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Pertinence du questionnement sur les pratiques, d’une démarche participative, mais prudence sur les

I. Outils actuels du pilotage de la qualité dans les modes d’accueil de la petite

2. Tirer des leçons d’autres approches qualité : des leviers et des écueils

2.2 Pertinence du questionnement sur les pratiques, d’une démarche participative, mais prudence sur les

équipes

Le recul d’une vingtaine d’années dont on dispose désormais sur les évaluations conduites dans les structures médico-sociales a permis de repérer les faiblesses qu’une telle démarche peut avoir pour les professionnels et sur le fonctionnement des structures.

Ainsi, pour le médico-social, deux rapports ont été publiés sur ce sujet en 2017 puis 2018194. L’évaluation, outil de la qualité : les forces

L’enjeu de l’évaluation (quelle que soit sa forme) est de poser la qualité des soins et des accompagnements comme principe fondamental des pratiques professionnelles et, par conséquent, de réduire les risques de manquement des services à leur mission envers les usagers et de promouvoir la qualité technique, humaine et sociale du service rendu.

In fine, l’intégration de "la démarche qualité" dans les établissements et services vise :

o l’amélioration continue des résultats de la structure, du service ou du professionnel ;

o la pertinence des pratiques ;

o la qualité de vie au travail bénéficiant au professionnel comme à l’usager.

La mise en œuvre d’une évaluation, tout particulièrement lorsqu’elle est conduite en interne peut susciter des réticences chez les équipes impliquées, néanmoins, lorsque la démarche est ancrée dans les pratiques, et que les professionnels contribuent à sa conception, il ressort d'un rapport IGAS récent que ceux-ci peuvent y trouver un intérêt ou s'en saisir.195

Une démarche qualité pertinente permet alors aux équipes d’estimer le résultat des démarches entreprises sur l’amélioration de la prise en charge.

193 Contribution Uniopss pour le HCFEA

194 Catherine Hesse, Thierry Leconte, Le dispositif d’évaluation interne et externe des établissements et services sociaux et médico-sociaux, IGAS, juin 2017

Annie Vidal, Rapport d’information sur l’évolution de la démarche qualité au sein des EHPAD et de son dispositif d’évaluation, n°1214, Assemblée Nationale, 26 juillet 2018

195 Catherine Hesse, Thierry Leconte, IGAS, juin 2017, opere citato

Le dispositif d’évaluation interne et externe des établissements et services sociaux et médico-sociaux (IGAS 2017) 196

Le rapport vise à répondre à une saisine sur la mission d’évaluation de la politique de contrôle et

d’amélioration de l’offre sociale et médico-sociale à travers dispositif d’évaluation interne et externe des établissements et services sociaux et médico-sociaux.

Il s’agit d’interroger la mise en œuvre de l’article L312-8 du code de l’action sociale et des familles (CASF) issu de la loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale avec les évaluations internes (conduites par l’établissement) et externes (par un organisme extérieur) des activités et de la qualité des prestations que délivrent les établissements et services sociaux et médico-sociaux.

Avec cette loi, la mise en œuvre de ces évaluations conditionne les renouvellements de leur autorisation.

L’exercice d’évaluation des 25 000 ESMS arrivant à son terme, il paraissait nécessaire d’évaluer ce dispositif.

L’ANESM (qui a fusionné avec la HAS en 2018) a été créée afin d’accompagner les établissements dans leur démarche d’évaluation. Dans cette optique, elle a publié des recommandations de bonnes pratiques professionnelles (RBPP). Les évaluations sont fondées sur le respect des RBPP qui conditionne en retour le renouvellement des autorisations. Il ressort des travaux des inspecteurs que les RBPP couvrent tous les champs du secteur, mais de façon inégale. Par ailleurs, l’appropriation par les acteurs de la mise en œuvre de la qualité dans les établissements est également très inégale.

L’ANESM a également la charge d’habiliter les évaluateurs externes sans critère fondé sur la qualité des méthodologies d’évaluation proposées par les prestataires. In fine, le choix de l’organisme qui procède à l’évaluation externe est du ressort de l’ESSMS à qui il appartient de rémunérer l’évaluateur. Ce circuit interroge sur les risques de conflit d’intérêt.

La démarche d’évaluation est un dispositif lourd à instaurer mais il est désormais adopté par les ESMMS et les réticences initiales ont été levées. Cependant, les inspecteurs regrettent que l’appui national à sa mise en œuvre soit resté limité du fait de l’absence de référentiel proposés aux ESSMS. Ainsi, les structures ont eu à s’organiser par elles-mêmes (notamment avec leurs fédérations).

Par ailleurs, l’exploitation, à une même date butoir, des 25 000 rapports d’évaluation constitue une charge importante pour les autorités de tarification. Malgré l’hétérogénéité des référentiels utilisés par les ESSMS et les évaluateurs externes, l’analyse des rapports d’évaluation externe est jugée globalement utile par les autorités en charge du renouvellement des autorisations.

