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Le bon parent comme signification centrale de l’imaginaire collectif

2 e PARTIE : ANALYSE DES CORPUS

4. eme CHAPITRE Se construire parent d’un enfant handicapé dans une association : la constitution d’une identité

4.3. Le bon parent comme signification centrale de l’imaginaire collectif

Nous allons maintenant voir que l’UNAPEI fonctionne comme une structure de sollicitation de l’imaginaire individuel.

Des significations imaginaires fondatrices : la valorisation de l’enfant handicapé, le handicap comme signification du Destin, la parentalité au service d’une cause constituent l’imaginaire qui donne la tonalité à l’UNAPEI.

Chaque parent est invité à y entreprendre une réparation imaginaire de son enfant. Le parent responsable, figure de la famille, qui prend soin de son enfant, le rééduque, l’aime, se construit comme image centrale d’un imaginaire collectif.

4.3.1. Le bon parent conforté par le médecin

Les revues de l’UNAPEI font une large place à des articles de médecins. Ils décrivent un parent indispensable à son enfant handicapé et le mettent en garde contre le risque du mauvais parent.

4.3.1.1. Les qualités du parent d’enfant handicapé

La signification d’une responsabilité parentale y est largement développée, « ce sont les

parents, l’entourage familial qui ont le rôle le plus important » ou plus loin « Votre enfant attend tout de vous et vous êtes seul capable de lui construire un bonheur à sa portée » (Dr.

Kolher, Nos enfants inadaptés, janvier 1962).

La clé de cette réussite est l’abnégation « Il faut chercher en vous la force d’endurance qui

n’est qu’une première étape vers la résignation et la sagesse qui vous conduiront à une intelligente lucidité, à une compréhension et à un amour tels que votre malheureux enfant se trouvera heureux dans l’atmosphère familiale ». La représentation d’un parent qui se sacrifie

permet le bonheur de l’enfant handicapé. La conception chrétienne se révèle également à travers les affects conjugaux « L’amour qu’ils (les parents) se portent est capable de leur

donner le courage nécessaire » (ibid.).

Un médecin neuro-psychiatre, conseiller technique d’une association régionale, pose la famille comme centrale dans l’éducation des enfants handicapés mentaux quitte à l’éduquer, elle aussi, pour qu’elle s’associe ou prenne en charge son enfant handicapé. « L’éducation de

la famille est donc un devoir puisque l’infirme mental ne peut pas être séparé d’elle psychologiquement » (Nos enfants inadaptés, N°1, 1962). La représentation d’une

impossible séparation de la personne handicapée de ses parents scelle la responsabilité parentale. Séparation représentée comme difficile pour les parents étant donné les liens qui les unissent à leur enfant « l’attachement pour l’enfant infirme est toujours très fort » (ibid.).

Lorsque l’enfant est devenu un adulte ce lien ne peut que se poursuivre, « Une tutelle ne

peut se concevoir sans la famille, tuteur naturel de l’enfant », inscrivant l’adulte handicapé

dans une représentation d’éternel enfant dans un lien de dépendance naturalisée. Les contributions du médecin au XIXe siècle pour responsabiliser la famille sont toujours d’actualité, articulées sur une signification naturaliste de l’éducation familiale.

Un autre médecin salut les bienfaits des proches pour la socialisation d’enfants handicapés.

leurs possibilités restreintes » (Nos enfants inadaptés, n°4, 1962), dans un long article repris

dans la revue de l’UNAPEI.

Les médecins, convoqués comme experts insistent sur le rôle essentiel de la mère et notamment de l’amour qu’elle doit donner à son enfant « les nombreux travaux qui ont été

fait nous ont démontré que le tout jeune enfant a, avant tout, besoin d’amour maternel… dans cette catégorie d’arriérés » (Nos enfants inadaptés, n°5, 1963).

Une conception médicale du handicap est développée, « Il faut désormais que l’arriéré

mental soit considéré comme un malade qu’un médecin doit suivre régulièrement ». (Nos

enfants inadaptés, janvier 1962). Le médecin, dans la continuité du médecin hygiéniste du XIXe siècle assure la coordination de la rééducation en tant que « spécialiste aidé par des

pédagogues et éducateurs spécialisés ». Le corps médical se construit comme « spécialiste »

de la rééducation des enfants handicapés mentaux, indispensable à la famille, celle-ci actrice principale de la prise en charge.

