Chapitre 6 Liens, partenariats et gestion des connaissances
6.2 Partenariats avec des organisations non gouvernementales
251. En ce qui concerne la coopération avec les organisations non gouvernementales (ci‐après dénommées ONG), il convient de faire la distinction entre la coopération avec les ONG à l’échelle nationale et la coopération avec les ONG à l'échelle internationale en leur qualité d'organes consultatifs auprès du CIG. La partie 6.2.1. ci‐dessous porte sur les premières et la partie 6.2.2. est consacrée aux secondes.
6.2.1 Partenariats avec des organisations non gouvernementales à l’échelle nationale
252. La Convention de 2003 encourage les États parties à travailler avec « des communautés, des groupes et des organisations non gouvernementales pertinentes » afin d’établir des inventaires (article 11 (b)). Les Directives Opérationnelles insistent par ailleurs sur le rôle des ONG en indiquant celles qui devraient être impliquées à l’échelle nationale « … dans l’identification et la définition du patrimoine culturel immatériel ainsi que dans d’autres mesures de sauvegarde appropriées… » (article 90).
253. Comme cela a été exposé plus haut, un grand nombre d’États membres doit relever de multiples défis dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention de 2003. L’un de ces défis porte sur l’implication des communautés dans les mesures de sauvegarde et un autre a trait à la consultation et à la participation des communautés dans l'élaboration de politiques, de la
législation et de plans de sauvegarde. Les ONG peuvent jouer un rôle important en tant que médiateurs et « ponts » entre différents acteurs. Un grand nombre d'ONG spécialisées ont une excellente compréhension de la Convention et elles possèdent l’expertise adéquate. Elles sont également reliées aux communautés locales et au gouvernement. Leur capacité à créer des liens entre ces derniers ne doit donc pas être sous‐estimée.
254. Il est ressorti de la présente évaluation que certaines ONG ont en effet joué un rôle important dans la mise en œuvre de la Convention de 2003 à l’échelle locale et à l’échelle nationale. Les actions spécifiques des ONG ont consisté notamment à :
• expliquer la Convention et ses principes aux communautés ;
• mener des projets de recherche sur le PCI ;
• réaliser des inventaires du PCI dans les communautés ;
• participer à la préparation de formulaires de candidature pour inscription sur les listes de la Convention ;
• entreprendre des actions de sauvegarde telles que la recherche, l’organisation d’ateliers, les festivals, le renforcement des capacités ;
• défendre les intérêts spécifiques des communautés locales face aux autorités gouvernementales ;
• agir en tant que représentants légaux des communautés locales dans le cadre de contrats avec les organismes gouvernementaux, et
• conseiller les gouvernements et les organismes gouvernementaux.
255. Cependant, l’évaluation a également conclu que la prise en compte par la Convention du rôle potentiel des ONG à l’échelle nationale a été assez limitée. En effet, le principal point d'entrée pour les ONG se situe à l'échelle internationale avec l'octroi par le CIG d’un statut d'accréditation à un certain nombre d'organisations. Les avantages et les points faibles de l'accréditation sont étudiés dans la partie ci‐dessous.
6.2.2 Partenariats avec des organisations non gouvernementales à l’échelle internationale (fonction consultative auprès du CIG)
256. La Convention encourage la participation des ONG dans sa mise en œuvre en leur permettant de présenter leur candidature au statut d'accréditation afin d'exercer des fonctions consultatives auprès du Comité (article 9.1). En vertu des Directives Opérationnelles (article 96), des organisations non gouvernementales accréditées peuvent être invitées à fournir des conseils au CIG sur :
• des dossiers de candidature à la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente ;
• des programmes, projets et activités mentionnés à l'article 18 de la Convention ;
• des demandes d’assistance internationale ; et
• des effets des plans de sauvegarde des éléments inscrits sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente.
257. Les ONG qui souhaitent acquérir le statut d'accréditation sont priées de présenter une demande officielle au CIG et de justifier que leurs activités se situent dans le domaine de la sauvegarde du PCI. À ce jour, 156 ONG ont été accréditées pour fournir des services consultatifs au CIG. Cependant, leur représentation géographique est assez inégale : seules deux ONG proviennent de la région arabe. Depuis la création de l'Organe consultatif, six représentants d'ONG accréditées ont participé à l’évaluation des candidatures à la LSU, à la PAR et des demandes d'AI.