Celles-ci considèrent, comme les directeurs d’ESSMS, que la démarche d’évaluation a un réel impact sur la qualité des prestations, bien qu’il n’existe pas d’instrument satisfaisant de mesure de la qualité. Pour autant, les autorités en charge du renouvellement des autorisations soulignent que le dispositif comporte des défauts et faiblesses liées, notamment, au caractère quasi-automatique et exclusif du lien entre la simple production du rapport d’évaluation externe et le renouvellement de l’autorisation et au manque de marge de manœuvre en matière de recomposition de l’offre sociale et médico-sociale.

A l’issue de ce diagnostic, la mission considère qu’il est important de conserver le dispositif d’évaluation interne et externe instauré par la loi de 2002 et de maintenir la mobilisation des acteurs. Pour autant, plusieurs pistes d’amélioration sont proposées afin d’améliorer le dispositif existant :

uments de mesure de la qualité.

alité des évaluations externes.

e dialogue de gestion.

196 Catherine Hesse, Thierry Leconte, IGAS, juin 2017, op.cit.

En ce sens, cela se démarque de certaines démarches plus formelles de type certification (voir ci-après).

Dans le cas des établissements pour personnes âgées dépendantes relevant du secteur médico-social, il est intéressant de relever que l’appropriation de la règlementation par les professionnels est un élément essentiel qui suppose une dynamique institutionnelle. Cette démarche est notamment portée par la HAS, animateur national du pilotage de la qualité. Par exemple, elle produit des recommandations, outils ou guides à l’attention des professionnels de terrain. Ces documents sont construits sur la base des contributions d’experts mobilisés par la HAS197.

L'évaluation outil de la qualité : Ecueils et précautions

L'un des enseignements de l'utilisation de la démarche qualité dans le médico-social est que la conduite de changement doit être échelonnée sur un temps réflexif suffisamment long pour fédérer l’ensemble des acteurs autour du projet et leur permettre de s’organiser.

En effet, la réussite de l’évaluation interne repose sur l’engagement de la direction, l’implication de l’ensemble du personnel et des usagers (ou leurs proches) à toutes les étapes. Il requiert des compétences méthodologiques chez les professionnels (ou a minima au sein de la direction qui saura en transmettre les essentiels) ainsi que des temps de concertation avec les équipes, les usagers et/ou leurs proches. Il s’agit donc d’une démarche technique, chronophage et/ou onéreuse qui peut susciter une attitude d'évitement des acteurs concernés et de prudence des gestionnaires.

Par ailleurs, la manière dont les évaluations sont introduites dans les pratiques et leur articulation avec les contrôles, agréments, financements et sanctions peut être perçues comme une approche coercitive dans laquelle la participation des professionnels et des usagers, tiendrait plus d'un habillage que d'une réelle prise en compte de leur contribution. Citons pour exemple la typologie et l'utilisation des questionnaires de satisfaction, ou les réunions d'information et de concertation à un stade tardif de la mise en place des outils et méthodes de la démarche. Ces freins humains à la mise en œuvre de l'évolution de la qualité sont à considérer.

Pour maintenir ou améliorer les normes de qualité, le rapport Petite enfance, grands défis (OCDE, 2001) recommandait d’une part un pilotage efficace des systèmes d’éducation et d’accueil des jeunes enfants (EAJE) par les gouvernements et, d’autre part, des approches d’inspiration participative et associative de la qualité.

Selon les dernières estimations de l’Observatoire National de la Petite Enfance (ONPE), en 2016, on dénombre 436 400 places financées par la branche Famille (PSU ou CMG)198 dans environ

197 Ainsi par exemple, la fiche repère « Sécurité alimentaire, convivialité et qualité de vie, les champs du possible dans le cadre de ma méthode HACCP (état actuel de la législation) » rédigé par l’ANESM (désormais rattaché à la HAS)197 s’attache-t-elle à apporter des clés d’appropriation d’une réglementation pour les professionnels des EHPAD.

198 403 800 financé par la PSU et 32 600 avec le CMG structure de la Paje.

12 000 EAJE. Une très large majorité d’EAJE reste gérée par une municipalité (60 %), devant le secteur associatif (30 %) et les entreprises du secteur marchand (8 %)199. Mais ce qui est remarquable ces dernières années, c’est la progression des créations de places portées par le secteur marchand (entreprise de crèche et micro-crèches Paje). Compte-tenu de la diversité des gestionnaires, la conduite de la qualité doit se faire avec toutes ces cultures d’établissements.

