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Courbes de décalage en fréquence ∆f

La gure7.4montre un exemple de courbes de décalage en fréquence ∆f obtenues lors de l'immersion de la même sonde dans sept liquides ioniques diérents. Des exemples de courbes de retrait sont montrés au chapitre6.

Figure 7.4  En traits pleins : décalage de la fréquence de résonance ∆f en fonction de la profondeur d'immersion h d'une sonde CDP excitée à son mode fondamental. Les mesures sont réalisées sur sept liquides ioniques. En pointillés : ajustement linéaire du domaine h > 0.

Lors de la formation du ménisque, en h = 0, on observe que le décalage en fréquence ∆f augmente brusquement. Un saut positif est visible pour tous les liquides, et sa valeur est comprise entre 210 ± 2 Hz pour le IL29 et 430 ± 3 Hz pour le IL22. Le comportement du décalage en fréquence en h = 0 a récemment été relié aux propriétés élastiques de l'interface liquide qui est assimilée à un ressort de raideur eective kl[Dupré de Baubigny et al.,2015].

L'immersion de la sonde introduit alors un décalage en fréquence ∆f positif donné par la relation ∆f f0 h=0 = 1 2 kl k , (7.1)

où meff ' 10−11 kg est la masse eective de la sonde. Le saut de fréquence observé en

h = 0est donc directement proportionnel à la raideur de l'interface liquide kl, qui est donnée

théoriquement par l'équation [Dupré de Baubigny et al.,2015] kl= 2πγ ln  4 lc R [1 + sin θ]  + 1 sin θ − γE − 1 . (7.2)

Pour une bre cylindrique de rayon R = 30 nm, la raideur eective kl est théoriquement

comprise entre 0, 5 γ et 0, 55 γ lorsque l'angle de contact ¯θ varie entre 30° et 90°. Ces va- leurs sont en bon accord avec les observations expérimentales puisque l'on mesure un rapport kl/γ = 0, 5 ± 0, 07.

Lors de l'immersion de la bre cylindrique (en h > 0), la courbe de ∆f décroît linéaire- ment avec la profondeur d'immersion h. Les mesures montrent d'autre part, que la pente de ∆f dans ce domaine est d'autant plus grande (en valeur absolue) que la viscosité du liquide est élevée. On rappelle ici que les viscosités des ILs utilisés dans cet exemple sont telles que µIL22 = 36 mPa · s < µIL12 < µIL24 < µIL26 < µIL16 < µIL18 < µIL29 = 500 mPa · s. L'évolu-

tion des courbes de ∆f avec la profondeur d'immersion h est attribuée à la modication de la masse eective de la sonde meff lorsque h > 0. En eet, l'oscillation de la bre dans le liquide

provoque un écoulement de cisaillement sur une distance radiale nie. On appelle couche visqueuse, la couche de liquide entrainée par le cylindre. Lorsque la bre est immergée, la masse initiale meff de la sonde augmente alors d'une masse eective ml(h), qui est reliée à la

quantité de liquide mis en mouvement par l'oscillation de la sonde. Plus le cylindre s'enfonce dans le liquide, plus sa surface de contact augmente, et plus le terme de masse ajoutée ml(h)

est élevé. Par ailleurs, les courbes de déexion de la Fig.7.3indiquent que l'angle de contact du ménisque ne varie pas lors de l'immersion de la bre. Par conséquent, l'évolution de la fréquence de résonance de la sonde peut s'interpréter à partir de l'équation

∆f (h) f0 = 1 2 kl(θa) k − 1 2 ml(h) meff , (7.3)

valable au premier ordre en kl  k et en ml  meff. L'hypothèse ml  meff sera discutée

ultérieurement.

IBLes courbes de ∆f permettent donc d'accéder au coecient de masse ajoutée mlqui est,

en première approximation, linéaire avec la profondeur d'immersion h.

An d'étudier l'inuence de la fréquence d'excitation, des courbes de spectroscopie FM sont réalisées sur le même système, au premier mode excité de la sonde (f1 = 455, 4 kHz,

k1 = 88, 5N · m−1). Les résultats de l'expérience sont représentés sur la Fig.7.5. On constate

que l'allure des courbes expérimentales est semblable à celle des mesures de la Fig.7.4. Nous noterons cependant que le rapport signal sur bruit est plus faible pour les mesures réalisées à f1 et que les valeurs du saut de fréquence ∆f(h = 0) sont 5 à 7 fois plus petites que pour

le mode fondamental. Ce dernier résultat s'interprète simplement à partir de l'équation ∆fi fi h=0 ∼ 1 2 kl,i ki , (7.4)

où l'indice i fait référence au i`eme mode excité de la sonde. Les travaux de Julien Dupré de

Baubigny ont montré en eet que la raideur du ménisque kl est indépendante de la fréquence

d'excitation pour f < 500 kHz. Par conséquent, le rapport des sauts de décalage en fréquence ∆f0/∆f1 est donné théoriquement par l'équation

∆f0

∆f1

= f0 k1 f1 k0

= 6, 27, (7.5)

Figure 7.5  En traits pleins : décalage de la fréquence de résonance ∆f en fonction de la profondeur d'immersion h d'une sonde CDP sollicitée à son premier mode excité. En pointillés : ajustement linéaire du domaine h > 0.

