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2. Voies des nucléotides cycliques dans le système vasculaire

2.3. Hydrolyse des NCs par les phosphodiestérases

2.3.2. La PDE3

2.3.2.1. Caractéristiques générales

La famille des PDE3 est codée par 2 gènes différents, PDE3A qui code pour 3 isoformes (PDE3A1-3) et PDE3B qui code pour une seule isoforme (Lugnier, 2006b; Omori and Kotera, 2007a). Les PDE3 ont la particularité de posséder un insert de 44 acides aminés au niveau du domaine catalytique C-terminal, qui semble jouer un rôle important dans la sensibilité de l’enzyme au GMPc et à l’inhibition sélective de ces enzymes (He et al., 1998; Manganiello and Degerman, 1999). Leur activité enzymatique peut être stimulée suite à une élévation de la concentration d’AMPc intracellulaire dans différents types cellulaires tel que les CMLs d’aorte humaine ou rat en culture (Liu and Maurice, 1998).

Les isoformes possèdent dans leur région N-terminale des sites NHR pour N-terminal

hydrophobic region, responsables de leur adressage intracellulaire ciblé ce qui pourrait

contribuer à la compartimentation du signal AMPc (Wechsler et al., 2002). Comme l’isoforme PDE3A1 contient deux domaines NHR1 et NHR2, sa localisation est exclusivement membranaire. L’isoforme PDE3A2 ne contient que le domaine NHR2, sa localisation est donc mixte, à la fraction membranaire et cytosolique (Maurice et al., 2003). L’isoforme PDE3A3 dépourvue des domaines NHR se retrouve exclusivement dans le cytosol. Et enfin, l’isoforme PDE3B possédant un domaine NHR1 plus long que celui de la PDE3A1 a été décrit pour être associé à la membrane (Yan et al., 2007) (Figure 15).

Toutes les isoformes de la famille des PDE3 possèdent des sites de phosphorylation (Figure 15), à l’exception de la PDE3A3 (Wechsler et al., 2002). Les PDE3A1 et PDE3B peuvent être phosphorylé par la PKA et la protéine kinase B (PKB) alors que la phosphorylation de la PDE3A2 se fait exclusivement par la PKA (Rondinone et al., 2000). La phosphorylation permet l’activation des PDE3 et par conséquent, une diminution des concentrations d’AMPc.

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Figure 15 : Représentation schématique de la structure et des voies de régulation des isoformes de PDE3 d’après (Zaccolo and Movsesian, 2007).

La structure des isoformes de PDE3 diffère par la présence ou l’absence du domaine NHR (Nterminal hydrophobic region), et de sites de phosphorylation par la PKA et la PKB : P1, P2, P3.

La PDE 3 permet l’interaction entre les voies de signalisations des deux nucléotides cycliques car elle a la capacité d’hydrolyser l’AMPc et le GMPc (Tableau 2). Les deux NCs sont en compétition pour le même site catalytique. D’autre part, la PDE3 présente une Vmax 4 à 10 fois supérieure pour l’AMPc (Lugnier, 2006b). L’hydrolyse de l’AMPc par la PDE3 est donc inhibée par le GMPc. Cette particularité aurait des conséquences importantes sur le rôle vasculaire de la PDE3. En effet, son activité sera plus importante en cas de faible intensité de la voie GMPc dans la CML. L’activité de la PDE3 pourrait ainsi être exacerbée par une diminution de la biodisponibilité du NO d’origine endothélial, principal stimulateur de la voie GMPc dans les vaisseaux (Eckly and Lugnier, 1994; Eckly et al., 1994; Komas et al., 1991). La PDE3A est principalement présente dans le cœur, les plaquettes, les oocytes et les CMLs alors que la PDE3B est particulièrement exprimée dans les adipocytes, les hépatocytes, le rein et les spermatozoïdes (Reinhardt et al., 1995). Les CMLVs humaine, porcine et de rat, expriment tous les isoformes de la PDE3 (Polson and Strada, 1996). La PDE3A semble être la forme prédominante dans la fraction cytosoliques tandis que la PDE3B est limitée à la fraction particulaire (Liu and Maurice, 1998; Palmer and Maurice, 2000). Cette différence de distribution intracellulaire, souligne le rôle de ces deux familles dans la régulation de fonctions cellulaires différentes et suggère la compartimentation du signal AMPc au niveau vasculaire. L’expression des isoformes de la PDE3 peut être modulée par divers agents pharmacologiques administrés in vivo. Une administration prolongée de nitrate chez le rat augmente l’expression

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de la PDE3A1 dans CMLVs d’aorte (Kim et al., 2001). Un traitement prolongé par des agents élévateur de la concentration d’AMPc stimule l’expression des isoformes PDE3A2 et PDE3B dans l’aorte et l’artère fémorale de rat (Tilley and Maurice, 2002).

2.3.2.2. Modulation pharmacologique de l’activité PDE3

Des inhibiteurs de la PDE3 sont disponibles sur le marché. Certains ont un usage thérapeutique.

- L’amrinone (Inocor®) et la milrinone (Primacor®) (IC50 = 150 nM) sont des pyridines utilisés pour leur propriété cardiotonique dans le traitement de l’IC congestive en aigu. Le traitement chronique de patients atteints d’insuffisance cardiaque sévère a cependant révélé une augmentation de la mortalité due aux arythmies et aux arrêts cardiaques (Movsesian and Kukreja, 2011; Packer et al., 1991).

