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5. Pharmacothérapie de la greffe

5.4 Pharmacodynamie des immunosuppresseurs en prévention de la GvHD

ce malgré l’atteinte des niveaux systémiques cibles. Cette variation interindividuelle pourrait s’expliquer, en partie, par l’atteinte d’un degré d’inhibition différent aux cibles thérapeutiques lymphocytaires (Dumont and Ensom 2000, Oellerich and Armstrong 2006, Billing, Giese et al. 2010). Le suivi de marqueurs PD spécifiques pourrait aider à objectiver directement le degré d’immunosuppression atteint au niveau moléculaire, et ainsi être un outil complémentaire au suivi PK. Une telle approche n’a pas encore été mise en place en clinique. Toutefois, des études majoritairement en greffe rénale montrent la plus-value d’un tel suivi pour les inhibiteurs de la calcineurine et le MMF (Sommerer, Giese et al. 2008, Sommerer, Hartschuh et al. 2008, Chiarelli, Molinaro et al. 2010, Maiguma, Yosida et al. 2010, Raggi, Siebert et al. 2010, Fukuda, Goebel et al. 2011, Sommerer, Schnitzler et al. 2011, Molinaro, Chiarelli et al. 2013).

Différentes approches ont été proposées pour déterminer la PD des inhibiteurs de la calcineurine. Ces dernières visaient, soit à mesurer l’activité de l’enzyme cible, la calcineurine, ou à évaluer les réponses immunologiques obtenues, telles que l’expression génique ou protéique de cytokines et la prolifération cellulaire (Caruso, Perico et al. 2001, Stalder, Birsan et al. 2003, Giese, Zeier et al. 2004, Hartel, Schumacher et al. 2004). Deux études ont évalué l’activité catalytique de la calcineurine en greffe de CSH et ont mené à des observations contradictoires. Alors que Sanquer et collaborateurs ont observé un risque accru de GvHD aiguë chez les patients ayant une plus grande activité calcineurine, d’autres ont observé une diminution de l’activité de l’enzyme chez les patients ayant la GvHD (Yamazaki, Mori et al. 2009, Gerard, Bleyzac et al. 2011).Ce dernier résultat peut suggérer que la résistance à la CsA passe par un mécanisme indépendant de la calcineurine. Toutefois, il ne peut pas être exclu que la divergence de ces résultats soit inhérente aux méthodes analytiques utilisées. L’un des marqueurs PD les plus prometteurs pour les inhibiteurs de la calcineurine est la quantification de l’expression résiduelle (pré vs.2 heures post-dose) des gènes régulés par le NFAT (IL-2, IFN, G-CSF et TNF). Cette dernière stratégie a été particulièrement étudiée en greffe rénale, mais également dans d’autres types de greffes solides (Giese, Zeier et al. 2004, Billing, Giese et al. 2010, Sommerer, Schnitzler et al. 2011, Steinebrunner, Sandig et al. 2014). Entre autres, l’activité transcriptionnelle du NFAT a été associée au risque de rejet, d’infection et de cancer cutané, de même qu’à la fonctionnalité du greffon (van Hest, Doorduijn et al. 2007, Sommerer, Giese et al. 2008, Sommerer, Hartschuh et al. 2008, Billing, Giese et al. 2010, Sommerer, Zeier et al. 2010, Hadjibabaie, Vazirian et al. 2011). Une inhibition de l’expression de l’ordre de 15 à 30% semble souhaitable pour maximiser l’effet et limiter les toxicités (Billing, Giese et al. 2010, Sommerer, Zeier et al. 2010). Une relation inverse a également été observée entre l’expression des transcrits contrôlés par le NFAT et le taux circulant des inhibiteurs de la calcineurine (Giese,

Zeier et al. 2004, Sommerer, Zeier et al. 2010). Similairement, Maiguire et collaborateurs ont proposé récemment que la quantification du transfert intranucléaire du NFAT cytoplasmique par la cytométrie en flux pourrait s’avérer un outil de suivi PD utile (Dong, Fukuda et al. 2014). À ce jour, aucune étude n’a déterminé le bénéfice d’évaluer l’expression des gènes régulés par le NFAT en greffe de CSH. Par contre, nos travaux montrent la faisabilité de cette approche chez les greffés de CSH recevant une thérapie immunosuppressive combinée, incluant un inhibiteur de la calcineurine (résultats non présentés).

En ce qui a trait au MMF, l’activité IMPDH est un marqueur PD qui suscite beaucoup d’intérêt. Plusieurs méthodes de quantification sont décrites dans la littérature pour estimer l’activité IMPDH par la quantification des produits catalytiques de l’enzyme (Langman, LeGatt et al. 1995, Montero, Duley et al. 1995, Albrecht, Storck et al. 2000, Glander, Braun et al. 2001, Daxecker, Raab et al. 2002, Glander, Sombogaard et al. 2009, Laverdiere, Caron et al. 2012). De ce fait, une activité IMPDH accrue avant et après la transplantation a été associée au risque de rejet en greffe rénale (Chiarelli, Molinaro et al. 2010, Lexicomp® 2014). Raggi et collaborateurs ont comparé l’activité IMPDH chez des transplantés rénaux (semaines 1, 2 et 12 après la greffe) ayant rejeté (n=17) ou non leur rein (n=35). L’inhibition de l’activité IMPDH était plus faible chez les patients ayant fait le rejet en comparaison avec le groupe contrôle sans rejet (inhibition de 26,5% vs. 56,7%, p<0,001). De plus, l’activité IMPDH avant la greffe était plus élevée chez les patients ayant rejeté le greffon. Ces différences n’étaient pas expliquées par les variations d’exposition au MPA ou à la CsA. Une autre étude, réalisée chez 54 patients greffés du rein depuis plus de 6 mois et recevant le MMF depuis au moins 3 mois, montre également un lien entre l’activité IMPDH et le risque de rejet. Un suivi de 15 mois a permis d’observer que l’activité IMPDH basale (C0h) augmentait avec le temps chez l’ensemble des patients. Toutefois, ce niveau de base avait tendance à être plus élevé chez les cinq sujets qui ont présenté un rejet (p=0,019). De plus, une augmentation importante de l’activité IMPDH au C0h a été observée au moment de l’épisode aigu de rejet chez ces cinq sujets. L’exposition au MPA (ASC0-12h) était similaire pour l’ensemble des sujets. En ce qui a trait à l’activité IMPDH pendant toute la période de suivi, la variabilité chez un même sujet était moindre que celle entre les individus (28% et 42%, respectivement) (Chiarelli, Molinaro et al. 2010). Ces données démontrent l’intérêt potentiel de cet outil tant en post-greffe immédiate qu’en greffe stable. Également, quelques études montrent que le niveau d’expression d’IMPDH1 et d’IMPDH2, de même que la variation des concentrations des purines pourraient être des approches complémentaires à l’activité IMPDH (Bremer, Mandla et al. 2008, Sanquer, Maison et al. 2008, Sombogaard, Peeters et al. 2009, Molinaro, Chiarelli et al. 2013, Vethe, Ali et al. 2014). En effet, l’estimation de l’activité enzymatique donne un reflet de l’activité totale des deux isoformes IMPDH. La quantification de l’expression d’IMPDH1 et IMPDH2 par PCR quantitative en temps réel permet d’apprécier la contribution individuelle de chacun de ces gènes. Des études

supplémentaires sont requises afin d’évaluer l’importance de ces paramètres PD pour l’optimisation de la thérapie immunosuppressive en greffe.