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On considère un solide diélectrique semi-inni, de surface plane et horizontale, sur laquelle est déposé un liquide non volatil qui forme un lm stable d'épaisseur E constante (voir Fig. 4.5). Si l'épaisseur est susamment faible, les interactions de vdW entre le substrat et le solide se manifestent et une surpression se développe au sein du lm mince. Cette pression, nommée pression de disjonction, est négative si le substrat et le liquide s'attirent mutuellement, ce qui sera toujours le cas pour un liquide apolaire par exemple, où les seules forces de vdW mises en jeux sont les forces dispersives (ou de London) qui sont attractives [Israelachvili,2011].

Le système précédent est maintenant placé à l'air ambiant, au voisinage d'une pointe AFM. Si la distance d entre le bas de la pointe et la base de la surface liquide est susamment faible, l'interaction de vdW pointe-surface déforme alors l'interface de manière axisymétrique (voir Fig. 4.5). La tension de surface, la gravité et l'interaction liquide-substrat s'oppose alors à

cette déformation. Par ailleurs, la viscosité de l'air étant au moins mille fois inférieure à celle des liquides considérés dans cette thèse (voir chapitre3), on néglige les contraintes visqueuses exercées par l'air sur l'interface liquide.

Sonde Air R Liquide (r, m, g) h�

z

r

d h�r� r Substrat solide E O

Figure 4.5  Représentation schématique d'un lm liquide d'épaisseur E, déformé par l'action à distance d'une sphère solide de rayon R. On note η(r) la déformation de l'interface liquide et d la distance de séparation entre le bas de la pointe et la base de la surface liquide.

4.3.2 Modélisation de la pointe AFM

La pointe AFM est ici assimilée à une sphère de rayon R. Si cette modélisation est naturelle pour les sondes colloïdales (pour lesquelles une sphère micrométrique est collée à l'extrémité d'un levier AFM classique) cette hypothèse peut sembler moins légitime pour des pointes AFM standards pyramidales. Il faut considérer ici que les interactions de vdW inter- viennent sur des distances relativement faibles, 1 − 100 nm, par rapport à la longueur de la pointe AFM, qui est de l'ordre de 10 µm. On comprend donc intuitivement que l'essentiel de l'interaction se produit au niveau de l'apex de la sonde, qui est arrondi.

Plus quantitativement, un certain nombre d'études s'est intéressé à l'impact de la géométrie de la pointe sur l'expression de sa force d'interaction avec une surface plane [Butt et al.,

2005,Cappella and Dietler,1999,Giessibl,1997,Hartmann,1991] Pour plusieurs géométries, la forme de la pointe ne modie pas la répartition spatiale de l'interaction mais aecte seule- ment son intensité. Considérer une pointe AFM comme une sphère de rayon R est ainsi une approximation raisonnable et couramment utilisée [Forcada et al.,1991b,Quinn et al.,2013,

Sahagún et al.,2007,Wang et al.,2011,Zitzler et al.,2002]. Cela permet de plus de décrire l'instabilité du jump-to-contact au moyen d'expressions un peu plus simples.

4.3.3 Interaction pointe-liquide

Le potentiel d'interaction de la pointe AFM modélisée par une sphère et de l'interface liquide est calculé à partir de la théorie de Hamaker, initialement développée pour les solides indéformables [Hamaker,1937].

Le calcul s'appuie sur le potentiel de vdW non retardé, w(q), qui s'exerce entre deux atomes ou deux molécules

w(q) = λ

q6, (4.5)

où q est la distance de séparation des molécules et λ est la constante d'interaction du potentiel qui dépend du potentiel d'ionisation, de la polarisabilité et de la polarité des molécules en présence [Israelachvili,2011].

La théorie de Hamaker suppose que les interactions entre paires de molécules sont additives. L'énergie dEplassociée à l'interaction de la pointe AFM avec un volume diérentiel de liquide

dVliq est donc égale à l'addition du potentiel d'interaction w de tous les atomes de la pointe

avec tous les atomes contenus dans le volume dVliq. Dans le cadre de la mécanique des milieux

continus, la sommation discrète peut être remplacée par une intégration volumique et l'énergie dEpl s'écrit alors

dEpl = ρldVliq×

Z

Vpointe

w(q) ρp dVpointe, (4.6)

où ρlet ρpdésignent respectivement la densité moléculaire du liquide et de la pointe, et Vpointe

le volume de la pointe. Dans le système de coordonnées cylindriques (r, φ, z) dont l'origine O est placée à une distance d + R du centre de la sphère (voir Fig.4.5), l'énergie d'interaction dEpl s'écrit donc dEpl = 4HplR3 3π 1 [(d + R− z)2+ r2− R2]3 dVliq, (4.7)

où le volume diérentiel dVliq se situe en (r, z) et où on a introduit la constante d'Hamaker

de l'interaction pointe-liquide Hpl = π2λρlρp. Lorsque la pointe se trouve à grande distance

de l'interface liquide (d → ∞) l'énergie d'interaction pointe-liquide dE∞

pl est nulle.

