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Partie 1 – Ancrage théorique

2. La viralité

2.9. Perspectives : peut-on prédire la viralité ?

« Comprendre la croissance de la popularité d’un contenu sur Internet est d’un grand intérêt pour un large éventail de services, d’un point de vue technologique, économique et social. »78 (Figueiredo et al., 2011).

« La facilité avec laquelle les contenus peuvent maintenant être produits pose au centre des préoccupations le problème de l’attention qui peut leur être consacrée. »79 (Szabo et al., 2008).

La viralité d’un contenu est-elle prédictible (Figure 10 qui reprend avec humour cette question) ? Telles sont les questions auxquelles aimeraient répondre certains, les annonceurs et les publicitaires faisant certainement partie des plus intéressés. En effet, il s’agit là d’un enjeu économique de première importance dans le domaine publicitaire. Mais les professionnels ne sont pas les seuls à souhaiter pouvoir répondre à cette question. Les particuliers également, en tant que créateurs massifs de contenus numériques voudraient pouvoir prédire le succès de leurs œuvres. Certains scientifiques pensent déjà

78 « Understanding content popularity growth on the Internet is of great relevance to a broad range of

services, from technological, economical and social perspectives. » (Figueiredo et al., 2011).

79 « The ease with which content can now be produced brings to the center the problem of the attention that

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pouvoir répondre à cette question à l’aide d’algorithmes80. Rappelons que la viralité est composée de deux aspects complémentaires : l’exposition au contenu et la diffusion de ce même contenu. La revue de littérature présentée dans cette partie expose des travaux qui tentent de développer des méthodes qui permettraient de prédire chacun de ces aspects sur différentes temporalités. Sur bien des points cette partie ressemble à la partie qui énumère les différents facteurs de viralité. La différence est qu’ici les travaux présentés proposent des méthodes de prédiction à partir des facteurs et données relevés. Bien sûr, les travaux présentés ne concernent pas tous le format vidéo mais il est toutefois possible d’extrapoler certains résultats pour les appliquer à ce format.

80 Nous mettons à votre disposition un outil d’analyse colorimétrique et sémantique développé par le MIT

qui permet d’estimer la popularité potentielle d’une image qui sera postée sur les réseaux sociaux et notamment sur Flickr : http://popularity.csail.mit.edu/

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Figure 10 Est-ce que ce que vous avez fait va devenir viral ? (Source : Upworthy)

2.9.1. Analyse antérieure à la diffusion du contenu

Khosla (2014) s’est focalisé sur deux aspects cruciaux qui peuvent affecter la popularité d’une image afin de la prédire : le contenu et le contexte social. Ses travaux adoptent une approche qui repose, entre autres, sur les signaux sociaux comme le nombre d’amis qu’a celui qui poste la photographie. Khosla (2014) fait donc ressortir les facteurs qui reviennent le plus souvent sur les photographies les plus populaires. Il semblerait dans un premier temps que les caractéristiques les plus simples comme la saturation n’ont que peu d’impacts sur la popularité d’une photographie. Ensuite, les tons verts et bleus auraient moins d’impacts que les tons rouges sur la popularité d’une image. Sûrement parce que ces tons saisissent mieux l’attention de l’individu. Mais les couleurs seules ne semblent pas avoir un impact majeur sur la popularité d’une image. Le dégradé et la texture donnent

