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4. Infarctus du myocarde :

4.3. Pathophysiologie de l’IDM :

La pathophysiologie de l’IDM, définie comme étant une formation de thrombus suite à une rupture de plaque d’athérosclérose, a significativement évolué lors des deux dernières décennies. L’étude VIRGO (Variation in Recovery: Role of Gender on Outcomes of Young Acute Myocardial Infarction Patients) a montré qu’une femme sur 8 se présentant avec un syndrome coronarien aigu ne peut pas être classée selon la définition universelle de l’IDM [54]. A l’instar des hommes qui se présentent le plus souvent avec des coronaropathies occlusives, les coronaropathies non occlusives sont plus répondues chez les femmes [55].

IDM avec obstruction :

L’IDM avec obstruction est engendré principalement par une rupture ou une érosion d’une plaque d’athérosclérose. Cette dernière est définie comme étant une réaction inflammatoire en réponse à l’accumulation des lipides au niveau de la paroi artérielle (Figure 10) [56]. L’hypercholestérolémie, en particulier l’augmentation des LDL, est considérée comme un facteur principal favorisant la formation d’une plaque d’athérosclérose. La première étape dans la formation d’une plaque consiste à la pénétration des LDL dans l’espace sous-endothélial favorisée par l’augmentation de la perméabilité endothéliale. Ces LDL sont alors piégés dans l’espace intimal en interagissant avec la matrice extracellulaire (MEC) [56]. Ces molécules de LDL vont ensuite subir une série de modifications, principalement l’oxydation, qui est responsable de l’initiation de la réponse inflammatoire qui s’intensifie par l’infiltration des monocytes et des lymphocytes T et la sécrétion d’un cocktail de cytokines [56]. Des métalloprotéinases (MMPs) capables de dégrader la MEC sont également libérées par les cellules de la plaque.

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La deuxième conséquence de l’oxydation des LDL est la formation des cellules spumeuses qui sont des macrophages gorgées de LDL oxydés. Quant aux LDL extracellulaires, ils se regroupent au centre de la plaque pour former un amas appelé noyau graisseux. D’un autre côté, des cellules musculaires lisses (CML) migrent à partir de la média vers l’intima où ils prolifèrent. Les CML acquièrent ensuite un phénotype sécrétoire produisant de la MEC. L’accumulation de la MEC aboutit à la formation de la chape fibreuse.

Figure 10. Les étapes de formation d’une plaque d’athérosclérose http://jb-ricco.com/quest-ce-que-latherosclerose/

Ce qui fait le danger d’une plaque n’est pas tant sa taille mais les complications possibles issues de la rupture ou de l’érosion de l’endothélium revêtant la chape fibreuse (Figure 10) [56]. Une plaque est considérée vulnérable, si elle contient un grand centre lipidique et une chape fibreuse fine. La rupture de la chape fibreuse met en contact le sang

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avec les éléments thrombogènes de la plaque. Cela induit l’agrégation plaquettaire et la cascade de coagulation aboutissant à un phénomène de thrombose. Dans 20-40% des cas d’IDM [57], il n’existe pas une rupture de la plaque mais une érosion superficielle mettant en contact le sang avec l’espace sous-endothélial, mais les conséquences en matière de thrombose sont similaires. La formation de thrombus peut entrainer un rétrécissement de la lumière sans toutefois entrainer une occlusion complète, le syndrome résultant est alors l’angor instable. En cas d’une occlusion complète, le patient souffre alors d’un IDM.

Les femmes présentent plus souvent que les hommes une coronaropathie non-obstructive (15% versus 8%) [6]. Les données d’angiographie et d’échographie intravasculaire de l’étude PROSPECT (The Providing Regional Observations to Study Predictors of Events in the Coronary Tree), ont montré que les femmes avec syndrome coronarien aigu présentaient une coronaropathie moins extensive [58]. En outre, elles présentent moins de rupture de plaque que les hommes (6,6% versus 16,3% p = 0,002) [58]. Ces observations ont ultérieurement été confirmées dans l’étude ADAPT-DES (the assessment of dual antiplatelet therapy with drug-eluting stents) où les femmes avaient une chape fibreuse moins fine par rapport aux hommes et moins de rupture de plaque. Cette différence atténuait avec l’âge en étant significative seulement chez les patients de moins de 65 ans [6]. Les facteurs protégeant les femmes contre une coronaropathie lourde avant la ménopause semblent être plus liés à leur profil lipidique favorable que les hormones sexuelles [55]. De plus, le sexe féminin et le tabagisme sont les facteurs de risque les plus associées avec l’érosion de la plaque d’athérosclérose [59].

