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CHAPITRE 3- CONCEPTION, SYNTHÈSE ET CARACTÉRISATION DE L’ANODE

3.4 Caractérisation électrochimique des films minces de Ni(O)-CGO

3.4.3 Suivi dynamique in situ des propriétés électriques et microstructurales lors de la réduction des

3.4.3.2 Suivi in situ de la réduction de NiO par spectroscopie d’impédance

3.4.4.1.2 Percolation du nickel

Pour concevoir des films minces performants, le réseau de nickel doit être continu dans l’épaisseur du film, c’est-à-dire il faut qu’il y ait une percolation suffisante de la phase nickel dans le cermet Ni-CGO. Cette percolation sera atteinte dans différentes conditions de température qui dépendront du pourcentage volumique de nickel initiale dans le film mince. Les travaux précédents ont montré que le pourcentage volumique de nickel doit atteindre un minium pour que la percolation puisse se faire.

Dans la suite du travail, nous avons étudié l’influence du taux de nickel dans les films et le temps de réduction à une température donnée sur le phénomène de percolation.

Temps de percolation

La conductivité totale augmente fortement lorsque le niveau de percolation du nickel dans le film est atteint. Cette augmentation brusque de conductivité dépend de la température à laquelle la mesure est réalisée et du pourcentage volumique de nickel dans le film (cf. Figure 3-24). Par exemple, pour un film de Ni(O)50-CGO50, il faut attendre 10h à 350°C pour observer une augmentation de conductivité alors qu’à 500°C, après 7,5 min, nous constatons une augmentation de conductivité.

La variation des temps de percolation (tp) qui correspondent au temps nécessaire pour la formation d’un réseau de nickel continu est tracée en fonction de la température (Figure 3-26a). Nous constatons qu’il est difficile de déterminer avec précision le temps de percolation à 500°C pour un film contenant 70% volumique de Ni. En effet, la percolation du réseau de nickel est très rapide et est obtenue après un temps de traitement de seulement 5 min. Nous remarquons également que pour des températures supérieures à 390°C, les temps de percolation sont plus importants pour les échantillons moins riches en nickel, c’est-à-dire ceux qui contiennent 50% en volume de Ni. Cela peut être expliqué par le fait que pour des teneurs en nickel plus faibles l’obtention d’un réseau continu de particules de nickel métallique (la percolation) nécessite une réorganisation plus importante de ces dernières. De plus, l’accessibilité des particules de nickel au sein des films poreux est différente. L’énergie d’activation de ce mécanisme a été quantifiée en traçant l’évolution de α en fonction de la température en utilisant une loi d’Arrhenius pour les deux compositions en nickel (Figure 3-26b). α représente le rapport entre le temps de percolation à une température T et le temps de percolation observé à T = 350°C. Cette loi prévoit que ces deux courbes sont des droites, ce qui

est le cas. A partir des coefficients directeurs de ces droites, il est possible de déterminer les énergies d’activation. Nous obtenons 1,2 eV pour un film contenant 50% en volume de Ni et 1,8 eV pour un film contenant 70% en volume de Ni. Ces différences peuvent s’expliquer par un environnement de l’oxyde de nickel dans la couche non identique. Nous pouvons donc conclure que l’accessibilité du réseau de nickel est différente pour les deux échantillons. Nos films sont constitués de nanoparticules de Ni et CGO agglomérées entre elles dans un réseau «3-D », ce qui laisse une mésoporosité ouverte et connectée. Lors de la réduction de NiO en Ni métallique, il y a des variations de volume importantes, qui créent une porosité supplémentaire facilitant l’accessibilité des particules au gaz réducteur. Dans le cas des films contenant 70% en volume de Ni, le volume poreux est plus important, ce qui facilite l’accessibilité des gaz. A cela s’ajoute une surface spécifique plus importante qui peut permettre la réduction d’un plus grand volume de nanoparticules de NiO à même temps de traitement. Cependant, une autre morphologie de film pourrait conduire à d’autre effet, les interactions étant différentes.