Les médecins participent à la construction d’une représentation d’un parent, éducateur de son enfant handicapé, où les liens affectifs et les arguments moraux tiennent lieu d’argument. Les représentations attachées à la mère lui attribuent un rôle particulier, mère aimante et pivot de l’éducation des enfants au sein de la famille.

4.3.1.2. Les travers du parent d’enfant handicapé

Les pulsions morbides à l’égard de l’enfant handicapé s’expriment. Les relents de sa mort envisagée à peine voilés : « Un enfant est né…l’enfant est resté en vie au bout d’une lutte à

peine victorieuse puisqu’il se révèle déficient mental » (BRAUNER, A., et F., Pour élever un enfant déficient mental. Le démarrage éducatif, 1962, cité par Lecuyer, R., Nos enfants

inadaptés, 1962). La vie n’a pas triomphé sur la mort, la victoire n’est pas complète. La vie qui arrive n’est pas un succès.

Les médecins mettent en garde les parents contre leurs « mauvais penchants » qui renforcent ou provoquent le handicap. Le parent « surprotecteur » est une variante du bon parent ou plutôt du « trop bon parent ». « la mère doit avoir une attitude ferme et douce et se défendre

d’une hyperprotection qui empêche toutes acquisitions » (Nos enfants inadaptés N° 4, 1962,

p. 5). L'attitude surprotectrice de certains parents est critiquée et montrée comme empêchant l'évolution de leur enfant handicapé. Nous pouvons voir dans ce comportement une mise en acte du bon parent, celui qui s'occupe bien de son enfant, voir « trop bien ».

Un médecin indique que « l’enfant intellectuellement handicapé… développe bien souvent

une inadaptation affective directement induite par l’attitude familiale », (Duche, D., Nos enfants inadaptés, n°4, 1962). Au handicap mental, les parents ajoutent un handicap affectif

Un autre évoque la responsabilité parentale dans le développement de handicaps chez leurs enfants « … on reconnaît en effet de plus en plus en plus de sujets qui, au départ ont des

potentialités intellectuelles normales, ne se développent pas parce que le milieu culturel dans lequel ils sont plongés dans leurs premières années de leur vie est insuffisant pour leur permettre leur développement » (Nos enfants inadaptés, n°5, 1963). Même s’il alerte les

parents contre leurs sentiments de culpabilité, « les parents d’infirmes doivent savoir

surmonter leur sentiment de culpabilité » (ibid.), la mise en avant des qualités du bon parent

pour l’évolution de son enfant ne peut que renforcer ce sentiment de culpabilité lorsque l’enfant ne progresse pas. Ces propos d’un spécialiste qui s’appuie sur « de nombreux

travaux » scientifiques visent la mère et contribuent à renforcer son sentiment de culpabilité.

En sus d’être la cause du handicap, elle est également celle qui ne répare pas suffisamment son enfant.

Un autre propose la sublimation, « la question même de leur existence et de leur éducation

resserre le lien familial, fait jaillir des forces d’intervention, fait entrer les parents, liés à la tâche et aux écoutes, dans un amour complémentaire et ouvert au sens des autres, dans un Amour adulte » (Nos enfants inadaptés N° 5, 1963).

La représentation d’un parent qui induit ou contrarie l’épanouissement de l’enfant handicapé s’appuie sur un discours psychanalytique. L’amour maternel et parental remplace l’amour d’inspiration divine. Le médecin prend le relais du prêtre.

Aujourd’hui, l’UNAPEI s’oriente davantage vers une conception éducative de la rééducation.

La psychanalyse, qui soutient les propos de certains médecins, ne sont pas exempts de positions morales et de rapports de pouvoirs (Donzelot, 2005). Le discours psychanalytique que l’on peut lire dans les revues de l’UNAPEI servent la prescription d’une responsabilité parentale. Il est paradoxal, incitant les parents à « surmonter leur sentiment de

responsabilité », tout en désignant ces mêmes parents, « l’attitude familiale », « le milieu culturel… insuffisant », « la surprotection », comme cause du renforcement du handicap.

Le médecin s’instaure dans une figure du surmoi. Il dit le bien et le mal, le bon et le mauvais parent. Psychanalyste, il sait la pulsion à l’œuvre pour violenter le handicap. Mais soumis à l’imaginaire social du bon parent responsable de son enfant, il prône celui-ci, défenseur d’un ordre institué.