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de meilleurs résultats. Dans un second temps, parmi les caractéristiques majeures sémantiquement significatives, Khosla (2014) cherche à étudier l’impact de la présence ou de l’absence de certains objets, personnes, etc., dans certaines photographies sur la popularité de celles-ci. Parmi les objets semblant avoir le plus d’impacts sur la popularité d’une image, on peut citer les mini-jupes, les maillots de bain, les bikinis, les parfums, les brassières, les revolvers, et les tasses. Ce classement n’est pas parfait car le dispositif utilisé pour reconnaître les objets n’en référence qu’un nombre limité. La présence de personnes contribue positivement à la popularité d’une image. Une partie de l’étude de Khosla (2014) recherche les facteurs de popularité parmi les signaux sociaux. Un individu qui possède des photographies avec de nombreuses vues a plus de chances de poster de nouvelles images qui généreront également de nombreuses vues. Sur Flickr, il semblerait que plus un usager possède de contacts plus ses photographies seront potentiellement populaires. Les tags, la longueur du titre et de la description seraient aussi de bons éléments pour prédire la popularité potentielle d’une image. En effet, plus ces paramètres posséderaient de mots plus ils auraient de chances d’apparaître dans les résultats de recherches. Le contenu de l’image (technique et sémantique) et les signaux sociaux sont tous deux nécessaires dans l’établissement de la popularité d’une image.

2.9.2. Analyse précoce de la diffusion du contenu

Szabo et al. (2008) estiment possible de prédire la popularité à venir d’un contenu juste après qu’il ait été posté sur Internet, c’est-à-dire en fonction de la popularité qu’il aura engrangé dès les premiers temps de son existence sur le Web. Cette étude démontre qu’il existe effectivement une corrélation entre la popularité précoce et la popularité tardive d’un même contenu. En d’autres termes, plus un contenu est populaire au moment qui suit sa première diffusion sur Internet, plus celui-ci est susceptible de devenir viral. Cette méthode est applicable aux vidéos postées sur le site YouTube mais fonctionne également avec d’autres contenus postés sur d’autres plateformes.

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2.9.3. Analyse postérieure de la diffusion du contenu

D’autres travaux sont plus intéressants dans notre cas puisqu’ils s’intéressent à la prédiction du potentiel de partage des vidéos. Dans l’un de ces travaux, Shamma et al. (2011) se concentrent sur l’identification de modèles d’interactions à partir d’outils de partages synchrones de vidéos81. Shamma et al. (2011) pensent que les vidéos à potentiel viral sont traitées différemment et engendrent des interactions spécifiques. Il évite donc une approche sur le contenu de la vidéo, ses méta-datas, etc. sachant que les auteurs estiment que l’on peut déterminer la nature du contenu en fonction de l’usage et les commentaires que font les usagers de la vidéo. Il en résulte un modèle qui permet de prédire le nombre de vues que cumulera une vidéo à partir de la façon où celle-ci est regardée dans un environnement synchrone de partage.

2.9.4. Conclusion des perspectives

La revue de littérature proposée rapporte diverses analyses qui diffèrent au niveau de leur temporalité dans leur approche du potentiel d’exposition ou de diffusion d’un contenu. En effet, Khosla (2014) proposait une analyse de ce potentiel antérieure même à la première diffusion du contenu sur le Web en étudiant le contenu technique et sémantique ; Szabo et al. (2008) proposaient un modèle permettant d’estimer ce potentiel dans les premiers instants qui suivent la première mise en ligne du contenu en observant sa popularité précoce qui est en théorie corrélée avec la popularité tardive ; et enfin, Shamma et al. (2011) proposaient une méthode postérieure de prédiction du nombre de partages

81 Shamma et al. (2011) se sont servi en particulier de Zync, un plug-in pour Yahoo! Messenger, l’outil de

messagerie instantané de Yahoo!. Ce plug-in permet aux usagers de partager une vidéo et de pouvoir la visionner en même temps.

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d’un contenu en fonction du comportement des individus vis-à-vis de ce même contenu dans un environnement d’échange synchrone.

Les travaux qui nous ont été présentés sont intéressants, tout particulièrement, à notre sens, ceux de Khosla (2014). Malgré le fait que son corpus soit uniquement composé de photographies, dans la mesure où ils proposent une analyse sémantique automatisée du contenu. Cette méthode est limitée certes pour le moment à cause des bases de données sémantiques encore trop restreintes en termes de références, mais elle promet des perspectives de recherches intéressantes lorsque le dispositif d’analyse sémantique sera extrapolé au format vidéo.