L’expérience "certi-crèche"200 de la ville de Bordeaux a permis d’enclencher une démarche vertueuse d’amélioration continue de la qualité dans les EAJE, grâce à un processus participatif incluant les directrices d’EAJE, les agents municipaux et les parents sur une durée de deux ans, en lien avec la CAF et la mairie de Bordeaux, en appui sur un cadrage normatif (Afnor). Instauré dans un climat de crise du secteur, et avec une réticence initiale des professionnelles, le processus, pourtant lourd en temps et en ressources humaines, a finalement convaincu les professionnelles des EAJE (et notamment les directeurs) de l’intérêt cette réflexion partagée et réflexive de la qualité.

Cela est apparu comme un élément de professionnalisation intéressant et de management pertinent.

Aujourd’hui tous les ans une auto évaluation concerne 1/3 des établissements municipaux. Réalisé en mai 2016 par l'AFNOR, l'audit de renouvellement participatif s'est soldé par un succès avec la décision favorable pour la reconduction de la certification.

La ville de Nantes a mis en place une démarche participative « Imaginons ensemble l’accueil de nos tout-petits pour demain » incluant les parents, les assistants maternels, les EAJE… au total 1000 personnes ont contribué à la formulation de 22 propositions qui ont été analysées par la ville et soumises à l'arbitrage des élus. La démarche a abouti à la formalisation d’une charte qualité d'accueil des tout-petits signée avec la CAF et le Département.

199 Les 2 % d’EAJE restants sont gérés soit par des CAF, soit par des mutuelles ou directement par des administrations.

200Certi'Crèche est un référentiel d'engagement de service créé à l'initiative de la Ville de Bordeaux et développé en partenariat avec AFNOR Certification. Ce label édité en 2013 repose sur sept engagements : des modalités d'admission claires et transparentes ; un accueil adapté à chaque situation pour répondre aux besoins de l'enfant et des parents, en particuliers des locaux accueillants, adaptés, sécurisants ; une prise en charge personnalisée de l'enfant ; une relation entre les parents et les professionnels basée sur l'échange et le dialogue ; un établissement largement ouvert sur son environnement ; une organisation responsable à l'écoute et au service des familles ; une démarche concertée d'amélioration continue des prestations"

Deuxième point, les expériences du médico-social en particulier font ressortir la nécessité de mettre à disposition des professionnels des repères pratiques pour les accompagner dans leurs démarches, qui plus est lorsque l’évaluation est conduite en interne : « (…), on peut regretter que l’appui national à sa mise en œuvre soit resté limité, aucun référentiel n’ayant été proposé aux ESSMS à l’échelon national. »201

Programme et Curriculum

Dans les témoignages de professionnels, on relève que des programmes spécifiques ou ciblés dans certains établissements sont proposés seulement aux enfants « repérés ». Cela peut poser question en matière de déontologie quant à la notion de « prédestination » des enfants, des aprioris culturels et sociétaux.

Le risque n’est-il pas, en effet, de confier un programme « clef en main » à des professionnels peu qualifiés au détriment de professionnels formés à l’accueil et au développement du jeune enfant dans sa globalité ? La notion de curriculum, peu utilisée en France et pourtant courante au niveau international alimente la réflexion sur la question de la qualité de l’accueil du jeune enfant. Présentée par Sylvie Rayna, Catherine Bouve et Pierre Moisset202 dans l’ouvrage Un curriculum pour un accueil de qualité de la petite enfance cette notion fait partie des points clefs des recommandations retenus par les experts de l’OCDE (2006). On peut retenir comme définition que le curriculum est « un cadre de référence au niveau national ou local pour les pratiques. Il s’agit d’un texte, qui au-delà des seules indications réglementaires, présente un ensemble d’éléments explicites en termes d’objectifs, de normes, de valeurs, de connaissances …orientant le fonctionnement et la culture des lieux d’accueil et d’éducation ».

201 Rapport IGAS 2017, op. cit.

202 Sylvie Rayna, Catherine Bouve et Pierre. Moisset, Un curriculum pour un accueil de qualité de la petite enfance - ERES –2014

Pour la petite enfance il ne s’agit pas de programme, mais de démarche et surtout de démarche participative.

Dans un curriculum pour la petite enfance, la notion de besoins des enfants doit également laisser une place à celle des « droits ». Un curriculum requiert un accompagnement, une élaboration participative et un suivi dans sa mise en œuvre.

Les récents rapports d’évaluation de politiques publiques203 soulignent que les évaluations externes conduites par des organismes choisis et financés par les établissements eux-mêmes (comme l’impose la réglementation pour les ESMS) sont contre-productives du fait du circuit de financement et des risques de conflits d’intérêts.

Pour les assistants maternels, le défi est encore plus important et rejoint la question de la professionnalisation. La récente publication du décret d'agrément des assistants maternels, et la prise de conscience des droits à la formation continue, est un défi à relever, d'une part avec les

« parents employeurs », et d'autre part avec les régions qui ont qualité pour la mise en œuvre de ces formations et leur financement au travers des OPCA.

2.3 Des écueils de la labellisation: confusion entre satisfaction et qualité, manque de