4.3.2. Le parent, responsable principal de son enfant handicapé

Le parent qui se mobilise pour son enfant apparaît comme une puissante signification dés le début du mouvement parental chez les fondateurs des associations. Nous l’avons vu avec Malécot aux Papillons Blancs.

Perret-Gayet insiste également sur cet aspect, « nous n'avons pas choisi d'avoir un enfant

malade, certes ; mais l'ayant, nous avons sur les épaules une charge dont nul ne peut nous enlever le poids moral… N'attendons pas TOUT de l'ETAT ou des ŒUVRES ». (Ayerdhal,

p. 36). Il combat un attentisme parental par des valeurs morales qui soutiennent un engagement personnel, « comme si la citoyenneté ne se constituait que d'exigences et de

droits, sans que le citoyen ait d'efforts à fournir pour prendre en charge sa situation individuelle et sans qu'il ait de devoirs personnels à l'égard de la communauté » (idem). Il

prône des valeurs citoyennes et républicaines. L’individu participe au fonctionnement de la société qui le soutient dans la prise en charge de son enfant handicapé.

Le rôle principal de la famille pour l’enfant handicapé est sans cesse réaffirmé, « des familles

qui entendent assumer…leurs responsabilités à l’opposé d’un paternalisme social aujourd’hui désuet…il faut bien admettre que la famille reste, et devra rester toujours, la cellule essentielle de la vie de l’infirme mental » (Intervention d’un responsable associatif au

Journées nationales de l’UNAPEI, Nos enfants inadaptés, N° 9, 1964, p. 19).

L’action familiale, soutien associatif développé par « des visites » de jeunes parents d’enfants handicapés les orientent vers la responsabilité familiale. « L’action familiale

doit…(aider) la famille à prendre en main son propre destin » (Epanouir N° 125, 1983) ,

mettant en œuvre la formule chrétienne « Aide toi le ciel t'aidera » à l’origine des Papillons Blancs.

4.3.2.1. Des rôles familiaux institués

Les rôles familiaux institués sont réaffirmés : une mère, bonne épouse, disponible pour son mari, un père qui a un emploi à l'extérieur. L'arrivée d'un enfant handicapé dans une famille ne change pas cet ordre établi. La mère doit faire fi de ses affects afin de maintenir la cohésion familiale :

« Grace à son travail, le père de famille a plus de possibilités de se reprendre… par une sorte de compensation, y déployer un surcroit d’énergie et d’initiative. Mais la femme qui reste au foyer… le désespoir, l’angoisse qui la tenaillent jusqu’en ses fibres les plus secrètes, se traduit souvent par un abandon, un laisser-aller visible dans son aspect et sa tenue… Une femme se doit à elle-même, aux autres et, en particulier, à ceux qui vivent dans son sillage, de donner toujours la meilleure idée de son aspect physique et moral… autour de ce sourire, peut s’édifier tout l’équilibre de la famille. Il lui permettra d’orner sa maison, de veiller à l’éducation de ses autres enfants, de vérifier son image et de prendre même un rendez vous chez le coiffeur. Soucis futiles, diront certains. Ils auront tort. Un homme peut se lasser d’une femme triste et négligée qui n’a pu surmonter sa douleur » (Nos enfants

inadaptés, N° 2, 1962).

La femme est désignée comme la responsable de la séparation des couples qui ont un enfant handicapé.

Pendant que le père a un rôle actif dans l’association, la mère s’occupe de l’enfant handicapé. « Y a-t-il une meilleure adhésion que celle de l’épouse de l’administrateur qui

pense à la réussite d’un projet discuté au bureau pendant qu’elle couche, qu’elle borde et qu’elle endort son inadapté » (Editorial, Nos enfants inadaptés N° 12, 1964). C’est dans ce

rôle qu’elle trouve son bonheur. Le père peut œuvrer sereinement, à la condition que « son

conjoint y participe aussi même muettement » (ibid.).

La mère du XIXe siècle, caractérisée par le don de soi à sa famille, est toujours d’actualité. Si la mère craque quelquefois, son mari en subi les conséquences « Plusieurs mamans – qui

sont des femmes très équilibrées et qui apportent à la solution de leurs problème, une abnégation, un dévouement admirable, reconnaissent créer elles-mêmes certains jours où leurs nerfs sont à fleur de peau, une ambiance survoltée –dont les maris le plus souvent subissent les conséquences » (Nos enfants inadaptés, N° 11, 1964).

