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PARTISANEPARTISANE

PARTISANE SOCIALISTESOCIALISTESOCIALISTESOCIALISTE.

« Les actes de Napoléon et d’Alexandre dont dépendait, semblait-il, que les évènements eussent lieu ou non, étaient aussi peu libres que l’acte de n’importe quel soldat qui partait en campagne désigné par le sort ou recruté. [...] La vie de tout homme présente deux faces ; celle de sa vie personnelle, d’autant plus libre que ses intérêts sont abstraits, et celle de sa vie alimentaire, la vie de ruche où l’homme obéit inéluctablement aux lois qui lui sont prescrites »

Tolstoï, La Guerre et la Paix, Paris, Gallimard, col. Folio Classique, 2002 [1869], T. 2, pps. 10-11.

L’organisation socialiste a subi de profondes mutations depuis la refondation du PS en 1971. L’arrivée au pouvoir, l’intégration de pratiques gestionnaires, mais aussi la professionnalisation croissante de ses élites, sont autant d’éléments qui pointent ces mutations. Néanmoins, dès lors que l’on cherche à trouver une cohérence à ces évolutions, il apparaît que l’organisation socialiste repose sur un véritable paradoxe : elle s’est profondément transformée et pourtant, dans le même temps, semble reposer toujours sur des modes et des principes de fonctionnement identiques. Comment appréhender les changements de cette organisation qui, à bien des égards, n’est plus la même mais semble toujours identique ? Pour comprendre ce qui change et pourquoi dans l’organisation, il est nécessaire de s’interroger sur ce qui change précisément dans la manière dont les membres du parti eux-mêmes conçoivent, investissent et pratiquent la compétition intra partisane. En d’autres termes, il s’agit de mettre en évidence ce qui change dans le jeu politique interne pour mieux appréhender ce qui change le terrain de jeu, à savoir l’organisation du parti.

Pour saisir ce lien itératif entre les membres et leur organisation, on s’appuie sur la notion de configuration partisane, notion tirée du concept éliassien de configuration (ou formation) sociale. Ce processus peut alors être mis en perspective avec l’idée postulée par Katz et Mair du développement des partis politiques en partis cartels. Autrement dit, il s’agit en fin de compte de saisir à travers la notion de configuration partisane, le processus de changement organisationnel socialiste et donc, le cas échéant, la cartellisation de ce parti. Cette hypothèse suppose néanmoins que la notion de configuration partisane soit précisée théoriquement en tant que telle mais également articulée avec le modèle idéal-typique du parti cartel.

Ce premier chapitre a pour objet d’apporter ces précisions, lesquelles ne sont pas indispensables uniquement d’un point de vue théorique : envisager le PS à partir de la notion de configuration partisane suppose aussi de définir quand et comment celle-ci se constitue. La configuration socialiste se constitue en effet sur des bases renouvelées après le congrès d’Epinay en

1971. Autrement dit, il faut voir comment se sédimente la configuration partisane et comment les règles du jeu politique interne se déterminent. Or, ces deux étapes se réalisent durant la phase d’institutionnalisation du nouveau parti, donc après 1971. Il fallait alors éviter ici un point de vue historique et descriptif sur la période 1971-1981, pour mettre en évidence les principaux éléments qui émergent durant cette phase et pèsent par la suite sur le processus de changement. Deux traits saillants de la culture partisane socialiste doivent, dans cette perspective, être plus particulièrement mis en évidence : l’impératif militant et l’idée de modernité. D’abord car mettre en évidence la culture partisane socialiste, c’est souligner l’objectivation des contraintes à l’intérieur de la configuration partisane, la mise en place des règles du jeu interne. Ensuite, car ces deux éléments pesèrent, et pèsent toujours, sur la manière d’appréhender et de jouer le jeu politique interne des membres du parti. En d’autres termes, à travers ces deux éléments, c’est la mise en forme de la configuration partisane et par là les conditions de son changement qui seront explicitées.

Il faut donc préciser ce qu’est théoriquement une configuration partisane (Section 1), avant d’identifier deux des traits saillants de la culture partisane telle qu’elle se met en place suite au congrès d’Epinay, traits qui serviront de fil directeur pour identifier le processus de changement qui va affecter la configuration socialiste et, par là, son organisation (Section 2).

Section 1. Configuration partisane et changement

des partis politiques.

Bien que la notion de configuration partisane soit tirée du concept de configuration de N. Elias, l’usage théorique qui en est fait ne peut se lire comme une simple reprise du concept éliassien adaptée au cadre partisan. Si les présupposés théoriques mobilisés par Elias seront abondamment sollicités dans le cadre de cette modélisation, il convient d’ajuster la notion de configuration partisane en fonction de l’objet propre de l’étude. Dans ces conditions, la configuration partisane se distingue de la configuration ; elle ne peut se lire uniquement comme l’application mécanique à un parti politique du concept d’Elias.

Il faut donc, dans un premier temps, définir la notion de configuration partisane telle qu’entendue ici, définition qui doit tenir compte de la structuration de la compétition au sein de la configuration partisane socialiste. A cette première étape s’en ajoute une seconde : préciser les ajustements théoriques nécessaires pour analyser le changement organisationnel à partir de la configuration partisane. Il s’agit, là, d’abord d’intégrer l’organisation dans la définition de la configuration partisane puis d’articuler la notion de configuration partisane et modèle des partis cartels.