• Aucun résultat trouvé

Pertinence et limites de la modélisation

La modélisation d'une sonde AFM par un système masse-ressort ponctuel est une mé- thode classique, utilisée par de nombreux auteurs [Chen et al.,1994b,Nony et al.,1999,Wang,

1998, Winkler et al., 1996] et qui est validée, dans une certaine mesure, par les courbes de résonance de la Fig.2.3. On observe en eet un très bon accord entre les mesures expérimen- tales et les modèles donnés par les Eqs. (2.6) et (2.7). Néanmoins, assimiler une sonde AFM à un oscillateur mécanique ponctuel constitue une hypothèse forte qu'il convient de discuter.

e

W z x Z(x,t) L

Figure 2.5  Représentation schématique d'une sonde AFM. Le levier (longueur L, largeur w, épaisseur e) est modélisé par une poutre encastrée dans le cadre de la théorie d'Euler-Bernouilli. La dé- exion de l'axe neutre, Z(x, t), est sup- posée parallèle à l'axe z.

Une modélisation plus réaliste de la sonde AFM passe par l'utilisation de la mécanique des milieux continus [Butt and Jaschke, 1995, Paolino et al., 2009, Sader, 1998, Stark and Heckl,2000]. Le levier est assimilé à une poutre encastrée (Fig. 2.5) et on néglige l'inuence de la pointe sur la dynamique de la sonde. En eet, pour la majorité des sondes commerciales où la pointe est intégrée au micro-levier (Fig. 1.4), la masse de la pointe est 500 fois plus

petite que celle du levier [Butt et al.,1993]. Dans le cas de sondes colloïdales (où une bille de masse non négligeable est collée à l'extrémité du levier) l'inuence de la pointe est discutée par Laurent et al. [Laurent et al.,2013].

L'utilisation de la mécanique des milieux continus se fait généralement dans le cadre de la théorie d'Euler-Bernouilli. L'épaisseur du levier e est supposée négligeable devant la largeur welle-même bien plus petite que la longueur du levier L. Les modes de vibration transverses de la sonde sont supposés parallèles à l'axe z et uniformes selon la largeur du levier.

2.4.1 Cas du système libre (F = 0)

En l'absence d'interaction avec la surface, la déexion du levier Z(x, t) est solution de l'équation ∂Z2 ∂t2 + E e2 12ρL ∂Z4 ∂x4 = 0, (2.17)

où ρL désigne la densité du levier, E son module d'Young.

Dans un souci de simplicité, la dissipation induite par l'interaction avec l'air ambiant n'a pas été prise en compte ici.

La géométrie du levier impose des conditions aux limites particulières qui agissent comme un ltre fréquentiel : la solution générale de l'équation précédente est ainsi la somme discrète de plusieurs modes oscillants.

b)

a)

x z L x z 1ermode w0=a0 2

d

Ee 2 12rLL4 x z 2èmemode N1 w 1= 6.27w0 x z 3èmemode N1 N2 w 2= 17.55w0 PSD (m 2 /Hz) Frequency (Hz)

e

f0 f1 f2

Figure 2.6  a) Représentation schématique des trois premiers modes de exion d'une poutre encastrée. b) Densité Spectrale de Puissance (PSD) du signal de déexion d'une sonde AFM en fonction de la fréquence. La sonde est uniquement soumise au bruit thermique. Les quatre premiers modes de exion et les deux premiers modes de torsion sont visibles sur le graphe. Le ratio des diérentes fréquences de résonance est en très bon accord avec la modélisation : f0 = 14, 046 kHz, f1 = 6, 26f0 et

f2 = 17, 48f0. Adapté de [Paolino et al.,2009].