IDM sans obstruction :

L’ischémie myocardique peut également se présenter sans coronaropathie obstructive (Figure 11). Malgré le risque de développer des complications CV, ces patients sont faussement rassurés et reçoivent moins de thérapies que ceux avec obstruction [14]. L’étude

WISE (Women’s Ischemia Syndrome Evaluation) a montré que la moitié des femmes s’étant présenté pour une ischémie myocardique n’avaient pas de coronaropathie obstructive (définie comme ≥50% de sténose au niveau d’au moins une artère coronaire) [7, 8].

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Figure 11. Pathophysiologie de l’IDM sans obstruction (Traduite depuis la version originale) [60]

Le spasme coronaire est une vasoconstriction intense conduisant à l’obstruction partielle ou complète de l’artère coronaire (Figure 11) [61]. Il survient souvent au repos, particulièrement pendant la nuit. Sur l’ECG, le spasme coronaire est souvent associé à une dépression du segment ST. Le mécanisme pathogénique semble inclure plusieurs facteurs, plus particulièrement l’hyperréactivité des CML, le système nerveux autonome et les cellules endothéliales [6, 61].

La dissection spontanée d’une artère coronaire (DSAC) est définie comme étant une déchirure au niveau de la paroi artérielle qui n’est pas d’origine iatrogénique ou traumatique (Figure 11). Le progrès dans l’utilisation des techniques d’imagerie coronaire a amélioré le diagnostic de cette manifestation. La DSAC serait à l’origine d’environ 1,7-4% des syndromes coronariens aigues [62, 63]. De plus, il est bien plus présent chez les femmes (92-95%) notamment d’âge jeune (entre 44 et 55 ans) [6]. La dissection peut avoir lieu entre n’importe laquelle des 3 couches de la paroi artérielle (adventice, media ou intima). Plusieurs facteurs semblent être responsables de ce phénomène. Dans la majorité des cas, les patients

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souffrent d’une artériopathie fragilisant la paroi artérielle [6]. Des cas associés à des dysplasies fibromusculaires ont également été rapportés [6].

Le syndrome de Takotsubo, également appelé le syndrome des cœurs brisés est caractérisé par un apex en forme de ballon (Figure 11). Il se présente avec des symptômes très similaires à un syndrome coronarien aigu, avec une douleur thoracique et des modifications ischémiques au niveau de l’ECG [64]. Une cardiotoxicité aux catécholamines suite à un stress physique ou émotionnel a été désignée comme une des principales causes de ce syndrome [64]. 1-2% des patients se présentant pour un syndrome coronarien aigu sont diagnostiqués pour avoir le syndrome de Takotsubo dont 90% sont des femmes ménopausées [64-66]. Parmi les caractéristiques cliniques de ce syndrome: des anomalies au niveau de la mobilité de la paroi ventriculaire, augmentation importante des peptides natriurétiques, augmentation légère des cTns, récupération de la FV systolique dans les 3 à 6 mois [6].

La dysfonction coronaire microvasculaire (DCM) contribue également aux signes et aux symptômes d’ischémie non-obstructive. Elle correspond à une altération au niveau de la régulation des vaisseaux de résistance myocardiques également appelés artérioles coronaires [67]. La prévalence de cette dysfonction microvasculaire est plus élevée chez les femmes, qui représentent 70% des patients [68]. Une altération au niveau de la fonction endothéliale des artérioles coronaires est considérée comme l’un des principaux mécanismes responsables de DCM. Cette dysfonction endothéliale entraine une réponse exagérée aux stimuli vasoconstricteurs et une incapacité de produire du monoxyde d’azote en réponse à ces stimuli [67]. Un déséquilibre au niveau du système nerveux autonome induisant une vasoconstriction exagérée a également été suggéré [67].

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