- Le cilostazol (Pletal®) (IC50 = 20 nM) est un dérivé des quinolones, utilisé pour ses propriétés vasodilatatrices et anti-agrégeante (en inhibant la recapture de l’adénosine) dans le traitement d’une artériopathie ischémique des membres inférieurs, la claudication intermittente (Kanlop et al., 2011; Liu et al., 2011).

- L’usage des autres inhibiteurs comme le cilostamide, et l’OPC-33540 reste uniquement expérimental. Le cilostamide inhibe la PDE3A avec une IC50 = 27 nM et la PDE3B avec une IC50 = 50nM (Sudo et al., 2000a). L’OPC-33540 inhibe préférentiellement la PDE3A ( PDE3A IC50 = 0,32 nM, PDE3B IC50 = 1,5 nM) (Sudo et al., 2000a). Les tests in vitro réalisés sur des PDEs recombinante d’origine différente (humaine, bovine, rat) montrent que ces deux inhibiteurs sont sélectifs pour la famille PDE3 (ratio de sélectivité ˃ 100 pour PDE1, 2, 4, 5, 7) (Sudo et al., 2000a).

2.3.2.3. Rôle de la PDE3 dans la régulation du tonus vasculaire

Des dosages in vitro de l’activité hydrolytique des PDEs réalisés dans des tissus vasculaires, en présence d’1 µM d’AMPc, révèlent que la famille de PDE3 possède l’activité majoritaire (Hubert et al., 2014; Polson and Strada, 1996). D’autre part, l’importance fonctionnelle de cette famille de PDE sur le contrôle de la vasomotricité a notamment été démontrée dans plusieurs lits vasculaires par la réalisation d’expérience de réactivité vasculaire ex-vivo, en présence d’inhibiteur sélectif de la PDE3.

Actuellement, il est clairement établi que l’inhibition pharmacologique de la PDE3 induit, d’une part une réponse relaxante dans plusieurs lits vasculaires comme l’artère mésentérique humaine (Lindgren et al., 1989), l’aorte de rat (Lindgren and Andersson, 1991a) ainsi que les artères coronaires, pulmonaires et rénales humaine et leur équivalent chez le rat (Lindgren and

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Andersson, 1991b). Sur des anneaux d’aorte de rat pour lesquels l’endothélium a été détérioré, l’effet vasorelaxant est préservé (Eckly et al., 1994; Komas et al., 1991). D’autre part, l’inhibition de la PDE3 s’oppose à la réponse contractile induite soit par la stimulation spécifique d’un RCPG, soit par dépolarisation à l’aide d’une solution physiologique enrichie en K+ ([K+] = 80 mM) (Meisheri et al., 1980). De plus, une potentialisation des réponses relaxantes à des agents responsable de l’augmentation de [AMPc]i et du [GMPc]i a également été observée en présence d’inhibiteur de la PDE3 (Komas et al., 1991; Lindgren and Andersson, 1991b; Maurice and Haslam, 1990).

Bien que ces effets vasorelaxants puissent être expliqués par l’augmentation de la concentration d’AMPc résultant de l’atténuation de son hydrolyse par la PDE3 (Eckly et al., 1994; Lindgren et al., 1991a), il est nécessaire de souligner l’implication du GMPc dans les effets précédemment observés. La présence d’un endothélium fonctionnel et l’utilisation d’agents activateurs des GCc (donneurs de NO, ANP) contribuent à l’augmentation de la concentration de GMPc, connue pour réguler négativement l’activité de la PDE3. L’augmentation de la concentration de GMPc dans les CMLVs permet une action synergique avec les agents élévateurs de la concentration d’AMPc(isoprénaline et forskoline) pour potentialiser leur effet vasorelaxant. Donnée confirmée par l’étude de Maurice (Maurice et al., 1991) réalisée dans l’aorte de rat. En effet cette étude rapporte une potentialisation de l’effet du cilostamide en présence d’isoprénaline et d’un donneur de NO, le nitruprussiate de sodium.

Bien que ce mécanisme soit identique à celui décrit dans les cardiomyoctes, l’expression de la PDE2 au niveau vasculaire est faible en comparaison à la PDE3 ce qui par conséquent, sous-entend que le GMPc exerce globalement un effet inhibiteur sur l’activité PDE3 plutôt que stimulateur de l’activité PDE2.

L’utilisation de souris déficiente pour l’isoforme PDE3A et PDE3B a permis de mettre en évidence l’implication spécifique de l’isoforme PDE3A, sans la PDE3B, dans la prolifération des CMLVs. En effet, il a été constaté un blocage du cycle cellulaire dans les CMLVs issues des souris déficientes pour la PDE3A exclusivement. De plus, l’utilisation d’ARN interférant ciblant la PDE3A chez les souris déficientes pour la PDE3B a confirmé l’implication exclusive de l’isoforme PDE3A (Begum et al., 2011).

Dans l’endothélium vasculaire, la caractérisation des isoformes de PDE3 présents restent encore incomplète. Cependant, l’effet des inhibiteurs de PDEs dans les CEs est clairement défini. Ils réduisent la prolifération et l’expression des molécules d’adhésion des CEs (Blease et al., 1998; Lugnier and Schini, 1990; Suttorp et al., 1993). Le mécanisme mis en jeu semble impliquer un

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complexe macromoléculaire adressé à la membrane des CEs et associant la PDE3 au facteur d’échange Epac1. Le détachement d’Epac1 du complexe permettrait son activation et provoque la formation de tubules et l’adhésion cellulaire (Wilson et al., 2011).