Chaque mode de vibration possède une fréquence propre (Fig. 2.6) reliée à la fréquence du mode fondamental par la relation

fn f0 = αn α0 2 , (2.18)

où αn est tel que cos(αn) cosh(αn) =−1. On a ainsi α0 = 1, 8751, α1= 4, 6941, α1= 7, 8548

etc... [Butt and Jaschke,1995]. Fait intéressant, chaque mode de vibration se comporte comme un oscillateur harmonique. On attribue au ni`ememode oscillant une raideur eective, k

n, telle

que [Butt and Jaschke,1995,Paolino et al.,2009] kn k0 = αn α0 4 , (2.19)

où k0 désigne la raideur du levier au mode fondamental.

Dès lors que la raideur et la fréquence de résonance sont connues, la masse eective introduite dans la section2.1peut être obtenue expérimentalement grâce à la relation 2πfn=pkn/meff.

Pour les sondes employées dans cette thèse, les valeurs de meff sont de l'ordre de 10−12−

10−11kg. D'un point de vue théorique, m

eff est dénie de sorte que k0= k, où k est la raideur

statique du levier. Or, pour un levier rectangulaire f0= 1 2π r α4 0 k 3 M, o`u k = Ew 4 e L 3 (2.20) et M est la masse réelle du levier. On obtient alors meff = 3/ α04 M ' 0, 24M. Pour les

leviers en forme de V, meff ∈ [0, 13 ; 0, 2]M [Chen et al.,1994a].

IB En conclusion : En l'absence d'interaction avec le support, la modélisation de la sonde AFM par un oscillateur harmonique amorti est tout à fait valide. La mécanique des milieux continus permet cependant d'interpréter la présence de plusieurs modes de vibrations. Ces diérents modes permettent d'étudier l'impact de la fréquence et de la raideur sur le système, c'est pourquoi, un certain nombre de mesures seront réalisées au mode fondamental et au premier mode excité (f1 ' 6, 27 f0 et k1 ' 39, 27 k0).

2.4.2 Cas général ((F 6= 0))

Lorsque la pointe oscillante interagit avec un échantillon, le mouvement de la sonde reste périodique mais n'est plus sinusoïdal. En eet, l'interaction pointe-surface, qui est non linéaire, introduit dans le mouvement de la sonde des harmoniques du signal d'excitation. Comme ces harmoniques excitent les modes de vibration du micro-levier, il faut s'assurer que la modélisation de la sonde par un système masse-ressort ponctuel (qui ne possède qu'un mode résonant) reste pertinente dans le cas où F 6= 0.

Rodrigez et Garcia [Rodriguez and Garcia, 2002] ont décomposé en série de Fourier le mouvement théorique d'une pointe AFM excitée à son mode fondamental et soumis à une interaction pointe-surface non linéaire (Fig.2.7). Lorsque la sonde est modélisée par un oscil- lateur ponctuel, en (a), l'importance relative des diérentes harmoniques décroit de manière monotone. En revanche, dans l'approche "continue", en (b), les contributions des harmoniques sont modulées par les fréquences propres du levier. Un maximum local apparaît à chaque fois qu'une harmonique est proche, ou coïncide, avec un mode propre du levier. C'est le cas par exemple pour ω = 6 ω0.

L'étude montre cependant que pour des expériences réalisées à l'air ambiant (Q ∼ 100−1000 et f0> 105 Hz) l'ordre de grandeur des harmoniques est, quelle que soit la modélisation, trois

A (w )/A (w 0 )

Figure 2.7  Spectre de Fourier normalisé A(ω)/A(ω0)du mouvement théorique d'une

sonde AFM. La pointe est excitée sinusoïdalement à la pulsation ω0 (pulsation du

mode fondamental) et interagit avec une surface par une force non linéaire. En a) la sonde est modélisée par un oscillateur harmonique amorti. En b) elle est modélisée par une poutre encastrée. Les contributions des diverses harmoniques sont alors modulées par les fréquences propres du levier. Adapté de [Garca and Perez,2002]

IB En conclusion, la modélisation de la sonde par un système masse-ressort ponctuel est parfaitement adapté pour l'étude des systèmes de cette thèse.