Une femme, médecin et mère d’un enfant handicapé, pose le rôle principal de la mère dans la rééducation de l’enfant, « pour l’enfant déficient mental comme pour les autres, elle

(l’éducation) doit être l’œuvre de la mère dés la première enfance. C’est un effort continu et chaleureux qui conditionnera une bonne intégration à l’école…. La mère apporte d’instinct à l’enfant toutes les stimulations qui lui sont alors nécessaires ». (Nos enfants inadaptés, N°

11, 1964).

Le rôle maternel est présenté comme instinctuel. Il peut également prendre une connotation organique, « l’attachement viscéral de la mère qui ne peut se résoudre » au placement de l’enfant handicapé dans un établissement. (Epanouir, mars 1982).

Les parents reprennent eux-mêmes ces rôles prescrits dont les représentations du genre font d’eux de bons parents. La complémentarité des rôles institués se fait au service d’une famille pérenne pour l’équilibre de l’enfant handicapé.

4.3.2.2. Le parent aimant

Les résonnances chrétiennes se font entendre lorsque « l’humble amour du père pour son

fils, nous a conduit… à la reconnaissance de la vérité de la vie » (Editorial, Nos enfants

inadaptés N° 7, 1963), en écho au Père qui envoie son fils sur terre pour sauver les hommes, source de la Révélation.

Le dévouement est une qualité parentale. « les parents sont prêts à affronter certaines

difficultés ou épreuves en contrepartie du plaisir qu’ils procurent à leur enfant » (Une mère,

Présidente d’une APEI, Epanouir, Mars 1982). La recherche du bonheur de l’enfant permet le dépassement de la souffrance maternelle.

Les personnes très gravement handicapées « ont besoin de soins, d'éducation et d'amour », (Epanouir n°120, 1982). La représentation d’un amour nécessaire à l’épanouissement de l’enfant handicapé peut être partagée par des professionnels. Le directeur d'un établissement médico-social explique que « pour qu'une MAS offre la réponse qu'on souhaite, il faut que

le handicapé se sente aimé et puisse aimer ceux qui l'entourent… les professionnels puiseront hors d'eux-mêmes cet amour des autres et ce désir de la communauté » (Epanouir,

Les parents d’enfants « très lourdement handicapés » devenus adultes expriment « leur

crainte…. Du manque d’amour dont pourrait souffrir leur enfant » lorsqu’il sera hébergé

dans un foyer (Epanouir, sept. 1984).

Le rôle fondamental de la famille est réaffirmé. La synthèse des travaux annuels de l'UNAPEI « a aussi confirmé un préalable essentiel à tout rapprochement (de l'enfant handicapé) avec la société, c'est que l'enfant en difficulté trouve d'abord dans sa famille la

place qui lui revient, qu'il s'y sente bien, reconnu et aimé tel qu'il est, soutenu dans sa préparation à la vie » (Editorial, Épanouir, septembre 1984).

La création des établissements médico-sociaux est l’œuvre de l’amour parental, « 1 200

établissements et services à la disposition de quelques 120 000 personnes handicapées mentales de tous âges et de leurs familles qui ont été la concrétisation de leurs efforts, de leur temps de loisir, de leur volonté et de leur amour » (Allocution d'une responsable de

l'UNAPEI à l'assemblée générale de l'UNAPEI le 19 mai 1984. Epanouir, juillet 1984). L’amour des parents pour leur enfant handicapé est hors du commun, c’est un « amour

extraordinaire d’une maman et d’un papa » (Président de l’UNAPEI, Vivre ensemble, N°

57, 2001).

L’amour parental glorifié rappelle l'amour irremplaçable et inconditionnel, mais impossible comme l'est l'amour œdipien. Chasseguet-Smirguel illustre cette régression vers le narcissisme primaire par l’amour du troubadour pour sa Dame : « la recherche de l'exaltation narcissique pure, l'élation que procure la contemplation imaginaire de l'objet » (1999, p. 56). Elle poursuit, indiquant un retour vers le Moi, l'autre ne pouvant procurer ce que l'on attend de lui, « l'objet, à la limite, n'est plus qu'un prétexte à l'assomption glorieuse du Moi pour laquelle l'incarnation représente une entrave » (ibid.)