Les pentes du décalage en fréquence, ∆f∗, sont mesurées pour chaque liquide dans le

domaine immergé (h > 0). Leurs valeurs sont représentées sur la Fig. 7.6 en fonction de la viscosité cinématique ν qui caractérise la résistance d'un liquide à un écoulement de ci- saillement. Le graphe permet également de comparer les mesures réalisées aux deux premiers modes de résonance de la sonde. On constate que le décalage en fréquence linéique ∆f∗ est

proportionnel à la viscosité ν mais ne dépend que faiblement de la fréquence d'excitation pour la gamme fréquentielle explorée. On observe toutefois un phénomène de saturation aux hautes fréquences (f1 & 400 kHz) et hautes viscosités (µ & 300 mPa · s), pour lesquelles la

pente ∆f∗ semble atteindre un plateau. La même tendance a été observée pour les mesures

sur glycérol (µ ' 900 mPa · s) au premier mode excité de la sonde. L'origine de ce phéno- mène est encore incertaine et sera discutée ultérieurement. Il pourrait s'agir ici d'un eet non linéaire apparaissant aux grandes contraintes de cisaillement, tel que le glissement de la ligne de contact [Sega et al., 2013] où le dépôt d'un lm de liquide [Quéré, 1991] pendant l'oscillation de la sonde.

8

(#10

!4

m

2

.s

!1

)

0 1 2 3 4 5 " f $ (# 1 0 8 H z. m ! 1 ) 0 1 2 3 4 Mode fondamental

Premier mode excit4e

Figure 7.6  Décalage en fréquence linéique ∆f∗ en fonction de la viscosité cinéma-

tique ν pour le mode fondamental de la sonde (en bleu) et pour le premier mode excité (en rouge).

IB Une observation plus approfondie de la Fig. 7.4 montre que les courbes de décalage en fréquence ∆f(h) obtenues pour les liquides les plus visqueux (IL18 et IL29) ne sont pas

tout à fait linéaires dans le domaine h > 0. Elles présentent en eet un prol parabolique qui explique l'importante incertitude associée à la mesure de leur pente m∗

l. On pourrait

supposer que l'utilisation de liquides relativement visqueux (µ> 400 mPa · s) provoque une augmentation signicative de la masse eective du système qui ne permettrait pas d'utiliser le modèle linéaire donné par l'Eq. (7.3). Pour nos expériences toutefois, le coecient linéique de masse ajoutée m∗

l est inférieur à 10−7 kg · m−1. Ainsi, la masse ajoutée maximale, atteinte

en h ' 500 nm, est de l'ordre de 5 × 10−14kg, ce qui est inférieur de trois ordres de grandeur

à la masse eective meff de la sonde. Le modèle linéaire utilisé pour analyser les courbes de

décalage en fréquence est donc bien valide.

L'allure parabolique des courbes de ∆f pour les liquides les plus visqueux pourrait provenir d'un eet lié à l'amortissement des vibrations mécaniques de la sonde. Il est possible en eet que la sonde immergée soit sur-amortie (Qint < 1/

2) et que l'asservissement de la phase de l'oscillation ne soit plus eectué correctement. Les données issues du liquide IL29, pour lequel les courbes de décalage en fréquence présentent une allure nettement parabolique, ne seront donc plus considérées dans la suite de ce chapitre.

Pour le reste des mesures, la dérivation de Eq. (7.3) par rapport à h relie simplement la pente ∆f∗ de la courbe de décalage en fréquence au terme de masse ajoutée linéique m

l, par l'équation m∗l = −2 meff ∆f∗ f0 , (7.6)

où la masse eective meff est dénie par l'équation meff = k/(2πf0)2 (voir chapitre 2). Les

valeurs de m∗

l correspondant aux expériences précédentes sont représentées en fonction de la

viscosité ν sur la Fig. 7.7. L'ajustement des données conrme que m∗

l est proportionnel à ν

et donne un rapport m∗

l/ν = 1, 9× 10

−4± 2 × 10−5 kg · s · m−3 pour le mode fondamental et

m∗l/ν = 2× 10−5± 5 × 10−6kg · s · m−3 pour le premier mode excité (sans prendre en compte

les mesures issues des expériences avec le IL18 et le IL29).

8

(#10

!4

m

2

.s

!1

)

0 1 2 3 4 5

m

$

(#

l

1

0

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k

g

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! 1

)

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 Mode fondamental

Premier mode excit4e

Figure 7.7  Coecient de masse ajoutée linéique m∗

l en fonction de la viscosité

cinématique ν pour le mode fondamental de la sonde (en bleu) et pour le premier mode excité (en orange).

Contrairement aux mesures de ∆f∗, le coecient m

l est fortement dépendant de la fré-

quence d'excitation du cylindre. Le ratio des coecients directeurs des ajustements linéaires est ainsi égal à 9 ± 3, ce qui pourrait suggérer que le terme de masse ajoutée m∗

l est inverse-