Seuil et dimensionnalité de la percolation

La théorie de la percolation indique que la conductivité d’un mélange d'une phase Ni et d'une phase CGO dont les conductivités vérifient σNi > σCGO, varie en fonction de p, la fraction volume de la phase Ni en suivant les lois de puissance suivantes24, 25 :

 p > pc σ= σNi (p – pc)t

 p < pc σ= σCGO (pc – p)-s

Figure 3-26 : (a) Tracé du temps de percolation tp en fonction de la température pour 50%Ni (bleu) et 70%Ni (noir). (b) Tracé de ln α en fonction de la température en coordonnées d'Arrhenius dans des films minces poreux de Ni(O)50-CGO50 (bleu) et Ni(O)70-CGO30 (noir). α = tp (T)/ tp (350°C).

 p = pc σ= σNiCGONi)u

avec pc la fraction volumique critique appeléele seuil de percolation, σNi la conduction du nickel, σCGO la conduction de l’oxyde de cérium dopé gadolinium, t, s et u étant les exposants critiques du modèle qui dépendent de la topologie du système, u étant égale à t/(t+s).

Lorsque p > pc , la relation peut s’écrire de la manière suivante : ln σ = ln σNi + t ln (p-pc). Le tracé de ln σ en fonction de ln (p-pc) est donc une droite. Dans notre cas, pc ne varie pas en fonction de la température et de la teneur en nickel. Sur la Figure 3-27a, le tracé de la conductivité totale (σ) en fonction du pourcentage volumique de nickel permet de déterminer la valeur de pc. Cette valeur est obtenue en modélisant le profil de la conductivité en fonction de la teneur en nickel après réduction totale de l’oxyde de nickel dans les films. Grâce à cette modélisation, nous avons déterminé le seuil de percolation de notre système. La valeur de pc est de 31,1% et est en accord avec les estimations précédentes obtenues à partir de la variation de la conductivité en fonction de la température (pc ≥ 30% vol. en Ni). Cette valeur est généralement obtenue dans le cas ou le réseau formé par le Ni est un réseau tridimensionnel.

Figure 3-27 : (a) Conductivité totale de films minces de Ni-CGO en fonction du %vol. en Ni pour différentes températures avec modélisation du profil de conductivité à 400°C. Valeurs de Muecke et al. en référence 5 (b) Schéma simplifié de la porosité colonnaire et des plans de percolation 2D des films minces poreux de Ni-CGO.

Dans les lois de puissance précédemment définies, les exposants t et s peuvent prendre différentes valeurs dépendant de la topologie du système. Kirkpatrick 26 et Scher 27 ont défini les valeurs des exposants critiques et du seuil de percolation en fonction de la dimensionnalité du réseau étudié. Les résultats sont rassemblés dans le Tableau 3-2. Ainsi, ces exposants valent 1 si on a un ensemble de chaines conductrices (chaines qui se connectent entre elles peu importe l’architecture) et sont compris entre 1 et 1,4 pour (t) ou 1,3 pour (s) dans le cas de réseau bidimensionnels (feuillets,…). Dans le cas de réseau tridimensionnels, ces exposants valent 2,0 pour (t) et 0,73 pour (s). Ces exposants sont les coefficients directeurs des droites en coordonnées logarithmiques. Ainsi dans notre cas ces coefficients sont de 1,1 ± 0,08 pour t et 0,6 ± 0,1 pour s, démontrant une percolation des particules de nickel dans un réseau bidimensionnel.

Les résultats de dimensionnalité obtenue par la valeur du seuil de percolation et par les valeurs des exposants critiques sont en contradiction. Ceci est possible dans le cas où une anisotropie de la conductivité existe13, 14, 28. Cette anisotropie peut correspondre à des chemins de conductions privilégiés selon l’axe perpendiculaire au plan du substrat. Ceci a pour effet de déformer la dimensionnalité 3D du réseau de percolation en un réseau 2D.

Ces résultats sont en accord avec les caractérisations microstructurales réalisées sur les films poreux de NiO-CGO. En effet, dans le §3.3.1.3, nous avons montré que les pores sont connectés entre eux dans une direction perpendiculaire au plan du film, délimitant des colonnes. Ainsi, la connectivité des particules de nickel se fait dans un plan perpendiculaire au réseau du film délimité par la structure colonnaire du réseau poreux (Figure 3-27b).

Tableau 3-2 : Valeurs des exposants critiques t et s de conductivité, de la coordination z et du seuil de percolation dans le modèle de sites psc selon la nature du réseau et de sa dimensionnalité26-28.