Un processus psychique similaire se joue avec l’enfant attendu qui ne tient pas ses promesses de rendre ses parents heureux. Le narcissisme se retourne vers le moi. Le parent a le sentiment de vivre quelque chose d'extraordinaire, que les autres parents ne vivent pas. L'extraordinaire d'être un parent d'un enfant handicapé, se débarrasse de ses aspects négatifs pour acquérir ses lettres de noblesse. Cette vie hors du commun, pour qu'elle ne soit pas que souffrance, doit être exaltante. Le Moi se glorifie de cette exaltation. Il se pâme d'une telle expérience. Le narcissisme renoue avec le Moi, l’idéalise, entraînant un processus régressif, pour retrouver ce temps lointain où le moi pouvait écarter ce qui ne lui sied pas.

4.3.2.3. Le parent rééducateur

Les associations fondatrices se sont construites sur cette idée de parents rééducateurs de leurs enfants. « Contribuons nous-mêmes à la rééducation de nos enfants » prônait Perret- Gayet (Ayerdhal, p. 36).

Le premier numéro de la revue Nos enfants inadaptés paru en janvier 1962 exprime dans son Editorial la responsabilité parentale dans laquelle s’originent les associations, « chaque

famille éprouvée doit participer à la réinsertion sociale de son enfant déficient par une action directe…..accueilli jusqu'au terme de sa vie dans un foyer spécialement conçu pour lui…cette rééducation, cette vieillesse assurée dépendent au départ des familles ». La

réadaptation de l’enfant handicapé se poursuit par l’action associative, créer un établissement, afin de pourvoir à l’avenir de son enfant, lorsque les parents seront âgés. Les parents doivent entreprendre une formation pour élever leur enfant, « les parents

doivent apprendre à devenir ses éducateurs…la nécessité absolue…. de former les parents »

(Epanouir N° 122, 1982).

D'autres parents le disent à leur façon, ayant peur de se voir écartés des actions éducatives

« Ils veulent que l’on considère qu’ils font partie de l’équipe éducative » (Epanouir, juin-

juillet, 1983).

La rééducation précoce de l’enfant renforce son évolution. « On insistera jamais assez sur

l’importance de commencer tôt la rééducation… c’est alors aux parents qu’incombe cette tâche ». (Citation d’un livre destiné aux parents d’enfants handicapés, Nos enfants inadaptés,

N° 2, 1962, p. 7).

La rééducation par les parents est un moyen de dépasser leur tourment, « Enfin on reconnait

que l'enfant aura besoin d'une éducation particulière…. et quand les parents participent à l'éducation précoce, leur peine se transforme en action ». (Epanouir, septembre 1984). La

rééducation/réparation de l’enfant et la réparation psychique du parent se confondent. La participation active des parents à l'éducation ou la rééducation de l’enfant handicapé est une action salvatrice pour leur sentiment de culpabilité.

Recourir à la participation des personnes handicapées au fonctionnement de la société. Les centres d’aide par le travail les ont introduits dans le travail, l’éducation vise leur intégration sociale « l’espoir d’en faire des hommes utiles par des traitements, une éducation et une

situation sociale appropriée » (Le président de l’UNAPEI, Editorial, Nos enfants inadaptés

N° 4, 1962). Longtemps représentés comme des individus inutiles, les personnes handicapées seront désormais salutaires et profitables à la société.

L’éducation éloigne de l’animalité. Ce qui différencie le petit d’homme de l’animal, c’est son éducabilité. Le mythe de l’enfant sauvage montre que l’être humain possède en lui cette humanité que l’éducation va révéler. Aussi, ce n’est pas tant l’importance des acquisitions qui importent les parents, mais l’éducabilité de leur enfant. C’est un pas gagné vers l’humanité.

De parents, ils deviennent éducateurs ou rééducateurs. Ce positionnement met à distance le parent de l’enfant qui peut alors devenir un objet d’éducation.

Le parent élève son enfant, l’éducateur l’éduque. Si l’enfant handicapé ne peut être élevé, hissé vers de nouvelles connaissances, il est rééduqué, réparé. La rééducation vise à

retrouver ce qui a été perdu. Le parent rééduque l’enfant autant qu’il remédie à ses propres fêlures dans sa généalogie.

Il apprend à corriger l’enfant, ce faisant, il apprend à l’apprécier par les soins qu’il lui dispense, approvisionnant ses craintes du handicap.

L’engagement parental pour l’éducation de leurs enfants créera ensuite des rivalités et des conflits dans les établissements médico-sociaux entre les parents et les éducateurs lorsque