN et réduction de la production excessive des cytokines et activation de la phagocytose par les macrophages (Spite et al., 2009). La résolvine D2 limite aussi le recrutement des PN dans un modèle de péritonite (Norling et al., 2012). Le résolvine E1 interagit avec la chimérine ChemR23, bloque la signalisation de ce récepteur et limite ainsi le recrutement des macrophages et des cellules dendritiques (Oh et al., 2011). Les résolvines limitent aussi leur activation. La résolvine E1 se fixe sur le récepteur du leucotriène B4, BTL-1, et empêche ainsi l’activation du PN et son recrutement (Arita et al., 2007). Cela a été montré in vivo dans un modèle de péritonite développé chez des souris déficientes pour BTL1 (Arita et al., 2007). Les résolvines D1 et E1 empêchent également l’activation du PN en inhibant notamment la polymérisation de l’actine (Serhan et al., 2008). La résolvine E1 favorise l’apoptose des PN et accélère la résolution de l’inflammation pulmonaire en augmentant l’activation des caspases dans deux modèles, l’inflammation induite par instillation de Escherichia Coli ou avec du carraghénane (El Kebir et al., 2012). La résolvine E2 augmente la phagocytose des PN apoptotiques par les macrophages et limite la production de cytokines pro-inflammatoires (Oh et al., 2012). Les résolvines, particulièrement la résolvine E1, favorisent la sensibilité du PN à la lipoxine A4 en induisant la synthèse de son récepteur (Maderna and Godson, 2009). Enfin, les résolvines E1, D1 et les protectines augmentent l’expression de CCR5 par les PN apoptotiques ce qui piège CCL-3 et CCL- 5, limitant ainsi le recrutement d’autres leucocytes (Serhan and Petasis, 2011).

Les résolvines, particulièrement la résolvine D1, semblent également induire l’expression des miRNA favorisant la résolution, tels que mir-21, miR-146b, miR-208a, and miR-219, notamment en ciblant la voie NF-кB. Cela été montré dans un modèle murin où l’inflammation est induite par le zymosan (Recchiuti et al., 2011; Recchiuti and Serhan, 2012). Récemment les résolvines ont également été décrites comme diminuant la douleur au cours des phénomènes inflammatoires par leurs effets sur le système nerveux central (Ji et al., 2011).

Les protectines sont une famille plus restreinte. Elle comprend la protectine D1 (PD1), et une forme exprimé exclusivement dans le système nerveux central, la neuro protectine D1 (NPD1). Les protectines ont des fonctions redondantes par rapport aux résolvines. Elles diminuent notamment le recrutement des PN et favorisent la résolution de l’inflammation dans un modèle de péritonite (Serhan, 2007)

Les marésines constituent les derniers médiateurs lipidiques découverts. Elles sont produites à partir de DHA principalement par le macrophage activé par la lipoxygénase. Elles exercent les mêmes rôles que les résolvines et protectines : induire la phagocytose des PN apoptotiques par le

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macrophage et limiter le recrutement des PN en faveur de celui des macrophages (Serhan et al., 2009).

Rôle des anti-inflammatoires stéroïdiens et non stéroïdiens

Les anti-inflammatoires stéroïdiens inhibent les enzymes impliquées dans le métabolisme lipidique et limitent donc la synthèse de médiateurs de la résolution. Les GCs inhibent la cyclo- oxygénase 2 en inhibant NF-кB (Malcher-Lopes and Buzzi, 2009). De plus, les GCs par le biais de l’annexine-A1, inhibent la phospholipase A2 (Parente and Solito, 2004).

Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS comme l’aspirine) inhibent les cyclo- oxygénases 1 et 2. Des AINS spécifiques de la cyclo-oxygénase 2, responsable de la synthèse des éicosanoïdes, sont en cours de développement (Serhan, 2011), ce qui permettrait de ne pas modifier la synthèse des médiateurs lipidiques de la résolution, comme les lipoxines, les résolvines D et les protectines.

Rôle émergent des microRNAs

Des boucles de contrôle négatif de l’inflammation, notamment pulmonaire, impliquant des micro-RNA (miRNA) ont été décrites. Un profil d’expression de miRNA a été décrit dans des pathologies pulmonaires comme la mucoviscidose, la BPCO et l’asthme, traduisant une dérégulation de l’inflammation. Par exemple dans la BPCO, l’expression de 23 miRNAs est diminuée comme miR- 30, miR-146, miR-155, alors que 5 sont augmentés comme miR-494. Ces dérégulations aboutissent à l’activation de la voie NF-кB en modulant la signalisation sous le TLR-4. Mieux comprendre leur régulation ouvrira sans doute à l’avenir de nouvelles cibles thérapeutiques (Oglesby et al., 2010).

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