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Partager nos peurs avec un meilleur ami fumeur

Dans le document Les mots sont des fenêtres (Page 62-65)

Alain et Serge sont les meilleurs amis du monde depuis plus de trente ans. Alain est non fumeur et s’évertue depuis des années à convaincre Serge de renoncer à ses deux paquets quotidiens. Il se rend compte que, depuis un an, son ami tousse de plus en plus. Un beau jour, il finit par laisser exploser toute l’énergie et la vitalité accumulées dans sa colère et ses craintes inexprimées.

ALAIN : Serge, je sais que nous en avons déjà parlé des dizaines de fois, mais écoute-moi.

J’ai peur que tes satanées cigarettes ne finissent par te tuer ! Tu es mon meilleur ami et je veux que tu vives aussi longtemps que possible. Ne pense pas que je te juge. Ce n’est pas le cas. Je suis simplement très inquiet.

(Auparavant, quand Alain avait essayé de le convaincre d’arrêter de fumer, Serge l’avait souvent accusé de le juger.)

SERGE : Non, j’entends ton inquiétude. Nous sommes amis depuis longtemps…

ALAIN : (Formulant une demande.) Serais-tu prêt à arrêter ? SERGE : J’aimerais bien.

ALAIN : (Écoutant les sentiments et besoins qui empêchent Serge d’accéder à sa demande.) Crains-tu d’essayer parce que tu ne veux pas échouer ?

SERGE : Oui, tu sais bien que j’ai déjà essayé plusieurs fois… Je sais que les gens me déconsidèrent encore plus parce que je suis incapable d’arrêter.

ALAIN : (Devinant ce que Serge pourrait avoir envie de demander.) Moi, je ne te

déconsidère pas. Et si tu essayais et échouais à nouveau, je ne te déconsidérerais toujours pas. Je voudrais simplement que tu essaies.

SERGE : Merci, mais tu n’es pas le seul… Tout le monde s’y met : ça se lit dans leur regard.

Ils me prennent pour un minable.

ALAIN : (Écoutant avec empathie les sentiments de Serge.) Tu trouves que c’est un peu étouffant de se soucier de ce que les autres pourraient penser, alors qu’en soi il est déjà assez difficile d’arrêter de fumer ?

SERGE : Je n’aime pas me dire que je suis dépendant, qu’il y a quelque chose que je ne parviens pas à maîtriser…

ALAIN : (Regardant Serge droit dans les yeux, il hoche la tête en signe d’approbation.

L’intérêt et l’attention qu’Alain porte aux sentiments et besoins profonds de Serge transparaissent dans son regard comme dans son silence.)

SERGE : En fait, je n’ai plus aucun plaisir à fumer. On a l’impression d’être un paria quand on fume en public. C’en est gênant.

ALAIN : (Continuant à manifester sa bienveillance.) On dirait que tu as vraiment envie d’arrêter mais que tu crains les conséquences que cela pourrait avoir sur l’image que tu as de toi et sur ta confiance en toi.

SERGE : Oui, je suppose que c’est cela… Tu sais, je ne pense pas en avoir jamais parlé. En général, quand les gens me disent d’arrêter, je les envoie tout simplement au diable. J’aimerais bien arrêter, mais je ne veux pas être soumis à toutes ces pressions extérieures.

ALAIN : Je ne voudrais t’imposer aucune pression. Je ne sais pas si je peux te rassurer sur tes craintes d’échec, mais je voudrais certainement te soutenir si je le peux. Enfin, si tu es d’accord…

SERGE : Oui, je voudrais bien. Je suis très touché par ton inquiétude et ta bonne volonté.

Mais… si je ne suis pas encore prêt à essayer, ça ne te pose pas de problème ? ALAIN : Bien sûr que non. Cela ne retirera rien à notre amitié. Je voudrais simplement que

notre amitié dure plus longtemps ! (Ayant formulé une véritable demande et non une exigence, Alain garde à l’esprit son attachement à la qualité de la relation, indépendamment de la réponse de Serge. C’est ce qu’il exprime en disant « Cela ne retirera rien à notre amitié », tout en énonçant son propre besoin : « Que notre amitié dure plus longtemps. »)

SERGE : Eh bien, je vais peut-être réessayer… mais n’en parle à personne, d’accord ? ALAIN : Bien sûr. À toi de décider quand tu seras prêt. Je n’en parlerai à personne.

Exercice

FORMULER DES DEMANDES

Pour voir si nous sommes d’accord sur l’expression claire des demandes, cochez les phrases où une action concrète est clairement demandée.

1. Je veux que tu me comprennes.

2. Je voudrais que tu me dises une chose que j’ai faite et que tu as appréciée.

3. Je voudrais que tu sois plus sûr de toi.

4. Je veux que tu arrêtes de boire.

5. Je veux que tu me laisses être moi-même.

6. Je voudrais que tu sois sincère avec moi, au sujet de la réunion d’hier.

7. Je voudrais que tu ne dépasses pas la limite de vitesse.

8. J’aimerais te connaître mieux.

9. Je voudrais que tu respectes ma vie privée.

10. J’aimerais que tu prépares plus souvent le dîner.

Voici mes réponses.

1. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « que tu me comprennes » n’expriment pas clairement une demande d’action concrète. On aurait pu dire : « J’aimerais que tu me répètes ce que tu m’as entendu dire. »

2. Si vous avez coché cette phrase, nous sommes d’accord pour considérer qu’il s’agit d’une demande claire et concrète.

3. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « être plus sûr de toi » n’expriment pas clairement qu’une action concrète est demandée. On aurait pu dire : « J’aimerais que tu fasses un stage de développement personnel qui, je pense, t’aiderait à acquérir plus d’assurance. »

4. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « que tu arrêtes de boire » ne disent pas clairement ce que veut celui qui parle, mais seulement ce qu’il ne veut pas. On aurait pu dire : « Je voudrais que tu me dises quels besoins tu satisfais en buvant et j’aimerais bien que nous discutions d’autres façons de satisfaire ces besoins. »

5. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « que tu me laisses être moi-même » n’expriment pas clairement quelle action concrète est demandée. Cette personne aurait pu dire : « Je veux que tu me dises que tu ne mettras pas un terme à notre relation, même si je fais des choses qui te déplaisent. »

6. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « que tu sois sincère » n’expriment pas clairement quelle action concrète est demandée. On aurait pu dire : « J’aimerais connaître tes sentiments à propos de ce que j’ai fait, et savoir ce que tu aimerais que je fasse différemment. »

7. Si vous avez coché cette phrase, nous sommes d’accord pour considérer qu’il s’agit d’une demande claire et concrète.

8. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, elle n’exprime pas clairement quelle action concrète est demandée. On aurait pu dire : « Je voudrais que tu me dises si tu serais d’accord pour que nous déjeunions ensemble une fois par semaine. »

9. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots « que tu respectes ma vie privée » n’expriment pas clairement quelle action concrète est demandée. On aurait pu dire : « Je voudrais que tu acceptes de frapper avant d’entrer dans mon bureau. »

10. Si vous avez coché cette phrase, nous ne sommes pas d’accord. À mon sens, les mots

« plus souvent » n’expriment pas clairement quelle action concrète est demandée. Cette personne aurait pu dire : « Je voudrais que tu prépares le dîner tous les lundis soir. »

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