4.3.4 Interaction liquide-substrat

Une démarche similaire permet de calculer l'énergie d'interaction dEsl de l'ensemble du

substrat solide avec un volume diérentiel de liquide situé à une hauteur z. Dans le système de coordonnées cylindriques (r, φ, z) dont l'origine O est placée à une distance E du substrat solide (voir Fig.4.5), cette énergie s'écrit

dEsl = −

Hls

6π (E + z)3 dVliq, (4.8)

où Hls est la constante d'Hamaker du système liquide-substrat. En l'absence de pertur-

bation de l'interface liquide (d → ∞, z = 0), l'interaction liquide-substrat s'écrit alors dE

sl =−Hls/6πE3 dVliq.

I . L'attraction du substrat solide contribue à aplatir l'interface liquide à partir d'une dis- tance radiale λF = (2πγE4/Hls)1/2. Si cette distance est largement supérieure à la longueur

capillaire lc= (ρg/γ)1/2, l'interaction liquide-substrat est alors négligeable et on peut dénir

une épaisseur caractéristique Ebulk' (Hls/2πρg)1/4, au delà de laquelle le lm liquide adopte

un comportement de volume [Ledesma-Alonso et al., 2013]. Les expériences AFM menées dans le cadre de cette thèse ont été réalisées sur des gouttes de liquide millimétriques (1- 3 mm de rayon environ), dont l'épaisseur E varie entre 200 et 700 µm. Or, pour nos liquides Ebulk∼ 1 µm. Nous négligerons donc l'action du substrat solide dans toute la suite.

4.3.5 Équation de Young-Laplace généralisée pour un lm épais

La diérence de pression, ∆P , au travers de l'interface liquide d'équation z = η(r) est décrite par l'équation de Young-Laplace généralisée [Ledesma-Alonso et al.,2012b]

∆P = 2γκ + ρgη + Πpl+ Πsl , (4.9)

où κ est la courbure moyenne de l'interface liquide, ρ est la masse volumique du liquide, g, est l'accélération de la pesanteur, et Πpl est le champ de pression induit par la pointe et Πsl

est la pression de disjonction induite par le substrat solide, que nous négligerons par la suite. La courbure moyenne de l'interface liquide, κ, s'écrit en coordonnées cylindriques

κ =∂r 2r   r ∂rη q 1 + (∂rη)2  , (4.10)

où ∂r représente la dérivée partielle par rapport à la position radiale r.

Le champ de pression Πpl correspond alors à la diérence d'énergie d'interaction volumique

de l'état perturbé (d ni) et de l'état non perturbé (d → ∞), soit, Πpl = − dEpl dVliq +dE ∞ pl dVliq = −4HplR 3 3π 1 [(d + R− η)2+ r2− R2]3. (4.11) Adimensionalisation

L'expression (4.9) peut s'écrire de manière adimensionnelle en divisant toutes les distances et longueurs du système par la taille caractéristique R. On obtient alors, pour un lm liquide où Πsl≈ 0, ∆P∗=∂r∗ r∗   r∗ r∗η∗ q 1 + (∂r∗η∗)2  + Boη∗− Ha h (d∗+ 1− η)2+ (r)2 − 1i3 , (4.12)

où x∗ = x/R. L'équation précédente fait ressortir deux nombres sans dimension qui contrôlent

le comportement de l'interface liquide et du jump-to-contact : le nombre de Bond, Bo=

ρgR2

γ , (4.13)

qui compare les eets de la gravité aux eets capillaires, et le nombre d'Hamaker modié Ha=

4Hpl

3πγR2 , (4.14)

qui compare l'énergie d'interaction pointe-liquide à l'énergie capillaire. Pour nos expériences, les valeurs de Ha et de Bo s'étendent sur six ordres de grandeurs car le rayon de la pointe

varie entre 10 nm et 10 µm. Avec γ ∼ 10−2 N · m−1, H

pl' 5 − 50 × 10−20J et ρ ∼ 1000 pour