258. Afin d’encourager davantage la participation des ONG, l'UNESCO organise un Forum des ONG, qui a généralement lieu la veille du premier jour de la réunion du CIG. Trois forums des ONG
ont été organisés jusqu’à présent (à Nairobi en 2010, à Bali en 2011 et à Paris en 2012).34 Les ONG accréditées ont été invitées à envoyer des représentants aux forums et l'UNESCO a apporté un soutien financier pour la participation d'un représentant pour chaque ONG des pays les moins développés. Les discussions des forums ont porté sur la contribution des ONG à la sauvegarde du PCI à l'échelle nationale et sur la nature des services consultatifs qu’ils proposent au Comité. Les forums qui ont eu lieu à Bali et à Paris ont abouti à la publication de déclarations d’ONG.
259. Les interviews avec les représentants des ONG et l'enquête auprès des ONG accréditées ont révélé que le statut d'accréditation a été bénéfique à leur travail sous de nombreux aspects. Le nom de l’UNESCO confère du prestige et donne aux organisations un statut international. La possibilité d'interagir avec d'autres acteurs du domaine du PCI lors du forum des ONG, le portail mis en ligne pour les ONG et d’autres mécanismes informels ont permis aux organisations accréditées de connaître les actions menées par les autres et de rester informées des dernières évolutions en matière de PCI.
260. L'évaluation a cependant aussi constaté que de nombreuses ONG ont le sentiment que leur statut d’accréditation n'est pas pris au sérieux par le GIC. En effet, les déclarations du forum des ONG et les contributions individuelles des ONG et des autres observateurs ne sont souvent pas suffisamment prises en compte au cours des débats et n’ont donc que peu d’impact sur les décisions prises par le CIG.
261. L’une des raisons pour lesquelles les points de vue des ONG ne sont pas pris en considération par le CIG semble être liée aux critères d'accréditation. Un certain nombre de parties prenantes a en effet indiqué que les critères actuels pour l'accréditation des ONG n'étaient pas assez rigoureux. Cela a conduit à la rapide approbation d’accréditation de nombreuses organisations qui ne jouent pas un rôle très actif dans la mise en œuvre de la Convention. Afin que les ONG soient considérées comme des partenaires sérieux dans le cadre des actions de sauvegarde à l’échelle nationale et internationale ainsi que pour les mécanismes de la Convention, il convient de revoir le processus et les critères de sélection. Ce processus de révision devrait inclure différentes parties prenantes, dont les ONG elles‐mêmes. Le dernier forum des ONG a aussi constaté que les ONG souhaitent être « des participants actifs pour toute révision potentielle des critères pour l'accréditation ».35
262. Les interviews avec les représentants des ONG accréditées montrent également que beaucoup d’entre elles voudraient jouer un plus grand rôle dans la mise en œuvre de la Convention, par exemple en assurant le suivi des mesures de sauvegarde pour les éléments inscrits sur la LSU.
Les déclarations du forum des ONG qui a eu lieu à Paris contient aussi un certain nombre de recommandations qui défendent une participation plus active des ONG. Le groupe a affirmé que « le rôle des ONG accréditées en tant qu'acteurs de la mise en œuvre de la Convention dépasse les possibilités limitées d’exercice de fonctions consultatives auprès du Comité ».36 Le forum a aussi recommandé qu’il soit demandé aux ONG accréditées de présenter des rapports périodiques en complément de ceux des États parties. Ce type de mécanisme peut en effet constituer un moyen complémentaire efficace pour assurer le suivi de la mise en œuvre de la Convention.
Recommandation n° 17. Encourager les représentants des ONG accréditées à participer aux débats du CIG avant de voter les points à l'ordre du jour et inclure les résultats des forums des ONG (tels que les déclarations des ONG) dans les ordres du jour du Comité.
34 Des ONG ont publié une déclaration publique à Abu Dhabi (2009)et par la suite à Nairobi (2010), Bali (2011) et Paris (2012).
35 NGO Statement ICH 7.COM, Paris, 6 décembre 2012
36 Idem.
Recommandation n° 18. Revoir le processus et les critères d'accréditation pour les ONG afin de garantir que toutes les ONG accréditées ont l’expérience requise et la capacité d'exercer des fonctions consultatives auprès du Comité.